| Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]7 février 1791.] 32 pour repasser chez l’étranger; mais si vous en exemptez les lettres de change de l’étranger, payables en France, il en résultera que beaucoup de négociants tireront des lettres de change sous des noms supposés, pour se soustraire au droit, et le produit de l’impôt deviendra presque nul. Je demande que l’Assemblée se borne à décréter l’amendement de M. Martineau. (L’amendement de M. Martineau est adopté.) M. Roederer, rapporteur. J’adopte sans difficulté; mais il me semble que, pour ne pas faire un article séparé, on pourrait modifier l’article même et le rédiger ainsi : » Les lettres de change, môme celles qui seraient tirées par seconde, troisième et duplicata; billets à ordre ou au porteur, mandats, rescrip-tions et généralement tous les écrits portant promesse ou mandement de payer des sommes déterminées et qui circulent dans le commerce ; même les endossements et acceptations de pareils effets venant de l’étranger et payables en France lesquels seront présentés au timbre ou au visa dans la place de France où ils devront recevoir le premier endossement ou l’acceptation et seront chargés seulement de la moitié du droit imposé sur les effets de même valeur faits en France. « L’endossement des lettres de change et mandement de payer venant de l’étranger et payables chez l’étranger ne seront pas assujettis à être écrits sur papier timbré ou visés. » (Cette rédaction est adoptée.) M. Haïrac. Je demande que les négociants qui ont fait timbrer leurs livres de l’ancien timbre ne soient pas tenus de les faire timbrer de nouveau. (Murmures). M. Roederer, rapporteur. L’observation qui vous est faite est fondée; mais elle ne peut être admise dans son entier. Il est très certain que les négociants, qui ont fait timbrer jusqu’à présent, ne doivent pas perdre les registres qu’ils ont fait timbrer de l’ancien timbre. L’article premier de votre décret autorise les particuliers qui ont du papier timbré de l’ancienne régie de leur apporter dans trois mois, contre remboursement du prix. Les négociants ne peuvent pas rapporter les feuilles blanches de leurs registres ; il faut donc qu’ils soient admis à les faire contre-timbrer, mais à la charge de payer le supplément du droit à raison de l’excédent du prix du nouveau timbre sur l’ancien. Pour ne pas multiplier les articles inutiles dans la loi, je propose d’ajouter à l’article premier une disposition qui donnera satisfaction à M. Nairac et de dire ; « ou de les faire contre-timbrer en payant le supplément. » (Cette addition est adoptée.) M. de Fontenay. La plupart des lettres de change qui sont tirées de l’étranger se tirent par première et seconde ; le tireur adresse directement la première à celui sur lequel il tire, et cette première n’est point négociée. Il passe les ordres sur la seconde, qui circule dans le commerce; et c’est le dernier porteur souvent qui va rechercher la pre-mièrechez un banquier dt Paris, par exemple, audo-micile duquel elle a été indiquée. Je suppose que ce banquier n’a pas fait timbrer; certainement il n’est pas en faute : d’après cela je demanderais qu’il fût énoncé dans l’article que le porteur ne sera obligé d’en faire l’avance qu’au tant que la formalité n’aura pas été remplie sur l’effet qui lui a été transmis. Si la forme n’a pas été remplie sur la première, c’est la faute de l’accepteur, et c’est contre l’accepteur seul qu’on doit avoir recours. M. Roederer, rapporteur. Messieurs, il y a deux manières de présenter les lettres à l’acceptation : par la première, le tireur de la lettre de change s’adresse immédiatement à celui sur qui il la tire, à charge par lui de la faire accepter et de la remettre à une seconde personne; c’est de transmettre la lettre de change à une tierce personne, de la charger de la présenter à l’acceptation de celui sur qui elle est tirée. Dans l’un et dans l’autre cas, l’inconvénien t que prévoit le préo-pinant ne doit pas arriver. En effet, Messieurs, lorsqu’une lettre de changea été présentée immédiatement à l’accepteur ou au payeur par le tireur, pour être remise par ce dernier à une tierce personne, cette tierce personne ne doit la recevoir qu’au tant que l’accepteur l’aura soumise au timbre. De même, et à plus forte raison, si c’est une tierce personne quia été chargée par le tireur de présenter l’effet à l’acceptation, cette tierce personne est dans l’obligation, soit de la faire viser et timbrer elle-même, soit de la faire timbrer par l’accepteur, après l’avoir reçue de lui. M. de Fontenay. Ce n’est pas cela. Ma demande est que le porteur ne soit tenu à faire l’avance de l’amende qu’autant que la formalité n’aura pas été remplie sur l’effet qui lui a été fait. M. Déineunier. M. de Fontenay demande que lorsque le porteur d’une troisième lettre de change est obligé ce la faire protester, vous disiez si ce sera l’accepteur de la première qui fera l’avance des frais, ou bien si ce sera le dernier porteur. Il demande en même temps que le dernier porteur ne soit pas tenu à faire les avances, mais que les avances soient faites par le premier accepteur. Les droits du Trésor public étant à couvert, on i eut adopter cette disposition, qui est purement additionnelle. Cela se réduit à ajouter dans l’un des articles qu’a lus M. le rapporteur, que dans le cas où une lettre de change aurait été tirée par première et seconde, lorsque le premier porteur l’aura fait accepter, et que le dernier porteur sera forcé de la faire protester, ce n’est pas lui, mais le premier accepteur qui sera tenu de faire les avances pour les droits de timbre. Je crois qu’il est impossible àM. le rapporteur, s’il a bien entendu la difficulté, d’y répondre réellement. (L’amendement est adopté.) M. Roederer, rapporteur. Yoici encore une addition; elle porte sur l’article 21 : « La régie fera déposer dans les greffes des tribunaux de commerce des empreintes des timbres de commerce, lettres de change et autres mandements de payer. » (Adopté.) M. Roederer, rapporteur. On pourrait encore ajouter que le décret sera porté dans le jour à la sanction du roi. (Adopté.) Un membre : Je demande si le comité a préparé son rapport sur la pétition de la communauté des parcherainiers, qui lui avait été renvoyée? [Assemblée nationale.| ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 février 1791.] 33 Je prie l’Assemblée d’observer que le décret ui permet d’employer du papier timbré, au lieu e parchemin, faii un tort considérable aux par-cheminiers, sans qu’il en résulte aucun avantage sensible pour le public. M. Roederer, rapporteur. Je réponds au préopinant que nous avons en effet examiné cette aemandedesparcheminiers. Pour l’apprécier, l’Assemblée n’a qu’à se rappeler les motifs d’après lesquels elle s’est décidée : elle n’a pas supprimé l’usage du parchemin; au contraire, elle le laisse en concurrence avec le papier, sans payer de droits plus forts. On peut donc croire qu’au lieu d’en diminuer la consommation, elle sera favorisée. Si l’on rétablissait l’ordre ancien, le public et le Trésor national seraient grevés, relativement au produit que l’on attend du nouveau mode de perception ; le public, parce que vous l’avez sou-lagéen l’autorisant à employer du papier au lieu de parchemin timbré, et qu’il aura par ce moyen les expéditions à beaucoup meilleur compte qu’autrefois. Le Trésor public d’un autre côté souffrirait, parce qu’autrefois il n’y avait qu’une première expédition qui lut nécessairement en parchemin, et toutes les deuxièmes, troisièmes et ultérieures, étaient faites en papier de la régie. Et je dis qu’en remplissant ces deux objets vous ne faites pas encore de tort aux parchemi-niers, puisque vous favorisez l’emploi du parchemin pour tous les particuliers qui le préféreraient à du papier, en le leur donnant à meilleur compte. M. de Saint-Martin. 11 a été distribué à l’Assemblée une pétition des papetiers de Paris. Cette pétition tombe sur l’article 2 : « La régie fournira exclusivement, et au prolit du Trésor public, pour tous les actes, le papier nécessaire. » Mon obervation porte sur ces mots : La régie fournira exclusivement. Je demande à M. le rapporteur si le comité entend que la régie fasse fabriquer elle-même, ou bien s’il y aura des bureaux de timbre dans tous les départements, afin d’employer en même temps toutes les manufactures du royaume. M. Roederer, rapporteur. Le dommage, que les papetiers appréhendent, n’est pas du tout aussi considérable qu’ils le craignent, et même n’est pas augmenté au delà de celui que pouvait leur porter ci-devant le privilège attrinué à la régie, pour la vente des papiers timbrés. Il faut savoir. Messieurs, que la pétition des papetiers, présentée à l’Assemblée nationale, consiste a obtenir de vendre tout le papier, et à ce que la régie n’en vende point. En conséquence, Tunique moyen de perception qu’emploierait la régie serait d’appliquer un timbre aux papiers que vendraient les papetiers. Messieurs, cela est incompatible avec le produit, parce qu’il ne suffit pas que la régie applique un timbre, il faut qu’elle ait tous les moyens qui sont dans la puissance humaine pour prévenir la contrefaçon. Or, si Ton appliquait un timbre indistinctement et à toute espèce de papiers qui seraient présen tés au timbre par des particuliers, on n’aurait aucun moyen de découvrir, de reconnaître les con-trefaçonsqui pourraient s’introduire, ou, du moins, on perdrait les moyens les plus efficaces pour parvenir à cette découverte. Cet inconvénient a été si bien senti par l’Assemblée qu’elle a décrété un timbre extraordinaire !’• Série. T. XXIII. pour les papiers autres que ceux de la régie qui seraient présentés par les particuliers, afin de réserver ainsi à la régie le moyen de reconnaître les contrefaçons de son timbre et de les poursuivre. J’observe d’ailleurs que ce privilège est tellement inséparable du droit, qu’il est établi en Angleterre. Quant auxregistres des négociants, on nesera tenu de faire timbrer comme autrefois que ceux portés en justice, et les négociants se pourvoiront infailliblement, chez les marchands de papier, de papier ordinaire qu’ils feront timbrer extraordinairement; les marchands de papier ne perdront rien à cet égard. Enfin le comité a vu dans la pétition des fabricants de papier l’inconvénient de nuire au service public en privant la régie de la faculté de choisir elle-même les fabriques le plus à sa portée et d’éviter ainsi soit des frais considérables de transport, soit des avaries, soit toutes autres pertes. (La discussion est close.) Le décret général portant établissement du timbre est adopté comme suit: (1) Art. 1er. « A compter du premier avril prochain, la formule sera abolie, les timbres maintenant en usage seront supprimés, les papiers ou parchemins, qui s’en trouveraient marqués, ne pourront être employés qu’après avoir été contre-timbrés du timbre qui sera ci-après établi, et il sera libre à tout particulier, qui en serait pourvu de les rapporter dans trois mois, à compter du jour de la publication du présent décret, à la régie qui lui en rendra le prix; ou de les faire contre -timbrer, en payant le supplément. Art. 2. « A compter de la même époque, et dans toute l’étendue du royaume, la régie de la formalité de l’enregistrement fournira exclusivement et au profit du Trésor public, pour tous les actes qui seront ci-après indiqués, des papiers marqués de nouveaux timbres, et dont les prix seront déterminés par le tarif annexé au présent décret. Art. 3. « Seront écrits sur papier timbré : « 1° Toutes les minutes et expéditions d’actes qui, soit en minute, soit en expédition dans tous les cas, ou dans quelques cas seulement, sont soumis à la formalité de l’enregistrement, en vertu du décret du 5 décembre dernier ; « 2° Les minutes et copies signifiées des jugements des juges de paix, et les minutes et les copies des actes de procédure et instruction des instances; « 3° Les registres des municipalités pour tout ce qui concernera leurs affaires, et sera étranger aux fonctions publiques qui leur sont déléguées par les lois ; les registres des universités, facultés, collèges, hôpitaux, fabriques; ceux des administrateurs, syndics, marguilliers, fabri-ciens, receveurs des droits et des revenus des villes et hôpitaux; ceux des notaires, huissiers et autres officiers ministériels, greffiers et concierges des prisons et autres lieux de détention; ceux des courtiers, agents de change, et de toute personne ou corps revêtus d’un caractère public, et obligés, par les règlements, à tenir des registres ; « 4° Les expéditions, extraits, copies certifiées (1) Ce décret n’est pas inséré au Moniteur. 3