[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. fl8r septembre 41914 Nous avons sous les yeux un grand exemple de cette vérité. L’Angleterre, cet Empire que la liberté et le commerce ont conduit au plus haut degré de prospérité et de puissance, est gouverné par un parlement (1) qui a le pouvoir de toucher à la Constitution et qui l’exerce souvent. Ces changements s’effectuent sans secousse, lorsque les événements les nécessitent, sans que jamais on ait jamais songé à des Conventions. Et qu’on ne dise pas comme à l’ordinaire : ces changements se font toujours au détriment du peuple, par un parlement corrompu. Que ces éternels déclama-teurs sur la corruption anglaise daignent nous expliquer comment, lorsqu’il s’agissait de faire, il y a quelques mois, une guerre injuste et désastreuse à la Russie, l’or et les promesses du ministère n’ont pu retenir ces hommes, toujours vendus suivant eux; et comment M. Pitt a vu décroître sa majorité d’une manière si effrayante pour lui; ou plutôt qu’ils nous rendent libres, heureux et puissants comme les Anglais; jusque-là qu’ils cessent de dire tant de mal d’une Constitution qui fait, depuis un siècle, le bonheur d’un grand peuple et dont, peut-être après bien des essais malheureux, nous serons forcés un jour de nous rapprocher. Le bonheur dont jouissent nos voisins et l’amour qu’ont tous les hommes pour la paix, ce besoin de tous les jours, doivent nous rassurer contre la crainte des innovations successives et violentes. D’ailleurs, il n’est pas plus en votre pouvoir de prolonger d’un seul moment votre ouvrage, qu'il ne vous est possible de prolonger votre existence individuelle. Tous les décrets ne peuvent rien contre la puissance de l’opinion et la force des choses. Au bout de l’immense levier de l’opinion publique, cette feuille légère peut ébranler l’univers; seule, elle est le jouet des vents. Ainsi, Messieurs, lorsque je vous demande d’écarter par la question préalable tous ces projets de Conventions, ce n’est pas que j’attache une extrême importance à cette question, puisque je suis intimement convaincu que ce projet ou tout autre de même nature ne saurait être exécuté, mais je voudrais sauver à cette Assemblée le reproche d’avoir voulu enchaîner la volonté de la nation, et d’avoir essayé quoique vainement de prolonger son existence, après sa séparation, pour gouverner encore. Vous vous rappelez sans doute que Louis XIV, toujours maître chez lui et souvent chez les autres, comme il le disait lui-même, imagina dans son orgueil de donner des lois et de régler le gouvernement après sa mort. Mais vous savez aussi ce qui arriva. A peine fut-il expiré, que l’Europe qu’il avait fait si longtemps trembler, vit annuler ses dernières volontés par quelques magistrats accoutumés à fléchir devant lui. Croyez-vous que l’Europe verrait casser aussi facilement cet étrange testament qu’on vous propose aujourd’hui; mais il y aurait cette différence, c’est que Louis XIV n’a point eu la douleur de voir son orgueil déçu. Je me sens la force de parler avec cette assurance, lorsque je suis soutenu par l’opinion de plusieurs excellents esprits et par l’autorité d’un grand homme. Mirabeau a dit dans cette tribune : tout ce qui est bon est constitutionnel ; le reste ne l’est pas. Ce mot profond tranche la question. Mais, me demande-t-on, qui reconnaîtra ce qui est bon d’avec ce qui ne l’est pas? La nation je pense. — Mais comment? — Par l’organe de ses représentants. — Quand? — Toujours. Je demande donc qu’on décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur la proposition de toutes, ces prétendues assemblées réformatrices. Que votre comité, au lieu devons proposer d’inexécutables décrets, vous soumette enfin le mode de présentation de l’acte constitutionnel au roi. Voilà ce qui est véritablement nécessaire et urgent; car il n’est aucun de vous qui ne doive trouver qu’il est plus que temps de cesser d’offrir (par une étrange et scandaleuse inconséquence) à la France et à l’Europe étonnées, le spectacle d’un roi déclaré inviolable et puni, et des hommes libres ne sauraient nier que la perte de la liberté ne soit la plus grave des punitions,. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. VERNIER. Séance du jeudi 1er septembre 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les Secrétaires fait lecture des pror-cès-verbaux des séances du mardi 30 août au matin et au soir , qui sont adoptés. Un membre , député du département de la Meuse, présente une adresse du tribunal du district de Varennes, contenant l’expression de sa respectueuse reconnaissance envers l’Assemblée, pour les dispositions de bienfaisance qu’elle a décrétées le 18 août dernier. Un de MM. les Secrétaires donne lecture d’une note de M. le ministre de la justice , ainsi conçue : « Conformément aux décrets des 21 et 25 juin dernier, le ministre de la justice a apposé le sceau de l’Etat aux décrets suivants : « Au décret du 23 juin 1791, qui suspend Renvoi des commissaires dans le département du Finistère. « A celui du 4 juillet, relatif à la suppression des chambres des comptes. « A celui du 19 dudit, qui annule l’inféodation du sol de la forêt de fieaufort, faîte au, sieur Barandier-Dessuile. « A celui du 2 août, portant qu’il sera versé à la Trésorerie nationale, par la caisse de l’extraordinaire, 16 millions pour être employés aux dépenses de la guerre. « A celui des 28 juillet, 2 et 6 août, sur les droits d’entrée et de sortie des marchandises. « A celui du 8 août, qui autorise les commissaires civils envoyés dans le département de la Vendée à se transporter dans le district de Ghâ-tilloo. « A celui du même jour, relatif à la circonscription des paroisses des districts d’Arras, de Bapaume, de Béthune, de Boulogne-sur-Mer, de Montreuil et de Saint-Pol. (1) Je dis que l’Angleterre est gouvernée par son parlement, parce que le roi d’Angleterre est partie intégrante et nécessaire du parlement.. (1) Cette séance est incomplète au M&niteur.