28S ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE réglé par la loi du 8 Nivôse, pour les nominations aux places de juges-de-paix, est commun à celles de leurs greffiers. » L’insertion de la présente loi au bulletin, tiendra lieu de publication (1). Clauzel demande que l’on emploie le même mode dans le remplacement des juges de tous les tribunaux civils ou criminels établis dans la République. Renvoyé au Comité de législation (2) . 59 Un membre [CAMBON], au nom du Comité des finances, continue le rapport sur les rentes viagères; les rédactions qu’il propose sont adoptées (3). « Sur la proposition d’un membre [LACROIX], la Convention nationale décrète que les bases de liquidation adoptées pour les rentes viagères dues par la République et pour la répartition du capital, en provenant, seront appliquées aux rentes viagères qui étoient dues par les émigrés, déportés ou condamnés » (4). CAMBON, après avoir fait adopter la suite du travail sur les rentes viagères, expose que le Comité avait différé de proposer une exception : celle de savoir si les compagnies de finances qui ont prêté à l’ancien gouvernement à un taux viager usuraire doivent souffrir dans le remboursement du capital une réduction proportionnelle aux intérêts usuraires qu’ils ont touchés. La difficulté de cette question vient de ce que ces compagnies, par une émission d’actions au porteur, ont associé à leur fortune un grand nombre de citoyens indigents sur lesquels il serait à craindre que la rigueur de la loi ne portât. C’est pourquoi Cambon demande le renvoi aux Comités de salut public et des finances, pour qu’ils méditent sur le parti le plus convenable à prendre. Ce renvoi est décrété (5). 60 Des citoyens de Genève, demeurans à Paris, sont introduits à la barre, et rendent grâces à la Convention d’avoir décerné les honneurs du Panthéon à Jean-Jacques Rousseau (6). (1) P.V., XXXVII, 179. Minute de la main de Merlin, (C 301, pl. 1072, p. 29) . Décret n° 9127. Reproduit dans Blm, 24 flor. (1er suppl4); J. Mont., n° 17; J. Sans-Culottes, n° 453; J. Fr., n° 596; J. Perlet, n° 599; Feuille Rép., n° 315. (2) J. Sablier, n° 1314. (3) Adoption des articles V à XIV inclus (J. Fr., n° 596; Ann. R.F., n° 165). (4) P.V., XXXVII, 179. Minute de la main de Cambon, (C 301, pl. 1072, p. 30). Décret n° 9118. Mention dans Débats, n° 600, p. 316; J. Sablier, n° 1314; Mess, soir, n° 633; J. Mont., n° 17; Audit, nat., n° 597; Rép., n° 144; J. Perlet, n° 598; M.U., XXXIX, 377; J. Paris, nos 498 et 499. Voir ci-dessus, séance du 22, n° 48; voir Arch. pari., T. LXXXVII, séances : du 1er germinal, n° 78; du 2, n° 40; du 6, n° 58; du 9, n° 55; du 13, n° 16; du 16, n° 30; du 21, Annexe II; du 23 n08 24 et 69; du 27, n° 69. (S) Mon., XX, 456. (6) P.V., XXXVII, 180. Le cn REYBAZ, orateur de la députation : « Citoyens représentans, Des citoyens de Genève, demeurant à Paris, rassemblés au nom de Rousseau, leur compatriote, se présentent devant vous. Le décret que vous avez rendu pour honorer sa mémoire, pour ordonner le transport de ses restes dans le dernier asile des grands hommes, a fait tressaillir nos cœurs de joie; et nous avons besoin de vous présenter l’hommage de notre respectueuse admiration. Nous n’oserions proférer dans cette enceinte le nom de Rousseau, si la nouvelle Genève n’avait réparé à son égard les torts de l’ancienne. Il y a trente ans que l’aristocratie genevoise conspira avec le despotisme qui régnait en France, pour proscrire cet ami de l’humanité. Ce crime fut celui d’un petit nombre de dominateurs. La nation genevoise n’a jamais cessé d’honorer, de chérir Rousseau. Elle a toujours regardé la proscription de ce grand citoyen comme un attentat contre la liberté et contre le peuple. Aussi le premier acte que fit notre République rentrée dans ses droits, fut de déchirer cette page honteuse de notre histoire. Un décret souverain ordonna cet acte de justice. Bientôt une inscription gravée sur le marbre, consacra aux respects publics la maison où naquit l’auteur de l’Emile; et le peuple genevois célébra à son honneur une fête, où 1200 enfans mêlèrent les accens de leur joie naïve aux acclamations de la reconnaissance publique. C’est ainsi que les mânes de Rousseau ont été consolées des persécutions de quelques hommes par une cérémonie expiatoire de la nation entière et les premiers hommages de sa liberté. Aujourd’hui, parmi les républicains genevois, rassemblés devant vous au nom de Rousseau, vous voyez des vieillards qui ont vécu longtemps avec lui, qui ont joui jusqu’à ses derniers jours de son amitié la plus familière. D’autres ont eu l’honneur, en défendant sa mémoire et sa doctrine de partager la haine de ses ennemis. Tous nous lui payons le tribut le plus digne de lui : c’est de chérir à son exemple la liberté de suivre et de défendre ses principes. Mais Rousseau n’appartient pas seulement à notre patrie; il appartient à toutes les nations; il appartient surtout à la France libre. Il a marché le flambeau à la main dans la carrière que vous avez fournie. Cet édifice que vous avez élevé, il en a posé dans son Contrat social les bases inébranlables. C’est par le contraste qui existait entre la dépravation de son siècle et la pureté de ses principes que son âme forte, raidie contre le spectacle des erreurs et des vices, s’est fortifiée encore davantage. Il vit de près ce qu’on appelait les grands du monde; et l’égalité devint son idole. Le despotisme opprimait la terre; et son cœur s’embrasa d’amour pour la liberté. C’est du sein de la corruption sociale que son imagination irritée a produit ses chefs d’œuvre immortels d’éloquence et de génie. Semblable à la nature qui trouve dans les matières les plus viles le froment des plus admirables productions. Quel beau jour, citoyens Représentans, que celui où un peuple immense de citoyens, rassemblés par vous et autour de vous, célébrera à son 28S ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE réglé par la loi du 8 Nivôse, pour les nominations aux places de juges-de-paix, est commun à celles de leurs greffiers. » L’insertion de la présente loi au bulletin, tiendra lieu de publication (1). Clauzel demande que l’on emploie le même mode dans le remplacement des juges de tous les tribunaux civils ou criminels établis dans la République. Renvoyé au Comité de législation (2) . 59 Un membre [CAMBON], au nom du Comité des finances, continue le rapport sur les rentes viagères; les rédactions qu’il propose sont adoptées (3). « Sur la proposition d’un membre [LACROIX], la Convention nationale décrète que les bases de liquidation adoptées pour les rentes viagères dues par la République et pour la répartition du capital, en provenant, seront appliquées aux rentes viagères qui étoient dues par les émigrés, déportés ou condamnés » (4). CAMBON, après avoir fait adopter la suite du travail sur les rentes viagères, expose que le Comité avait différé de proposer une exception : celle de savoir si les compagnies de finances qui ont prêté à l’ancien gouvernement à un taux viager usuraire doivent souffrir dans le remboursement du capital une réduction proportionnelle aux intérêts usuraires qu’ils ont touchés. La difficulté de cette question vient de ce que ces compagnies, par une émission d’actions au porteur, ont associé à leur fortune un grand nombre de citoyens indigents sur lesquels il serait à craindre que la rigueur de la loi ne portât. C’est pourquoi Cambon demande le renvoi aux Comités de salut public et des finances, pour qu’ils méditent sur le parti le plus convenable à prendre. Ce renvoi est décrété (5). 60 Des citoyens de Genève, demeurans à Paris, sont introduits à la barre, et rendent grâces à la Convention d’avoir décerné les honneurs du Panthéon à Jean-Jacques Rousseau (6). (1) P.V., XXXVII, 179. Minute de la main de Merlin, (C 301, pl. 1072, p. 29) . Décret n° 9127. Reproduit dans Blm, 24 flor. (1er suppl4); J. Mont., n° 17; J. Sans-Culottes, n° 453; J. Fr., n° 596; J. Perlet, n° 599; Feuille Rép., n° 315. (2) J. Sablier, n° 1314. (3) Adoption des articles V à XIV inclus (J. Fr., n° 596; Ann. R.F., n° 165). (4) P.V., XXXVII, 179. Minute de la main de Cambon, (C 301, pl. 1072, p. 30). Décret n° 9118. Mention dans Débats, n° 600, p. 316; J. Sablier, n° 1314; Mess, soir, n° 633; J. Mont., n° 17; Audit, nat., n° 597; Rép., n° 144; J. Perlet, n° 598; M.U., XXXIX, 377; J. Paris, nos 498 et 499. Voir ci-dessus, séance du 22, n° 48; voir Arch. pari., T. LXXXVII, séances : du 1er germinal, n° 78; du 2, n° 40; du 6, n° 58; du 9, n° 55; du 13, n° 16; du 16, n° 30; du 21, Annexe II; du 23 n08 24 et 69; du 27, n° 69. (S) Mon., XX, 456. (6) P.V., XXXVII, 180. Le cn REYBAZ, orateur de la députation : « Citoyens représentans, Des citoyens de Genève, demeurant à Paris, rassemblés au nom de Rousseau, leur compatriote, se présentent devant vous. Le décret que vous avez rendu pour honorer sa mémoire, pour ordonner le transport de ses restes dans le dernier asile des grands hommes, a fait tressaillir nos cœurs de joie; et nous avons besoin de vous présenter l’hommage de notre respectueuse admiration. Nous n’oserions proférer dans cette enceinte le nom de Rousseau, si la nouvelle Genève n’avait réparé à son égard les torts de l’ancienne. Il y a trente ans que l’aristocratie genevoise conspira avec le despotisme qui régnait en France, pour proscrire cet ami de l’humanité. Ce crime fut celui d’un petit nombre de dominateurs. La nation genevoise n’a jamais cessé d’honorer, de chérir Rousseau. Elle a toujours regardé la proscription de ce grand citoyen comme un attentat contre la liberté et contre le peuple. Aussi le premier acte que fit notre République rentrée dans ses droits, fut de déchirer cette page honteuse de notre histoire. Un décret souverain ordonna cet acte de justice. Bientôt une inscription gravée sur le marbre, consacra aux respects publics la maison où naquit l’auteur de l’Emile; et le peuple genevois célébra à son honneur une fête, où 1200 enfans mêlèrent les accens de leur joie naïve aux acclamations de la reconnaissance publique. C’est ainsi que les mânes de Rousseau ont été consolées des persécutions de quelques hommes par une cérémonie expiatoire de la nation entière et les premiers hommages de sa liberté. Aujourd’hui, parmi les républicains genevois, rassemblés devant vous au nom de Rousseau, vous voyez des vieillards qui ont vécu longtemps avec lui, qui ont joui jusqu’à ses derniers jours de son amitié la plus familière. D’autres ont eu l’honneur, en défendant sa mémoire et sa doctrine de partager la haine de ses ennemis. Tous nous lui payons le tribut le plus digne de lui : c’est de chérir à son exemple la liberté de suivre et de défendre ses principes. Mais Rousseau n’appartient pas seulement à notre patrie; il appartient à toutes les nations; il appartient surtout à la France libre. Il a marché le flambeau à la main dans la carrière que vous avez fournie. Cet édifice que vous avez élevé, il en a posé dans son Contrat social les bases inébranlables. C’est par le contraste qui existait entre la dépravation de son siècle et la pureté de ses principes que son âme forte, raidie contre le spectacle des erreurs et des vices, s’est fortifiée encore davantage. Il vit de près ce qu’on appelait les grands du monde; et l’égalité devint son idole. Le despotisme opprimait la terre; et son cœur s’embrasa d’amour pour la liberté. C’est du sein de la corruption sociale que son imagination irritée a produit ses chefs d’œuvre immortels d’éloquence et de génie. Semblable à la nature qui trouve dans les matières les plus viles le froment des plus admirables productions. Quel beau jour, citoyens Représentans, que celui où un peuple immense de citoyens, rassemblés par vous et autour de vous, célébrera à son