ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { J î'93 285 [Convention nationale.] dans le jour par un piquet de 40 hommes des chasseurs des montagnes, aux ordres du capi¬ taine Lefèvre; la cavalerie espagnole ayant paru en même temps que l’infanterie venant du eôté d’Hendaye; une escouade de 10 chasseurs qui gardaient cette partie s’est repliée, et a mis quelque désordre dans le reste du détachement qui a rétrogradé de quelques pas ; le capitaine Lefèvre en ayant instruit le capitaine Latour - d’ Auvergne, celui-ci dépêcha une ordonnance au général Lassalle pour lui faire part des mouvements de l’ennemi, et marcher immédia¬ tement avec 150 hommes au secours dudit détachement qui avait déjà repris, son poste un moment avant son arrivée. L’ordonnance ayant mal rendu l’avis du citoyen Latour-d’Auvergne, et s’étant expliqué de manière à faire penser que l’engagement était sérieux, le général donna ordre à 400 hommes de la brigade de droite et à 25 dra¬ gons de se rendre au poste avancé, pour ren¬ forcer les troupes. Le général faisait alors une reconnaissance sur la gauche avec le chef de brigade Lespinasse. Non content de ces dispo¬ sitions, il demanda à l’adjudant général Hay un bataillon et 50 dragons pour se porter au camp des sans-culottes : le commandant Les¬ pinasse prit pour toute l’artillerie les mesures les plus convenables pour repousser les ennemis, et fit porter deux pièces de huit sur la hauteur dominant le plateau où la grosse réserve de cava¬ lerie et d’infanterie des Espagnols se porte habi¬ tuellement, et où notamment elle se trouvait en très grande force aujourd’hui. Après ces dispositions, le général Lassalle, chef de brigade, et Lespinasse se portèrent aux postes avancés du côté d’Hendaye pour obser¬ ver les dispositions de l’ennemi. Celui-ci s’obs¬ tinant à vouloir reprendre un poste essentiel d’où il avait été délogé, l’action s’est engagée de nouveau; elle a été très vive. Nos troupes, puissamment secondées par l’artillerie, comman¬ dée par le capitaine Maran, impatientes d’en venir aux mains avec un ennemi qu’elles sont sûres de vaincre, quand elles peuvent le serrer de près, l’ont attaqué à la baïonnette, ayant à leur tête le capitaine Dubon des chasseurs de montagnes. L’ennemi, repoussé d’abord avec perte, ren¬ forcé par des troupes fraîches, a regagné en partie le terrain qu’il avait perdu, quand la Tour-d’ Auvergne, se portant à la tête de ses valeureux frères d’armes, les a repoussés pour la dernière fois de leur hauteur et culbutés vers la Bidassoa. Cavalerie, infanterie, ont disparu, et le champ de bataille est resté aux soldats de la Bépu-qlique. Nous avons eu deux hommes tués et sept ou huit blessés ; la perte de l’ennemi a dû être con¬ sidérable, et je l’évalue à cent hommes : un guidon rouge est tombé entre nos mains; enfin cette journée a été glorieuse à la valeur fran¬ çaise : c’est le rapport que vient de me faire le général de brigade Lassalle. Je m’empresse, citoyens représentants, de vous en envoyer une copie. Signé : Henri Frégeville. III. Les citoyens qui, le 30 frimaire dernier, PRÉSENTÈRENT UNE PÉTITION EN PAVEUR de Commune-Affranchie, se plaignent d’avoir été arrêtés (1). Compte rendu du Journal de la Montagne (2). Les citoyens qui présentèrent décadi der¬ nier (3) une adresse au nom de Commune-Affran¬ chie, se plaignent d’avoir été arrêtés, malgré la mesure et le respect qu’ils avaient mis dans leur supplique. IV. Adresse de la. Société populaire de Ga-bian (Hérault) pour demander l’appli¬ cation rigoureuse de la loi du maxi¬ mum (4). Suit le texte de cette adresse, d’après l’original qui existe aux Archives nationales (5). La Société populaire et républicaine des adora¬ teurs zélés de la Constitution, séant à Gabian, canton de Roujan, district de Béziers, dépar¬ tement de V Hérault, à la Convention natio¬ nale. « Citoyens représentants, « Des républicains jaloux du salut de la patrie et de l’exécution de vos décrets, se hâtent de vous prévenir que la plus sage des mesures, celle qui tout à coup avait tué l’agio¬ tage et fait disparaître les accaparements, la fixation des denrées et marchandises, se trouve neutralisée par les moyens mêmes qu’on a pris pour en assurer le succès. « Oui, citoyens représentants, tout a été mal combiné dans cette fixation intéressante; les localités ont tout fait; chaque district n’a con¬ sulté que ses avantages propres, et les diffé¬ rentes communes que leurs intérêts respectifs. La plus grande diversité, la bigarrure et les contradictions même les plus révoltantes se font remarquer à cet égard, non seulement d’un département à l’autre, mais dans le même dépar¬ tement, entre les différents districts qui le com-(1) La pétition de ces citoyens n’est pas mention¬ née au procès-verbal de la séance du 3 nivôse an II; mais on en trouve, un extrait dans le compte rendu de cette séance publié par le Journal de la Mon¬ tagne. (2) Journal de la Montagne fn° 41 du 4 nivôse an II (mardi 24 décembre 1793), p. 327, col. 2], (3) Voy. ci-dessus, séance du 30 frimaire an II (vendredi 20 décembre 1793), p. 33, la pétition des citoyens de Commune-Affranchie. (4) L’adresse de la Société populaire de Gabian n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 3 nivôse; mais, en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, on lit l’indication suivante : « Renvoyé au comité dé commerce, section des subsistances, le 3 nivôse, deuxième année répu¬ blicaine. » (5) Archives nationales, carton F18 1547°. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [ g "93 236 (Convention nationale.] posent et les communes qui en ressortissent. Il est de fait que les denrées et les marchandises se trouvent très souvent à plus haut prix dans les lieux qui les fabriquent ou qui les produisent que dans ceux qui les consomment ou qui doi¬ vent les consommer. De là résulte nécessaire¬ ment le défaut de circulation et une disette réelle dans tous les endroits sujets à des approvision¬ nements; personne ne veut acheter pour perdre; personne ne veut revendre sans gagner, et pour ne pas être affamés au sein même de l’abondance, les citoyens sont obligés de dépas¬ ser le maximum, pour satisfaire à leurs nécessités. « Les corps administratifs le savent et se taisent, les accapareurs en sont instruits, et ils en profitent, et l’agiotage recommence avec autant de fureur que jamais. C’est à ceux qui payent le mieux qu’on porte tout ce qu’on déplace, et les amis de vos décrets meurent de faim pour les observer. « Citoyens représentants, ne souffrez pas qu’un abus aussi destructeur se perpétue plus longtemps dans le sein de la République; arrê-tez-en de suite les funestes progrès, vous le pouvez dans un instant, et le moyen en est aussi simple que sûr. Ne permettez pas qu’on élude ou qu’on viole impunément le maximum; ordonnez que les municipalités le détermine¬ ront d’après vos décrets, et autorisez que l’on y joigne seulement les frais de transport selon la distance des lieux. « Par là, citoyens représentants, vous' prévien¬ drez toutes les manœuvres perfides qu’on se per¬ met sur cet objet; vous déjouerez les derniers efforts de l’égoïsme, vous rétablirez la circu¬ lation et vous ferez cesser les craintes des vrais amis de la patrie et de la liberté. « Fait en la séance publique par les membres composant la Société populaire et républicaine des adorateurs zélés de la Constitution séante à Grabian, le décadi, 20e de frimaire, an II de la République française, une et indivisible. » (Suivent 38 signatures.) ANNEXE N° 1 à la Séance de la Convention nationale du 3 nivôse an II (Lundi, 3 décembre 1903). Comptes rendus, par divers journaux, de la discussion à laquelle donna lieu la demande d’admission à la barre de la Société des Cordeliers (1). I. Compte bendu du Journal des Débats et des Décrets (2). Une lettre de la Société populaire dite des Cordeliers demande à la Convention d’être admise à sa barre pour lui présenter une pétition importante. (1) Yoy. ci-dessus, même séance, p. 206 , le compte rendu du Moniteur. (2) Journal des Débats et des Décrets (nivôse an II, n° 461, p. 29): Bourdon (de l’Oise). Je m’oppose à l’admis¬ sion. Il ne doit pas y avoir plus de faveur pour les Sociétés populaires de Paris que pour celle des départements. Au contraire, elles sont sur les lieux, et peuvent mieux attendre le décadi que vous avez indiqué aux pétitionnaires . Je demande l’ordre du jour. Romme. Il est impossible que vous remettiez au même jour l’admission de tous les pétition¬ naires. Ce n’est pas que je demande une distinc¬ tion pour Paris. Mon unique objet est de présen¬ ter une mesure telle, que les députations des départements ne viennent pas à Paris inutile¬ ment, ou qu’elles ne soient pas forcées d’y faire un séjour coûteux. En conséquence, je propose de décréter que le décadi et le quintidi seront employés à recevoir les pétitionnaires. Je demande, en outre, que la députation des Cor¬ deliers soit admise sur-le-champ. Un membre demande le maintien du règle¬ ment, sauf les séances extraordinaires du soir, que l’on pourra accorder aux pétitionnaires. Romme insiste sur sa motion. Il s’oppose à ce qu’on entende des pétitionnaires le soir, parce que ces séances sont toujours peu nom¬ breuses, et qu’une pétition peut donner lieu à des décrets. Bourdon (du Loiret) est d’avis qu’il faut accorder aux pétitionnaires deux jours par décade. Bourdon (de l’Oise). Il faut dire ici toute la vérité. Les pétitionnaires qu’on vous annonce viennent demander l’élargissement de Vincent et de Ronsin. C’est en vertu d’un décret qu’ils sont détenus. Je demande l’ordre du jour. Un membre. Cette circonstance particulière me paraît un motif pour vous déterminer à entendre sur-le-champ les pétitionnaires. La Convention décrète qu’elle ne passe pas à l’ordre du jour; que les pétitionnaires seront admis, et qu’elle consacre deux jours par décade aux pétitions; ce sont le décadi et le quintidi. La députation des Cordeliers est admise à la barre. L'orateur. La Société des Cordeliers, semblable à l’antique Rome, est ferme dans ses principes, plus elle a d’ennemis à combattre, plus elle est forte. Elle a attaqué courageusement le pou¬ voir exécutif lorsqu’il était entouré de toutes sortes de scélérats !... elle a renversé le trône !... elle a combattu et combattra jusqu’à la mort toutes les factions. Le bonheur du peuple, l’unité, l’indivisibilité de la République, voilà l’étendard sous lequel elle périra. Vincent et Ronsin, deux de ses membres, ont été incarcérés et gémissent sous le poids d’une accusation. Voudrait-on les punir d’avoir dénoncé, poursuivi, jusqu’à l’échafaud, Dumou-riez, Lafayette, Custine, Roland et leurs com¬ plices? Eh bien ! elle vient vous déclarer qu’elle les a toujours regardés comme patriotes et vrais Cordeliers, et qu’elle les reconnaît encore. Que l’accusation soit prouvée... et que, dans le plus bref délai, ils soient jugés ! S’ils sont criminels, nous vous demandons vengeance... s’ils ne le sont pas, nous vous demandons justice des dénonciateurs ! Mais que deux citoyens, recon¬ nus patriotes jusqu’à ce moment, soient jugés; voilà le vœu des Cordeliers, qui jurent dans le