289 [États gén. 1789. Cahiers.] laud ; A.. Guillaume -, G. Guilton; Ar mieux, et Saint-Etienne, greffier. MÉMOIRE Présenté à l’assemblée de la communauté d’Eguil-/es, par le sieur Goullin , maître chirurgien audit lieu. Nih.il raelîus, nihil pejus quam medicina. Messieurs, Après bien des réflexions sur la médecine et la chirurgie, il me parait qu’il serait du plus grand intérêt de la nation, et de chaque individu en particulier, pour éviter les abus dans la différence des réceptions des chirurgiens des villes, de celles des chirurgiens des villages, que les députés aux Etats généraux fissent tous leurs efforts pour obtenir de Sa Majesté que tout médecin et tout chirurgien puisse, à l’avenir, exercer son état dans toutes les villes, bourgs et villages du royaume, à l’exception de la ville de Paris; qu’il n’y eût plus aucune distinction du médecin et du chirurgien d’une ville, au chirurgien et au médecin d’un village : les habitants d’un village devant être aussi chers au Roi et à la nation que les habitants des villes. Us doivent, par conséquent, avoir des sujets d’une égale capacité pour les traiter dans leurs maladies, et non pas d’être obligés de confier leur vie à des sujets qui, comme il n’arrive que trop souvent, savent à peine lire et écrire : Ex sutora medicus. Pour parvenir à se procurer des sujets également, ou du moins assez instruits, il faudrait qu’il y eût des collèges de chirurgie et de médecine, divisés par classes d’études, et que les étudiants logés dans les collèges ne pussent êlre admis de la première à la seconde classe, et ainsi successivement jusqu’à la dernière ; et non pas des écoles de chirurgie et d’université de médecine, où, jusqu’à présent, les étudiants, placés çà et là dans les villes, livrés à eux-mêmes et à la dissipation, restent des années sans paraître aux leçons. Pourvu qu’ils se fassent inscrire dans les registres toutes les fois requises, avec de l’argent, et quelques réponses étudiées à des questions qu’on leur aura faites quelques jours auparavant, ils obtiennent très-facilement leurs grades. Et sans études, ils sont médecins et chirurgiens par l’unique moyen de l’inscription de leur nom. Et suivant le précepte : a beau mentir qui vient de loin, parleur longue absence de leur pays, ou par la réputation qu’auront acquis leurs pères, ils en imposent au public : Nihil procréât tantum fama immerita malum. Pour éviter d’autres abus, il faudrait diviser les praticiens par classes, suivant leur rang et leur mérite; que toutes les villes, et tous les villages donnassent, chaque année, une somme déterminée, assez avantageuse à chaque classe par gradation; pour exciter l’émulation d’un chacun, il faudrait que ceux qui seraient admis à la dernière classe pussent parvenir à être admis à la seconde, et ainsi successivement, avec la liberté de faire rétrograder ceux qui auraient été admis dans une classe qu’ils ne mériteraient pas à tous égards ; et qu’aucun praticien, par quelque raison que ce fût, ne pût retirer aucun autre honoraire que celui qui serait attaché à la classe à laquelle il aurait été admis, pour éviter quid non mortalia pectora cogis auri sacra famés. Sire, princes, princesses, clergé, noblesse, tiers-état, voilà le déficit le plus considérable de la France : Nullum bonùm , nulla divitia , sine sanitate. lr* Série, T. VI. [Sénéchaussée d’Aix.] Sa Majesté ayant bien voulu permettre à un chacun de représenter aux Etats généraux tout ce qui pouvait être utile à son peuple, nul objet étant aussi intéressant que celui-ci ; voyant que personne n’y a fait aucune attention jusqu’ici, j’aurais cru manquer à mon Roi et à ma patrie, si, dans le temps où le flambeau de la lumière éclaire toute la France, j’avais omis de donner la plus légère idée du plus grand fléau qui dévore journellement tout le royaume. Trop heureux si ma remontrance faisait ouvrir les yeux au gouvernement pour réprimer, à l’avenir, des abus qui sont à l’insu de tout le monde, et font le malheur de tout le genre humain! Je supplie très-humblement qu’on ait la bonté de me passer l’expression : oui, il est très-certain que les citoyens s’occupent trop peu à acquérir des connaissances dans la médecine, capables de faire connaître à un chacun les abus qui se glissent dans cette science, soit par l’ignorance des praticiens, soit par l’avarice des droguistes et apothicaires, etc. ; en état de le mettre au jour si le cas le requiert. Signé Goullin, maître en chirurgie, à Eguilles. CAHIER Des doléances et plaintes de la communauté d'Es-parron de Palliéres , sénéchaussée d'Aix en Provence. Les sieurs députés qu’aura élus l’ordre du tiers pour assister et voter aux Etats généraux de France, seront expressément chargés de demander la suppression ou la réduction de la dîme, charge onéreuse pour les pauvres habitants et possédants biens de cettedite communauté , étant perçue sur le pied du douze sur tous les grains ayant épis, vin, agneaux et chevreaux. Demander que les sieurs prieurs décimateurs, chanoines de la collégiale Saint-Sauveur de Gri-gnan, soient chargés de l’entretien total de la maison curiale, construite attenant l’église paroissiale aux années 1746 et 1747, aux frais de la communauté de cedit lieu; et que cet édifice a soumis icelle à une charge. annuelle et perpétuelle d’une pension féodale de 15 livres annuellement en faveur de messire de Lordoué, seigneur féodiste dudit lieu, abandonnée et traitée entre les parties pour payer le demi-lods à lui dû à chaque échute de dix en dix ans, charge onéreuse et très-ruineuse pour la pauvre et misérable communauté; ladite obligation suivant la transaction sur ce passée avec ledit seigneur le 28 septembre 1767. De même que lesdits sieurs décimateurs soient tenus à l’entretien de la sacristie, du sanctuaire, et d’une cloche : lesquels sont obligés à fournir pour avertir le peuple ainsi que la loi accorde. D’y solliciter la réformation du code civil et criminel ; la suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux; une attribution à ceux des arrondissements, de souveraineté, jusqu’au concurrent d’une somme déterminée; l’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens; la liberté à ceux-ci, de quelque ordre qu’ils soient, de concourir pour tous emplois militaires, bénéfices et charges, attribués de noblesse ; et d’y réclamer surtout contre la vénalité des offices. Lesdits sieurs députés réclameront, en outre, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 19 290 [États gén. 1789. Cahiers.] une modération dans le prix du sel, uniforme pour tout le royaume ; comme aussi l’abolition de tous les droits de circulation dans son intérieur, et notamment le reculement des bureaux des traites dans les frontières. Quant aux affaires relatives et particulières à la province, l’assemblée charge par exprès ceux qui sont ses représentants en l’assemblée convoquée eu la ville d’Aix, d’insister à demander au meilleur des rois la convocation générale des trois ordres de la province, pour former ou réformer la constitution du pays ; de réclamer de sa justice qu’il soit permis aux communautés de se nommer un syndic avec entrée aux Etats ; de s’élever contre la perpétuité de la présidence, contre la permanence de tout membre non amovible ayant, vu l’état des choses, entrée auxdits Etats, des magistrats et de tous officiers attachés au fisc ; la désunion de la procure du pays du consulat de la ville d’Àix, l’admission des 'gentilshommes non possesseurs de fiefs, et du clergé du second ordre ; l’égalité de voix pour l’ordre du tiers, contre celles des deux premiers ordres, tant dans les Etats que dans la commission intermédiaire; et surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales, sans exemption aucune, et nonobstant toutes possessions ou privilèges quelconques ; l’impression annuelle des comptes de la province, dont envoi sera fait dans chaque communauté ; et que la répartition des secours que le Roi accorde au pays, ensemble de l’imposition de 15 livres par feu,' affectée à la haute Provence, sera faite dans le sein des Etats et par eux arrêtée ; déclarant, au surplus, que l’assemblée, quant a tous autres objets, soit généraux pour tout le royaume, soit particuliers à cette province, s’en réfère absolument au cahier général qui sera dressé dans l’assemblée d’Aix. Les habitants, en général, d’Esparron de Pal-lières demandent aux sieurs députés représentants à rassemblée des Etats généraux, la liberté de la chasse, port des armes, pour détruire tout gibier qui ruine et mange partie de la récolte. Demandent encore que le seigneur perçoit les cens et septier de blés, sur le taux d’une grosse mesure dont neuf panaux font des mesures couranies; ils réclament de la justice la modération. Le seigneur féodiste perçoit le lods à raison de six un, et ayant le droit de prélation. Le seigneur perçoit annuellement environ soixante charges de blé de la première qualité, toujours grosse mesure, et toujours de la première qualité; que bien souvent il refuse le blé sous prétexte qu’il n’est pas assez beau et de recette. La communauté d’Esparron et le seigneur avaient tous les bois en commun à l’exception de ces enclos nobles de tous les temps, par transaction du 28 septembre 1767. Les bois sont là partagés enlre la communauté et le seigneur. La partie obvenue à la communauté a été répartie à tous les habitants, sous la charge onéreuse d’être obligés, en coupant leur partie de bois, d’avoir sa permission sous la réserve du bois à brûler, de le lui porter au château à trois sous le quintal. Par laditè transaction, le seigneur s’est acquis en propriété la dofense à tous possédants biens dans le terroir d’Esparron, de ne pouvoir faire un colombier, n’y ayant que le sien seul, que ses pigeons endommagent beaucoup, et qu’ils doivent être enfermés dans les temps de droit des grains. Demandent encore que le chemin de la fontaine) [Sénéchaussée d’Aix.] la communauté en fait l’entretien annuel dü pavé, et le seigneur possède des fumiers au préjudice de l’usage commun. Signé Robussat, lieutenant de juge; Roux, consul; Fiuout; B. RebusSat; Rebuffet; R. Bour-relly; Mandric; Hœcuffat; J. Icarro; A. Roux; J.-J. Rebussat; Dauphin; J. -B. Serre; J. -H. Michel; P. Michel; B. Roux; J. Rebussat; J.-J. Gardet; J. Finaud; A-Roux; B. Pommière; J. Mandric; Finaud; M. Ollaguier; J Rebussat; J. Rebussat; Finaud, député; et Pourrière, greffier et député. Coté et paraphé ne mrietur le présent cahier, contenant quatorze pages. Fait à Esparron de Pallières, le 28 mars, 1789. Signé J. Rebuffat, lieutenant de juge, CAHIER Des instructions et doléances délibérées le 29 mars 1789, par l'assemblée des habitants du lieu et communauté de Fos-Amphoux , en conformité des règlements de Sa Majesté des 24 janvier et 2 de ce mois ; le tout sous l'autorisation de M. Jean-Joseph Berlus, lieutenant de juge dudit lieu (1). Deux sortes d’instructions et doléances; les unes intéressent la généralité du royaume, et les autres sont relatives et particulières à la province. Objets qui intéressent la généralité du royaume. Art. 1er. Réformation du code civil et criminel. Art. 2. Cessation de la vénalité des offices, et suppression des épices. Art. 3. Extinction de tous les tribunaux d’exception. Art. 4. Réforme sévère des tribunaux qui, étant fondés en juridiction universelle, subsistèrent : par rapport à ces tribunaux, il y aura simultanément suppression totale, et création nouvelle d’oificiers; et la liste de ces officiers sera présentée, par chaque province, à son auguste maître. Art. 5. Il n’y aura plus que deux degrés de juridiction, tant en matière civile qu’en matière criminelle. Art. 6. Les tribunaux du second ordre auront une attribution de souveraineté jusqu’à une somme déterminée. Art. 7. Les lettres closes seront abrogées, comme attentatoires à la liberté du citoyen. Art. 8. Abolition de tout droit de circulation dans l’intéj icur du royaume, et reculement des bureaux des traites aux" frontières. Art. 9. Mêmes poids et mêmes mesures en France. Art. 10. Attendu que les biens des hôpitaux sont un patrimoine public, les administrateurs de ces établissements pieux seront élus parle conseil municipal de chaque lieu , et leurs comptes seront rendus de la même manière que ceux des communautés d’habitants et aux mêmes personnes. Art. 11. Le droit de régale temporelle, appartenant incontestablement au Roi, Sa Majesté en retiendra, à l’avenir, le montant, et ne le délaissera plus aux nouveaux titulaires des évêchés. Àrt. 12. L’augmentation des congrues sera portée à 1,500 livres par rapport à certaines pa-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des A rchives de V Empire. ARCHIVES PARLEMENTAIRES.