656 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, i 19 brumaire an il 19 novembre 1793 être à l’influence que donnait à Osselin sa qualité de député, qualité consignée dans le procès-ver¬ bal; il ne devait pas souffrir, disons-nous, que ces administrateurs prévaricassent dans leurs de¬ voirs et ménageassent l’impunité d’un coupable. Les administrateurs ont commis un crime; Os¬ selin l’a partagé. Que la responsabilité ne soit pas un vain mot. Un fonctionnaire a enfreint la loi ; il a cherché à soustraire la punition du crime à la vigilance des tribunaux ; il est donc lui-même coupable de cette conduite; car nul n’est invio¬ lable devant la loi ainsi le veut l’égalité. En conséquence, le comité de sûreté générale me charge de vous proposer le projet de décret suivant : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport du comité de sûreté générale, décrète ce qui suit : « Il y a lieu à accusation contre Osselin, un de ses membres; le scellé sera mis de suite sur ses apiers. La Convention renvoie devant le tri-unal révolutionnaire Lagardie, ci-devant ma¬ réchal de camp ; Soulès et Froidure, administra¬ teurs de police de Paris. « Au surplus, la Convention déclare nul, comme attentatoire à la dignité nationale, l’en¬ gagement souscrit, par Osselin, le 4 mai dernier (vieux style) en faveur de la femme Charry. Merlin (de TMonville). La Convention doit frapper ceux de ses membres qu’elle trouve cou¬ pables, mais, avant, elle ne peut refuser de les entendre. Voulland. La Convention ne juge pas Osselin, elle le renvoie devant un tribunal. J’observe, au surplus, que s’il eût voulu être entendu, il ne serait pas sorti; car il était ici lorsque le rapporteur a commencé son rapport. Le décret présenté par Dubarran est adopté. « La Convention nationale, sur le rapport de son comité des secours publics [Haussmann, rapporteur (1)], décrète que la trésorerie natio¬ nale payera, sur le vu du présent décret, une somme de 150 livres à la citoyenne Élisabeth Duchatel, veuve Goutté, demeurant à Versailles, et dont les enfants sont au service de la Répu¬ blique. « Renvoie cette citoyenne devant les corps administratifs à Versailles, pour les secours que la loi accorde aux pères et mères dont les enfants sont aux frontières (2). » « La Convention nationale, sur le rapport de son comité des secours publics [Hausmann, rap¬ porteur (3)], décrète : Art. 1er. « Les enfants dont les pères et mères auront subi un jugement emportant la confiscation de leurs biens, seront reçus dans les hospices des¬ tinés aux enfants abandonnés et élevés confor¬ mément à la loi du 1er juillet dernier. (1)1 D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 277, dossier 724. (21 Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 111. (3) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 277, dossier 724. Art. 2. « Les personnes qui voudront élever chez elles de ces enfants recevront l’indemnité accordée par la loi du 19 août dernier, en se conformant à ce qui est prescrit par cette loi (1). » La séance est levée à 4 heures (2). Signé : P. A. Laloi, président; Fourcroy, C. Duval, Frécine, secrétaires. En vertu du décret du 29 prairial, l’an II de la République française une et indivisible. S. E. Monnel, Eschasseriaüx, P. J. Duhem, Frécine. PIÈCES ET DOCUMENTS NON MENTIONNÉS AU PROCÈS-VERBAL, MAIS QUI SE RAP¬ PORTENT OU QUI PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SÉANCE DU 19 BRUMAIRE AN II (SAMEDI 9 NOVEMBRE 1793). I. PÉTITION DES CITOYENS DE DA COMMUNE DE Mennecy, DÉPARTEMENT de Seine-et-OlSE (3). Compte rendu du Moniteur universel (4). Une députation de citoyens de la commune de Nelsy (Mennecy), accompagnée de femmes et d’enfants, réclame une seconde fois la liberté de plusieurs fonctionnaires publics de cette commune, arbitrairement détenus. Suit le texte de la pétition des citoyens de la commune de Mennecy , d’après un document im¬ primé (5). PÉTITION FAITE A LA CONVENTION NATIONALE PAR LES HABITANTS DE MeNECY (6), LE NO-NIDI, 19 BRUMAIRE, L’AN II DE LA RÉPU¬ BLIQUE FRANÇAISE. « L’empire de la superstition est difficile à détruire; le fanatisme ne néglige rien pour re¬ lever les autels dont il abuse et vous voyez une partie de ses tristes victimes. « Nous venons réclamer ceux de notre com¬ mune qu’un ordre de votre comité de sûreté (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 112. (2) Ibid. (3) La pétition des citoyens de la commune de Mennecy n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 19 brumaire an II ; mais on en trouve un extrait dans le compte rendu de cette séance publié par le Moniteur. (4) Moniteur universel [n° 51 du 21 brumaire an II (lundi 11 novembre 1793), p. 206, col. 3]. (5) Bibliothèque de la Chambre des députés i Collection Portiez (de l'Oise ) in-4°, t. 45, n° 25. (6) Sur le document imprimé, on lit partout Me-necy au lieu de Mennecy. __ [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 19 bruma.re an il 657 19 novembre 1793 fénérale a fait arrêter dans le moment où. ils taient chargés d’une commission bien chère à leur cœur; et certes ce comité n’a pu être trompé que par le petit nombre de ceux qui regrettent les abus dont ils profitaient. « Le sextidi 16 brumaire (1), au moment où les députés de la commune de Mennecy ap¬ portaient à cette barre l’argenterie de leur ci-devant église, et les affublements inutiles de son prêtre, un gendarme s’est présenté à l’auberge où ils logeaient, et a demandé qu’on lui remît les ohandeliers, ornements, croix, bannières, etc., pour les conduire au district de Corbeil, et que tous les députés l’y accompagnassent. On lui a demandé ses ordres; ils portaient d’arrêter seu¬ lement cinq desdits députés : ces derniers ont obéi à la loi et ont laissé à leurs collègues le soin d’exécuter le sage arrêté de la commune. « Pendant ce temps, d’autres gendarmes en¬ levaient de Mennecy d’autres habitants; et il en est, dans les maisons desquels on est allé faire des perquisitions, et qui auraient été arrêtés, s’ils se fussent tfouvés chez eux. « Soit adresse, soit étourderie, car la haine, et surtout la haine religieuse, raisonne toujours mal, on a compris dans ces arrestations, quelques personnes qui n’ont pas paru à l’assemblée qui a proscrit la dépense inutile du clergé de Mennecy. « Ainsi, dans le moment où vous nous accueil¬ liez à cette barre, dans le moment que vous re¬ ceviez nos calices pour faire le paiement de nos troupes, nos linges pour étancher le sang de nos blessés, nos bannières même, pour les transfor¬ mer en guidons patriotes, des ordres surpris à la religion de notre comité plongeaient, au nom de la Convention nationale, dans une malheu¬ reuse captivité, une partie de ceux qui étaient chargés de vous les offrir. « On s’était bien gardé de déclarer à votre comité quel était le motif des arrestations qu’on sollicitait près de lui; mais il n’est pas permis de révoquer en doute, d’après les demandes du gendarme quel était le but que se proposaient les dénonciateurs; car un homme chargé d’ar¬ rêter des gens regardés comme suspects, eût-il commencé par demander, contre la teneur de ses ordres, les croix et les bannières, si ces der¬ niers objets n’eussent été ceux dont on désirait prévenir la fonte? « Avec quelque adresse que se soit masqué l’homme qui a sans doute le plus participé à faire tomber, sur d’excellents patriotes, la peine qui ne doit être que le partage du crime, on ne peut méconnaître celui auquel l’arrêté delà commune de Mennecy enlève 1,500 livres de revenu, et la jouissance d’une magnifique maison : trop ha¬ bile dans l’art de feindre, il se sera sans doute bien gardé de paraître, et aura fait agir ceux qu’il a séduits sous le prétexte que nous voulions abo¬ lir la religion. Loin de nous cette pensée, citoyens législateurs ! nous professons tous cette religion que vous nous avez annoncée, et que nous trouvons dans l’Evangile des Droits de l’homme : l’humanité est en la base; c’est sur celle-ci qu’est établie solidement l’humanité couronnée par la liberté. Nous ne voulons point faire aux autres ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît. Et ceux qui, à cette religion primitive, veulent (1) Voy. ci-dessus, séance du 16 brumaire an II, p. , , . , l’admission à la barre des citoyens de Men¬ necy. en joindre une autre, trouveront toujours sûreté et protection parmi nous, pourvu qu’ils ne sortent pas des bornes que leur prescrit l'éga¬ lité. « Le rabbin juif, le prédicant luthérien, le ministre calviniste et le prêtre catholique peu¬ vent venir exercer leur culte dans notre com¬ mune; ils y trouveront, eux et leurs sectaires, la liberté la plus entière; mais de la même ma¬ nière que l’État ne loge pas, ne nourrit pas, ne paie pas les trois premiers, nous demandons à ne plus payer, nourrir et loger le quatrième; car nul ne doit être contraint de payer le ministre d’un culte auquel il ne croit pas. « Les pères, les mères, les épouses, les enfants désolés des victimes du fanatisme, viennent vous supplier de leur rendre leurs enfants, leurs maris et leurs pères : vos champs vous redemandent leurs cultivateurs; et comme aucun de nous n’a le projet de procurer la liberté à des coupables, nous nous bornons à solliciter de votre justice un décret qui ordonne à votre comité de sûreté générale de vous faire le plus prompt rapport des motifs de l’ordre d’arrestation lancé contre les habitants de la commune de Mennecy : nous laisserons sous la hache de la loi ceux des accusés dont nous ne pourrons prouver que le véritable crime est d’avoir fait profession de patriotisme, abjuration du fanatisme et proclamation de la parfaite égalité entre les divers cultes qui peu¬ vent partager l’esprit humain et soumettre malheureusement sa raison. « Signé sur la minute : Aubin; Jenret; Ber-nateau; Leloup; Baran; F. Clouet; Leblanc; Gervaise; Jean-Baptiste Hi-VERT; LoiSEAU ; GrUERIN ; VAURY; Marc; Avril; Guérin; Louis Rem y; Laurent Fournier; Gremilly; Grivotte; Delton; Turquois et autres au nombre de 88 qui ont fait leur signature à la marque d'une croix. » Le Président a répondu aux pétitionnaires et ils furent admis aux honneurs de la séance. PÉTITION A LA SOCIÉTÉ POPULAIRE SÉANT aux Jacobins, le même jour (1). « Citoyens, amis et frères, « Des hommes qui professent la créance que vous avez propagée, des hommes, qui, dépouillés de tous les préjugés que cette société a vaincus, sont en butte à la persécution du fanatisme et ont été enlevés et à leur commune et à leur Société populaire dans le moment même où ils apportaient à la Convention les dons de leur commune, sont ceux dont nous sommes venus réclamer auprès de la Convention la liberté ! « Nous demandons, à double titre, et de pa¬ triotes persécutés, et de membres de la Société populaire, les secours que la société mère doit à tous ses frères et qu’elle a juré d’accorder au nom de l’humanité à tous les hommes. « Donnez-nous, frères et amis, des défenseurs officieux actifs et vigilants ; et pour vous assurer que le fanatisme seul cherche à nous opprimer, {1) Bibliothèque de la Chambre des députés » Collection Portiez (de l'Oise), in-4°, t. 45, n° 25. lre SÉRIE, T. 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