198 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 46 Villers, au nom des comités d’agriculture et de commerce : D’après le rapport de vos comités de commerce et d’agriculture, vous avez décrété, le 14 frimaire, que les administrateurs du bureau de commerce à Marseille, qui avaient continué leurs fonctions contre les dispositions de la loi du 6 septembre 1792, seraient mis en état d’arrestation et rendraient compte des deniers qu’ils avaient reçus. Ce décret a été exécuté; les administrateurs ont été mis en état d’arrestation, et le district de Marseille a nommé des commissaires pour examiner leurs comptes. Le 17 pluviôse, ces comptes ont été vérifiés, et le 22 du même mois ils ont été reçus par l’administration du district. Il est nécessaire de vous rappeler en peu de mots les motifs qui vous ont déterminés à rendre le décret du 14 frimaire. L’Assemblée législative, en supprimant, le 27 septembre 1791, toutes les chambres de commerce dont l’existence annonçait encore des corporations, n’avait indiqué aucune mesure pour la réception des marchandises du Levant, ni pour plusieurs autres objets dont Marseille était particulièrement chargée. Cette ville, voulant prévenir les malheurs qu’un pareil oubli pouvait causer, fit un règlement pour l’établissement d’un bureau provisoire de commerce, qui fut approuvé par le district et confirmé par le département le 24 juillet 1792. Ce bureau était composé du maire de Marseille, du procureur de la commune, de quatre officiers municipaux et de douze administrateurs. Le 6 septembre suivant, l’Assemblée législative attribua aux conservateurs de la santé à Marseille la perception des droits dont le bureau de commerce était chargé, en fixant le mode de liquidation et de comptabilité de l’une et l’autre de ces administrations. Les membres du bureau de commerce étaient disposés à se soumettre à cette loi; mais le conseil général de la commune arrêta, le 14 janvier suivant, qu’il serait fait à la Convention nationale une pétition sur cet objet, et qu’en attendant sa décision le bureau de commerce subsisterait. Cette pétition donna lieu au décret du 31 mars 1793, qui a maintenu provisoirement ce bureau de commerce, et d’après lequel les membres qui le composaient semblaient ne pouvoir se dispenser de continuer leurs fonctions. C’est cependant pour s’y être conformés que vous les avez frappés le 14 frimaire. Nous n’examinerons pas si, malgré le vœu du conseil général de la commune, le bureau ne devait pas d’abord obéir au décret qui le supprimait; tout annonce qu’il a été violenté par une municipalité perfide. Nous n’examinerons pas la conduite de cette municipalité, qui, non contente de s’opposer à l’exécution d’une loi, eut l’audace de vous le déclarer; elle a subi les peines dues à ses forfaits. Nous n’examinerons pas enfin si le décret du 31 mars 1793 vous fut surpris; on vous a déjà dit qu’il avait été le fruit de l’intrigue; ce qu’il y a de certain, c’est que vous ne le rendîtes que pour vous instruire plus parfaitement des motifs de la réclamation de cette commune. Aussitôt que l’administration du département fut épurée, elle sentit tous les inconvénients de ce dernier décret; elle prit sur elle de suivre l’exécution de celui du 6 septembre 1792, qui supprimait le bureau de commerce; elle arrêta en conséquence, le 20 vendémiaire, qu’il serait procédé à sa liquidation, et il a été versé à différentes époques, dans la caisse du bureau des conservateurs de la santé, une somme de 84,171 liv. 10 s. 1 d. On accusait encore les administrateurs d’un fait grave : c’était d’avoir fait transporter de la Monnaie dans leur caisse des sommes considérables pour soutenir la rébellion. Il est très-vrai que, le 15 août 1793, le receveur du bureau de commerce fut sommé par cette même municipalité, qui peu de temps auparavant s’était opposée à l’exécution de la loi, de recevoir dans sa caisse la somme de 532,000 liv. en numéraire; mais le bureau de commerce ne paraît pas avoir participé à cette voie de fait; ceux qui en étaient les auteurs ont été punis. D’ailleurs cette somme a été rétablie en entier dans la Monnaie; ce qui est constaté par un procès-verbal du département, du 5 octobre 1793. Les membres du bureau provisoire du commerce à Marseille ayant été autorisés à continuer leurs fonctions par le décret du 31 mars 1793, s’étant conformés à celui du 14 frimaire en rendant leurs comptes, les comptes ayant été trouvés bons, comme il est constaté par l’arrêté du district du 22 pluviôse, n’étant pas d’ailleurs coupables du transport de la Monnaie dans leur caisse de cette somme de 532,000 liv., il vous reste à prononcer sur l’état d’arrestation où ils sont depuis plus de quatre mois. Je n’ajouterai que quelques observations aux faits que je viens de vous exposer; c’est que le patriotisme de ces citoyens ne peut être suspect, puisque la députation des Bouches-du-Rhône s’intéresse à leur sort. Plusieurs d’entre eux peuvent être dans ce moment de la plus grande utilité pour la République; depuis qu’ils sont en arrestation, ils se sont servis utilement de leur crédit chez l’étranger pour nous procurer des subsistances et des approvisionnements. Le projet de décret que je vais vous présenter a été communiqué au comité de sûreté générale, qui l’a adopté (1) . Le décret est adopté ainsi qu’il suit : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [VILLERS au nom de] ses comités de sûreté générale, de commerce et d’agriculture; Considérant qu’il est constaté par l’arrêté du district de Marseille, du 22 pluviôse, que les membres du bureau provisoire du commerce de cette commune ont rendu le compte qui leur était prescrit par la loi du 14 frimaire dernier; Rapporte celle du 31 mars 1793, et décrète que les représentants du peuple qui sont actuellement dans le département des Bouches-du-(1) Mon., XX, 298; AF "14, f° 546. 198 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 46 Villers, au nom des comités d’agriculture et de commerce : D’après le rapport de vos comités de commerce et d’agriculture, vous avez décrété, le 14 frimaire, que les administrateurs du bureau de commerce à Marseille, qui avaient continué leurs fonctions contre les dispositions de la loi du 6 septembre 1792, seraient mis en état d’arrestation et rendraient compte des deniers qu’ils avaient reçus. Ce décret a été exécuté; les administrateurs ont été mis en état d’arrestation, et le district de Marseille a nommé des commissaires pour examiner leurs comptes. Le 17 pluviôse, ces comptes ont été vérifiés, et le 22 du même mois ils ont été reçus par l’administration du district. Il est nécessaire de vous rappeler en peu de mots les motifs qui vous ont déterminés à rendre le décret du 14 frimaire. L’Assemblée législative, en supprimant, le 27 septembre 1791, toutes les chambres de commerce dont l’existence annonçait encore des corporations, n’avait indiqué aucune mesure pour la réception des marchandises du Levant, ni pour plusieurs autres objets dont Marseille était particulièrement chargée. Cette ville, voulant prévenir les malheurs qu’un pareil oubli pouvait causer, fit un règlement pour l’établissement d’un bureau provisoire de commerce, qui fut approuvé par le district et confirmé par le département le 24 juillet 1792. Ce bureau était composé du maire de Marseille, du procureur de la commune, de quatre officiers municipaux et de douze administrateurs. Le 6 septembre suivant, l’Assemblée législative attribua aux conservateurs de la santé à Marseille la perception des droits dont le bureau de commerce était chargé, en fixant le mode de liquidation et de comptabilité de l’une et l’autre de ces administrations. Les membres du bureau de commerce étaient disposés à se soumettre à cette loi; mais le conseil général de la commune arrêta, le 14 janvier suivant, qu’il serait fait à la Convention nationale une pétition sur cet objet, et qu’en attendant sa décision le bureau de commerce subsisterait. Cette pétition donna lieu au décret du 31 mars 1793, qui a maintenu provisoirement ce bureau de commerce, et d’après lequel les membres qui le composaient semblaient ne pouvoir se dispenser de continuer leurs fonctions. C’est cependant pour s’y être conformés que vous les avez frappés le 14 frimaire. Nous n’examinerons pas si, malgré le vœu du conseil général de la commune, le bureau ne devait pas d’abord obéir au décret qui le supprimait; tout annonce qu’il a été violenté par une municipalité perfide. Nous n’examinerons pas la conduite de cette municipalité, qui, non contente de s’opposer à l’exécution d’une loi, eut l’audace de vous le déclarer; elle a subi les peines dues à ses forfaits. Nous n’examinerons pas enfin si le décret du 31 mars 1793 vous fut surpris; on vous a déjà dit qu’il avait été le fruit de l’intrigue; ce qu’il y a de certain, c’est que vous ne le rendîtes que pour vous instruire plus parfaitement des motifs de la réclamation de cette commune. Aussitôt que l’administration du département fut épurée, elle sentit tous les inconvénients de ce dernier décret; elle prit sur elle de suivre l’exécution de celui du 6 septembre 1792, qui supprimait le bureau de commerce; elle arrêta en conséquence, le 20 vendémiaire, qu’il serait procédé à sa liquidation, et il a été versé à différentes époques, dans la caisse du bureau des conservateurs de la santé, une somme de 84,171 liv. 10 s. 1 d. On accusait encore les administrateurs d’un fait grave : c’était d’avoir fait transporter de la Monnaie dans leur caisse des sommes considérables pour soutenir la rébellion. Il est très-vrai que, le 15 août 1793, le receveur du bureau de commerce fut sommé par cette même municipalité, qui peu de temps auparavant s’était opposée à l’exécution de la loi, de recevoir dans sa caisse la somme de 532,000 liv. en numéraire; mais le bureau de commerce ne paraît pas avoir participé à cette voie de fait; ceux qui en étaient les auteurs ont été punis. D’ailleurs cette somme a été rétablie en entier dans la Monnaie; ce qui est constaté par un procès-verbal du département, du 5 octobre 1793. Les membres du bureau provisoire du commerce à Marseille ayant été autorisés à continuer leurs fonctions par le décret du 31 mars 1793, s’étant conformés à celui du 14 frimaire en rendant leurs comptes, les comptes ayant été trouvés bons, comme il est constaté par l’arrêté du district du 22 pluviôse, n’étant pas d’ailleurs coupables du transport de la Monnaie dans leur caisse de cette somme de 532,000 liv., il vous reste à prononcer sur l’état d’arrestation où ils sont depuis plus de quatre mois. Je n’ajouterai que quelques observations aux faits que je viens de vous exposer; c’est que le patriotisme de ces citoyens ne peut être suspect, puisque la députation des Bouches-du-Rhône s’intéresse à leur sort. Plusieurs d’entre eux peuvent être dans ce moment de la plus grande utilité pour la République; depuis qu’ils sont en arrestation, ils se sont servis utilement de leur crédit chez l’étranger pour nous procurer des subsistances et des approvisionnements. Le projet de décret que je vais vous présenter a été communiqué au comité de sûreté générale, qui l’a adopté (1) . Le décret est adopté ainsi qu’il suit : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [VILLERS au nom de] ses comités de sûreté générale, de commerce et d’agriculture; Considérant qu’il est constaté par l’arrêté du district de Marseille, du 22 pluviôse, que les membres du bureau provisoire du commerce de cette commune ont rendu le compte qui leur était prescrit par la loi du 14 frimaire dernier; Rapporte celle du 31 mars 1793, et décrète que les représentants du peuple qui sont actuellement dans le département des Bouches-du-(1) Mon., XX, 298; AF "14, f° 546.