[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, i *} bramairè an il 521 (19 novembre 1793 ministration refuse de reconnaître la Convention depuis les journées des 31 mai et 2 juin dernier; il était alors absent de Taraseon. Il avoue avoir signé quelques arrêtés en qualité de pro¬ cureur syndic; mais ces arrêtés n’avaient que la tranquillité publique pour objet. Il ne tarda pas à s’apercevoir des vues criminelles des admi¬ nistrateurs, et, dès ce moment, il fut obligé de se soustraire par la fuite à leur vengeance. Sa retraite ayant été découverte, il fut saisi, chargé de fers et traîné dans les prisons de Mar¬ seille. Arraché de cette prison par le général Carteaux, il fut de nouveau incarcéré dans la ville de Lyon et délivré par l’armée de la Répu¬ blique. « Ce qui peut, ajoute Bernard, avoir donné heu à cette inculpation, c’est que le secré¬ taire de l’Administration du district de Taraseon porte mon nom; mais pour moi, je n’ai jamais cessé d’être attaché à la Convention, à la Mon¬ tagne. » Poultier parle en faveur de Bernard. Il rend justice à son patriotisme et assure que ses dénonciateurs jouissent d’une très mauvaise réputation, et que l’un d’entre eux est un fort mauvais prêtre. Merlin (de Douai), Montaut, Charlier observent qu’il existe de grands coupables dans cette affaire, et pour que la justification de Bernard soit plus éclatante, ils s’accordent à demander que Bernard et ses dénonciateurs soient mis en état d’arrestation, que les pièces originales soient envoyées au comité de sûreté générale, chargé de vérifier la signature et de faire incessamment un rapport. Ces propositions sont décrétées D. Compte rendu du Journal de la Montagne (1). Monnel, membre du comité des décrets, donne lecture de plusieurs pièces envoyées par le district de Taraseon, contre Marc-Antoine Bernard, suppléant de l’infâme Barbaroux, et admis comme député des Bouches-du-Rhône. Une de ces pièces est une protestation de ne plus reconnaître la Convention nationale, rédi¬ gée par le district, le 27 juin, et signée Bernard. Celui-ci nie le fait et soutient que ce qui a pu servir de prétexte à la calomnie, c’est que le secrétaire du district de Taraseon porte le même nom que lui II offre d’ailleurs de prouver son alibi, et rappelle les sacrifices qu’il a faits, les persécutions qu’il a bravées, les diverses prisons où il a été jeté, pour avoir défendu la représentation nationale et la Montagne. Poultier, nouvellement arrivé d’Avignon, où il était à portée de s’instruire des faits, assure que, dans le pays, Bernard a toujours été eu butte à l’aristocratie, qui l’avait surnommé Marat ; que son patriotisme fortement prononcé lui a suscité nombre d’ennemis, et que les calom¬ nies, dont il a heu de se plaindre en ce moment, sont l’ouvrage d’un prêtre, nommé Moche, qui, chassé d’Avignon pour cause de fédérahsme, s’est mis à accuser à tort et à travers pour recré¬ pir sa réputation aux dépens d’autrui. On interpelle Bernard de répondre par oui ou par non sur la question : s’il a signé l’acte (1) Journal de la Montagne [n° 7 du 30e jour du 2e mois de l’an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 55, col. 1]. portant serment de ne plus reconnaître la Con¬ vention. Il affirme de nouveau que non seulement il ne l’a pas signé, mais qu’il ne l’a pu signer, étant alors absent de Taraseon, et qu’il n’est rien de plus aisé à constater, puisque l’acte, dont il s’agit, se passa en présence de toute la commune. Charlier demande que le dénoncé et les dé¬ nonciateurs soient provisoirement mis en arres¬ tation, et que les originaux des pièces qui ont été lues soient incessamment apportés au comité de sûreté générale, pour reconnaître quels sont ceux qui doivent être hvrés au glaive de la loi. (Adopté.) Bernard sera mis en état d’arrestation chez lui. E. Compte rendu du Journal de Berlet (1). Le comité de sûrete générale a été chargé de prendre des renseignements sur tous les sup¬ pléants qui, depuis le 31 mai, ont remplacé les députés chassés de la Convention. Il présente plusieurs dénonciations graves contre Bernard, de Taraseon, département des Bouches-du-Rhône, qui est venu prendre la place de Barbaroux. Bernard est accusé d’avoir signé des protestations contre le 31 mai et jours suivants, et d’autres arrêtés tendant à provoquer le fédérahsme. Il présente avec beaucoup de chaleur ses motifs de justification. Il se plaint d’abord d’une erreur de nom; il parle d’un alibi; il cite des attestations qui por¬ tent qu’il a chéri la Révolution et défendu la Convention ; il trace le tableau des persécutions qu’il a essuyées de la part des fédéralistes. Les larmes qu’il mêle à son apologie allaient entraîner la Convention, mais Merlin et Mon¬ taut réduisent la question à ces simples termes : « Bernard a-t-il, ou non, signé une protestation contre le 31 mai? » La Convention décrète que Bernard et ses dénonciateurs seront mis en état d’arrestation jusqu’à ce que les faits aient été constatés. Les dénon aticeurs sont Mauge et Fabre, de Taraseon. Ils ont été assez maltraités dans le cours de cette discussion. annexe n° 3 à la séance de la Convention nationale du *# liminaire an 11 (Mardi, 19 Novembre 4 903). Pièces annexes au décret ordonnant l’ar¬ restation de Mi arc-Antoine Bernard, député des Bouches-du-BSkône (9). A. Dénonciation de Qoupilleau (de Montaigu) contre Bernard (3). « Arles, le 17e du mois de brumaire de l’an II de la Répubhque française. « Quoique la Convention, citoyens amis et collègues, ne m’ait envoyé dans ce pays que pour (1) Journal de Perlel [n° 424 du 30 brumaire an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 403]. (2) Voy. ci-dessus, même séance, p. 506, le décret ordonnant l’arrestation de Marc-Antoine Bernard. (3) Archives nationales, carton Dm 344, dossier ARCHIVES PARLEMENTAIRES. zy Drumaire an il 19 novembre 1793 522 [Convention nationale.! une levée extraordinaire de chevaux, je n’en songe pas moins aux hommes et à tout ce qui peut compromettre le salut de la République. J’ai fait part de mes observations au comité de Salut public, je lui ai dit qu’il ne fallait pas s’endormir sur la situation actuelle des dépar¬ tements méridionaux, que les chiffonniers d’Ar¬ les, les contre-révolutionnaires d’Avignon, les muscadins qui s’étaient échappés de Lyon, quel-ues débris de l’armée contre-révolutionnaire e Chartier, une foule d’aristocrates de toutes couleurs avaient des points de ralliement du côté de Nîmes et de Millau, et que si nous n’y prenions garde, nous verrions encore se former un nouveau camp de Jalès; rappelez-lui, je vous prie, mes observations, et prenez des mesures en conséquence si elles n’ont déjà été prises. En¬ courageons les sociétés populaires; elles fomen¬ tent l’esprit public dans ces contrées ; encoura¬ geons les nouveaux corps administratifs, ils com¬ mencent à être à la hauteur de la Révolution; mais point de modérantisme, point de quartier aux gens suspects ; soyons fermes encore quelque temps et la liberté ne trouvera plus d’obstacles. « L’intention de la Convention, mes chers collègues, en se débarrassant d’une foule de coquins qui siégeaient dans son sein, n’a pas été, sans doute, de les faire remplacer par d’autres traîtres à la patrie. Cependant vous verrez par les pièces ci-jointes qu’il y en existe un contre lequel il faut que vous provoquiez sur-le-champ la vengeance nationale. « Vous verrez par ces pièces que Marc-An¬ toine Bernard, député suppléant des Bouches-du-Rhône, actuellement siégeant à la Conven¬ tion, qui exerçait par intérim, à Tarascon, les fonctions de procureur syndic du district, a fait rendre, sur son réquisitoire, tous les arrêtés berticides qui coïncideraient avec ceux des trop fameux sectionnaires de Marseille ; que c’est lui qui a provoqué la force armée départe¬ mentale ; que c’est lui qui a fait prêter et qui a prêté lui-même le serment de méconnaître l’autorité de la Convention nationale et tous les décrets qui en étaient émanés depuis le 31 mai, etc., etc. « Faites-en bonne et prompte justice. « J’ai laissé, en partant de Nice, le roi des mar¬ mottes et ses satellites dans la neige jusqu’au ventre, et mourant de faim; nos grand’routes sont couvertes de ses prisonniers et de ses déser¬ teurs. « L’armée de Lyon est devant Toulon, notre grosse artillerie achevait de s’y rendre lorsque je passai à Aix; jamais on n’a vu de préparatifs plus formidables et il n’est pas possible que Toulon tienne à une attaque générale. « Courage de lions, mes amis, encore un peu de persévérance, et les despotes coalisés nous de¬ manderont la paix. « Si je puis être de quelque utilité à la Répu¬ blique en ce pays -ci dans le peu de temps que j’ai à y rester, disposez de moi. « Salut, amitié et fraternité. « Ph. -Ch. -A-Goupille au. » Bernard. Cette lettre ne figure pas dans le Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public de M. Aulard. B. Extrait des registres de l'Administration du district de Tarascon, département des Bouches-du-Bhône (1). Séance publique et permanente du 12e juin 1793, l’an II de la République. Les trois sections assemblées en permanence dans le Heu ordinaire delà section n° 2, ont unani¬ mement déÜbéré d’inviter le district de requérir sur-le-champ la force armée de Beaucaire. Fait en séance permanente à Tarascon, les jour et an que dessus. Signé : Couru ON, président; Jaramy fils, secrétaire . Vu par nous, membres du comité général des sections de cette ville de Tarascon, en séance permanente, le 13 juin 1793, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. Signé : Benoît, Rey, président en absence, Rausty fils et Veray. Vu la présente réquisition des trois sections réunies des citoyens de cette ville de Tarascon assemblées en permanence, apportée au Heu des séances de l’Administration par une dépu¬ tation de ces trois sections, et le vu des membres du comité général desdites sections mis à la suite de ladite réquisition ; Ouï le procureur syndic en remplacement; L’Administration en surveillance permanente et en séance pubHque; Considérant les dangers actuels et imminents de la circonstance dont cette ville est menacée et considérant que sa sûreté générale exige les moyens les plus pressants et les plus extraordi¬ naires; Arrête de requérir et requiert l’Administration du district et les maires et officiers municipaux de la ville de Beaucaire de faire sans délai et tout de suite partir et faire parvenir en la ville de Tarascon les cent cinquante volontaires du département du Tarn qui s’y trouvent en gar¬ nison, la compagnie des canonniers de Beau¬ caire avec deux pièces d’artillerie, et la prions et chargeons par tous les moyens que la loi met en notre pouvoir de donner aux citoyens de Tarascon les secours instants dont la sûreté générale a le plus grand besoin, et qu’elle attend de leur zèle, de leur fraternité et de leur attache¬ ment aux lois de la République une et indivi¬ sible. Fait à Tarascon, en l’Administration réunie avec les commissaires députés par le départe¬ ment des Bouches-du-Rhône et les 32 sections de la ville de Marseille, le 12 juin à sept heures du de soir, 1793, an II de la République, une et indivisible. Signé : Joseph Stafford, président de la députation; Barbeau fils, commissaire se¬ crétaire; Moubiæt-Gras, président; Mar¬ tin, Peyre, Martin, André Isnard; Gi¬ raud on, Bernard, procureur syndic en remplacement. Certifié conforme : Fournials, secrétaire en absence. (1) Archives nationales, carton Dm 344, dossier Bernard.