[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ! 15 brumaire an II 425 1 4 t 5 novembre 1793 et jours suivants, ledit Duplessis s’absenta, et qu’à son retour, vers le 24, il dit hautement dans la chapelle où se réunissait le comité dit de surveillance : j’ai été à ma campagne, et ces rebelles m’ont forcé de marcher jusqu’au bourg de Thé, distant de deux lieues de Vannes. Je certifie en outre qu’il n’a pu obtenir du con¬ seil général de la commune dont je suis membre, un certificat de civisme qui avait été demandé pour lui par son père. A Brest, le 21e jour du 1er mois de l’an II de la République française une et indivisible. Signé : Jean Herbert. Je déclare en outre que le cachet de la muni¬ cipalité fut pris par les rebelles, dans la jour¬ née du 15 mars dernier, sur le bureau, et qu’il ne s’est trouvé que depuis un mois. Les jour et an que dessus. Signé : Jean Herbert. Copie du procès-verbal du conseil tenu à bord du vaisseau le Terrible. Aujourd’hui 21 septembre 1793, l’an II de la République une et indivisible, les généraux et capitaines de l’armée, réunis en conseil pour délibérer en présence du citoyen Tréhouart, re¬ présentant du peuple, sur la situation des dif¬ férents vaisseaux et la fermentation qui s’est manifestée depuis quelques jours dans l’armée, et sur les suites qu’elle fait craindre, ont succes¬ sivement émis les opinions suivantes, après avoir pris connaissance de la dépêche du ministre de la marine, en date du 16 septembre 1793. Le capitaine Vanstabel, commandant le Tigre, déclare que son vaisseau peut tenir la mer un mois et demi; il se flatte que son équipage le se¬ condera en obéissant aux ordres qu’il pourrait lui donner. Le capitaine Thomas, commandant le Nor-ihumberland, déclare que son vaisseau peut tenir la mer un mois ; il se flatte que son équipage le secondera en obéissant aux ordres qu’il pourrait lui donner; il lui manque 40 hommes pour le complet de l’équipage. Signé : Thomas. Le capitaine Dorré, commandant le vaisseau le Téméraire, déclare n’avoir point à se plaindre de son équipage; mais il ne peut répondre de son obéissance, si l’on exigeait que son vaisesau tienne encore la mer : il déclare en outre qu’il a aux hôpitaux 118 hommes, et qu’il craint d’avoir bientôt un plus grand nombre de ma¬ lades, n’ayant pas cessé d’en avoir beaucoup. Il a pour 1 mois de vivres et 18 jours d’eau. Signé : Y. -F. Dorré. Le capitaine Langlois, commandant le Tour-ville, déclare que, jusqu’au 14 septembre, jour auquel plusieurs vaisseaux ont hissé leurs hu¬ niers, il n’avait point à se plaindre de son équi¬ page; mais qu’à cette époque et depuis, il a for¬ mellement énoncé le désir, la nécessité même de la rentrée à l’armée de Brest : il a débarqué 75 malades ou gens manquant au complet; il a pour un mois de vivres, et douze jours d’eau et de bois. Le capitaine Langlois a ajouté que son équipage a manifesté du mécontentement de ve¬ nir au mouillage, et a dit encore que son vaisseau peu lesté portait mal la voile. Signé : Langlois. Le capitaine Keranguen, commandant l'A¬ chille, déclare avoir pour vingt-cinq jours de vi¬ vres; que son équipage s’est bien montré jus¬ qu’au 14 septembre; mais que depuis ce temps il manifeste le désir le plus ardent, avec un ca¬ ractère d’effervescence, de rentrer à Brest. Le 14 septembre, à l’imitation de plusieurs autres vaisseaux, il hissa les huniers. Aujourd’hui, en venant au mouillage, il a crié fortement, à plu¬ sieurs reprises, A Brest. S’il avait plus de moyens de répression, il espérerait ramener l’ordre à bord de son vaisseau. Signé : Y. Bertrand Keranguen. Le capitaine Tïphaigne, commandant le Nep¬ tune, a déclaré avoir pour un mois de vivres, et de l’eau pour jusqu’au 5 octobre; son équipage paraît être dans de bonnes dispositions, à l’ excep¬ tion de quelques têtes incendiaires; qu’il lui manque 44 hommes au complet, et qu’il a dans ce moment 52 malades au poste, et 100 scorbu¬ tiques dont il ne peut tirer qu’un faible service; il a ajouté que presque tout son équipage avait besoin de hardes. Signé : Tïphaigne. Le capitaine Henry, commandant V Aquilon, a déclaré qu’il a maintenu jusqu’à ce jour son équipage dans l’obéissance aux lois, mais qu’il est affaibli par l’absence de 74 hommes, ma¬ lades ou déserteurs au départ, parmi lesquels se trouvèrent 16 aides-canonniers ; qu’il a 39 hommes au poste, dangereusement malades, et en outre 32 scorbutiques à peine capables d’un faible service. Le capitaine Henry a ajouté que son vaisseau, ainsi qu’il l’a déjà déclaré, a sa fisse d’ ourdie fortement lézardée, et plusieurs barreaux gercés et éclatés; il a pour un mois de vivres. Le capitaine Henry a déclaré avoir en dépôt environ 100 barriques de vin qu’il ne peut délivrer qu’ autant qu’on les lui remplace¬ rait par un poids équivalent. Signé : Henry. Le capitaine Lévêque, commandant l'impé¬ tueux, qufa rallié depuis le 10 septembre, a pour trois mois d’eau et de vivres; son équipage s été soumis jusqu’à ce jour, et il espère que le même esprit continuera de l’animer; il observe qu’il lui manque au complet 50 hommes, et qu’il a 40 malades attaqués de fièvre et de flux de sang. Le capitaine Lévêque observe encore que son eau étant faite dans le courant du mois de mai dernier, il a fieu de craindre que les barriques n’aient éprouvé du coulage, particulièrement au premier plan. ■' Signé : L’Evêque. Le capitaine Bouvet, commandant l' Auda¬ cieux, déclare qu’au dernier mouillage, sous Belle-Isle, son équipage s’était refusé à embar¬ quer de l’eau, et avait fortement crié : « A Brest ! à Brest ! » que rappelé à l’ordre, il n’a point partagé, en totalité, le mouvement insur¬ recteur qui a eu fieu le 14; mais qu’il craint qu’il n’imite à l’avenir un semblable mouve¬ ment, s’il le voyait faire. II lui manque 57 hom¬ mes, et a beaucoup de scorbutiques; il a pour 1 mois de vivres et 12 jours d’eau et de bois : son vaisseau, très léger, est peu en état de soutenir un coup de vent. Signé : Bouvet. 426 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Le capitaine Coëtnempren, commandant le Jean-Bart, déclare avoir pour 2 mois de vivres, 2 mois d’eau, son équipage est en santé, paraît bien disposé, et il ne lui manque que 36 hommes. Signé : Coetnempren. Le capitaine Obet, commandant le Suffren, a déclaré avoir pour 1 mois de vivres et d’eau; qu’il lui manquait 30 hommes; qu’il avait 12 hommes dangereusement malades, et 30 scor¬ butiques; il a ajouté que son équipage était dans la plus grande effervescence, surtout depuis le mouillage de Quiberon, et a, le premier, hissé las huniers le 14 septembre. Ce vaisseau tient la mer depuis le 8 avril, et son détachement est dénué de hardes, et demande, ainsi que l’équi¬ page, à aller à Brest. Signé : Obet. Le capitaine Bonnefous, commandant le Ter¬ rible, a déclaré avoir pour 1 mois de vivres, de l’eau jusqu’au 1er octobre; que l’équipage avait été paisible jusqu’au 14 septembre, mais qu’il a partagé l’effervescence qui s’est manifestée dans différents vaisseaux de l’armée, et a an¬ noncé le plus ardent désir de rentrer à Brest; aujourd’hui, en venant au mouillage, ce désir s’est manifesté de nouveau. Le capitaine a rendu hommage au zèle du détachement du Calvados, qui s’est empressé le 14 de jurer obéissance et fidélité aux lois et aux ordres du général : il ajoute qu’il manque 45 hommes au complet. Signé : Bonnefous. Le capitaine Bruix, commandant l'Indomp-table, a déclaré avoir 1 mois de vivres, 25 jours d’eau, et 18 jours de bois. Antérieurement à l’effervescence qui s’est manifestée dans l’ar¬ mée, Il avait été très satisfait de son équipage, et était assuré de toute sa confiance, il espère même l’avoir aujourd’hui, quoi qu’il soit certain que des malveillants ont voulu la lui faire perdre. Il déclare formellement aux représentants du peuple, �que le 13 après midi, des officiers du Tourville sont venus à bord de son vaisseau présenter aux officiers une pétition tendant à forcer la rentrée de l’armée à Brest; que ceux-ci ont refusé de la signer, en déclarant que leur devoir était l’obéissance. (Déclaration relative à Clément, enseigne du vaisseau le Tourville.) Le capitaine Bruix a ajouté que pendant le sé¬ jour des officiers du Tourville à bord de l'indomp¬ table, une députation de la Bretagne lisait à l’é¬ quipage assemblé, un projet d’adresse à la Con¬ vention nationale, pour lui exprimer l’indigna¬ tion des marins en apprenant l’horrible trahison des Toulonnois, et leur vœu de mourir fidèles à la République. Au milieu des applaudisse¬ ments, un homme du Tourville, qu’on lui a dit s’appeler Morel, s’est écrié : il ne faut pas parler de cela, allons à Brest ! à Brest ! c’est là qu’il faut aller, je connais plus de 40 aristocrates dans l’armée, qui veulent la livrer. (Déclaration relative à Jean Morel, matelot du vaisseau le Tourville.) Ces cris ne produisirent aucun effet, l’équi¬ page y répondit par des huées de mépris. Je dé¬ clare encore que parmi les officiers du Tourville était le citoyen Clément et le citoyen Prisset, officiers, le premier du Tourville, et le second de la Convention (Déclaration relative à Clé¬ ment), et qu’il a consigné dans son journal tous les faits relatifs à cet événement. Le capitaine, Bruix continuant sa déclaration, ajoute que le 14, son équipage fut tranquille, désapprouva l’acte d’insurrection qui avait eu lieu à bord de plusieurs vaisseaux; que le 15 au soir, un canot du Tourville passant auprès de V Indomp¬ table, cria à plusieurs reprises à l’équipage de ce vaisseau : « Vous êtes des j... f... vous n’avez pas hissé les huniers parce que votre capitaine vous a donné une double ration »; ce que le capitaine Bruix dément formellement ici, ne voulant les engager à faire leur devoir que par son exemple et par son désir de bien servir sa patrie. Enfin le 16 au matin, lui étant malade et couché, le petit hunier a été hissé sans ordre et malgré l’opposition des officiers de garde; qu’averti de cet événement, et s’étant rendu sur le pont, tout mouvement avait cessé, et le plus grand silence avait régné parmi l’équipagé; qu’ayant demandé quel était le motif et le but de ce mouvement, personne n’avait répondu, qu’ après avoir blâmé cette conduite, il leur or¬ donna d’amener le betit hunier, ce qui fut exé¬ cuté. Le capitaine Bruix rend hommage à la conduite des canonniers de la garnison et de la tête de son équipage, qui témoignèrent une dou¬ leur profonde de ce qui venait de se passer. Il a terminé en annonçant qu’il lui manquait au complet 59 hommes, que beaucoup sont sans hardes, surtout le détachement. Signé : E. Bruix. Le capitaine Richery, commandant la Bre¬ tagne, a déclaré avoir pour 1 mois de vivres, de l’eau et du bois jusqu’au 2 octobre; qu’ii manque 109 hommes au complet; qu’il a 45 ma¬ lades, dont 28 dangereusement, et en outre 50 scorbutiques, incapables d’un service un peu pénible. Le capitaine Richery ajoute que l’équi¬ page paraît dans de bonnes dispositions; que le 14, il n’a cédé que quelques instants aux mou¬ vements qui avaient été imprimés à plusieurs vaisseaux; il se loue des canonniers, des timo¬ niers, du détachement et d’une partie des ma¬ telots. Signé : Richery. Le capitaine Labatut, commandant la Con¬ vention, déclare avoir pour plus d’un mois de vivres, de l’eau et du bois jusqu’au 3 octobre, qu’il n’est pas assuré de l’obéissance de son équi¬ page, qui, le 14, a hissé les huniers, et a paru avoir le plus violent désir de retourner à Brest ; il a cependant paru tranquille depuis l’assem¬ blée qui a eu heu à bord du Terrible ; il pense que la majorité ne partage point l’effervescence du reste, mais laisse faire. Le capitaine Labatut ajoute qu’il a appris que le 13 le maître d’équi¬ page du vaisseau la Convention étant à bord du Tourvillle, a été appelé et introduit dans la chambre d’un officier, qu’on lui a fait lecture d’une pétition tendant à faire rentrer l’escadre à Brest, et qu’il s’était constamment refuséfà la signer, disant qu’il ne le ferait qu’à son bord, quand il en aurait eu l’exemple de son capi¬ taine et de l’état-major de son vaisseau. Le maître d’équipage a dit que parmi les officiers qui se trouvaient dans la chambre où. il a été introduit, il a reconnu le citoyen Prisset, offi¬ cier de la Convention. Signé : Labatut. Le capitaine Duplessis-Grrenédan, comman¬ dant la Côte-d'Or, a déclaré que ce vaisseau avait fConvention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { i5 brumaire an II 427 15 novembre 1793 pour 3 mois et 1 /2 de vivres, 2 mois et 20 jours d’eau; que l’esprit de l’équipage était fortement prononcé pour retourner à Brest; que le 14, les matelots ayant voulu hisser les huniers, en fu¬ rent empêchés par le détachement et les canon¬ niers qui prirent les armes; mais que depuis cette époque, ces militaires ayant dû être tra¬ vaillés ont adhéré au vœu du reste de l’équipage, dont la totalité est très effervescente; qu’en outre les soldats de marine ont rédigé une opi¬ nion fondée, disent-ils, sur une lettre venue de Brest qui annonce la destitution des chefs. Signé : Duplessis-Grenédan. Le capitaine Tranquelleon, commandant la 'Révolution, a déclaré avoir pour 1 mois de vivres, outre un dépôt qui lui a été donné pour lest, en vin, salaisons et biscuit, 18 jours d’eau et de bois; il ajouté que jusqu’à la première relâche de Belle-Isle, l’équipage avait été entièrement obéissant à ses ordres ; au’à cette époque, il se manifesta quelques mouvements qui n’eurent pas de suite; mais que le 14 septembre, il les hissa aussi, malgré ses ordres et ses exhorta¬ tions pressantes. Il a déclaré encore que, voyant le général dans un canot, il a été à sa rencontre, quoique malade, lui rendre compte de l’événe¬ ment qui avait eu heu à bord de la Révolution ; mais que le général lui ayant dit de retourner à son poste, il était revenu à son bord, où il avait fait prendre les armes au détachement, et avait annoncé à l’équipage qu’il était prêt à périr plutôt que de les voir appareiller le vaisseau; qu’il avait ordonné à deux officiers d’amener le petit hunier, ce qu’ils avaient exécuté sans op¬ position, les esprits s’étant calmés, et que lui, accompagné d’un autre officier, avaient amené le grand hunier. Il a remarqué dans son équi¬ page plusieurs individus fermes à leur devoir; mais qu’il ne peut répondre de la grande majo¬ rité, d’après l’événement ci-dessus, et la certi¬ tude où il est que des agitateurs travaillent les équipages. Le capitaine Tranquelleon a encore déclaré qu’il lui manquait environ 60 hommes, et qu’il avait 40 malades fiévreux et scorbuti¬ ques; l’équipage est dénué de hardes. Le capitaine Tranquelleon ajoute encore que le 14, étant au conseil à bord du Terrible, les officiers du Tourville ont été à bord de la Révo¬ lution, lire à l’équipage une pétition tendant à rentrer à Brest sur-le-champ ; que les officiers de ce vaisseau, à qui elle a été présentée à signer, s’y sont refusés en déclarant qu’ils ne connais¬ saient que leurs devoirs. Ils ignorent le nom de cet officier. Signé : Tranquelleon. Le capitaine Bois-Sauveur, commandant le Superbe, a déclaré avoir des vivres, de l’eau et du bois jusqu’au 8 octobre; qu’il lui manque 55 hommes au complet ; qu’il a 22 malades à dé¬ barquer, et plusieurs scorbutiques; que depuis le 8 avril jusqu’au 14 septembre, il avait été très satisfait de son équipage; mais que ce jour, il a partagé l’erreur de plusieurs vaisseaux, en his¬ sant le petit hunier à deux reprises différentes, quoiqu’il l’eût fait amener la première fois. De¬ puis cette époque, il n’a pas cessé de manifester son désir de retourner à Brest, d’après la ré¬ ponse de la Convention à l’adresse qui lui a été envoyée par les députés des équipages. Il déclare, en outre, avoir eu connaissance d’une pétition envoyée à bord du Superbe, et communiquée aux officiers de l’état-major, que l’un d’eux lui a présentée, et qu’il l’a vue signée de différentes personnes, dont les noms ne lui sont pas connus. Un de ces officiers lui dit que cette pétition venait du Tourville, tendant à demander à la Convention la rentrée de l’es¬ cadre; pour toute réponse il leur dit que cette pétition devait être présentée au général de Galles, et se retira sans savoir si elle a été si¬ gnée par quelqu’un de son bord. Signé : B ois -Sauveur. Le capitaine Joyeuse, commandant le Trajan, a déclaré avoir des vivres, de l’eau et du bois pour 25 jours, 70 hommes manquant au com¬ plet, et en outre 100 scorbutiques; que son vais¬ seau fait de l’eau et nécessite le jeu de la pompe deux fois par jour; que son grand mât avarié le met hors d’état de soutenir une suite de gros temps, que même il pourrait tomber dans un tangage. Il déclare encore qu’il est infiniment satisfait du zèle et de la bonne conduite de l’é¬ quipage, quoi qu’il soit très fatigué, tenant la mer depuis le 6 avril; mais qu’il lui a annoncé que, toujours' disposé à suivre ses ordres, il es¬ père que, rentré �à Brest, il lui sera permis de se reposer 3 mois, les peines inséparables d’une carrière aussi active lui donnant des droits à cette faveur. Signé : Joyeuse, Le capitaine Terrasson, commandant le Juste, a déclaré avoir généralement des vivres jusqu’au 8 octobre, de l’eau et du bois pour 12 jours, 70 hommes manquant au complet, 13 sur les cadres et>20 scorbutiques. Il a déclaré encore que son équipage, tranquille jusqu’au 14 sep¬ tembre,' avait été assez effervescent depuis cette époque, et avait fortement manifesté le désir de retourner à Brest ; qu’au jour d’hui même, il avait vu avec peine l’armée venir au mouillage, et avait marqué beaucoup de mauvaise volonté pour serrer les voiles; que le détachement qui s’était d’abord montré fidèle à ses devoirs, suit aujourd’hui le mouvement du reste de l’équi¬ page, ce qui lui prouve que des malveillants sèment le désordre à son bord, comme à bord de plusieurs autres vaisseaux. Il a ajouté que son grand mât était arqué, et que sa hune de misaine était un peu avariée. Signé : Terrasson. Le contre-amiral Kerguelen, commandant V Auguste, a pour environ 25 jours de vivres et d’eau. Il lui manque 60 hommes au complet, il a 50 malades au poste, et autant de scorbuti¬ ques; la tête de son mât de misaine et sa hune avariées le mettent hors d’état de soutenir sans danger un gros temps. Le général Kerguelen a déclaré que son équipage est extrêmement difficile pour les vivres, et extrêmement effer¬ vescent, ayant manifesté depuis longtemps le désir de rentrer à Brest; que le 14 septembre il a hissé ses huniers, et n’a voulu les amener que lorsque le vice-amiral a joint ses ordres et ses instances à celles qu’il leur avait déjà� fait entendre. Depuis cette époque, l’esprit de l’équi¬ page n’a pas changé, il manifeste toujours for¬ tement le désir de rentrer à Brest. Le général Kerguelen déclare en outre que le 14 septembre, pendant qu’il était au conseil, un individu du Tourville, qu’il croit être un officier, a porté à son bord une sommation à adresser au général, pour faire rentrer l’armée 428 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ( f brumaire 1%” à Brest sur-le-champ, et qu’il en a fait part au capitaine du Tourville, et lui en a témoigné sa surprise. Signé : Kerguelen. ' Les capitaines des frégates, VEngageante, la Galathée, la Sémillante et la Nymphe, ont dé¬ claré être prêts à tenir la mer, ainsi que leurs équipages. Le capitaine de TEpervier a annoncé n’avoir que pour 21 jours d’eau et de vivres. Le capitaine Dordelin a cependant annoncé que la Nymphe fatiguait beaucoup, et faisait de l’eau. Signé : Dordelin, Charles Flotte, Bou-LAINE, LA BrETÈCHE et ÉMERY. Après l’énoncé de ces diverses opinions sur la situation des vaisseaux et des équipages, le citoyen Tréhouard, représentant du peuple près les ports de Brest et de Lorient, a proposé au conseil les questions suivantes; 1° Est-il possible, avec l’eau que l’on a ac¬ tuellement dans l’escadre, de se rendre de suite sur la croisière indiquée par le ministre de la marine? 2° S’il n’y a pas assez d’eau à bord des vais¬ seaux pour se rendre sur la croisière indiquée, combien faudrait -il de temps pour s’en procu¬ rer? 3° Serait-il nécessaire de mettre les malades à terre avant d’aller au combat? les équipages, dans ce cas, seraient -ils trop affaiblis? 4° L’esprit d’insubordination qui s’est ma¬ nifesté parmi les équipages de différents vais¬ seaux, et leur vœu plusieurs fois prononcé avec effervescence de rentrer à Brest, laissent-ils es¬ pérer que, rendus à la discipline, ils suivront, en vrais républicains, les ordres du ministre de la marine pour entreprendre une nouvelle croisière? 5° Quelle est la cause qui a pu produire l’in¬ surrection coupable qui a surtout éclaté le 1 4 sep¬ tembre? 6° Les différents besoins de l’armée, la sai¬ son, l’esprit d’insubordination des équipages, permettent -ils de faire voile sans délai pour la croisière indiquée? 7° Enfin, le salut de l’armée de la République exige-t-il impérieusement qu’elle relâche à Brest avant de reprendre la mer? Les généraux et capitaines répondent collec¬ tivement et après un mûr examen aux questions du citoyen Tréhouart, de la manière suivante : A la première. Non. A la deuxième. La quantité d’eau nécessaire à quatorze vaisseaux retiendrait l’armée au mouillage plus de 3 semaines, et conséquem¬ ment lui rendrait impossible l’exécution que lui prescrit le ministre de la marine ; cette impossi¬ bilité serait encore accrue par la consommation des vivres qu’il faudrait remplacer. A la troisième. Il est nécessaire de débarquer les malades qui, un jour de combat, embarras¬ sent extrêmement le poste destiné aux blessés. Un débarquement de malades, sans rempla¬ cement, affaiblirait encore des équipages in¬ complets. A la quatrième. Depuis le 14 septembre, le vœu fortement prononcé des équipages a été de rentrer à Brest ; les généraux et capitaines croient impossible de les rendre actuellement à la dis¬ cipline, et dans l’instant même un officier de la Côte-d'Or vient annoncer au général qu’un soulèvement se manifeste à bord de ce vaisseau, et que l’équipage, après avoir formellement an¬ noncé qu’ü veut mettre à la voile à la pointe du jour, a placé une sentinelle à la porte de la Sainte-Barbe et à l’entrée de la Fosse-aux -lions. A la cinquième. L’on ne saurait déterminer précisément la cause de cette funeste insurrec¬ tion ; mais l’on ne peut douter que des malveil¬ lants n’aient semé le trouble, que plusieurs vais¬ seaux plus effervescents n’aient contribué à propager les inquiétudes et le désordre qui dans ce moment s’est prodigieusement augmenté et paraît s’accroître encore. A la sixième. Non. A la septième. Les généraux et capitaines, pro¬ fondément affligés des maux qui désolent l’ar¬ mée navale de la République, et voulant la sau¬ ver, déclarent qu’ils ne peuvent espérer de par¬ venir à cet heureux résultat, si elle ne fait route au plutôt pour entrer à Brest. Fait à bord du vaisseau le Terrible, le 21 sep¬ tembre 1793, l’an 2 de la République une et indivisible. Signé : Vanstabel, Thomas, Dorré, Lan¬ glois, Bertrand Keranguen, Tiphai-gne, Henry, l’Évesqtje, Bouvet, Coet-nempren, Obet, Bonnefous, Bruix, Ri-CHERY, LabATUT, DüPLESSIS -GRENÎîD AN, Bois-Sauveur, Joyeuse, Terrasson, Ker¬ guelen, Lelarge, Landais, Trenquel-LEON, et MORARD DE GaLLES._ Les généraux et capitaines de l’armée navale de la République française, ayant unaniment re¬ connu que le salut de l’escadre dépendait essen¬ tiellement de sa prompte rentrée à Brest, et qu’ils ne trouvaient de possibilité d’exécuter pour l’instant les ordres du ministre de la marine, sans compromettre les forces qui leur sont confiées ; le vice-amiral Morard de Galles, commandant l’es¬ cadre, voudra bien prendre toutes les disposi¬ tions pour entrer à Brest dans le plus court délai, et rendra compte de cette mesure au co¬ mité de Salut ‘public et au ministre de la marine. A bord du vaisseau le Terrible, en rade du Palais, le 21 septembre 1793, l’an II de la Ré¬ publique une et indivisible. Signé : Les représentants du peuple près des ports de Brest et de Lorient. « Citoyens représentants, « Il y a 8 jours environ que je déposai entre les mains d’un de vos collègues (le citoyen Tréhouard), les faits que je dépose aujourd’hui dans les vôtres : alors je le fis de vive voix; il m’ordonna de le faire par écrit; je promis et je vais obéir. Son absence a produit mon retard : j’attendais son retour; mais les circonstances me font loi et je dois parler. Citoyens représen¬ tants, mon vaisseau va partir, c’est le bruit général, et, je vous le déclare, j’aimerais presque autant subir la peine de mort que de retomber une seconde fois sous le commandement d’un être tel que mon capitaine. « Je suis patriote, je n’ai pas cessé de l’être; je suis républicain, j’en ai des preuves bien con¬ vaincantes à vous donner. Avec cela, citoyens