SÉANCE DU 10 PRAIRIAL AN II (29 MAI 1794) - N° 17 111 résultat d’une souscription volontaire faite en son sein. Elle vous demande qu’elle soit employée à la construction d’un vaisseau appelé « le Défenseur de la République ». Les sociétaires ne possédant pas de richesses, mais en revanche ils ont des vertus, de la probité et du patriotisme; ils auraient désiré que l’offre, qu’ils vous présentent fût plus considérable. N’importe ! C’est le résultat de leurs économies ! puissent les patriotes ne rien épargner pour la République que nous voulons, que nous aimons, que nous défendrons jusqu’à la mort. Vive la République, vive la Convention nationale, Honneur et gloire à ses immortels travaux. Vive la révolution républicaine ! (1) . 16 h La section des Piques montre le même dévouement que la Société des Défenseurs de la Patrie, et exprime sa reconnaissance sur les travaux des comité de salut public et de sûreté générale (2) . L’ORATEUR : Ils sont donc implacables, ces ennemis déclarés de l’égalité, de la liberté ! pour eux le mot fraternité devient un irritant qui fait mugir ces monstres altérés de sang, et les attentats les plus féroces paraissent être les seuls calmants de leur rage impie. Quoi ! tandis que vous, représentants d’un peuple de frères, vous consacrez avec la plus imposante authenticité, la légitime reconnaissance pour l’Etre Suprême devant qui nous avons sanctionné la constitution républicaine, que vous avez décrétée, tandis que vous annoncez à l’univers que la certitude consolante de l’immortalité de l’âme fait la base des droits sacrés de l’homme dont les français régénérés ont recouvré l’usage imprescriptible et inaliénable, tandis, enfin, que le premier effet émané de ces causes sublimes est une proclamation solennelle de la pratique de toutes les vertus sociales, remises à l’ordre du jour, pour n’en plus être écartées, des antropophages, deshonorant l’effigie d’homme avec laquelle ils essayent d’en imposer à la nature, viendront jusque dans le sanctuaire de la représentation nationale, y choisir leurs victimes parmi ceux d’entre vous que les circonstances mettent le plus souvent à portée de manifester l’ardent amour que tous vous partagez pour la chose publique. Citoyens Législateurs, l’horreur a glacé pour un instant l’énergie dont les citoyens, domiciliés dans l’arrondissement de la section des Piques, n’ont jamais cessé de donner des preuves palpables; mais aujourd’hui, nous venons tous, avec le calme du courage réfléchi, entourer les représentants du peuple français d’une haie de républicains qu’il faudra détruire jusqu’au dernier, avant que le fer homicide des lâches assassins, stipendiés par de soi-disant puissances encore plus lâches puisqu’elles n’osent frapper corps à corps, atteignant aucun d’entre vous. (1) C 306, pl. 1157, p. 24, signé Cortin, Lefèvre, Dermiguin. (2) P.V., XXXVIII, 189. Bln, 12 prair. (suppT) ; J. Sablier, n° 1349; M.U., XL, 174; J. Fr., n° 613; Rép., n° 161; Audit, nat., n° 614; J. Lois, n° 609; Débats, n° 617, p. 133; J. Matin, n° 708. Déjà quelques unes des sections de cette cité sont accourues vous apporter leur vœu, la section des Piques vient vous confirmer que le cri de ralliement des parisiens est : Force aux représentants du peuple français, fondateurs de la République une, indivisible et impérissable. Gloire immortelle à la Convention nationale, reconnaissance éternelle aux comités de salut public et de sûreté générale; mort aux tyrans ! telle est l’expression de nos cœurs enflammés d’un patriotisme qui ne s’éteindra qu’avec notre existence (1) . (On applaudit). 16 i La section de Châlier fait part des progrès qui se font appercevoir dans plusieurs ateliers de salpêtre qu’elle a établis, et félicite la Convention nationale sur ses immortels travaux; l’orateur dépose sur le bureau plusieurs ouvrages propres à l’esprit de morale et au culte dû à l’Etre Suprême, qui sont renvoyés au comité d’instruction publique (2) . La section a présenté 2 cavaliers et fourni 13 714 livres de salpêtre; elle en promet 3 000 par décade (3) . (On applaudit). La Convention nationale décrète la mention honorable et l’insertion au bulletin des adresses des jeunes citoyens de Villejuif, des habitans de la commune d’Aigue-Perse, des pompiers de Paris, des jeunes républicains et de la commune de Bourg-l’Egalité, des Défenseurs de la patrie et des sections des Piques et de Châlier, et les députations sont invitées aux honneurs de la séance (4) . 17 La commune de Sceaux présente à la Convention nationale les bustes des jeunes héros Barra et Viala, morts pour la patrie, etc. Elle présente la mère du jeune Barra, sa sœur et son frère. Sur la proposition d’un membre [CHARLIERJ, la Convention décrète que la famille du jeune Bara recevra l’accollade fraternelle du président, et sera placée à ses côtés. Ce décret est exécuté au milieu des plus vifs applaudissemens. Il est décrété en outre, qu’extrait du procès-verbal de ce jour sera expédié à la mère du jeune Barra et à la famille de Viala [et, sur la motion de RICHARD] qu’il sera aussi envoyé aux armées de la République. La députation de la commune de Sceau-l’Unité fait part à la Convention d’un trait vraiment républicain de la part d’un père de famille qui a été remplacer aux frontières son (1) C 306, pl. 1157, p. 26, signé Thiroux (présid.). (2) P.V., XXXVIII, 189. Audit, nat., n° 614; J. Matin, n° 708; Rép., n° 161; J. Lois, n° 609; Débats, n° 617, p. 133; M.U., XL, 174; Btn, 19 prair. (suppl1). (3) Ann. R.F., n° 181; J. Fr., n'> 613. (4) P.V., XXXVIII, 189. SÉANCE DU 10 PRAIRIAL AN II (29 MAI 1794) - N° 17 111 résultat d’une souscription volontaire faite en son sein. Elle vous demande qu’elle soit employée à la construction d’un vaisseau appelé « le Défenseur de la République ». Les sociétaires ne possédant pas de richesses, mais en revanche ils ont des vertus, de la probité et du patriotisme; ils auraient désiré que l’offre, qu’ils vous présentent fût plus considérable. N’importe ! C’est le résultat de leurs économies ! puissent les patriotes ne rien épargner pour la République que nous voulons, que nous aimons, que nous défendrons jusqu’à la mort. Vive la République, vive la Convention nationale, Honneur et gloire à ses immortels travaux. Vive la révolution républicaine ! (1) . 16 h La section des Piques montre le même dévouement que la Société des Défenseurs de la Patrie, et exprime sa reconnaissance sur les travaux des comité de salut public et de sûreté générale (2) . L’ORATEUR : Ils sont donc implacables, ces ennemis déclarés de l’égalité, de la liberté ! pour eux le mot fraternité devient un irritant qui fait mugir ces monstres altérés de sang, et les attentats les plus féroces paraissent être les seuls calmants de leur rage impie. Quoi ! tandis que vous, représentants d’un peuple de frères, vous consacrez avec la plus imposante authenticité, la légitime reconnaissance pour l’Etre Suprême devant qui nous avons sanctionné la constitution républicaine, que vous avez décrétée, tandis que vous annoncez à l’univers que la certitude consolante de l’immortalité de l’âme fait la base des droits sacrés de l’homme dont les français régénérés ont recouvré l’usage imprescriptible et inaliénable, tandis, enfin, que le premier effet émané de ces causes sublimes est une proclamation solennelle de la pratique de toutes les vertus sociales, remises à l’ordre du jour, pour n’en plus être écartées, des antropophages, deshonorant l’effigie d’homme avec laquelle ils essayent d’en imposer à la nature, viendront jusque dans le sanctuaire de la représentation nationale, y choisir leurs victimes parmi ceux d’entre vous que les circonstances mettent le plus souvent à portée de manifester l’ardent amour que tous vous partagez pour la chose publique. Citoyens Législateurs, l’horreur a glacé pour un instant l’énergie dont les citoyens, domiciliés dans l’arrondissement de la section des Piques, n’ont jamais cessé de donner des preuves palpables; mais aujourd’hui, nous venons tous, avec le calme du courage réfléchi, entourer les représentants du peuple français d’une haie de républicains qu’il faudra détruire jusqu’au dernier, avant que le fer homicide des lâches assassins, stipendiés par de soi-disant puissances encore plus lâches puisqu’elles n’osent frapper corps à corps, atteignant aucun d’entre vous. (1) C 306, pl. 1157, p. 24, signé Cortin, Lefèvre, Dermiguin. (2) P.V., XXXVIII, 189. Bln, 12 prair. (suppT) ; J. Sablier, n° 1349; M.U., XL, 174; J. Fr., n° 613; Rép., n° 161; Audit, nat., n° 614; J. Lois, n° 609; Débats, n° 617, p. 133; J. Matin, n° 708. Déjà quelques unes des sections de cette cité sont accourues vous apporter leur vœu, la section des Piques vient vous confirmer que le cri de ralliement des parisiens est : Force aux représentants du peuple français, fondateurs de la République une, indivisible et impérissable. Gloire immortelle à la Convention nationale, reconnaissance éternelle aux comités de salut public et de sûreté générale; mort aux tyrans ! telle est l’expression de nos cœurs enflammés d’un patriotisme qui ne s’éteindra qu’avec notre existence (1) . (On applaudit). 16 i La section de Châlier fait part des progrès qui se font appercevoir dans plusieurs ateliers de salpêtre qu’elle a établis, et félicite la Convention nationale sur ses immortels travaux; l’orateur dépose sur le bureau plusieurs ouvrages propres à l’esprit de morale et au culte dû à l’Etre Suprême, qui sont renvoyés au comité d’instruction publique (2) . La section a présenté 2 cavaliers et fourni 13 714 livres de salpêtre; elle en promet 3 000 par décade (3) . (On applaudit). La Convention nationale décrète la mention honorable et l’insertion au bulletin des adresses des jeunes citoyens de Villejuif, des habitans de la commune d’Aigue-Perse, des pompiers de Paris, des jeunes républicains et de la commune de Bourg-l’Egalité, des Défenseurs de la patrie et des sections des Piques et de Châlier, et les députations sont invitées aux honneurs de la séance (4) . 17 La commune de Sceaux présente à la Convention nationale les bustes des jeunes héros Barra et Viala, morts pour la patrie, etc. Elle présente la mère du jeune Barra, sa sœur et son frère. Sur la proposition d’un membre [CHARLIERJ, la Convention décrète que la famille du jeune Bara recevra l’accollade fraternelle du président, et sera placée à ses côtés. Ce décret est exécuté au milieu des plus vifs applaudissemens. Il est décrété en outre, qu’extrait du procès-verbal de ce jour sera expédié à la mère du jeune Barra et à la famille de Viala [et, sur la motion de RICHARD] qu’il sera aussi envoyé aux armées de la République. La députation de la commune de Sceau-l’Unité fait part à la Convention d’un trait vraiment républicain de la part d’un père de famille qui a été remplacer aux frontières son (1) C 306, pl. 1157, p. 26, signé Thiroux (présid.). (2) P.V., XXXVIII, 189. Audit, nat., n° 614; J. Matin, n° 708; Rép., n° 161; J. Lois, n° 609; Débats, n° 617, p. 133; M.U., XL, 174; Btn, 19 prair. (suppl1). (3) Ann. R.F., n° 181; J. Fr., n'> 613. (4) P.V., XXXVIII, 189. 112 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE fils qui avoit déserté de son poste. Elle dépose un échantillon de salpêtre et une statue à la vertu portée par un grouppe de jeunes citoyennes décorées de guirlandes et d’emblèmes révolutionnaires. La citoyenne Barra (1) reçoit l’accolade du président, et un autre grouppe d’élèves de la patrie lui présente une corbeille de fleurs, dans laquelle se trouvent deux tourtereaux. La Convention applaudit au zèle de la commune de Sceaux-l’Unité, et les bustes de Barra et Viala sont placés dans la salle de la Convention; la mention honorable et l’insertion au bulletin sont décrétées. (2). On admet dans la salle une députation de la commune et de la Société populaire de Sceaux-l’Unité. Les citoyens qui la composent portent les figures en pied représentant le jeune Barra et Agricole Viala. Des citoyens les accompagnent, tenant dans leurs mains des couronnes et des guirlandes, et soulevant une corbeille où sont, parmi les fleurs, deux tourterelles. (3). BUGRANGER, (maire) : Citoyens représentans, La commune de Sceaux-l’Unité, la Société populaire, son comité de surveillance, ont regardé comme un devoir de venir vous féliciter du mémorable décret par lequel le peuple français reconnait l’Etre Suprême et l’immortalité de l’âme. Ce décret, monument sublime de morale et de justice, appelle toutes les vertus à la garde de la République; utile et consolateur pour les habitans des cités, il était surtout nécessaire aux habitans des campagnes, à ces hommes en qui le travail nourrit l’amour de la patrie et qui conservent jusqu’au tombeau ces mœurs simples et rigides, pierres angulaires des Républiques; que leur faut-il, Législateurs ? De la terre et de la liberté, des loix pour vivre et Dieu pour mourir ! Nous les possédons ces biens, grâces immortelles vous soient rendues ! Jugez de notre douleur, lorsqu’à l’époque de vos plus grands bienfaits, nous avons appris que des monstres avaient osé concevoir le parricide projet d’assassiner la représentation nationale en attentant à la vie de deux de ses membres. L’horreur que ces crimes nous ont inspirée, augmente s’il est possible, notre amour, notre reconnaissance pour l’Etre Suprême qui n’a pas voulu que la patrie en deuil eût à pleurer de nouveaux martyrs; oui, c’est lui, n’en doutons point, c’est lui qui veille sur vous; vos loix et notre République sont le plus beau, le plus digne hommage qu’il ait encore reçu des humains; malgré la ligue des tyrans qui nous démontrent leur faiblesse en appelant à leur secours le crime, la République triomphe et chaque jour s’affermit. (1) Et non Paloi. (2) P.V., XXXVIII, 190. Minute de la main de Charlier (C 304, pl. 1123, p. 4). Décret n° 9325. Bln, 12 prair.; Débats, n08 617, p. 139 et 620, p. 196; Audit, nat., n08 614 et 618; J. Sablier, n° 1349; Rép., n° 192; J. Mont., n° 34; M.U., XL, 174; Mess, soir, n° 650; J. Paris, n° 518; J. Fr., n° 613; J. Univ., n° 1648; J. Lois, n° 609; Feuille Rép., n° 331; J. Matin, n° 708; J. S.-Culottes, n° 469; Ann. R.F., n° 182; J. Perlet, n° 615; C. Univ., 11 prair. (3) Mon., XX, 603. Poursuivez, Législateurs, achevez votre grand ouvrage et demeurez à votre poste jusqu’à ce que la liberté, l’égalité, le bonheur de tous, fondés sur la base inébranlable des loix, vous permettent d’aller jouir de la félicité que vous avez créée. Vive la République ! (1). A la suite de ce discours, un membre de la Société populaire prend la parole et s’exprime ainsi : L’ORATEUR : Citoyens représentans, Les sentimens que la commune de Sceaux-l’Unité vient d’exprimer à votre barre étant ceux que nous nous glorifions de professer, la Société populaire de cette commune dont je suis l’organe, eut gardé le silence et respecté vos moments précieux s’il ne lui restait à remplir envers vous un devoir bien doux à son cœur. Occupés sans relâche à l’instruction de la jeunesse et à faire germer dans leurs cœurs les vertus républicaines que vous avez mises à l’ordre du jour, et empressés de présenter à leurs regards les traits chers des deux héros que la reconnaissance a placés au Panthéon et dont le souvenir vivra éternellement dans le cœur des républicains. Les voilà ces deux jeunes guerriers, ces héros intrépides qui n’ont point trouvé de modèle dans les Républiques anciennes mais qui auront beaucoup d’imitateurs au sein de la nation française. Présenter à vos regards l’image chérie du jeune Barra et d’ Agricole Viala, c’est vous offrir un spectacle bien doux et c’est vous rappeler le souvenir de leurs actions immortelles. Pères de la patrie, à ces traits reconnaissez des enfants qui se sont montrés dignes de vous. Voyez le jeune Barra, le sabre à la main, surpris mais conservant dans les bras mêmes de la mort la fierté et l’attitude d’un républicain. Voyez Agricole Viala, ses yeux pétillent encore de ce bouillant courage et de cette mâle intrépidité qu’il déploya sur les bords de la Durance en présence des infâmes fédéralistes, percé du coup mortel qui lui arracha la vie, après avoir essuyé sans sourciller six décharges d’artillerie et de mousqueterie; vous le voyez prononcer, avec le sang froid de l’héroïsme et de l’intrépidité ses dernières paroles; « Ils ne « m’ont pas manqué, mais cela m’est égal, je « meurs pour la liberté ». Citoyens représentants, nous eûmes le bonheur de posséder hier dans notre sein la mère, le frère et la sœur de l’immortel Barra, nous nous sommes empressés de les accompagner à votre barre. Vous la voyez devant vous cette vertueuse républicaine qui a donné le jour à ce jeune héros et qui lui a fait sucer avec le lait l’amour de la patrie et des vertus qu’il a su si bien mettre en pratique... CHARLIER : Je demande que, pour honorer la vertu, la mère de Barra monte, avec ses 2 enfants, à côté du président. (La famille de ce jeune héros est auprès du président. Des applaudissements unanimes s’élèvent et se prolongent dans toutes les parties de la salle) (2) . (1) C 305, pl. 1144, p. 32. (2) Mon., XX, 604. 112 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE fils qui avoit déserté de son poste. Elle dépose un échantillon de salpêtre et une statue à la vertu portée par un grouppe de jeunes citoyennes décorées de guirlandes et d’emblèmes révolutionnaires. La citoyenne Barra (1) reçoit l’accolade du président, et un autre grouppe d’élèves de la patrie lui présente une corbeille de fleurs, dans laquelle se trouvent deux tourtereaux. La Convention applaudit au zèle de la commune de Sceaux-l’Unité, et les bustes de Barra et Viala sont placés dans la salle de la Convention; la mention honorable et l’insertion au bulletin sont décrétées. (2). On admet dans la salle une députation de la commune et de la Société populaire de Sceaux-l’Unité. Les citoyens qui la composent portent les figures en pied représentant le jeune Barra et Agricole Viala. Des citoyens les accompagnent, tenant dans leurs mains des couronnes et des guirlandes, et soulevant une corbeille où sont, parmi les fleurs, deux tourterelles. (3). BUGRANGER, (maire) : Citoyens représentans, La commune de Sceaux-l’Unité, la Société populaire, son comité de surveillance, ont regardé comme un devoir de venir vous féliciter du mémorable décret par lequel le peuple français reconnait l’Etre Suprême et l’immortalité de l’âme. Ce décret, monument sublime de morale et de justice, appelle toutes les vertus à la garde de la République; utile et consolateur pour les habitans des cités, il était surtout nécessaire aux habitans des campagnes, à ces hommes en qui le travail nourrit l’amour de la patrie et qui conservent jusqu’au tombeau ces mœurs simples et rigides, pierres angulaires des Républiques; que leur faut-il, Législateurs ? De la terre et de la liberté, des loix pour vivre et Dieu pour mourir ! Nous les possédons ces biens, grâces immortelles vous soient rendues ! Jugez de notre douleur, lorsqu’à l’époque de vos plus grands bienfaits, nous avons appris que des monstres avaient osé concevoir le parricide projet d’assassiner la représentation nationale en attentant à la vie de deux de ses membres. L’horreur que ces crimes nous ont inspirée, augmente s’il est possible, notre amour, notre reconnaissance pour l’Etre Suprême qui n’a pas voulu que la patrie en deuil eût à pleurer de nouveaux martyrs; oui, c’est lui, n’en doutons point, c’est lui qui veille sur vous; vos loix et notre République sont le plus beau, le plus digne hommage qu’il ait encore reçu des humains; malgré la ligue des tyrans qui nous démontrent leur faiblesse en appelant à leur secours le crime, la République triomphe et chaque jour s’affermit. (1) Et non Paloi. (2) P.V., XXXVIII, 190. Minute de la main de Charlier (C 304, pl. 1123, p. 4). Décret n° 9325. Bln, 12 prair.; Débats, n08 617, p. 139 et 620, p. 196; Audit, nat., n08 614 et 618; J. Sablier, n° 1349; Rép., n° 192; J. Mont., n° 34; M.U., XL, 174; Mess, soir, n° 650; J. Paris, n° 518; J. Fr., n° 613; J. Univ., n° 1648; J. Lois, n° 609; Feuille Rép., n° 331; J. Matin, n° 708; J. S.-Culottes, n° 469; Ann. R.F., n° 182; J. Perlet, n° 615; C. Univ., 11 prair. (3) Mon., XX, 603. Poursuivez, Législateurs, achevez votre grand ouvrage et demeurez à votre poste jusqu’à ce que la liberté, l’égalité, le bonheur de tous, fondés sur la base inébranlable des loix, vous permettent d’aller jouir de la félicité que vous avez créée. Vive la République ! (1). A la suite de ce discours, un membre de la Société populaire prend la parole et s’exprime ainsi : L’ORATEUR : Citoyens représentans, Les sentimens que la commune de Sceaux-l’Unité vient d’exprimer à votre barre étant ceux que nous nous glorifions de professer, la Société populaire de cette commune dont je suis l’organe, eut gardé le silence et respecté vos moments précieux s’il ne lui restait à remplir envers vous un devoir bien doux à son cœur. Occupés sans relâche à l’instruction de la jeunesse et à faire germer dans leurs cœurs les vertus républicaines que vous avez mises à l’ordre du jour, et empressés de présenter à leurs regards les traits chers des deux héros que la reconnaissance a placés au Panthéon et dont le souvenir vivra éternellement dans le cœur des républicains. Les voilà ces deux jeunes guerriers, ces héros intrépides qui n’ont point trouvé de modèle dans les Républiques anciennes mais qui auront beaucoup d’imitateurs au sein de la nation française. Présenter à vos regards l’image chérie du jeune Barra et d’ Agricole Viala, c’est vous offrir un spectacle bien doux et c’est vous rappeler le souvenir de leurs actions immortelles. Pères de la patrie, à ces traits reconnaissez des enfants qui se sont montrés dignes de vous. Voyez le jeune Barra, le sabre à la main, surpris mais conservant dans les bras mêmes de la mort la fierté et l’attitude d’un républicain. Voyez Agricole Viala, ses yeux pétillent encore de ce bouillant courage et de cette mâle intrépidité qu’il déploya sur les bords de la Durance en présence des infâmes fédéralistes, percé du coup mortel qui lui arracha la vie, après avoir essuyé sans sourciller six décharges d’artillerie et de mousqueterie; vous le voyez prononcer, avec le sang froid de l’héroïsme et de l’intrépidité ses dernières paroles; « Ils ne « m’ont pas manqué, mais cela m’est égal, je « meurs pour la liberté ». Citoyens représentants, nous eûmes le bonheur de posséder hier dans notre sein la mère, le frère et la sœur de l’immortel Barra, nous nous sommes empressés de les accompagner à votre barre. Vous la voyez devant vous cette vertueuse républicaine qui a donné le jour à ce jeune héros et qui lui a fait sucer avec le lait l’amour de la patrie et des vertus qu’il a su si bien mettre en pratique... CHARLIER : Je demande que, pour honorer la vertu, la mère de Barra monte, avec ses 2 enfants, à côté du président. (La famille de ce jeune héros est auprès du président. Des applaudissements unanimes s’élèvent et se prolongent dans toutes les parties de la salle) (2) . (1) C 305, pl. 1144, p. 32. (2) Mon., XX, 604.