322 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 9 Un secrétaire fait lecture du procès-verbal de la séance du 9 vendémiaire, la rédaction est adoptée (71). 10 La section de l’Arsenal [Paris] vient réclamer la mise en liberté du citoyen Giot, juge de paix, incarcéré depuis le 17 vendémiaire. Cette demande est renvoyée au comité de Sûreté générale (72). [Extrait du registre des délibérations de rassemblée générale de la section de l’Arsenal, Paris le 10 brumaire an III ] (73) Apperts l’assemblé général sur l’exposé de plusieur de ses membre qui anonce que cettent transporté aux different comité pour y recueillir les motif de l’arestation du citoyen Giot, incarcéré depuis le dix sette vendemiere, il n’ont pas pue les obtenir. Conciderent qu’aux terme de la loy un citoyen doit connoitre dans les ving quatre heurs, les causes de sont arrestation. Arrette a l’unanimité qu’elle yra demain onze du couren en masse à la Convention national, rendre a son patriotisme la justice qui lui est due en le réclamant sans s’imissaire dans les causes qui ont put motivé sont arrestation. Fait et arrétté an assemblé général les dit jours, mois et an que dessus, incy signé aux registre. Royot, président, Duval, secrétaire. 11 Le représentant du peuple Couhey demande et obtient un congé de cinq décades. Accordé (74). 12 Un membre du comité des Secours présente et la Convention nationale adopte les projets de décrets suivans : (71) P.-V., XL VIII, 154. (72) P.-V., XL VIII, 154. (73) C 325, pl. 1408, p. 20. Moniteur, XXII, 408 ; J. Mont., n° 21. (74) P.-V., XL VIII, 154. C 322, pl. 1366, p. 24. Décret imprimé. Rapporteur anonyme selon C II* 21, p. 21. a La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [BAILLY, au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition de la citoyenne veuve Matthieu, dont le fils, sergent au premier bataillon des grenadiers de Paris, est mort en activité de service à l’armée des Alpes décrète que, sur le vu du présent décret, il sera payé par la Trésorerie nationale à ladite citoyenne Matthieu un secours provisoire de 300 L, imputable sur la pension à laquelle elle a droit par la mort de son fils. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (75). b La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENUAU, au nom de] son comité des Secours publics, sur la pétition de Joseph Rubaut, tailleur de pierre, qui après six mois de détention, a été acquitté par le Tribunal révolutionnaire, décrète que, sur le vu du présent décret, la Trésorerie nationale paiera audit Joseph Rubaut la somme de 600 L à titre de secours et indemnité, pour retourner à son domicile (76). 13 Au nom des trois comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, PORCHER, fait le rapport suivant (77) : Des députés de la commune de Bordeaux vinrent, il y a deux jours solliciter à votre barre le rapport de l’article II du décret du 6 août qui déclare traîtres à la patrie, met hors de la loi et confisque les biens de tous ceux qui ont provoqué, concouru ou adhéré aux actes d’une commission dont l’existence est heureusement anéantie depuis plus de quinze mois. Leurs voix, appuyées fortement dans cette enceinte par tous ceux de nos collègues qui chargés de votre confiance dans ce département, ont été le plus à même d’en étudier la situation politique, ne vous auroit pas permis, sans doute, de différer cet acte de justice, si la réflexion ne vous eût portés à penser que vous (75) P.-V, XL VIII, 154. C 322, pl. 1366, p. 24. Décret imprimé. Rapporteur Bailly selon C II* 21, p. 21. Bull., 12 brum. (suppl.). (76) P.-V., XL VIII, 154-155. C 322, pl. 1366, p. 24. Décret imprimé. Rapporteur Menuau selon C II* 21, p. 21. (77) Débats, n° 770, 607-611. Moniteur, XXII, 411-412; Bull., 12 brum. ; Gazette Fr., n° 1035 ; J. Paris, n° 43 ; J. Univ., n° 1803 ; F. de la Républ., n° 43 ; Ann. Patr., n° 671 ; Ann. R. F., n° 42 ; Mess. Soir, n° 807 ; J. Perlet, n° 770 ; C. Eg., n° 806; J. Fr., n° 768 ; J. Mont., n° 20; M. U., XLV, 206 et 216. SÉANCE DU 12 BRUMAIRE AN III (2 NOVEMBRE 1794) - N° 13 323 deviez à la sûreté du gouvernement, et même à la commune de Bordeaux, de n’adopter cette mesure que dans le cas où un examen sévère et réfléchi, de la part de vos comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, vous auroit convaincus de sa justice et de son utilité. Je viens en ce moment vous présenter le résultat de cet examen; ma tâche ne sera ni difficile ni douloureuse à remplir. Je n’ai pas à vous présenter ici le tableau désastreux des évé-nemens qui nécessitèrent ce décret qu’on désire effacer de votre code ; ce n’est plus ce département qui osa le premier rompre le faisceau qui nous unit tous, attisa dans la France le feu de la révolte, et y souffla le germe de la désobéissance. Instruit à l’école du malheur, cruellement dupe et victime de la séduction de quelques intrigans, il jure aujourd’hui à la souveraineté du peuple que vous représentez, une obéissance étemelle. Depuis longtemps, il faut le dire, le soupçon même ne pouvoit plus planer, sans injustice, sur cette cité célèbre. L’histoire, en raccontant sa révolte, en accusera sans doutes les intri-guans et les chefs ; mais elle défendra les inten-tions pures de la masse du peuple, elle n’oubliera pas que, dans une commune où des bataillons se formoient dans un clin d’oeil à la voix des représentans de la nation, pour voler aux frontières ou combattre les brigands de la Vendée, la richesse et la malveillance réunies, en prodiguant leur or, purent à peine séduire deux cents hommes pour marcher contre la représentation nationale. Citoyens, ne craignons pas de devancer l’histoire et de diriger l’opinion de nos neveux : oui, il exista dans cette commune des ambitieux, des intrigans et des traîtres que la souveraineté nationale dut atteindre et punir; mais il y exista aussi des zélateurs ardens de la liberté, qui ne durent leurs écarts qu’à leur amour pour elle, et que nous devons maintenant protéger. Lorsqu’une erreur enracinée conduisit au crime, lorsqu’elle menaça d’un coup mortel l’unité du gouvernement, la raison, la justice, les droits du peuple compromis, exigèrent contre elle de votre part, des mesures promptes et sévères; mais qui de nous ne sait pas que ce seroit aujourd’hui trahir à la fois la politique et la morale, si nous les prolongions, lorsqu’elle est entièrement dissipée? Sans dévier des principes sévères qui peuvent assurer, dans ces momens difficiles, la tranquillité et la sûreté du gouvernement dont nous sommes responsables, également éloignés de faire usage des armes dévorantes de la tyrannie et des pavots mortels du modérantisme, nous avancerons avec fermeté dans la carrière, et nous n’irons pas chercher à des époques reculés, des actes imprudens, des propos indiscrets, pour tourmenter des hommes qui depuis ont souvent fait oublier leurs fautes en rendant des services réels à la révolution. Nous avons enfin appris, depuis le 9 thermidor, par quels heureux fils nous pouvons bientôt sortir de cet état horrible qui n’offroit pour perspective, aux amis inquiets de la patrie, que la mort ou le retour du despotisme. Ces fils sont la justice et l’humanité mises en action. Investis du double pouvoir de protéger et de punir, le premier doit être notre état habituel et le plus sacré; comme le plus doux de nos devoirs, est de rallier autour de la représentation nationale et de la liberté tous les hommes qui nous offriront une garantie suffisante de leur amour pour elle ; et cette garantie précieuse, vos comités viennent vous assurer qu’ils l’ont trouvée dans la conduite actuelle des habi-tans de Bordeaux. Il ne peut rentrer dans le compte que je vous dois de vous retracer ici toutes les causes qui ont contribué à l’égarer : mais de l’aveu même des représentans envoyés sur les lieux, une des plus impérieuses, et qui trouvera aisément son excuse dans vos coeurs, fut son ardent amour pour la liberté. S’il s’agissoit donc de juger isolément l’erreur dont les Bordelais se sont rendus coupables ; si vous aviez à prononcer à part sur un égarement dont la date remonte à plus de quinze mois, et qui ne laisse, en ce moment, de traces que ce qu’il en faut pour leur rappeler le danger de s’attacher aux hommes et d’oublier les principes, vos comités, dans ce cas là même, ne craindroient pas d’invoquer en leur faveur votre indulgence. Mais la justice attend de nous que nous fixions votre attention sur toute la vie révolutionnaire de la commune de Bordeaux. Représentans, loin de vous cet affreux système qui ne calcule que les fautes, sans tenir compte des vertus ! Si on objecte à cette commune qu’elle laissa échapper de ses murs une centaine d’hommes égarés, qui marchèrent, pendant quelques milles, contre l’autorité nationale, que la plupart d’entr’eux croyoient servir, il lui sera libre sans doute de rappeler cette belle campagne de Moissac, où l’élite de ses guerriers, équipés, armés et défrayés par elle, et parcourant plus de cinquante lieues de terrein, offrit, dans le Midi, le premier exemple de ce que peut l’élan d’un peuple libre, et ne rentra dans ses murs qu’après avoir assuré, dans ceux de Montauban, le triomphe du patriotisme contre le fanatisme et l’aristocratie. Eh quoi! ne l’avons-nous pas vu, à presque toutes les époques de la révolution, mériter, par ses principes, son amour pour les lois, son dévouement à la liberté, l’estime et les éloges des représentans du peuple? Vos comités sont convaincus que tous les services rendus à la patrie sont toujours présens à votre mémoire, et que vous n’avez point oublié que 60 mille hommes, sortis du sein de ce département, combattant en ce moment, avec autant de gloire que d’intrépidité, les ennemis de la République sur les deux élémens. Vous savez aussi que des dons immenses ont constamment alimenté le trésor national; que des fournitures de toute espèce, ont rempli vos magasins et que dans une seule fois, elle y déposa 50 mille chemises pour l’usage de nos guerriers. Tant de services rendus à la patrie ne seroient-ils rien à vos yeux? pourriez-vous également oublier tout ce qu’elle a fait pour vous 324 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE témoigner un vif et sincère repentir de ses fautes ? La construction de deux frégates, la mendicité abolie, l’hôpital militaire meublé, le tout à ses frais, les navires des armateurs offerts, la loi du maximum religieusement observée, sans regret et sans murmure ; le respect le plus profond pour la représentation nationale, hautement professé dans son enceinte : tel est le tableau fidèle de la situation politique de cette cité fameuse, depuis que les auteurs seuls de ses maux ont péri sous le glaive des lois. Un individu seul, Pierre Serres, qui fut président du département de la Gironde, a trouvé les moyens de se soustraire à la vengeance nationale ; il fuira pour toujours le sol de la liberté, ou il y trouvera la mort. Citoyens, il est temps d’exercer dans cette commune un grand acte de justice ; il est temps de rendre au travail et au bonheur, des républicains dont l’expression des sentimens vous a paru sincère. Il existe à Bordeaux, comme ailleurs, des hommes qui ne peuvent vivre qu’au milieu des dilapidations et des larmes, et qui voudroient y entretenir un système d’oppression. Eh bien! que ces méprisables individus soient encore déjoués ; qu’ils trouvent leur malheur, puisque tel est leur sort, dans tous les heureux que vous ferez ; et puisse, pour l’avantage de ma patrie, ce malheur ne jamais trouver de terme! Nous n’aurions pas sans doute entièrement rempli vos vues, si nous terminions ce rapport, sans examiner la question de savoir si on doit rendre à ce département la dénomination sous laquelle il fut originairement connu. La solution de cette question nous a paru simple et facile. Commune-Affranchie, coupable d’une erreur plus longue et plus funeste à la patrie, a repris son nom ; celui de Bec-d’Ambès pouvoit également être effacé. Lorsqu’un pardon, en effet, est le fruit d’une justice bien méritée, il pourroit être utile d’anéantir ce qui rappelleroit le plus léger souvenir des fautes qui l’ont nécessité. Mais vos comités ont observé que les députés de Bordeaux n’avoient pas reçu de mandat à cet égard; qu’il existoit d’ailleurs dans les armées de la République beaucoup de bataillons sortis du sein de ce département, qui se sont formés avec cette dénomination ; que ces bataillons sont identifiés, pour ainsi dire, avec la victoire, dont ils ne peuvent plus se séparer, et qu’il seroit, en quelque sorte, injuste et impolitique d’effacer la moindre trace de tout ce qui peut servir à rappeler le souvenir de la gloire de nos guerriers. Ces motifs seuls ont déterminé vos comités à ne point mettre de dispositions à cet égard dans le projet de décret que nous allons vous présenter. Porcher propose le projet de décret qui suit : Un membre [PORCHER] fait un rapport au nom des comités de Législation, de Salut public et de Sûreté générale, réunis, sur les jugemens de la commission dite populaire de Bordeaux et présente un projet de décret qui est adopté en ces termes : La Convention nationale, après avoir entendu ses comités de Législation, de Salut public et de Sûreté générale réunis, considérant que les auteurs de la création de la commission dite populaire, établie à Bordeaux [Bec-d’Ambès], et des actes contre-révolutionnaires qui en ont été la suite, ont tous été atteints par la justice, et que Pierre Serres, mis hors la loi, est le seul qui s’y soit soustrait, décrète ce qui suit : Article premier. - Il ne sera plus exercé de poursuite en vertu de l’article II de la loi du 6 août 1793. En conséquence aucun citoyen ne pourra à l’avenir être inquiété en raison des dispositions de cet article. Art. II. - Il n’est rien changé, par le présent décret, en ce qui concerne Serres, président du département de la Gironde; il reste hors de la loi (78). PELET saisit cette occasion pour demander que les communes de la République qui, dans un temps où tous les noms furent changés contre des dénominations romaines, grecques ou révolutionnaires, changèrent les leurs contre ceux de Montagne, Marat, etc, reprennent leurs premiers noms. Il prévient l’objection qui pourroit lui être faite relativement aux communes qui portent des noms de Saints ; elles pourront faire comme on fait à Paris, ou l’on dit faux-bourg Denis, rue Honoré, etc. DUHEM déclare être en partie de l’avis de Pelet; il dit même avoir porté plusieurs réclamations au comité de Division chargé de présenter un travail à ce sujet. Mais il pense que les dénominations qui tiennent à des titres proscrits, à la féodalité ou au royalisme [tels que ceux de Palais-Royal et autres] (79), doivent disparoître à jamais : en conséquence, il conclut par demander qu’on attende le rapport du comité de Division. Cette dernière proposition est décrétée (80). 14 Un membre du comité des Finances [THIBAULT] présente un projet de décret sur la conservation des matières d’or et d’argent qui ont été versées aux hôtels des monnoies de la République. Un autre membre propose un autre article additionnel qui est adopté (81). (78) P.V., XL VIII, 155. C 322, pl. 1366, p. 24. Décret imprimé. Rapporteur Porcher selon C II* 21, p. 21. Débats, n° 770, 611; Moniteur, XXII, 412. (79) M. U., XLV, 219. (80) Débats, n° 770, 611. Moniteur, XXII, 412; Gazette Fr., n° 1035 ; J. Mont., n° 43 ; Mess. Soir, n° 807 ; J. Perlet, n° 770 ; J. Fr., n° 768; M. U., XLV, 216-219. (81) P.-V., XLVIII, 155.