562 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 janvier 1791.] extrait d’un bref qu'ils supposent adressé par le pape à notre roi. ■< Nous ne doutons point que, comme prince temporel, et peut-être comme homme, le pape ne regrette les sommes immenses que la France lui fournissait chaque année, et qui alimentaient le luxe de sa cour; mais, comme chrétien comme successeur des apôtres, comme chef de l’Eglise, il ne peut qu’applaudir à la pureté des règles que l’Assemblée nationale a rétablies, et qui ont été celles de la primitive Eglise, celles des premiers conciles, celles des Saints Pères, et dont on ne s'était écarté que par des abus dont les vrais fidèles, les plus grands saints avaient toujours gémi. « Ces abus ne tenaient point à la foi, qui s’est conservée pure parce qu’elle est l’ouvrage de Dieu; ils ont donc pu être retranchés sans nuire à cette foi divine à laquelle nous sommes tous invariablement attachés, et que nous soutiendrons au péril même de notre vie. « Sachons donc, chers concitoyens, nous conduire tout à la fois en bons chrétiens et en Français fidèles. Imitons un de nos plus grands rois, saint Louis, qui, aussi distingué par sa piété que par ses vertus héroïques, sut opposer une bar ri ère insurmontable aux entreprises et à l’ambition delà cour de Rome, C’est des ordonnances de ce grand prince qu’ont été tirés les principaux articles de ce décret, que des prêtres osent actuellement taxer d’impiété. « Après vous avoir avertis des préparatifs que l’on fait contre vous au dehors* et qui ne peuvent être à craindre qu’autant qu’ils seraieüt secondés au dedans par ceux que l’on cherche à séduire, voici quel est, pour y parer, le devoir de tout citoyen : « D’abord , les municipalités doivent veiller avec attention sur toutes les manœuvres qui pourraient se pratiquer dans leur ressort, et avertir aussitôt le directoire de tous les objets importants qui seraient venus à leur connaissance; elles doivent, surtout, veiller à ce qu’il ne se glisse dans leurs communes aucun embaucher, et les faire arrêter s’il s’en trouve. « Celles qui sent plus rapprochées des frontières doivent observer plus particulièrement les démarches hostiles, se faire représenter les passeports des personnes suspectes, et envoyer au directoire les noms de ceux de leur commune, s’il en existe, connus pour être passés en pays étranger, et avoir pris des engagements avec les ennemis de la Révolution; Elles doivent avertir ceux de leurs citoyens qui ont des armes, de les tenir en état. « Si, par les dispositions qu’elles verront régner parmi leurs habitants, elles avaient lieu de soupçonner que la prestation du serment pût être accompagnée de quelque trouble, il serait prudent qu'elles fissent tenir sous les armes un certain nombre de citoyens qui, par leur fermeté et leur modération, maintiendraient l’ordre et la tranquillité. Il est aussi de leur devoir de ne recevoir aucun serment que dans la forme et les termes prescrits par le décret du 27 novembre dernier, sanctionné le 26 décembre, sans permettre que l’on y ajoute ni condition ni restriction. « Enfin, tous les citoyens doivent se réunir pour le soutien de la loi, se distinguer par leur obéissance à ceux qui en sont les organes, et éviter tout excès envers ceux des ecclésiastiques qui pourraient se refuser à la prestation du serment. La moindre violence envers eux rendrait cvs rebelles à la volonté nationale intéressants aux yeux de la superstition ; les perturbateurs du repos public les décoreraient du beau nom de martyrs de la religion, tandis qu’ils n’auraient été que les victimes de leur orgueil et de leur opiniâtreté. La persécution anime et soutient le fanatisme ; la tolérance le détruit. « Voilà, citoyens, les sentiments qui doivent tous nous animer, et qui nous garantiront des dangers que la discorde amènerait sur ses pas. Tant que nos ennemis nous verront réunis par l’amour de la patrie et l’obéissance à la loi, ils n'oseront jamais attaquer une nation qui a toujours été distinguée par sa valeur, et que la défense d’une cause commune et aussi juste rendra toujours invincible. « Vu la présente, le directoire a arrêté qu’eile serait envoyée et publiée aux communes assemblées, à la diligence des municipalités ; que copies en seront envoyées à l’Assemblée nationale et aux autres départements du royaume. » i Signé : SEGUIN, président ; « Couthaud, secrétaire. « Besançon, le 19 janvier 1791. » Un membre demande que l’Assemblée veuille bien témoigner d’une manière toute particulière sa satisfaction des sentiments exprimés dans cette adresse; il observe que cela est d’autant plus nécessaire qu’une foule de libelles ont été distribués dans ce département pour détourner les ecclésiastiques de prêter le serment que leur conscience et leur honneur leur prescrivaient. M. de Mailly de Château-Renaud appuie cette demande de faits particuliers ; il annonce que l’évêque de ce département a été dénoncé à l’accusateur public de la manière la plus précise et que le tribunal est saisi de la connaissance de cette affaire. (L’Assemblée décrète que cette lettre sera imprimée, insérée dans le procès-verbal et distribuée à chacun de ses membres.) M. Thibault, curé de Souppes , annonce à l’Assemblée que tous les curés du diocèse de Valence ont prêté Je serment prescrit par la loi du 26 décembre dernier. M. Camus. Messieurs, quelques difficultés se présentent pour le remplacement de M. Poignot, député de Paris, décédé depuis quelques jours. Le premier suppléant est M. Vauvilliers; le second, M. Delavigne, l’un des juges des tribunaux de Paris. Non seulement, M. Vauvilliers ne s’est pas présenté, mais M. Delavigne a été lui demander réponse et né l’a pas eue. Il est question de savoir ce qu’on doit faire en pareil cas. Je ne vois pas nécessaire, dès que M. Poignot est mort à Paris, d’employer les formes judiciaires pour le notifier à M. Vauvilliers. Gependaut la place ne doit pas demeurer vacante et, puisqu’il ne se présente pas, il me sqmble que c’est à M. Delavigne à prendre la place. M. Thibault, curé de Souppes. G’est sur la réquisition d’un très grand nombre de députés de Paris que M. Delavigne s’est présenté au comité de vérification ; il y a exposé ses demandes vis-à-vis de M. Vauvilliers. Cependant le comité, n’en ayant point de connaissance légale et officielle, croit devoir, au préalable, consulter l’Assemblée sur le moyen de constituer en demeure les suppléants qui ne se présentent pas.