[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 aoiit H89.J 457 Extrait des registres du parlement séant à Aix , du samedi 8 août 1789. « Les Chambres ayant été assemblées, sur ce qui a été proposé que la cour doit, avant la tin de ses séances, faire parvenir à l’Assemblée nationale ses vœux et ses hommages, la matière mise en délibération, la cour a unanimement arrêté de charger M. D'André, conseiller en icelle, de présenter à l’Assemblée nationale, dont il a l’honneur d’être membre, les témoignages de son respect et de son amour, d’assurer l’Assemblée de son adhésion aux maximes qu’elle soutient avec une si généreuse fermeté, de la confiance entière dans laquelle est la cour que la Constitution qui va être donnée au royaume fera le bonheur du peuple français et des habitants de cette province, et que l’ordre, la paix, la cessation des troubles et la réunion des cœurs, seront les fruits heureux des lois sages auxquelles auront concouru tant de vertus et de lumières réunies. « Signé: d’Albert Saint-Hippolyte. « Collationné. Signé: Sancisies. » L’Assemblée témoigne qu’elle reçoit avec satisfaction les hommages du parlement d’Aix. M. Duquesnoy, député de Lorraine , demande à l’Assemblée d’entendre la lecture d’une lettre qui lui est adressée par M. l’évêque de Saint-Dié ; elle est conçue en ces termes : « Le vœu connu de l’Assemblée nationale, concernant la pluralité des bénéfices, me paraissant aussi conformeàla justice qu’à l’esprit de l'église, je n’hésite pas à opter entre les deux que je possède, et j’envoie aujourd’hui à M. l’archevêque de Vienne la démission de mon évêché. » (On applaudit vivement.) M. Rédon s’étant excusé d’entrer au comité de recherches et d’informations, parce qu’il était nommé du comité des matières féodales , M. Bu-zot, qui avait réuni le plus de suffrages après les membres dernièrement élus pour le comité de recherches a été nommé pour y remplacer M. Rédon. La discussion sur la déclaration des droits, présentée par le comité des cinq, est reprise. M. l’abbé Bonnefoy. Après avoir com paré les divers plans de déclaration des droits avec celle deM. de Lafayette, j’ai vu que cette dernière est le texte dont les autres ne forment que le commentaire. Je trouve dans le plan de M. Mounier les mêmes maximes augmentées de plusieurs autres. Je conclus pour celui de M. de Lafayette, qui est simple et clair, et qui réunit en peu de mots les droits primitifs de l’homme. Je désire seulement qu’on y ajoute: « que l’homme a un droit sacré à sa conservation et a sa tranquillité, et que l’Etre suprême a fait les hommes libres et égaux en droits. » M. Pellerin. Le principe de toute société consiste dans la propriété et dans la liberté. L’homme perd de cette liberté à raison de ce que la loi lui défend. L’homme perd de sa propriété par les contributions qu’il doit à la chose publique. Telles sont les restrictions que l’on doit apporter aux principes fondamentaux. 11 semble, au surplus, que c’est les reconnaître que de promettre à chacun liberté, sûreté et propriété. Si les principes sont certains, si chacun connaît ses droits, il paraît qu’il est plus facile de les concevoir que de les exprimer ; chacun de nous a senti que si c’était notre devoir d’éclairer nos concitoyens sur leurs droits, il n’était pas moins prudent de les éclairer sur l’exercice de ces mêmes droits; c’est un flambeau salutaire dans les mains de l’homme sage et paisible, qui devient une torche incendiaire dans les mains d’un furieux. Sans doute tous les principes que l’on nous a présentés sont vrais en eux-mêmes ; mais il a fallu étayer les conséquences qui pouvaient devenir dangereuses. Aussi cette méthode a-t-elle gêné tous les auteurs; tantôt il a fallu taire des principes, tantôt il a fallu les circonscrire. C’est ainsi qu’il a fallu prévenir les fausses interprétations. C’est à vous à guider le peuple dans les routes obscures où il serait entraîné. C’est à vous à l’instruire. Vous allez lui indiquer ses droits; mais ces droits supposent des devoirs: il est incontestable que les uns ne peuvent exister sans les autres; ils ont entre eux des idées relatives. Il est incontestable, en effet, qu’aucun citoyen n’a de droits à exercer, s’il n’y a pas un autre citoyen qui ait des devoirs à remplir envers lui. Il faut donc établir que les droits ne peuvent exister sans les devoirs; ainsi, lorsque nous établissons que la vie de l’homme, son honneur, son travail, forment sa propriété, il convient cependant de dire qu’il en doit une portion à la patrie. Ainsi il convient encore d’ajouter que, lorsque l’on porte atteinte à ses droits, il ne doit pas repousser la force par la force, mais recourir à la justice. Nous n’oublierons pas surtout de rappeler à l’homme qu’il ne tient pas la vie de lui-même; que les vertus sont récompensées. C’est par la méditation de ces vérités que l’on rétablit la morale et que l’on parvient à rendre les hommes vertueux. Un membre a présenté un projet qui, dans deux colonnes, renferme les droits de l’homme et les devoirs du citoyen. Cette forme éprouvera peut-être des difficultés; mais jamais on ne doit renoncer au mieux. Et si l’Assemblée n’en reconnaît pas la nécessité, elle ne peut se refuser à celle d’y céder. Je demande donc une déclaration qui renferme les droits et les devoirs de l’homme en société. M. le vicomte de Mirabeau. Pour trancher le nœud gordien, je propose qu’à la place d’une déclaration des droits, on mette simplement à la tête de la Constitution : pour le bien de chacun et de tous, nous avons arrêté ce qui suit , etc. M. Oulot. Vous avez deux grands inconvénients à éviter : le premier, de vous traîner sur les pas des préjugés; le second, de vous égarer dans les détails obscurs de la métaphysique, et de substituer des maximes artificielles aux vérités simples de la nature : il faut remonter au principe générateur et en suivre les conséquences. Il existe, et il doit en exister un qui embrasse tous les droits et tous les devoirs de l’homme; c’est celui de veiller à la conservation de son être; les autres n’en sont que la suite naturelle. M-le Président propose d’aller aux voix pour admettre ou rejeter la discussion du projet