(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 août 1790.] est notre premier besoin, l’ordre sans lequel la liberté n’est qu’une chimère; l’ordre sans lequel la liberté nous échappera bi n tôt ; car jamais ou n’est plus près du despotisme que dans les temps d’unaichie. Je viens maintenant, Messieurs, à ce qui fait l’objet des deux lettres que vous venez d’entendre. Pour Metz, la conduite que vous avez à tenir est déjà tracée par celle que vous avez tenue pour la garnison de Nancy. Veuillez fermement que l’ordre se rétablisse, et l’ordre se rétablira. Votre décret sera exécuté à Nancy, parce qu’il a é'é rendu à l’unanimité ; que l’Assemblée nationale, toujours ferme, toujours grande, surtout dans les moments de péril, ordonne à son président de se retirer dès ce soir vers le roi, et de lui demander de faire exécuter à Metz le décret que je vous supplie de rendre ; qu’il dise surtoutàSa Majesté que ses ministres seront très rigoureusemeni responsables de l’exécution des ordres qu’ils recevront. Si vous le voulez, Messieurs, lesseuls agents de l’autorité seront coupables ; et je déclare que s’ils mettent de la lenteur ou de la faiblesse dans l’exécution des ordres du roi, c’est moi qui les dénoncerai. Voire décret, j’ose vous en répond te, sera exécuté à Metz, et M. de Bouille (calomnié, peut-être, mais certainement l’un de nos meilleurs généraux) saura faire obéir aux lois. M. Enamery, comme représentant de la nation, comme membre du comité militaire, comme Messin, comme père de famille, j’ai le plus grand intérêt à sauver ma patrie, ma femme et mes enfants du danger qui les menace; mais comme membre du comité militaire, je sais que les décisions précipitées manquent presque toujours des mesures qui les font réussir. Je demande donc que l’affaire soit renvoyée au comité militaire, pour en rendre compte promptement ; mais qu’on lui donne le temps de prendre un parti prudent et réfléchi. (L’Assemblée nationale, consultée, décrète le renvoi des deux lettres aux trois comités réunis, des rapports, des recherches et militaire.) M. Meyfrund fait lecture d’une lettre de la municipalité de Toulon, qui entre dans quelques détails plus circonstanciés, et de l’événement qui concerne M. Castelet, et des mesures qu’elleavait prises pour l’arracher à la fureur du peuple. Celte lettre est plus consolante que celle du commandant de Toulon, en ce qu’elle annonce que les contusions qu’a reçues M. Castelet ne font pas trembler pour sa vie. Cette lettre, ainsi que les deux précédentes, est renvoyée aux mêmes comités réunis. M. Malouet. Je demande leur réunion dès ce soir. Je suis instruit par les officiers municipaux queledéfaut d’argentest lacausedeces malheurs. 11 faut que ces comités cherchent et trouvent le moyen de faire passer de l’argent, puisque la disette sert de prétexte aux insurrections. Il faut punir les scélérats coupables de l'assassinat de M. Casieiet ; mais il faut aussi prévenir, par de prompts secours, ce qui peut l’avoir occasionné. (L’Assemblée décrète que les trois comités se réuniront sur-le-champ.) M. Hell, au nom du comité d’agriculture et du commerce, propose ensuite un projet de décret pour autoriser le sieur Champagne, entrepreneur 169 d'une fabrique déplâtré , à continuer sa fabrication sur V emplacement qu'il occupe à Paris . Messieurs, par ettres patentes obtenues eu 1776, le sieur Champagne, inventeur d’un procédé pour cuire le plâtre avec du charbon de tjrre, a été autorisé à établir une usine sur un terrain qui s’est trouvé enfermé dans là nouvelle enceinte de Paris et a dépensé pour ses locaux une somme de 300,000 livres dans l’espoir de jouir de son privilège jusqu’en 1805; mais le district de Popineourt lui a fait signifier de transporter ses fours hors des murs de Paris. Les 240 membres provisoires de la municipalité ayant renouvelé le même ordre, le sieur Champagne sollicite de votre justice la sauvegarde de ses droits et le comité vous propose uu décret dans ce but. M. Defermon. Les lois établies ne sont pas abrogées, le sieur Champagne peut donc se pourvoir devant les juges compétents. Je demande la question préalable sur le projet de décret. M. de Custine. Les particuliers doivent être libres dans lYxercice de l’industrie, je crois donc que l’Assemblée duit rendre un décret en faveur du sieur Champagne. M. deEachèze. La question est plus importante qu’elle ne le semble au premier abord. En effet, il s’agit de décider si l’auteur ou l’inven-teur d’une découverte peut être récompensé par la jouissance d’un privilège. M. Hell. Je ne crois pas qu’il dépende de 240 membres de la municipalité de Paris, de frustrer le sieur Champagne des bénéfices qu’il est en droit d’attendre des dépenses faites pour son usine. M. Vernier. La difficulté qui se présente provient de la différence des droits établis sur les matériaux des fours à plâtre situés hors de l’enceinte ou en dedans de l’enceinte de Paris. La nouvelle enceinte en a englobé plusieurs qui auparavant se trouvaient au dehors. Dans cette circonstance, il faut concilier tous les intérêts. Ceux de l’Etat militent en faveur d’une découverte qui a l’avantagé pr -deux de ménager le bois qui devient si rare : il faut donc accorder par provision, au sieur Champagne, la liberté de cuire les matériaux qu’il aura rassemblés, ce qui diminuera nécessairement le chiffre des indemnités que la municipalité devra lui allouer. M. Merlin. L’Assemblée a accordé, par deux décrets, à la municipalité de Paris les mêmes pouvoirs qu’au d t recto re de département. C'est donc à la municipalité qu’il faut renvoyer la pétition du sieur Champagne. M. de Custine. 11 n’est pis possible de renvoyer une affaire à ceux qui font déjà jugée, afin d’en réformer le jugement. Divers membres demandent l’ajournement. (L’ajournement est mis aux voix et prononcé.) M. Gomhert, député suppléant de Chaumont-en-Bassigny , représente qu’il u’a pa-été fait me ition de son admission à la place ieM. Morel, démissionnaire, et du serment qu’il a prêté le 10 juillet dernier. M. Eoison, député suppléant de Verdun, dit (Assemblée nationale.) ARCHIYES PARLEMENTAIRES. [19 août 1790.] 170 qu’il a également remplacé M. de Pouilly, démissionnaire, et que le procès-verbal a commis la même omission que pour M. Gombert. L’Assemblée nationale rend le décret suivant sur ces réclamations: « L’Assemblée nationale, ouï son comité de vérification, a déclaré que les sieurs Gombert et Loison avaient été admis en qualité de députés à la place de MM. Morel et de Pouilly, et qu’il en serait fait mention dans le procès-verbal ainsi que du serment par eux prêté le 10 juillet dernier. » L’Assemblée reprend la suite de la discussion du projet de décret concernant les peines à infliger dans l armée navale. M. de Champagny, rapporteur , donne successivement lecture des articles, Plusieurs observations sont faites pelles sont adoptées par le rapporteur, qui les réunit aux articles du comité, dans la rédaction suivante : « Art. 31. Tout officier coupable d’avoir maltraité ou blessé un pomme de l’équipage, sera interdit de ses fonctions et mis en prison pendant le temps déterminé parle conseil de justice, suivant la nature du délit, sans préjudice, dans le cas de blessure dangereuse, à la réparation civile réservée aux tribunaux ordinaires. « Art. 32. Tout officier commandant une portion quelconque des forces navales de la nation, coupable d’avoir suspendu la poursuite, soit des vaisseaux de guerre, ou d’une flotte marchande marchant devant lui, soit d’un ennemi battu par lui, lorsqu’il n'y aura pas été obligé par des forces ou des raisons supérieures, sera cassé et déclaré incapable de servir. « Art. 33. Ainsi sera traité tout commandant d’escadre ou de vaisseau, coupable d’avoir refusé des secours à un ou plusieurs bâtiments, amis ou ennemis, dans la détresse, implorant son assistance, ou refusé protection à des bâiiroents de commerce français qui l’auraient réclamée, « Art. 34. Tout commandant d’un bâtiment de guerre, coupable d’avoir abandonné, dans quelque circonstance critique que ce soit, le commandement de son vaisseau pour se cacher, ou d’avoir fait amener son pavillon, lorsqu’il était encore en état de se defendre, sera condamné à la mort. « Seracondamnéàlamêrne peine tout commandant coupable, après la perte de son vaisseau, de ne l’avoir pas abandonné le dernier. « Art. 35. Tout officier chargé de la conduite d’un convoi, coupable de l’avoir abandonné volontairement, sera condamné à la mort, « Art. 36. Tout capitaine de naviredu commerce, faisant partie d’un convoi, coupable d’avoir volontairement abandonné le conyoi, sera condamné à trois ans de galères. « Art. 37- Tout officier commandant une escadre ou un bâtiment de guerre quelconque, coupable de n’avoir pas rempli la mission dont il était chargé, et cela par impéritie ou négligence, sera, s’il est officier général ou capilajue de vaisseau, déclaré incapable de commander, et s’il a tout autre grade, il sera déchu de tout commandement pendant trois ans. « S’il est coupable d’avoir volontairement manqué la mission dont il était chargé, il sera condamné â la mort. « Art. 38. Tout commandant d’un bâtiment de guerre quelconque, coupable de l’avoir perdu, si p’çst par impéritie, sma cassé et déclaré incapable de servir; si c’est volontairement, sera condamné à la mort. « Art. 39. Tout pilnte-côtier coupable d’avoir perdu un bâiiment quelconque de l’Etat ou du commerce, lorsqu’il s’était chargé de sa conduite, et qu’il avait déclaré en répondre; si c’est par négligence ou ignorance, sera condamné à trois ans de galères; si c’est volontairement, il sera condamné à la mort. « Art. 40. Tout officier particulier, chargé d’une expédition, mission ou corvée quelconque, coupable de s’être écarté des ordres qu’il avait reçus, et d’avoir par là fait échouer ou mal rempli la mission dont il était chargé, sera interdit de ses fonctions, et privé d’avancement pendant le temps déterminé par le conseil de justice. « Art. 41. Tout commandant d’un vaisseau de guerre, coupable d’avoir perdu son vaisseau par la suite d’une inexécution non forcée des ordres qu’il avait reçus, sera cassé et condamné à cinq ans de prison. « Art. 42. Tout homme, sans distinction dégradé ou emploi, coupable d’avoir volé à bord des effets appartenant à quelque particulier, sera frappé de douze coups de corde au cabestan; en cas de récidive, il courra la bouline. « Dans tous les cas de vol quelconque, le voleur sera obligé à la restitution des effets volés. « Art. 43. Tout homme coupable d’un vol, avec effraction, d’effets appartenant à des particuliers, soit à bord, soit à terre, sera condamné à recevoir la cale; en cas de récidive, il sera condamné à six ans de galères. <• Art. 44. Tout homme qui, descendu à terre, s’y rendra coupable d’un vol; si c’est sur territoire français, sera frappé de douze coups de corde au cabestan; si c’est sur territoire étranger, recevra la cale. « Si le vol excède la valeur de douze francs, l’homme qui s’en sera rendu coupable sera condamné à courir la bouline, et, en cas de récidive, à six ans de galères. « Art. 45. Tout homme coupable d’avoir volé et fait transporter à terre des vivres, munitions, agrès ou autres eff ts publics du vaisseau, sera condamné à courir la bouline. « Art. 46. En cas de récidive, ou si un premier vol des vivres et autres effets publics excédait en vivres une valeur de cinquante rations, et en autres effets une valeur de cinquante rations, et en autres effets une valeur de 50 livres, l’homme qui s’en sera rendu coupable, sera condamné à trois ans de galères. « Art. 47. Tout homme coupable d avoirvoléen toutou en partie l’argent de la caisse du vaisseau, ou de telle autre caisse publique déposée à bord dr. vaisseau, sera condamné à neuf ans de galères. « Art. 48. Tout homme coupable d’avoir volé à bord, de la poudre, ou d’avoir recélé de la poudre volée, sera condamné à trois ans de galères. « Art. 49. Tout homme coupable d’avoir volé ou tenté de voler de la poudre dans la soute aux poudres, sera condamné à neuf ans de galères. « Art. 50. Tout vol d’effets quelconques fait à bord d’une prise lorsqu’elle n’est pas encore amarinée, sera regardé comme un vol d’effels particuliers, et l’homme qui s’en sera rendu coupable sera frappé de douze coups de corde au cabestan. « Art. 51. Tout homme coupable d’avoir dépouillé un prisonnier de ses vêtements et de les avoir volés, sera frappé de vingt-quatre coups de corde aij cabestan,