[6 octobre 1789.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 355 de douze membres, qui se concerteraient avec le ministre et le conseil de la marine pour l’examen de l’emploi des fonds affectés à ce département. M. Cnrt, député de la Guadeloupe , a développé les grands intérêts qui ressortissent au département de la marine dans les diverses parties du globe ; il a fait sentir les rapports de commerce et d’administration qui doivent unir la métropole aux colonies et a présenté le tableau des économies qui pourraient tourner au profit des armements ; il a conclu à ce que, vu la multiplicité des objets, le comité fût composé d’au moins douze membres, pris parmi les députés des villes maritimes et parmi ceux qu’une longue expérience a familiarisés avec l’ensemble des grands intérêts de la marine. M. le marquis de Rostaing a proposé de faire entrer des négociants dans le comité. Six amendements ont été proposés sur la motion; mais l’Assemblée ayant considéré que les uns et les autres n’offraient que le développement des fonctions du comité demandé, elle a adopté la motion avec cette seule différence, qu’elle a fixé à douze le nombre des membres que la motion ne portait qu’à neuf, et elle a ordonné que tous les amendements seraient remis comme instructions au comité de marine. M. le comte de Mirabeau renouvelle la motion qu’il a faite dans la précédente séance d’une adresse aux commettants, relative aux circonstances actuelles. L’Assemblée décide que pour le moment, il n’y a lieu à délibérer. M. le Président lève la séance à dix heures du soir. ANNEXE à la séance de l'Assemblée nationale du 6 octobre 1789. PROJET PROPOSÉ POUR LA CAISSE D’ESCOMPTE, PAR M. Duclos-Dufresnoy, NOTAIRE, SUPPLÉANT DE LA DÉPUTATION DE PARIS (1). ( Imprimé par ordre de V Assemblée nationale et renvoyé au comité des finances.) Messieurs, ouvrir le plein payement, et à bureau ouvert , des billets de la caisse d’escompte, au plus tard, le 1er mars 1790 ; Prêter à l’Etat 182 millions , dans l’année prochaine, qui seront employés exclusivement au payement des intérêts de la dette publique; Payer, à bureau ouvert , sur des dividendes au porteur, les arrérages de l’année entière 1789, des rentes perpétuelles et viagères; Payer, ensuite, au mois d’octobre 1790 (2), les arrérages des six premiers mois de cette année , aussi sur des dividendes au porteur , et ainsi successivement aux mois d’avril et d’octobre de chaque aunée (1); Régénérer, en un mot, par cette opération, le crédit national, et celui de la caisse d’escompte. Tel est le but, et tels doivent être nécessairement les effets du plan proposé. Capital de la société de la caisse d’escompte. La caisse d’escompte est propriétaire d’un capital de 100 millions, qui forme la garantie des valeurs qu’elle a dans son portefeuille, valeurs représentatives des billets de caisse en circulation ; c’est-à-dire, que s’il existe dans les mains du public pour 100 millions de billets, la caisse d’escompte a alors 200 millions de valeurs pour en répondre. Fait démontré jusqu’à l’évidence dans le discours prononcé en 1787, à l’assemblée des actionnaires, par M. Duclos-Dufresnoy, discours imprimé en suite de la lettre à M. le comte de Mirabeau, sur sa motion concernant la caisse d’escompte. Mais de ce capital, elle n’a que 30 millions dans ses coffres. Les 70 millions, faisant le surplus, ont été déposés au Trésor royal, et convertis en une quittance de finance non disponible. Cette indisponibilité des 70 millions a été jusqu’à présent considérée comme un gage nul aux yeux des porteurs de billets de la caisse : la raison en est simple. Le public n’a eu d’inquiétude sur les billets de la caisse que lorsque les finances du gouvernement ont été évidemment dans la détresse, et dès lors c’est avec raison que les porteurs de billets ont jugé que le gage devenait nul, non en dernière analyse, mais pour la fidélité exacte du payement à vue des billets de caisse, fidélité de payement qui forme la base fondamentale de l’institution de la caisse d’escompte. Aussi la première partie de ce plan a-t-elle pour objet de vivifier, de régénérer ce gage, et dans l’opinion publique, et dans les mains de la caisse d’escompte. Pour y parvenir, la quittance de finance de 70 millions sera dès à présent convertie en 25,000 annuités au porteur, de 2,800 livres de capital chacune, composée de 30 coupons. Les deux premiers dividendes échéant en avril et octobre 1790 seront uniquement pour le payement des intérêts des 70 millions, et les 28 derniers cumuleront, de semestre en semestre, le remboursement de la vingt-huitième portion du capital avec le payement des intérêts; c’est ce qui a été connu autrefois en France, et ce qui est encore plus connu en Angleterre, sous la dénomination d 'annuités. Par le calcul fait à cet égard, si l’Assemblée nationale se détermine à destiner, de semestre en semestre, un fonds d’amortissement de 1,750,000 livres , à compter du semestre qui écherra au 1er avril 1791, l’Etat, au 1er octobre 1804, sera libéré de ce capital de 70 millions, dû à la caisse d’escompte. Ce fonds d’amortissement, étant destiné à entrer annuellement dans les coffres de la caisse d’escompte, n’aura pas l’inconvénient que pourront avoir les autres fonds d’amortissement, qui, remis (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. (2) Ainsi, payement de dix-huit mois d’arrérages de rentes dans le court espace de six mois. Mais ce payement ne sera que t’acquit des engagements de l’Etat, garantis par l’Assemblée nationale. (1) Ce payement d’arrérages rendra plus facile celui de la contribution patriotique, et sans doute plus exactes, ou plus généreuses, les déclarations du quart du revenu. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 octobre 1789.] 356 [Assemblée nationale.J en partie dans l’étranger, contribueront au désavantage de notre change. Ce fonds d’amortissement procurera une ressource nationale en cas de guerre : car en augmentant successivement et annuellement lesforces réelles de la caisse d’escompte, cette caisse pourra alors donner à la nation les premiers secours, les premiers moyens nécessaires pour des préparatifs de guerre, moyens qui en imposent à 1 ennemi et conservent la paix. Ces annuités disponibles formeront enfin, dans le plan proposé, un objet de gage et de sûreté pour le succès de l’emprunt dont il va être parlé, à faire par la caisse d’escompte. Payement, à bureau ouvert, et sur dividendes au porteur des intérêts de la dette publique. Si le projet est adopté, un mémoire particulier prouvera la possibilité de payement par la caisse d’escompte des dividendes au porteur, nonobstant la quantité des parties prenantes (1 ). C’est un bureau particulier étranger à la caisse d’escompte, qui sera chargé de la vérification des certificats de vie. Un timbre, ou visa apposé aux dividendes viagers, les rendra payables à la caisse. Ce mémoire indiquera les moyens conservatoires des douaires, des substitutions, des hypothèques, et enfin des droits des survivanciers aux rentes viagères (2). On observe que les cahiers de la ville de Paris demandent que tous les titres des créanciers actuels de l’Etat soient convertis, et rendus uniformes avec le caractère de consolidation, consentie par l’Assemblée nationale. Cette conversion, votée par les cahiers de Paris, a eu deux motifs : Le premier, celui de faire disparaître cette multitude de dénominations d’effets publics , et de rendre leur sort, comme leur titre, uniforme. Le second, de faire disparaître ces traces honteuses de banqueroute de ÎT�O et 1770, dont les titres des créanciers de l’Etat présentent chaque jour aux yeux du public le tableau et renouvellent le souvenir. Ainsi ce projet a l’avantage de remplir le vœu des cahiers de Paris. La caisse d'escompte est destinée, dans ce plan, à devenir caisse nationale, elle payera en 1791 la totalité des intérêts de la dette publique ; mais elle commencera seulement en 1790 les fonctions de cette caisse nationale, et elle payera, savoir : (1) En Angleterre, on subdivise les bureaux de payement en autant de lettres alphabétiques que celles des parties prenantes, c’est ce qui se pratiquerait pour les dividendes viagers qui, quoique payables au porteur, porteront chacun dans leur contexte les noms de la dette viagère. Quant aux autres dividendes d’intérêts perpétuels, on subdiviserait les bureaux, par numéros ; quant enfin au local, on prendrait provisoirement quelques maisons de moines. (2) Ce moyen est infiniment simple, c’est celui d’un dépôt public du titre grévé d’une manière quelconque, c’est celui de la remise successive du dividende à mesure des échéances. Enfin pour éviter la multiplicité des subdivisions des capitaux et des dividendes, soit perpétuels, soit viagers, chaque dividende payera un droit de timbre, et tout contrefacteur du timbre de la caisse, sera comme en Angleterre, puni de mort. Ce droit de timbre sera moins à charge aux rentiers que les frais de procuration, de quittance, et les droits dés receveurs des rentes à la ville, appelés grippe-sous. 182 millions au mois d’avril 1790, pour les arrérages de l’année entière 1789. 91 millions au mois d’octobre, pour les six premiers mois 1790. 273 millions. Total. L’administration des finances, libérée de tous soins pour pourvoir au payement de ces 182 millions, subviendra aux besoins actuels par la négociation de valeurs représentatives des fonds qu’elle avail destinés, de mois en mois, à compter du 1er janvier 1790, au payement des intérêts de 1789 de la dette publique. Enfin, s’il était, en dernière analyse, impossible de négocier la totalité de ces valeurs , il resterait la ressource de leur attribuer des intérêts jusqu’au jour de leur échéance, et de les donner librement en payement sous la garantie des décrets de l’Assemblée nationale aux parties prenantes sur l’exercice de 1789, qui préféreraient ces valeurs à un retard de payement. Il est essentiel d’observer que cette ressource employée, en dernière analyse, ne sera, pour ainsi dire, que provisoire et qu’instantanée : ces valeurs ainsi données s’éteindront successivement en 1790, par leur payement de mois en mois. L’Assemblée nationale décrétera qu’à raison de l'avance de 182 millions, la caisse d’escompte sera subrogée aux droits des créanciers d’intérêts de la dette publique ; elle décrétera aussi que la caisse d’escompte sera payée de cette avance, en reconnaissances du garde du Trésor royal, aux porteurs de 1,000 livres chacune, et productives de 3 0/0 d’intérêt, depuis le 1er avril 1790 jusqu’au 1er octobre 1791, et de 5 0/0 d’intérêt, à compter du 1er octobre 1791 (1). Il résulte de cette disposition deux avantages pour l’arrangement des finances du gouvernement. Le premier, la nation ne sera grevée d’aucun remboursement sur ces 182 millions, mais conservera seulement la faculté de le faire dès l’instant que ce prêt sera productif d’un intérêt à 5 0/0. Le second, c’est la prorogation jusqu’au 1er octobre 1791, de la quittance de ce prêt au modique intérêt de 3 0/0, au lieu que dans le plan proposé à l’Assemblée nationale, le gouvernement était obligé au remboursement partiel de cette avance par égale portion , de mois en mois, depuis le mois de janvier 1791, jusqu’au 1er mai 1792. Quant aux 91 millions que la caisse d’escompte payera au mois d’octobre 1790, pour le semestre des six premiers mois, la valeur en sera fournie à la caisse d’escompte en assignations payables de mois en mois, à compter de janvier 1791, soit sur les revenus publics, soit sur le deuxième tiers de la contribution patriotique payable en avril 1791, au moyen de quoi les mêmes valeurs que le premier ministre des finances avait, dans (1) C’est uniquement pour ne point déprécier ce gage, important pour la confiance publique soit dans les billets de caisse, soit dans l’emprunt par sourcription dont il va être parlé, qu’on exige dans ce projet que ces reconnaissances soient productives d’intérêt à cinq pour cent, à compter du Ie* octobre 1791 : car si celte opération est couronnée de succès, il conviendra aux intérêts de la caisse d’escompte de continuer à trois pour cent ce même prêt, c’est ce qui sera démontré aux actionnaires par le calcul arithmétique. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 octobre 1789.] 357 son plan, destinées au remboursement successif des 170 millions, seront appliquées au payement des intérêts de la dette publique à faire en octobre 1790 : ces valeurs seront remises dès le mois de juillet 1790, à la caisse d’escompte, afin que les administrateurs puissent les négocier et faire les fonds nécessaires pour le payement du mois d’octobre, afin aussi que pour ce payement la caisse ne soit pas dans la nécessité d’augmenter la masse de ses billets en circulation. Ces négociations faites successivement, à commencer au mois de juillet 1790, auront l’avantage de diminuer très-promptement la masse des billets de la caisse d’escompte qui auront été mis en circulation pour les payements faits en avril, mai et juin des intérêts de la dette publique. Tous les frais d’escompte de négociations de ces valeurs seront à la charge du gouvernement, il en sera usé de même et successivement pour le payement des autres semestres d’arrérages de la dette publique (1). Mais la caisse d’escompte bonifiera au gouvernement les intérêts à 4 0/0 des fonds entrés dans sa caisse, avant l’ouverture du payement du semestre, intérêts provenus de la négociation des valeurs qui lui auront été remises. C’est ainsi que la caisse d’escompte sera remplie des 273 millions qu’elle payera en 1790 à la décharge de l’administration des finances. Cette avance se continuera d’année en année, iusqu’à ce que la nation juge convenable de se libérer de ce prêt. Ainsi l’Assemblée nationale trouvera dans ce projet un soulagement énorme, celui de 273 millions appliqués au payement de la partie la plus sacrée de la dette exigible. Enfin, il est facile de sentir quelle impulsion donnera au crédit national un payement de 273 millions fait en 1790 sur les intérêts de la dette publique. La principale cause, et du discrédit et de la rareté du numéraire , provient des retards successifs qu’a éprouvés le payement d’intérêts de la dette (2). La raison en est simple, les hommes vivent avec leurs revenus et non avec les capitaux, et lorsque le créancier de l’État aperçoit des embarras dans les finances du gouvernement, lorsqu'il a éprouvé successivement des retards dans le payement de ses intérêts, il se précautionne contre de plus grands retards : il diminue sa dépense annuelle, il entasse ses écus, et c’est par une multitude de thésaurisations particulières , fruits de la prudence et de la prévoyance, que le numéraire disparaît. Ainsi, un des principaux moyens de rendre de l’activité à lacirculation interceptée du numéraire et de régénérer le crédit de la nation et delà caisse d’escompte, c’est de rendre inviolable le payement, à bureau ouvert, des intérêts de la dette publique. (1) Le comité des finances proscrit d’avance dans son rapport toutes anticipations sur les revenus, comme dangereuses et étant une des causes principales du désordre des finances; mais fixées irrévocablement à 91 millions par an par l’Assemblée nationale, elles n’auront aucun danger, elles auront au contraire l’avantage d’entretenir la circulation du numéraire des capitalistes. (2) L’exactitude des payements des arrérages des ventes sur la ville a été prescrite par des lettres patentes du 15 avril 1784, enregistrées au parlement le 31 du même mois, et elle est actuellement violée. Alors l’argent sortira de tous ces petits canaux multipliés dans lesquels il est actuellement engorgé. Alors toutes les opérations du gouvernement deviendront extrêmement faciles. Moyen (1) et possibilité’ de payement, en avril 1790, des intérêts de la dette publique. La caisse d’escompte empruntera la somme de 182 millions, par souscriptions au porteur de 2,000 livres chacune; le souscripteur en payera le cinquième, c’est-à-dire 400 livres en levant sa souscription ; il sera tenu de payer les quatre autres cinquièmes un mois après les proclamations d’appel faites par la caisse d’escompte, mais aucune proclamation ne pourra être faite avant le 15 mars 1790. Ainsi, les souscripteurs ne seront tenus à aucun payement avant le 15 avril. Les proclamations d’appel ne pourront être faites chaque fois que pour un cinquième de capital de la souscription. Ainsi, en supposant qu’elles se succèdent sans interruption, le payement des quatre cinquièmes de la souscription ne pourra être exigé avant les 15 avril, 15 mai, 15 juin et 15 juillet 1790 (2). Mais faute d’avoir fourni à ces appels successifs, toute mise antérieure de souscription sera irrévocablement perdue. La caisse d’escompte sera autorisée à vendre sur la place la souscription en retard de payement, et le prix de la négociation appartiendra en totalité, à perte et profit, , à la caisse d'escompte. Les souscripteurs jouiront de l’intérêt à 5 0/0 de leur mise, à compter seulement de la date du jour du premier et des autres subséquents payements de leur souscription ; chaque souscription sera payable en totalité par la caisse d’escompte dans l’année préfixe du payement du premier cinquième. Ainsi, la caisse d’escompte aura différents termes d’exigibilité pour le payement des sommes qu’elle aura reçues des souscripteurs, ce qui lui donnera la facilité de renouveler cette même souscription à un taux plus modéré. 11 sera attribué aux souscripteurs une prime de 1 0/0 sur le capital entier de leur souscription. D’où il résulte que les souscripteurs, en payant un cinquième de leur mise, ne sont tenus à aucun appel, ils auront placé leur argent à 10 0/0 pour un an (3) : en voici la preuve. 20 liv. pour l’intérêt à 5 0/0 de la mise de 400 livres. (1) Ce moyen a été pratiqué avec succès par la banque d’Angleterre, dans des circonstances de détresse, et pour des prêts faits au gouvernement : or jamais le crédit des billets de la banque n’en a souffert. Jamais aussi les souscripteurs n’ont été tenus de payer que la première mise de leur souscription, qui était seulement d’un dixième. (2) Délai nécessaire pour les signatures de tous les dividendes d’arrérages des créanciers de l’Etat : conséquemment le payement ouvert en avril, des 182 millions, se reportera sur ces quatre mois : Inde, les billets ne seront mis que successivement en circulation. (3) Ces dix pour cent ne peuvent être considérés comme usuraires, puisque c est uniquement une chance de profit que courront les souscripteurs : la banque d’Angleterre a de même donné aux souscripteurs environ le double de l’intérêt lors courant. Enfin ce n’est point le gouvernement, mais la caisse d’escompte qui payera cette chance, ou ces intérêts. 358 20 liv. ou 1 0/0 de prime accordé sur les 2,000 livres formant le total de la sous-- cription. 40 liv. Total du produit d’un an d’une mise de 400 livres. Si les souscripteurs sont obligés de fournir, à la deuxième mise, ou aux subséquentes, cet avantage d’intérêt qui leur est présenté s’affaiblira. Mais toutes les probabilités se réunissent pour le non-payement des quatre autres cinquièmes. La marche actuelle des décrets de l’Assemblée nationale va opérer incessamment l’établissement des municipalités dans tout le royaume, rétablissement de ces municipalités rétablira la perception des impositions suspendues par l’anarchie actuelle; dès lors l’abondance du numéraire renaîtra dans la capitale. En effet, Paris consomme pour sa subsistance les denrées et de l’étranger et de toutes les provinces qui l’avoisinent, et lorsque le Trésor royal ne reçoit point le produit des impositions des différentes provinces du royaume, la dépense journalière de 7 à 800,000 habitants, et l’exportation, et dans les provinces et dans l’étranger, du prix des subsistances, absorbe chaque jour une quantité énorme de numéraire dont la perception des impôts peut seule faire le remplacement. Lorsque la disette du numéraire se fait sentir dans la capitale, l’alarme se répand dans les villes de commerce ; les thésaurisations particulières se multiplient de proche en proche, et toutes ces thésaurisations répandues sur 24 millions d’habitants font disparaître, pour ainsi dire, dans une très-grande brièveté de temps, les 2 milliards ou environ de numéraire qui existent en France. La perception des impositions et leur rentrée exacte dans le Trésor public seront donc évidemment le salut de la patrie : conséquemment cette perception fixera l’attention de toutes les municipalités; elles jugeront qu’en vain l’Assemblée nationale aurait élevé le superbe monument de la liberté française, s’il n’était pas soutenu ensuite par le concours du pouvoir législatif, du pouvoir exécutif, et par l’ordre dans les finances du royaume. Le payement du premier tiers de la contribution patriotique qui doit être fait en avril 1790 concourra à l’augmentation du numéraire dans la capitale. Les rentiers, les banquiers, les financiers, les marchands et tout le peuple, en un mot, parisien, qui a si longuement souffert des calamités publiques et de la rareté du numéraire, formeront en quelque sorte une coalition universelle d’intérêt pour soutenir la caisse d’escompte. Gomment dès lors pourrait-on redouter des conspirations isolées d’ennemis de la liberté française, ils seront tous vaincus à ces époques des mois de mars et d’avril, ou du moins ils jugeront alors l’impuissance de leurs efforts. Toutes les probabilités se réunissent donc pour assurer et les actionnaires de la caisse d’escompte, et les souscripteurs que la première mise de la souscription suffira pour soutenir le plein payement, à bureau ouvert, en mars, des billets de la caisse, et ensuite leur émigration en avril et dans les mois suivants. Multiplions encore de plus en plus les motifs de confiance et de tranquillité. Le payement des intérêts de la dette publique n’aura pas été fait exactement pendant 15 jours par la caisse d’escompte que ces mêmes dividendes d’intérêt deviendront avec les billets de la [6 octobre n89.] caissedes seconds billets de confiance; et, attendu leurs diverses quotités de sommes, ils serviront d’appoints dans les payements faits en billets de caisse. Le payement entier des intérêts de la dette publique de 1789 rendra moins nécessaires et moins multipliés les besoins de l’escompte ; car il est démontré que la majeure partie des besoins d’escompte naissent des retards de payement des intérêts de la dette publique. A cette époque, tous leS arrangements de finances seront faits par l’Assemblée nationale. Ainsi, la confiance publique sera évidemment rétablie et parfaitement consolidée : conséquemment c’est avec facilité que les souscripteurs satisferaient aux appels qui pourraient être faits alors par la caisse d’escompte. Enfin, il est prouvé par l'expérience des opérations de la caisse d’escompte, qu’avec un capital seulement de 30 millions, elle a soutenu une circulation de 120 millions de billets et un escompte de 255 millions par semestre. Or, au moyen du payement de la première souscription montant à 36,400,000 livres, et de son capital primitif de 30 millions, elle aura en activité un capital de 66,400,000 livres qui pourrait, dans la proportion arithmétique, supporter une émigration de billets de 264 millions ; mais jamais cette émigration ne s’élèvera à beaucoup près à cette somme. D’ailleurs, il est possible d’affaiblir là masse de ces billets circulant dans la capitale, par un moyen qui dépend uniquement du pouvoir exécutif. Il suffit, en effet, que le premier ministre des finances ordonne à tous les collecteurs et receveurs d’impositions publiques, dans tout le royaume, de recevoir en payement les billets de la caisse d’escompte pour les transmettre ensuite au Trésor royal, et alors la masse de ces billets sera insensible par la sous-division dans toutes les provinces ; alors, ils seront admis librement et successivement dans toutes les villes de commerce comme signes représentatifs dii numéraire. Pour faciliter cette circulation dans les provinces, il sera prudent d’adopter la forme pratiquée en Angleterre pour éviter le vol ou la perte de ces billets ; cette forme anglaise consiste à faire des billets à ordre et à vue, mais qui ne sont payables que quelques jours après leur présentation à la caisse. La caisse d’escompte pourra enfin encourager la levée de cette souscription, en recevant le payement de l’argenterie sur le pied de 55 livres le marc ; par ce moyen, les patriotes timides qui ne portent pas leur argenterie à la Monnaie, parce qu’elle n’est pas payée comptant, s’empresseront de l’échanger contre cette souscription, et en faisant le sacrifice d’un objet de luxe stérile, ils retireront, dans la révolution d’une année, 60 livres par chaque marc d’argent. Payement à bureau ouvert des billets de la caisse d'escompte au 1er mars 1790. La Caisse d’escompte aura reçu, à cette époque, 36,400,000 livres pour la première mise delà souscription. A cette époqüe, le montant des valeurs fournies par le gouvernement pour les avances que la caisse d’escompte a, jusqu’à ce jour faites, à l’administration des finances, ou seront rentrées, ou seront faciles à négocier : elles sont assignées sur la contribution patriotique dont l’échéance est en avril 1790; ainsi, n’ayant qu’un mois à courir, elles seront d’une facile négociation, avec [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 octobre 1789.] [Assemblée nationale.] d’autant plus de raison qu’elles serviront à ceux ui les auront prises à l’escompte au payement u premier tiers de la contribution. Par la négociation de ces valeurs, par le payement de la première mise des souscripteurs, la . masse des billets de caisse qui est actuellement de 114 millions sera au lfer mars réduite à environ 27 millions (1). Enfin à cette époque les administrateurs auront augmenté le numéraire effectif de la caisse, soit par des fabrications de piastres, ou autrement ; ils pourront même faire des opérations pour faire disparaître ce désavantage désastreux de notre change avec l’étranger. Une des opérations les plus efficaces à cet égard serait d’ouvrir et de faire remplir par quelque puissante maison de banque, soit d’Angleterre, soit de Hollande, la souscription d’emprunt proposé par la caisse d’escompte. 11 n’est aucun discrédit, il n’est point de méfiance qui ne soient susceptibles d’être subjugués, tant par le véhicule d’intérêts que par le concours de sûretés, de gages et de nantissements. On a vu qu’indépendamment d’un capital de 30 millions, formant une partie des fonds que la caisse d’escompte possède dans ses coffres, elle aura encore, en créances sur la nation converties en effets au porteur et disponibles 252 millions de capitaux, savoir : 70 millions, montant de la conversion de la quittance de finances de pareille somme, en annuités. 182 millions de reconnaissances au porteur, du Trésor royal, pour l’avance des payements des intérêts de la dette publique. 252 millions (2). Voilà donc la caisse d’escompte qui est en état de donner aux étrangers un gage tel qu’ils pourront le désirer pour vaincre jusqu’aux derniers retranchements la méfiance des prêteurs étrangers; On sait d’ailleurs que les capitalistes étrangers mettent singulièrement leur confiance, pour leur placement d’argent, ou dans les principales maisons de banque, ou dans les courtiers ou les agents de change. Or l’administration de la caisse d’escompte est composée, en majeure partie, des chefs des principales maisons de banque de la capitale. Ils emploieront tous les ressorts de l’amitié et de la confiance qui résultent nécessairement d’une longue relation d’affaires, pour déterminer leurs amis, chefs des principales maisons de banque de l’étranger, à concourir avec eux, pour remplir la souscription proposée. RÉSUMÉ. Ou la souscription proposée aura été payée en totalité ou elle l’aura été seulement en partie. (1) On en donnera la preuve arithmétique. (2) Il ne faut pas que l’Assemblée nationale soit effrayée de cette masse d’effets au porteur, il ne faut pas qu’elle craigne que cette masse devienne la proie de l’agiotage : c’est un simple gage en stagnation dans les coffres de la caisse, gage de responsabilité de ses engagements. 35» Si elle est payée en totalité par les appels successivement faits par les souscripteurs, alors il n’existera aucun billet en émigration pour l’avance des 182 millions faite par là caisse d'escompte au gouvernement, puisque c’est avec l’argent même des souscripteurs que le prêt se trouvera fait. ‘ S’il n’est fourni par les souscripteurs que la première mise de 36.400,000 livres formant le premier cinquième, alors pour l’avance faite au gouvernement il y aura seulement 145,600,000 livres de billets en émigration. Si les souscripteurs fournissent au second appel d’un cinquième, alors les billets en émigration se réduiront à 109,200,000 livres, S’ils fournissent à l’appel de la troisième mise, ils seront réduits à 72,600,000 livres, et ainsi successivement : tel est le résultat de cette opération; Ainsi, en présentant la solvabilité de la caisse d’escompte pour le payement d’une supposition de 182 millions de billets en émigration, onprésénte aussi la sûreté des engagements de cette caisse vis-à-vis des souscripteurs. Voici le tableau du gage énorme qui doit inspirer la confiance des porteurs de billets de la caisse, ou celle des souscripteurs. 30 millions de fonds effectifs en activité. 70 millions, disponibles par la conversion de la quittance de finance en annuités correspondantes à la quantité et aux numéros des actions. Cette disposition des 70 millions en annuités remboursables d’années en années, ouvrira pour l’avenir une ressource, celle d’un appel de fonds sur les actionnaires et la caisse en remettant à chaque actionnaire l’annüité dont le numéro correspondra à celui de son action, procurera par cette remise d’annuité la facilité de satisfaire à l’ap-el de fonds ; et par cette opération 'appel il n’y aura aucun changement, ni dans le capital de la société, ni dans son diviseur : la société sera toujours composée de 25,000 actions, et chaque action du même capital de 4,000 livres. 182 millions, montant des 182,000 reconnaissances au porteur, de 1 ,000 livres chacune. 282 millions. Total pareil. Ces 282 millions, négociables et disponibles, excéderont donc de 100 millions le montant ou des billeffc de la caisse mis en circulation pour le prêt fait au gouvernement, ou des engagements contractés par la caisse envers les souscripteurs. En dernière analyse, ce plan, en donnant des valeurs disponibles et négociables entre les mains de la caisse d’escompte, a le double avantage de vaincre, jusqu’aux derniers retranchements, la méfiance, soit des porteurs de billets de caisse, soit des prêteurs par voie de souscription, et de rendre à la caisse d’escompte les principes fondamentaux de son institution, c’est-à-dire de rétablir les payements, à bureau ouvert, de ses billets de caisse, à l’époque au plus tard du premier mars 1790. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 3g0 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. PIÈCE JUSTIFICATIVE. Calcul des 70 millions de la quittance de finance convertie en annuités. Cet état suppose un payement par semestre de 3,500,000 livres dont : 1,750,000 1. » f. » d. pour les intérêts des 70 millions. 1,750,000 » » en remboursement sur le capital. 3,500,000 » » somme pareille. Conséquemment la dégradation des intérêts à mesure du remboursement sur le capital. En divisant 70 millions de capital par 25,000, nombre égal aux actions, chaque annuité représente un capital de 2,800 livres. Et en divisant 3,500,000 livres, qui sera le payement de chaque semestre à compter du 1er avril 1791 (1), chaque annuité aura à recevoir par semestre 140 livres. Le dernier semestre seul échéant au 1 cr octobre 1804 sera de 149 liv. 16 fr. 3 d. Au moyen de cette division par 25 mille, s’il arrivait la liquidation de la caisse d’escompte, chaque action recevrait l’annuité correspondance à son n° d’actions. t«r avril 1791.. 1er octobre 1791. 1er avril 1792..* \ 1er octobre 1792. < l*r avril 1793.., 1er octobre 1793. < [6 octobre 1789.] Report ......... 58,821,460 1. 14 S. 5 d. (1) Comme il n’y aura point de remboursement sur le capital pour les semestres payables en avril et octobre 1790, les dividendes pour les intérêts de ces se-estres seront chacun de 70 livres. 1er avril 1794 . . < Intérêts . . . . 1er octobre 1794. J 1er avril 1795 . . 1er octobre 1795 ) 1er avril 1796 .J 6 < 1er octobre 1796. 1er avril 1797. Payement . . 1er octobre 1797. / 1er avril 1798. . < Payement . , Intérêts . 1er octobre 1798. A reporter. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Report ......... 36,084,606 1. 10 s. 8 d ! Intérêts..... 902,115 3 3 Total.. 36,986,721 13 H Payement... 3,500,000 » * 9 < Reste.. 33,486,721 13 H . Intérêts ..... 837 , 168 * 40 le>’ octobre 1709.) Total.. 34,323,889 14 9 ( Payement... 3,500,000 ” * Reste.. 30,823,889 14 9 Intérêts ..... 770,597 4 10 ! i«r arril 1800. . ) Total.. 31,594,486 19 7 � ( Payement... 3,500,000 » » 10 é Reste.. 28,094,436 19 7 ! Intérêts ..... 702 , 362 3 6 Total.. 28,796,849 3 1 Payement... 3,500,000 » » Reste.. 25,296,849 3 1 Î Intérêts ..... 632,421 4 7 Total.. 25,929,270 7 8 Payement . . . 3,500,000 » » 11 � Reste.. 22,429,270 7 8 ! Intérêts ..... 560,731 15 2 Total.. 22,990,002 2 10 Payement.... 3,500,000 » » Reste.. 19,490,002 2 10 ! Intérêts..... 487,250 11 1 Total.. 19,977,252 13 11 Payement... 3,500,000 » » 12 � Reste.. 16,477,252 13 11 / Intérêts ..... 411,931 6 il l»r octobre 1802./ Total.. 16,889,183 10 » \ Der Payement 3,500,000 » » Reste.. 13,389,183 10 » i Intérêts ..... 334,729 11 9 1er avril 1803.. / Total.. 13,723,913 1 9 [ Payement.... 3,500,000 » » 13 \ Reste.. 10,223,913 1 9 j Intérêts ..... 255 , 597 16 6 1er octobre 1803. < Total.. 10,479,510 18 13 ( Payement.... 3,500,000 » » Reste.. 6,979,510 18 3 ..... 6,979,510 18 3 [6 octobre 1789.] 361 RÉPONSE aux observations faites sur le projet de M. Duclos-Dufresnoy. Objection. On demande comment il est possible que Ja caisse d’escompte présente aux souscripteurs l’espoir de l’avantage d’un placement à 10 0/0, qu’elle ne retire que 3 0/0 d’intérêt du prêt fait au gouvernement, et que cette opération ne soit pas onéreuse aux actionnaires. Réponse. C’est que le produit de 3 0/0 de 182 millions, est plus fort que celui à 10 0/0 de 36,400,000 livres : en voici la preuve : L’intérêt à 3 0/0 de 182 millions, payé par l’Etat à la caisse d’escompte, est pour un an de .............. . ........... 51,460,000 livres. L’intérêt à 10 0/0, y compris la prime accordée aux souscripteurs des 36,400,000 livres, sera pour un an, de ......... 3,640,000 Conséquemment les actionnaires de la caisse d’escompte, auront un bénéfice annuel (1) de .......................... 1,820,000 Conséquemment les actionnaires auront intérêt de continuer ce prêt, et la nation de le conserver, attendu son modique intérêt de 3 0/0. Dans une opération de ce genre, il est juste qu’il y ait une chance possible de perte comme de profit. On vient de donner la preuve arithmétique de la chance de profit. Mais il y aura une chance de perte, non sur le capital, mais sur le dividende des actionnaires, si la caisse d’escompte est obligée de faire Jes appels successifs de la souscription, et d’en payer les intérêts aux souscripteurs. Jamais l’appel des seconde et subséquentes mises des souscripteurs n’a eu lieu en Angleterre, et il est très-probable qu’il n’aura pas lieu en France. En effet, la solvabilité de la caisse d’escompte et la possibilité de payement de ses billets sont démontrées jusqu’à l’évidence, on ne saurait trop en répéter la preuve. A reporter, (1) A titre d’accroissement, et indépendamment des bénéfices des autres opérations ordinaires d’escompte. 362 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 octobre 1789.] PASSIF. 182,000,000 de billets en circulation pour le payement intégral des intérêts de la dette publique. 80,000,000 aussi de billets en circulation, pour l’escompte des effets de commerce. 262,000,000 Total du passif. ACTIF. Les valeurs de responsabilité du passif seront : 182,000,000 de reconnaissances au porteur de 1,000 livres chacune, productives d’intérêt et décrétées par l’Assemblée nationale, pour le prêt fait au gouvernement par la caisse d’escompte. 80,000,000 montant des lettres de change de commerce escomptées, lettres garanties au moins par trois signatures. 100,000,000 formant le capital des actionnaires, dont 30 millions effectifs et 70 millions en annuités au porteur, remboursables en quatorze ans. 362,000,000 Total de l’actif. Ainsi, indépendamment des bénéfices du semestre qui sont couramment dans les coffres de la caisse, l’actif surpassera de 100 millions le passif. Cette démonstration évidente aux yeux du public suffit pour soutenir le crédit des billets de la caisse. Mais il sera soutenu encore par un grand concours d’intérêts personnels : Celui des actionnaires de la caisse d’escompte ; Celui des commerçants, des financiers et autres particuliers qui reçoivent journellement de la caisse des secours d’escompte; Celui des souscripteurs à l’emprunt, [intéressés à s’affranchir des appels sur leurs souscriptions ; Celui des rentiers et créanciers des intérêts de la dette publique, débarrassés désormais dé toutes les formes contentieuses, et assurés du payement exact et invariable de leurs rentes, à bureau ouvert, au 1er avril et octobre de chaque année. Cette coalition puissante d’une multitude énorme d’intérêts personnels des citoyens de la capitale, réunie au crédit qui doit nécessairement résulter de l’arrangement des finances du royaume, ne laisse aucun doute raisonnable, ne permet pas même la crainte d’une révolution de discrédit sur les billets de la caisse, dont la solidité est d’ailleurs si évidemment démontrée. Objection. On demande quel est le numéraire effectif qui existera dans la caisse pour répondre du payement à vue des billets ? Aura-t-il la proportion du quart exigé au moins par les statuts ? Réponse. Oui, et au delà, puisqu’il y aura 66,400,000 livres de numéraire effectif dans la caisse, savoir : 30,000,000 livres de fonds effectif des action-" n aires. 30,000,000 livres 36,400,000 reçus des souscripteurs, pour la première mise d’un cinquième de leur souscription. 66,400,000 livres. Somme pareille. Laquelle somme multipliée par 4 donne une moyenne d’émigration de billets qui peut s’élever à 265,600,000 livres (1). Il n’est pas probable d’ailleurs que l’émigration de billets monte à 262 millions, soit à cause de la négligence des créanciers des intérêts de la dette publique, pour recevoir leur rente à l’échéance, négligence qui deviendra bien plus fréquente, lorsqu’ils seront assurés d’être payés à vue et à présentation de leur dividende d’intérêt, soit parce que dans l’exécution de ce projet, il doit être remis à la caisse d’escompte par le gouvernement pour 91 millions de valeurs, trois mois avant l’ouverture des semestres d’avril et d’octobre. La négociation successive de ces valeurs, faite par la caisse d’escompte, fera rentrer dans la même proportion les billets en émigration. Lorsque l’arrangement des finances sera décrété par l’Assemblée nationale, le numéraire effectif que la confiance publique rapportera à la caisse d’escompte est incalculable, puisque avec un simple fonds effectif de 30 millions, le numéraire de la caisse s’est élevé en 1788 à près de 52 millions, ainsi qu’il résulte du discours prononcé le 17 novembre par M. Lavoisier, à l’assemblée générale des actionnaires. Objection. On demande enfin quel est le degré de probabilité du succès de l’emprunt proposé par voie de souscription ? Réponse. D’abord , on observe qu’il suffit qu’il soit rempli avant le 1er mars, époque fixée irrévocablement pour le payement des billets de la caisse, à bureau ouvert ; or, certainement à cette époque, les principaux arrangements des finances du royaume seront décrétés par l’Assemblée nationale ; or, à cette époque, l’ordre sera rétabli dans tout le royaume par l’établissement des municipalités et des assemblées de département : l’arrangement des finances et le rétablissement de l’ordre dans l’administration du royaume opéreront nécessairement la régénération du crédit national. Enfin, les actionnaires de la caisse d’escompte, animés par la perspective de prospérité de leur établissement, les rentiers par celle du payement (1) Mais l’appel fait sur les souscriptions diminuera cette masse de billets si elle a quelque influence de discrédit, Le deuxième appel seulement, fait le 15 avril, de 36,400,000 livres, réunira dans les coffres de la caisse 102,800,000 livres en numéraire effectif : les souscripteurs, en payant le second appel, auront placé leur argent à 8 au lieu de 10 O/O. 363 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 octobre 1789.] de dix-huit mois d’arrérages de leurs rentes, dans la révolution de six mois, les capitalistes, enfin, par celle de l’espoir d'un placement à 10 0/0 pour , un an. sur un débiteur dont l’actif excède de ’ 100 millions son passif. Tout concourt pour assurer le succès du mode d’emprunt proposé par souscription, pour venir au secours et de la caisse d’escompte et des besoins du gouvernement. Objection. On demande en dernière analyse si l’établissement d’une banque nationale sera constitutionnel. Réponse. Peu importe pour ce projet la solution de cette importante question. La caisse d’escompte peut . conserver, et la première dénomination, et son caractère d’établissement particulier ; elle sera à l’égard de la nation, ce qu’elle est à l’égard des particuliers, une caisse de secours. Elle sera la sous-caisse de la caisse nationale; elle aura pour cette caisse un compte courant ouvert en recette et dépense, comme elle en a actuellement pour les banquiers et particuliers. « ORIGINE DE LA CAISSE D’ESCOMPTE, SES PROGRÈS, SES RÉVOLUTIONS, SES STATUTS, SON ORGANISATION OU Lettre de M. Duclos-Dufresnoy à M. le comte de Mirabeau , sur sa motion du 16 septembre concernant la caisse d'escompte (1). Je répondrai, Monsieur le comte, à votre motion sur la caisse d’escompte, en rappelant vos principes, et ceux de Smith sur l’utilité de cet établissement; en rendant compte de son origine, de ses révolutions, de ses statuts, de son régime, des arrêts de surséance si souvent par vous rappelés au souvenir public, et des motifs -de ces arrêts, motifs absolument étrangers aux intérêts et à la situation de la caisse d’escompte. Cette discussion prouvera que, la régénération des finances opérée et la Constitution faite, la caisse d’escompte aura des droits plus incontestables à la confiance publique que la banque de Londres, et que c’est sur ses fondements que doit être élevé l’édifice d’une banque nationale. C’est un ami, variable dans ses principes sur l’utilité de cet établissement, qui a égaré votre plume ; c’est un patriote qui se fait un devoir de vous rappeler à votre caractère, c’est-à-dire à cette invariabilité de principes qui, sur la matière du droit public, vous a toujours caractérisé. § 1er. — Principes consacrés par M. le comte de Mirabeau et extraits littéralement de son ouvrage ' sur la caisse d’escompte publié en 1785. « Les banques publiques fournissent aux nations emprunteuses et obérées un moyen de ressource et d’économie. « Une des grandes utilités de ces institutions ingénieuses, mais délicates, est de faciliter les échanges, en multipliant les signes représentatifs des nécessités et de la richesse. t Elles ne le sont pas moins, pour entretenir l’intérêt de l’argent a un taux plus bas et plus uniforme qu’il ne l’était avant leur établissement; et cette opération de première importance est également favorable à l’agriculture, aux manufactures, au commerce et aux finances ; grâce au bas prix de l’intérêt de l’argent, l’agriculture est encouragée , les manufactures, sans augmenter leurs charges, emploient de plus grands capitaux ; le commerce s’ouvre de nouvelles branches dont le haut prix de l’argent l’avait exclu jusqu’alors, et les gouvernements acquièrent des moyens de soulager le peuple, sans nuire à leurs revenus. « Ces considérations* et même celles relatives à la facilité que la réduction de l’intérêt donne au souverain d’emprunter, en augmentant plus lentement, si ce n’est en diminuant la dette publique, nous paraissent faites pour plaire aux bons esprits. « D’ailleurs on est longtemps incommodé de la rareté des espèces avant que de connaître dis - tinctement la cause de ce que l’on éprouve. On regarde là disette du numéraire comme momentanée, et ce n’est qu’après en avoir longtemps souffert que Ton cherche à y remédier. Or, les caisses d’escompte ont au moins la propriété de retarder beaucoup ces époques embarrassantes ; puisqu’elles suppléent à la monnaie par des billets de confiance qui valent autant, lorsque cette confiance a une base solide. Les établissements de ce genre sont nécessaires sous ces rapports. « Les caisses d’escompte sont donc , sous bien des aspects, des établissements précieux qui méritent intérêt et faveur. » Le retour, monsieur le comte, à ces principes, a sans doute dicté ces paroles de votre motion. Je suis loin de vouloir détruire la caisse d'escompte ; c’est vous, Messieurs, qui la détruisez, si vous perdez de vue longtemps encore les soins pressants que l’établissement du crédit national exige. Que la nation puisse enfin se reposer sur vos travaux ! que le retour de Tordre se fasse apercevoir ! que vos promesses, vos résolutions inspirent pleine confiance par la sagesse de vos décrets I et Ton aura bientôt trouvé le remède dont la caisse d’escompte a besoin, il est indiqué par l’abus même qu'elle a fait de son industrie. § IL — Principes de Smith (1) suri’ utilité des banques publiques. « La substitution du papier à l’or et à l’argent monnayés remplace un instrument du commerce fort dispendieux, par un autre qui coûte bien moins. « Lorsque le papier tient la place de l’or et de l’argent monnayés, la quantité d’outils de subsistance peut être augmentée de toute la valeur de l’or et de l’argent qu’on avait coutume de mettre à les acheter. « L’opération ressemble en quelque sorte à celle de l’entrepreneur de quelques grands ouvrages qui, en conséquence d'une perfection dans quelques mécaniques, supprime les anciennes machines, et ajoute la différence entre leur prix et celui (1) Ce document n’a pas été inséré an Moniteur. (1) Traité des richesses des nations.