[Assemblée nationale.] ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 25 JANVIER 1791. Lettre de M. GRIOLET, 'procureur général syndic dudépartement du Gard, suivie d'une proclama-tion du directoire du département du Gard sur le serment à prêter par les évêques, curés et autres ecclésiastiques fonctionnaires publics (1). Monsieur le Président, Les ennemis du bien public ont répandu dans cette contrée des écrits incendiaires au sujet du serment à prêter par les ecclésiastiques fonctionnaires publics, et on n’a négligé aucun moyen de tromper le peuple sur les véritables intentions de tromper [l’Assemblée nationale ; une chose bien remarquable, c’est que ces manœuvres criminelles, et les refus des curés ont lieu surtout dans les parties du département où il existe des protestants, et par conséquent où l’on a l’espérance d’allumer une guerre religieuse. J’apprends que dans les districts qui sont entièrement catholiques, la plupart des ecclésiastiques ont prêté le serment sans difficulté et que d’autres s’y disposent. Ces circonstances ont nécessité une proclamation dont j’ai l’honneur de vous envoyer des exemplaires, et que je vous prie de mettre sous les yeux de l’Assemblée nationale. Nous avons cru devoir dire toutes vérités avec courage et les exprimer avec cette simplicité qui est à la portée du peuple. Comme le directoire avait connaissance d’un refus combiné de cesser tout service divin, après l’expiration de la fatale huitaine, nous avous ordonné que tous les ecclésiastiques continueraient le service jusqu’à ce qu’ils fussent remplacés; cet ordre les contiendra. Quelque difficiles que soient nos circonstances particulières, l’Assemblée nationale peut compter sur notre dévouement absolu, que nous regardons comme notre premier devoir. Je suis, etc. Signé : GRIOLET, P. G. S. Proclamation du directoire du département du Gard sur le serment à prêter par les évêques , curés et autres ecclésiastiques fonctionnaires publics. Citoyens, Redoublez de fermeté et de patriotisme; les ennemis de la chose publique espèrent, en trompant votre piété, en alarmant vos consciences, exciter des désordres qui favoriseront leurs intérêts. L’Assemblée nationale a décrété, et le roi a voulu que les évêques, les curés, les vicaires et tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics prêtassent le serment de veiller avec soin sur les fidèles du diocèse ou de la paroisse qui leur est confiée, d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout leur pouvoir la Gons-(1) Nous empruntons ce document au journal Lc'JPoint-du-Jour , t. XVIII, pt 397. 493 titution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi. Ce serment civique qui lie les pasteurs aux intérêts de leur troupeau, et auquel de toutes parts se sont soumis des ecclésiastiques respectables, devient un objet de scandale pour quelques prêtres trompés, ou dont les intentions sont criminelles. On dit que l’Assemblée nationale a touché aux choses spirituelles, tandis qu’elle a déclaré, et qu’il est évident, que ces décrets ne portent que sur des objets purement temporels. On dit que la majesté de l’Eglise est détruite, tandis que nous allons voir revivre ses premières institutions, qui la rendirent si florissante dans les jours de sa pureté et de sa gloire, tandis que tout ce que l’Assemblée nationale a décrété, s’observait du temps des plus saints personnages. Tous les dogmes de l’Eglise catholique, apostolique et romaine sont respectés. La discipline est conservée. L’union avec le pape, avec le chef visible de l’Eglise est maintenue. Vous élirez vous-mêmes vos évêques et vos curés, afin que les plus dignes de votre confiance remplissent ces places éminentes. C’est ainsi qu’en usaient les premiers fidèles, et alors les pères de l’Eglise occupaient les sièges épiscopaux. Il est vrai que les revenus de3 évêques sont réduits, que les chanoines, les abbés coraman-dataires, les gros bénéficiers sont supprimés. Il est vrai que les dîmes, ces prémices de vos champs, les dîmes dont la suppression est le plus grand bienfait pour les campagnes, ne feront plus la richesse d’un prêtre oisif. Mais vos curés et vos vicaires auront un traitement digne de leurs fonctions sacrées, et les prêtres qui travaillent seront récompensés par la nation . Mais vos églises, mais les frais du culte ne seront plus laissés à l’avarice d’un décimateur et l’Etat y pourvoira avec majesté. On a réduit ou augmenté, selon l’intérêt public, l’étendue des diocèses, afin qu’il n’arrive plus qu’un évêque soit chargé de 700 paroisses et qu’un autre n’en administre que 20. On veut proportionner les paroisses entre elles, afin que chaque curé puisse remplir convenablement ses fonctions; on ne permettra plus qu’un seul homme fasse le service de deux prêtres et l’on vous donnera tous les pasteurs nécessaires à vos besoins. Citoyens, ce ne sont là que des opérations temporelles; il n’est aucun de vous qui ne puisse en juger d’après le bon seas et d’après l’évangile. La foi n’y est point intéressée; elle n’en sera que plus respectable, le culte ne sera que mieux ordonné. Ceux qui vous disent le contraire, veulent alarmer la simplicité de vos consciences; ou, s’ils sont de bonne foi, ils s’égarent étrangement. Et vous, prêtres vénérables 1 qui êtes soumis à la loi parce que vous savez être bons chrétiens et bons Français, vous qui n’avez pas regretté les dîmes et que l’ambition ne fait pas agir, recevez ici les témoignages de la reconnaissance publique. Et vous, qu’arrête encore une piété trompée! si vous aimez vraiment la religion, pratiquez ce précepte d’un saint évêque, cette maxime de saint Augustin : « Pourvu que le culte du vrai Dieu ne soit pas empêché, la religion observe toutes les lois qui peuvent contribuer à acquérir ou à posséder la paix de la terre. » La présente proclamation sera lue, publiée et ARCIIIVES PARLEMENTAIRES. [25 janvier 1791.] 494 �Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 126 janvier 1791.] affichée dans tout le ressort, à la diligence du procureur général, des procureurs syndics et des procureurs des communes. Et, en outre, le directoire déclare que les ecclésiastiques, fonctionnaires publics, qui n’auront pas prêté le serment civique dans les délais prescrits, doivent continuer le service divin, à peine d’en être responsables, jusqu’à ce qu’il ait été pourvu à leur remplacement en la forme de droit. Donné à Nîmes, le 15 janvier 1791. Signé : P. Vigier, président du directoire, Bara-gnon, LeCointe, J. Julien, Treljs, P. David , Bois-itère , Rigal , secrétaire général. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. L’ABBÉ GRÉGOIRE. Séance du mercredi 26 janvier 1791 (1). La séance est ouverte à 9 heures 1/2 du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, qui est adopté. M. le Président fait part à l’Assemblée de deux lettres de M. de Fleurieu, ministre de la marine. L’objet de la première est une demande faite par MM. Deshayes, lieutenant général des armées navales; d’Apchon et Casteliet, chefs d’escadre, absents du royaume, pour raison de santé, de conserver leurs appointements. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette lettre au comité des pensions.) La seconde est relative aux sommes nécessaires our le service du port de Cherbourg. (L’Assem-lée en ordonne le renvoi, ainsi que de l’état y annexé, au comité de marine.) M. le Président annonce qu’il a reçu la prestation de serment de M. Pierre Pauly, consul de la nation française dans la Norvège. 11 est donné lecture d’une pétition de la section de Mauconseil, qui a pour but d’astreindre au serment des ecclésiastiques fonctionnaires publics, tous les préposés à l’éducation gratuite. (Cette pétition est renvoyée au comité de Constitution.) M. Protot fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage sur l’établissement de maisons de secours. M. Vernier, au nom du comité des finances, résente un projet de décret concernant le rem-oursement des dépenses faites par le détache-chement de la garde nationale de Lyon, qui a accompagné jusqu’à Paris MM. Guillin, Terrasse et Descart. Le décret est rendu dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances sur l’état présenté par le détachement de la garde nationale, qui a conduit des prisons de Lyon eu celles de l’abbaye Saint-Germain à Paris, les sieurs Guillin, Terrasse et Descart; ledit état vérifié et approuvé par le comité des recherches, décrète qu’il sera payé audit détachement la somme de 4,720 1. 8 s., formant le montant dudit état. » (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. M. Vernier propose un décret relatif à l’établissement des foires et marchés demandés par la paroisse de Montoire, district de Guérande, département de la Loire-Inférieure. (L’Assemblée en ordonne le renvoi au comité de Constitution.) M. Prugnon, au nom du comité de l'emplacement des tribunaux et corps administratifs, présente un projet de décret pour le placement du district et du tribunal de Corbeil. Ce décret est adopté comme suit ; « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement des tribunaux et corps administratifs, autorise le district de Corbeil à acquérir, aux frais des administrés, la maison du prieuré de Saint-Guenault et ses dépendances, pour y former son établissement, ainsi que celui du tribunal, en observant les formes prescrites par les décrets rendus pour l’aliénation des domaines nationaux ; l’autorise également à faire procéder aux arrangements intérieurs et réparations strictement nécessaires à cet établissement, à la charge d’adjudication au rabais, pour le montant de la même adjudication être légalement supporté par les administrés. » M. Prugnon, au nom du comité d'aliénation , propose la vente de biens nationaux à diverses municipalités. Le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l’aliénation des domaines nationaux, des soumissions faites par les municipalités de Dôle, Nantua, Gourgeon, Anchenoncourt, Polaincourt, Preigney, Charmes-Saint-Valbert, Francour etLure, en exécution des délibérations prises par le conseil généralde leur commune pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont les états sont annexés à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des évaluations et estimations faites desdits biens, en conformité de l’instruction décrétée le 31 dudit mois de mai dernier; « Déclare vendre lesdits biens auxdites municipalités, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai 1790, et pour le prix de 1,750,3191. 8 s. 9 d. ; Savoir : à la municipalité de Dôle, département « Le tout payable de la manière déterminée par le même décret, et suivant les décrets particuliers qui sont annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. » M. Gossin, au nom du comité de Constitution , fait le rapport des pétitions des corps administratifs des départements du Var, de l’Ardèche, des