[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (2 avril 1791.J 521 L’ordre du jour est un rapport concernant les présidents et commissaires qui ont provoqué, pris et signé les délibérations des soi-disant catholiques de Nîmes et d'Uzès des 20 avril , 2 mai et 1er juin 1790. M. Alqnier, au nom des comités des rapports et des recherches. Messieurs, vous avez chargé vos comités des recherches et des rapports de vous rendre compte de l'affaire de quelques citoyens de Nîmes et d’Uzès, mandés à la barre comme présidents et commissaires des assemblées teuues par les soi-disant catholiques de ces deux villes, les 20 avril, 2 mai et 1er juin 1790. Les délibérations prises dans ces différentes asssemblées, et qui ont acquis une célébrité si funeste, vous sont depuis longtemps connues. Vous les proscrivîtes par vo're décret du 17 juin; elles furent encore rappelées à votre souvenir dans le rapport de l’affaire de Nîmes; et en effet ces délibérations se liaient trop évidemment aux troubles que cette ville a éprouvés, pour être séparées du récit de ses malheurs. La délibération, prise à Nîmes, le 20 avril, dans l’église des Pénitents blancs, fut le développement des machinations sourdes qu’on ménageait depuis longtemps pour troubler la tranquillité publique ; des libelles l’avaient précédée, et tout ce qui pouvait faire impression sur la multitude y était employé avec un art perfide. On troublait les consciences parde feintes alarmes sur le sort de la religion; on effrayait les citoyens en développant un prétendu projet de détruire la monarchie, enfin on portait l’inquiétude et l’amertume dans tous les cœurs en représentant le roi comme captif à Paris. Ces libelles eurent l’effet que les auteurs s’étaient promis. Une fermentation assez vive se manifesta ; des assemblées nocturnes, des exhortations publiques lui donnèrent plus d’activité; et lorsqu’on crut pouvoir compter sur l’exaltation des esprits, le projet de délibération fut présenté, dans une église, à une assemblée très nombreuse. On proposa de nommer un président et par acclamation on fit choix de M. de Lapierre, chevalier de l’ordre de Saint-Louis. M. Chevalier, doyen des notaires, fut choisi pour secrétaire ; et M. Michel, conseiller au présidial, M. Digne, négociant, Fort, marchand de bois, Melquioud aîné, négociant, et Fermel, libraire, furent nommés commissaires pour faire parvenir la délibération à l’Assemblée nationale, au roi, à la commune de Nîmes, et partout où ils voudraient. Le trop fameux François Froment, cet homme dont on a eu si souvent l’occasion de vous parler, en vous rendant compte de l’affaire de Nîmes, François Froment, avocat et receveur du chapitre, était aussi l’un des commissaires. La délibération ne portait dans tous ses points que i’anaiyse exacte des libelles séditieux qui avaient infecté Nîmes ; on y retrouvait le mémo esprit ; le projet de troubler l’ordre public, et de décréditer les travaux de l’Assemblée nationale y étaient ouvertement manifestés. Je ne vous rappellerai pas par quelles infâmes manœuvres on obtint plusieurs milliers de signatures : tous les moyens parurent licites, et tous furent employés : des exortations faites en chaire, des invitations pressantes prodiguées dans les cabarets faisaient accourir en foule des signataires; plusieurs ne savaient pas écrire; des hommes apostés exprès signaient pour eux; toutes facilités étaient données ; les uns déclaraient qu’ils signaient pour leur famille ; d’autres pour les gens de leur connaissance... Cette délibération, revêtue de ces signatures, fut répandue avec profusion dans le royaume, et adressée à un nombre infini de municipalités. Le 29 avril elle fut publique à Nîmes; le 2 mai, il y eut des troubles assez violents ; et l’aigreur qu’on avait excitée entre les deux classes de citoyens divisées par leurs opinions religieuses et par leur culte, ne fit chaque jour que s’irriter d’une manière alarmante. Le 2 mai, une délibération, à peu près semblable à celle dont je viens de parler, fut prise à Uzès, dans l’église des Capucins, par des citoyens catholiques. Les intentions étaient les mêmes. Le ci-devant baron deFontareiche fut nommé président de cette assemblée; MM. de Cobanne, de Leyrac, avocat, Borie, notaire et Morel, fabricant de bas, furent choisis pour commissaires et chargés d’envoyer les délibérations à l’Assemblée nationale, au roi et aux principales villes du royaume; cet ordre fut ponctuellement exécuté. On chercha aussi à alarmer le peuple sur le sprt de la religion ; on prit en considération les circonstances qui avaient déterminé le séjour du roi à Paris, les changements frappants, disait-on, qu’offraient les entours de ce prince et son nouveau genre de vie. On parut s’effrayer de la nécessité où était l’Assemblée nationale de s’environner de tout l’appareil d’une force militaire, et on feignit de croire que la contrainte de cette force armée influait sur vos décrets. On concluait à ce que l’Assemblée nationale et le roi s’éloignassent de Paris et à ce que ce monarque revît et sanctionnât les actes émanés de l’Assemblée depuis le 6 octobre. Enfin on adhéra à la délibération prise par les citoyens catholiques de Nîmes. Cette délibération eut bientôt la plus grande publicité. Elle fut prise le 2 mai; le 10, il y eut dans la ville un mouvement d’insurrection, mais qui heureusement fut promptement calmé. L’envoi fait aux différentes municipalités par les présidents et commissaires des catholiques de Nîmes, avait été repoussé avec horreur : de toute part, celte production séditieuse fut regardée comme un attentat à la paix publique; des tribunaux la flétrirent par des jugements; d’autres la firent lacérer par l’exécuteur; des corps administratifs en interdirent la circulation. De toute part, elle vous fut dénoncée ; de toutes les parties du royaume vous parvinrent des pétitions pour vous demander la proscription de l’ouvrage et la punition de ses auteurs et de ses pro-mulgateurs. Ges réelamalions presque universelles, n’empêchèrent pas que, le 1er juin, dans l’église des Jacobins de Nîmes, les mêmes citoyens ne prissent une nouvelle délibération confirmative de la première; et cette fois leur audace fut sans bornes. Les calomnies les plus atroces contre l’Assemblée nationale y furent consignées. On ne dissimula point une coupable coalition ; on annonça hautement l’adhésion la plus formelle aux principes manifestés à Uzès et à Montauban. Le bruit courut alors que quelques membres de cette assemblée avaient protesté contre vos décrets; cette rumeur fut accueillie par les citoyens catholiques et ils adhérèrent aussitôt à cette protestation. Cette nouvelle délibération fut envoyée aux corporations d’artisans de la plupart des villes du royaume; mais cette coupable in-