[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 septembre 1791.] 3*7| droit de demander 50,000 livres par exemple, n’aura pas assurément d’intérêt à réclamer la nullité ; quant à celui qui s’est eDgagé par l’acte à payer 50,000 livres, certainement il n’y a dans le monde aucun tribunal qui lui permette d’arguer de sa propre nullité; cela est tellement contraire aux premiers principes de la morale, u’en vérité aucune loi ne pourrait l’établir. oilà donc un acte qui sera par lui-même nul, d’une nullité absolue, et malgré les parties elles-mêmes, et qui pourtant existera. Maintenant, si vous voulez que votre loi s’exécute, il faudra que le commissaire du roi demande, au nom de la loi, que l’acte soit déclaré nul ; si vous allez jusque-là, votre loi, à la vérité, sera exécutée ; mais aussi elle est destructive de toute justice et de toute bonne foi ; car par là vous ne pouvez douter que ce sera l’homme de bonne foi, l’homme au secours duquel vous voulez aller, qui s’en trouvera victime, et d’une manière très fâcheuse pour lui, tandis que celui que vous voulez punir, jouira d’un avantage honteux et criminel. D’après ces réflexions, je demande que tous les officiers publics, les commis au droit d’enregistrement, les huissiers, les procureurs ne puissent pas, à peine d’interdiction et d’amende, recevoir, faire exécuter ou signer aucun des actes qui comprendront les qualités interdites. Je crois aussi qu’on doit punir d’une amende l’homme qui a pris, dans l’acte, des qualités interdites par la loi, lorsque l’acte passe sous les yeux de la société ; mais aller introduire, au travers de la liberté indéfinie des conventions humaines qu’il faut favoriser dans toute son étendue, un germe de nullité qui vient de la loi, et qui est indépendant de l’intention de toutes les parties, je crois que c’est créer un principe d’immoralité, et uand un principe d’immoralité est répandu ans la société, tous les honnêtes gens en souffrent et les fripons en profitent. M. Tronehet. En adoptant les réflexions de M. Duport, il faut, dans son propre système, ne-pas porter l’interdiction jusque sur tous les fonctionnaires publics, car il faut que les huissiers et les avoués puissent signifier les actes dont il est question ; seulement, il faut dire qu’ils ne pourront mettre de telles qualités dans le corps ae leurs exploits. M. Duport. C’est ce que j’ai entendu. Cela est évident. (L’Assemblée, consultée, adopte le principe de l’amende et de l’interdiction.) Un membre. Il me paraît que les termes du décret ne sont point étendus sur tous les actes de la société. Ainsi, par exemple, à l’égard des testaments, le décret ne statue rien du tout ; il ne peut même pas statuer, par la raison que ni l’amende ni la dégradation civique ne peuvent avoir lieu, dans le cas d’un testament olographe, vis-à-vis des héritiers et que la dégradation civique ne peut pas avoir lieu contre un homme mort. Cependant, il est opportun d’empêcher aussi que l’on ne prenne dans les actes testamentaires les qualités que l’on ne peut pas prendre dans les autres actes. Je demande donc que la loi soit précise à cet égard. M. Carat aîné. Si le testament est olographe, c’est une infraction aux lois de la part du testateur, mais la mort le dérobe à la peine. ( Marques d'assentiment). M. Chabroud. Je demande que l’amende dont vous venez d’adopter le principe soit fixée à 6 fois le montant de la contribution mobilière. M. Prieur. J’adopte l’amendement de M. Cha-broud; mais je demande que l’amende ne puisse pas être moindre de 3,000 livres. M. Lanjuinais. Il paraît plus raisonnable de prendre pour base de l’amende la contribution directe plutôt que la contribution mobilière, parce que la contribution mobilière ne se paye point ou se paye peu dans les campagnes ; mais il faut prévoir le cas où la contribution directe ne serait pas équivalente à la somme marquée. Je demanderais donc que l’amende fût de 6 fois le montant de la contribution directe et que néanmoins la somme ne puisse être moindre de 1,000 livres et que cette amende fût payable par corps. M. lie Chapelier, rapporteur . Le minimum me paraît ne pouvoir être fixé d’une part, et d’autre part contrarier le système pénal ; car un homme est plus puni souvent en payant 400 livres, qu’un autre en payant 4,000 livres. Puisque vous prenez pour règle la faculté présumée du citoyen, que d’autre part vous forcez celui qui n’a pas le moyen de payer 1,000 livres à les payer, il y a certes-là une injustice. Je m’élève donc contre le minimum et je dis qu’il faut simplement que vous fixiez l’amende à 6 fois la valeur de la contribution, sans établir ni minimum ni maximum. M. Lanjuinais. Eb bien I j’abandonne l’amendement. (L’Assemblée décrète que l’amende sera égale à 6 fois la valeur de la contribution mobilière et payable par corps.) M. Merlin. Je demande, en outre, qu’on ajoute aux peines à prononcer par les jugements, la radiation des titres exprimés dans les actes ; cela est extrêmement nécessaire. (Cette motion est adoptée.) M. Prieur. Il me semble que la loi n’est pas encore complète; elle ne prononce pas de peine contre ceux qui porteraient les marques distinctives attribuées aux ci-devant ordres supprimés. H faudrait que l’amende et la destitution des droits de citoyen, puissent s’appliquer également à ceux qui porteraient des distinctions proscrites par la Constitution. (Cette motion est adoptée.) M. Chabroud. Je demande que les diverses dispositions qui viennent d’être adoptées soient ajoutées au code pénal pour être réunies en un seul corps de lois. M. Le Pelletier-Saint-Fargeau. Il faut les renvoyer à la police correctionnelle. M. Chabroud. Je m’oppose à cette motion ! je ne veux pas que la police correctionnelle puisse priver des citoyens de leurs droits et de leur activité. (La discussion est fermée.) Le projet de décret modifié est mis aux voix dans les termes suivants : « L'Assemblée nationale ayant pour devoir