8» (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 avril 1790.1 ville, à faire un emprunt de quarante mille livres, pour être employé tant au payement des grains emmagasinés et à emmagasiner, qu’à l’acquit des dettes exigibles contractées par l’ancienne municipalité; le tout à charge de rendre compte de l’emploi de la somme ci-dessus. » M. Vernier fait également, pour le comité des finances, le rapport d’une demande formée par la ville de Montélimart, et conclut au décret suivant, qui est adopté: « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et après avoir ouï la lecture de la délibération prise par le conseil générai de la municipalité de Montélimart, au département de la Drôme, le 13 mars 1790, a décrété ce qui suit : « 1° La municipalité de Montélimart est autorisée à imposer une somme de 6,000 livres en capital, pour être employée à acquitter la partie qu’elle doit du logement des officiers de sa garnison, tant depuis l’établissement de ladite garnison, à l’époque des troubles qui ont eu* lieu en Dauphiné, que jusqu’à l’expiration delà présente année; elle est d’ailleurs autorisée à imposer 4 deniers pour livres du montant desdites 6,000 livres, pour droits de recette du collecteur ; 2° Cette imposition sera faite au marc la livre de la capitation, et répartie sur tous les habitants de la communauté, sans autre exception que de ceux dont la cote de capitation serait inférieure à la somme de deux livres. » M. Pellerin, député de Nantes, membre du comité des rapports, propose, pour la ville de Dieppe, le décret suivant : L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, informée de la manière dont a été faite l’élection des officiers de l’état-major de la garde nationale de la ville de Dieppe, et après avoir pris connaissance du règlement provisoire, fait pour maintenir la discipline et le service de cette garde, en date du 24 novembre dernier, déclare approuver ledit règlement et l’élection des officiers et de l’état-major de la garde nationale de la ville de Dieppe, pour avoir lieu jusqu’à l’organisation prochaine des gardes nationales du royaume. (Cette demande est renvoyée au comité de constitution.) M. Pellerin présente un décret qui autorise le Châtelet de Paris à donner suite à une affaire criminelle dont l’évocation lui a été attribuée par lettres patentes. Ce projet de décret est adopté comme il suit : L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, a décrété et décrète que le Châtelet, siège présidial de Paris, à qui Sa Majesté a attribué la connaissance des contestations, nées et à naître, au sujet des lettres de change qui peuvent avoir été altérées et falsifiées, dans le nombre de celles qui ont été acceptées par les sieurs Tourton, Ravel et Gallet de Santerre, comme aussi la connaissance des instructions criminelles relatives à l’altération et falsification des lettres de change, peut et doit continuer l’instruction jusqu’à jugement définitif, aux termes des lettres patentes portant l’attribution qui lui a été donnée desdites contestations et procédures criminelles en date du 2 décembre 1786. L’Assemblée nationale, ordonne à son président de se retirer par devers le roi pour supplier Sa Majesté de donner sa sanction au présent décret. M. Bouche dit qu’il s’est glissé une erreur dans l’impression du procès-verbal de la séance du 15 mars dernier, que le mot sanction a été substitué à celui d’acceptation, qui était dans la minute ; qu’il demande que cette erreur soit rectifiée: en conséquence l’Assemblée ordonne que le mot sanction, qui se trouve à la onzième ligne de la page troisième de son procès-verbal imprimé, du 15 mars, sera remplacé par celui d’acceptation. M. le duc de Biron, membre du comité des finances, demande à faire un rapport sur l’indemnité à accorder aux maîtres de poste. L’Assemblée décide que ce rapport et le rapport du comité féodal sur la chasse seront faits dans la séance du mardi 20 avril, au soir. L’ordre du jour est ensuite proclamé : il appelle la discussion sur la suite des articles proposés par le comité des finances sur les assignats. M. Prugnon. Attachera-t-on des intérêts aux assignats? Quel intérêt leur donnera-t-on? Voilà la question que vous devez examiner aujourd’hui. Vous avez décidé que les assignats seront forcés, et vous deviez le faire, ou bien vos assignats auraient été nuis : s’ils eussent été nuis, vous eussiez dû chercher un autre moyen; et si vous n’aviez pas trouvé ce moyen, il aurait fallu écrire sur le front de la constitution ce qu’on écrivit sur la tombe d’une beauté romaine: fuit. Les créanciers de l’Etat pourront dire : vous nous devez depuis longtemps dédommager par des intérêts; ils pourront dire: vous nous devez des intérêts jusqu’au remboursement ; vous nous assignez des fonds qui produisent des fruits, vous nous devez les fruits de ces fonds ..... Le capitaliste gui, assis sur sa caisse, enchaîne la société, et qui ne connaît que la cupidité et l’avarice, a besoin d’être tenté par l’intérêt : attachez donc des intérêts aux assignats. Cette conclusion paraît juste au premier coup-d’œil; cependant, en entrant dans le fond de la matière, on trouve plusieurs raisonnements par lesquels elle paraît attaquée d’une manière victorieuse. Vous faites un assignat qui vaut un écu; cet écu est destiné à payer des intérêts ; il ne saurait donc en porter. Un écu portant intérêt offre deux idées irréconciliables. C’est déjà un grand avantage pour le papier, qui vaut un écu, de pouvoir être pris forcément comme un écu: il est injuste d’attacher un intérêt à cette espèce d’écus ; les autres n’en portant pas. Ou l’assignat est bon, ou il ne l’est pas; s’il est bon, comme je n’en doute point, il n’a pas besoin d’intérêt; s’il est mauvais, l’intérêt ne le rendra pas bon : il prouvera qu’il est mauvais, et qu’on s’en est défié, même en le créant. Longtemps les billets de caisse ont été reçus sans inquiétude; ils ont même été désirés, et vous voulez qu’une nation doute de ses propres billets lorsqu’il ont derrière eux de superbes propriétés pour hypothèque. En Espagne, àVienne, en Sardaigne, des billets d’Etat circulent en portant intérêt; mais dans des pays où règne le pouvoir arbitraire, quelle base a ce papier ? Il est placé entre deux autres papiers; l’édit qui l'a établi est celui qui va le supprimer; il est placé entre une supposition et la banqueroute; c’est pour cela qu’il a fallu séduire les acheteurs de ce papier, en y attachant des intérêts ..... Je propose de créer : 1® pour 400 millions d’assignats portant intérêt à 5 0/0, et qui resteraient dans la caisse de l’extraordinaire ; 2° pour 400 89 [Àsjemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 avril 1790.] millions de billets monnaie, qui ne porteront point d’intérêt; ce sont ceux-là qui serviraient à payer vos créanciers. Les billets et les assignats auraient tous la même valeur; ils porteraient un numéro correspondant. Ceux qui ne voudraient pas garder des billets les échangeraient contre des assignats, qui ne sortiraient de la caisse de l’extraordinaire que dans le cas de cet échange. Ainsi jamais il n’y aurait plus de 400 millions en circulation. M. le marquis de Gouy d’Arsy. Il importe de répondre eu deux mots au préopinant, quoique ses observations ne soient pas parfaitement dans l’ordre du jour. Si chacun doit être libre de rendre des assignats ou des billets-monnaie, un omme qui aurait un billet, et qui voudrait le garder pendant huit jours, irait le changer contre un assignat pour retirer des intérêts pendant ce temps, et rechangerait son assignat contre un billet; de là un mouvement énorme qui exigerait une administration très dispendieuse. L’Etat ne cesserait pas d’être chargé des intérêts dont le préopinant croyait le libérer par le moyen qu’il a présenté. 11 a prétendu que cette charge très considérable est sans aucun objet. 11 aurait pu remarquer que l’Etat éteindra avec des assignats qui lui coûteront 3 0/0 des créances dont les intérêts sont à 5 et à 6. Je passe à la question. De la manière dont elle sera décidée dépendra le succès de votre opération ; et vous savez que de ce succès dépend le salut de l’Etat. Je propose de démontrer : 1° qu’il faut attacher un intérêt aux assignats; 2° que cet intérêt doit être peu de chose. Vous avez voulu rétablir la circulation du numéraire; vous n’v réussirez pas, s’il n’y a pas d’avantage à se défaire de son argent pour garder les assignats en portefeuille. Il faut donc attacher un intérêt aux assignats ; cet intérêt doit être peu de chose, parce qu’il n’a pas pour objet de donner du crédit aux assignats ; c’est l’assurance du paiement qui fait le crédit. Il ne faut pas que les capitalistes trouvent un avantage à soustraire les assignats à la circulation; il ne faut donc pas que l’intérêt soit considérable; il ne faut pas qu’il équivaille à celui des lettres de change; il ne faut pas non plus qu’il soit supérieur au prix des terres. On préférerait les assignats aux lettres de change, parce que leur hypothèque est plus sûre, parce que leur échéance est volontaire. Ces avantages feraient donner la préférence même à l’assignat qui ne rapporterait que 5 0/0; ainsi la faveur s’établirait dans nos changes; ainsi notre commerce se trouverait privé du numéraire fictif des lettres de change; et en voulant augmenter le numéraire, vous l’auriez considérablement diminué. Si les assignats produisaient 4 0/0, on ne les échangerait pas contre des terres qui ne rapportent que 3, qui font courir les risques attachés aux incertitudes d’une récolte, contre des immeubles dont on ne peut pas aisément se procurer la valeur. Les personnes qui se sont opposées à la création des assignats ont toutes demandé qu’on fixât l’intérêt à 4 et demi 0/0, bien sûres qu’alors la masse immense des biens du clergé resterait inattaquable. Vous pouvez être certains qu’il y avait là une arrière-pensée d’intérêt personnel : ona dit que les négociants demandaient la fixation des intérêts à 4 et demi, même à 5 0/0 : il faut déchirer le voile, et distinguer les négociants actifs et les négociants inactifs. Les premiers craignent l’influence d’un intérêt trop fort sur les lettres de change; les autres, qui sont des capitalistes et qui voudraient faire valoir leur argent, désireraient que les assignats portassent un intérêt de 5 et même 6 0/0. Hier, le comité des finances a reconnu que l’intérêt devait être fixé à 3 0/0; je pense qu’il serait plus convenable de le réduire à 2 0/0 et 7 dixièmes, parce qu’il n’y aurait pas de fraction. Notre détresse rend très pressant le secours qu’elle sollicite; il faudrait que les assignats-monnaie fussent déjà là, tandis que six semaines ou deux mois suffiront à peine pour leur fabrication. Je demande, en conséquence, que jusqu’à ce moment les billets de caisse portent intérêt et fassent fonction d’assignats par tout le royaume. M. Burdelot interrompt un moment la discussion et propose l’article additionnel suivant qui prendrait place après l’article 3 décrété hier : v Les porteurs d’assignats auront le droit de provoquer la vente des biens du domaine et du clergé qui seront par eux désignés, jusqu’à due concurrence, en faisant au préalable leur soumission de porter l’encbère au prix de i’estimaiion qui en aura été ou qui en sera faite, et déposant leurs assignats entre les mains de telle personne Sui sera commise par la municipalité du lieu. ans le cas où l’adjudication ne se passerait pas en leur nom, ils auront le privilège du remboursement sur le prix de ladite vente, s’ils sont payés en argent. Il sera procédé incessamment à la vente qui aura été ainsi provoquée, sans qu’il puisse y être sursis, pourvu toutefois que l’objet désigné puisse se détacher, sans perte ou sans inconvénient, ducorpsde ferme dont il serait dépendant. » (Cet article est renvoyé au comité des finances.) M. Anson, rapporteur. Quand le comité des finances s’est déterminé à vous proposer des intérêts à 4 1/2 0/0, il avait pris en considération le vœudesdéputésextraordinaires du commerce, qui viennent encore d’insister, et qui même ont demandé que l’intérêt fût porté à 5 0/0. Votre comité s’est rassemblé hier au soir ; il a été frappé lorsqu’il a vu presque toutes les adresses exprimer le désir des assignats à 3 0/0 ..... Un des objets de l’opération que vous avez décrétée est de retirer les billets de la Caisse d’escompte. Un orateur très éloquent a prétendu que les assignats-monnaie étaient désirés par les agents de change; les agents de change n’y ont nul intérêt; ils sont les intermédiaires entre le numéraire et ce qui n’est pas numéraire, entre celui qui a un effet et celui qui a de l’argent. Le même orateur a dit que la Caisse d’escompte désirait les assignats. Eh bien 1 on ne. donnera, pas d’assignats à la Caisse d’escompte : on a reçu des billets ; le receveur de l’extraordinaire retirera par échange ces billets et les remettra à la Caisse d’escompte avec une marque pour les éteindre. La Caisse d’escompte n’aura alors pas besoin d'assignats pour payer à bureau ouvert. Votre comité des finances m’a autorisé à vous proposer de fixer l’intérêt à 3 0/0 ; de cette manière un billet de 1,000 livres produira 20 deniers par jour. Les articles 4, 5, 6 et 7, sont ensuite mis aux voix et adoptés ainsi qu’il suit : « Art. 4. Au lieu de 5 0/0 d’intérêts par chaque année qui leur étaient attribués, il ne leur sera plus alloué que 3 0/0, à compter du 15 avril de l’année présente, et les remboursements, au lieu d’être différés jusqu’aux époques mentionnées dans lesdits décrets, auront lieu successivement par la voie du sort, aussitôt qu’il y aura une somme de i million réalisé en argent sur les obligations données par les municipalités pour les biens