SÉANCE DU 4e JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (SAMEDI 20 SEPTEMBRE 1794) - N08 10-11 303 10 La société populaire de la commune de Bourg [département de l’Ain] remercie la Convention nationale d’avoir envoyé dans le département de l’Ain le représentant du peuple Boisset. Les habitans de cette contrée, dit cette société, gémis-soient depuis un an, courbés sous la hache des partisans de l’anarchie : des victimes avoient été immolées ; les habitans ne calculoient plus les avantages de l’existence ; leurs vies appartenoient à des tyrans, et des ruisseaux de sang al-loient encore couler : votre digne collègue Boisset est arrivé, il a rétabli partout le calme et le bonheur. Elle donne ensuite des renseignemens sur les causes d’arrestation de plusieurs individus de ce département, et fait passer à la Convention nationale l’adresse envoyée aux officiers municipaux de Bourg par les volontaires du troisième bataillon de ce département. La Convention nationale ordonne l’insertion en entier au bulletin de cette adresse, et de celle du troisième bataillon du département de l’Ain, et le renvoi des pièces au comité de Sûreté générale (27). Une députation de la commune de Bourg, département de l’Ain, est admise à la barre (28). Elle demande que la Convention nationale et le comité de Sûreté générale ne prennent aucune mesure sur les rapports qui lui ont été faits de l’état de ce département; elle assure que les patriotes n’y sont pas incarcérés, que les hommes renfermés dans les maisons d’arrêt ne sont que des anarchistes turbulents, des intrigants dangereux et des fripons adroits. Elle loue la conduite du représentant du peuple, Boisset, qui entretient dans ce département l’ordre et la paix par des mesures aussi sages que vigoureuses. MERLINO : J’atteste la vérité des faits contenus dans l’adresse. On a hasardé, sur l’état du département de l’Ain, des assertions sur lesquelles j’appelle l’attention et l’examen de l’Assemblée. Je demande le renvoi de la pétition au comité de Sûreté générale. BASSAL : J’appuie le renvoi, et je provoque aussi l’examen; mais je n’ai pas la même confiance dans les récits qui viennent d’être faits à la Convention. Il n’est pas question des hommes qu’on vient de faire incarcérer dans le département de l’Ain ; ils seront connus un jour, puisqu’ils seront jugés. Ils ont pu bien servir la République dans les moments de dan-(27) P.-V, XLV, 345-346. (28) Cette adresse donne lieu à des présentations differentes dans les diverses gazettes : les Débats, n° 730, 570-571, présentent la pétition des citoyens de la commune de Bourg comme ayant pour but de réclamer la libération de trente-deux citoyens, incarcérés par ordre du représentant du peuple Boisset. Moniteur, XXII, 27 ; Mess. Soir, n° 763 ; C. Eg., n° 763 ; J. Fr, n° 726 ; M. U., XLIII, 559 ; Gazette Fr., n° 994 et n° 995 ; F. de la Républ., n° 441 ; J. Paris, n° 729. ger, et perdre ensuite le prix de leur énergie et de leur dévoûment par des crimes que je ne connais pas ; mais la Convention doit être en garde contre des relations peut-être intéressées. Il y a eu de grands mouvements dans le département de l’Ain; ils ont été excités par des hommes rebelles contre les décrets de la Convention nationale : des bataillons armés, payés et dirigés contre la représentation nationale ont été organisés par des autorités révoltées ; le peuple a été mis partout dans une fermentation dangereuse, pour servir des projets perfides ; ces hommes coupables ont-ils été punis ? ces fonctionnaires séditieux sont-ils incarcérés? seront-ils un jour jugés? Voilà ce qu’il nous importe aussi de savoir. Je demande un rapport, mais je demande aussi que les représentants du peuple envoyés dans ce département soient tous appelés pour éclairer la discussion des comités. La Convention décrète le renvoi au comité de Sûreté générale (29). LEGENDRE annonce que le comité de Sûreté générale a nommé hier deux commissaires, qü’il a chargés dé s’occuper de ce rapport. GOULY déclare que la Convention et les Jacobins ont été trompés sur les événemens arrivés dans le département de l’Ain. Il dit que ce département est généralement composé de citoyens laborieux, agriculteurs et amis de la Convention : il convient que deux communes ont été agitées par des mouvemens de rébellion, fomentés par des scélérats; mais il ne pense pas que cela suffise pour accuser les intentions et le civisme de la majorité des citoyens de cette partie de la République : il conclut en demandant le renvoi de la pétition au comité de Sûreté générale, qui sera chargé d’en faire un prompt rapport. Il espère qu’à ce moyen, la Convention s’éclairera sur les véritables ennemis du peuple. Le renvoi est décrété (30). 11 On fait lecture du bulletin de santé du représentant du peuple Tallien ; elle est assez assurée pour cesser les bulletins à dater de ce jour (31). [ Bulletin de santé du représentant du peuple Tallien, 4e sans-culottide an II, à midi ] (32) (29) Moniteur, XXII, 27. (30) Débats, n° 730, 571. (31) P.-V., XLV, 346. (32) C 318, pl. 1288, p. 2. Bull., 4e jour s.-c ; Moniteur, XXII, 27 ; Débats, n° 730, 570. J. Mont., n° 144 ; Mess. Soir, n° 763 ; J. Fr., n° 726 ; M.U., XLIII, 559 ; Ann. Patr., n° 628 ; C. Eg., n° 763 ; F. de la Républ., n°441 ; J. Perlet, n° 728 ; Gazette Fr., n° 995 ; J. Paris, n° 629. 304 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Nous regardons la santé du représentant du peuple Tallien comme assez assurée pour cesser les bulletins à dater de ce jour; mais lorsque la plaie sera cicatrisée, nous estimons qu’il doit passer sa convalescence à la campagne : ce sera le moyen le plus sûr de dissiper les affections spamodiques et les palpitations qu’il éprouve depuis l’époque de l’attentat porté à ses jours. Navier, Desault, Souque, Chabaneau. [on, applaudit ] (33) 12 Les citoyens Tanilly et Colin réclament leur mise en liberté. Renvoyé au comité de Sûreté générale (34). 13 Le comité des Secours propose à la Convention différens décrets en faveur de plusieurs citoyens acquittés par le tribunal révolutionnaire, au nombre desquels on remarque les 94 Nantais dernièrement acquittés, et qui doivent quitter Paris, en conséquence du décret d’hier (35). La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des secours publics, rend les décrets suivans : a La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Roger Ducos, au nom de] son comité des Secours public sur la pétition du citoyen Eustache-Rolland-Ro-ger Lesot, blanchisseur, domicilié à Paris, lequel, après onze mois de détention, et avoir été acquitté et obtenu sa liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 17 prairial, n’a néanmoins été élargi que le 4 fructidor; décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera audit Rolland-Roger Lesot la somme de 1 100 L, à titre de secours et d’indemnité. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (36). b La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Merlino, au nom de] (33) Débats, n° 730, 570. (34) P.-V, XLV, 346. (35) Débats, n° 730, 564. (36) P.-V., XLV, 346. C 318, pl. 1288, p. 3. Décret n° 10 955. Minute de La main de Roger Ducos, rapporteur. Bull., 1er vend, (suppl.). son comité des Secours publics sur la pétition des citoyens nommés en l’article suivant, faits prisonniers à l’isle de Taba-go, traduits ensuite à celle de la Barbade, débarqués après l'échange à Port-Malo, mis, par méprise, en arrestation à leur arrivée à Paris, et mis en liberté par arrêté du comité de Sûreté générale ; prenant en considération les maux qu’ils ont soufferts et les pertes qu’ils ont éprouvées, décrète : Article premier. - Sur la présentation du présent décret, la trésorerie nationale paiera aux citoyens Chaporé, Charles Fiot, François George, Jean-Pierre Etienne, Dufrenoi aîné, Dufrenoi le jeune, Barthélemi Romestain, Gaétan Audibert, Jacob Suzer, Charles Cabré, nègre, Julie, négresse, Etienne-Joseph Brunet et Jean Peraire, chacun une somme de 400 L. Art. II. - Indépendamment de cette somme, ils participeront aux secours déjà décrétés en faveur des réfugiés des communes envahies par l’ennemi, à compter du jour de leur débarquement. Art. III. - Le comité de Salut public est chargé d'employer ceux de ces citoyens qu’il jugera capables de servir la République, soit dans l’intérieur soit aux armées. Art. IV. - Le présent décret sera imprimé au bulletin de correspondance (37). c La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Roger Ducos, au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Pierre-Durand Pelot, domicilié à Oust, district de Girons [ci-de-vant Saint-Girons], département de l'A-riège, lequel, après quatre mois de détention, a été mis en liberté par jugement du tribunal révolutionnaire de Paris, du 29 fructidor. Décrète que, sur le vu du présent décret, la trésorerie nationale paiera audit Pelot une somme de 400 L à titre de secours et d’indemnité, et pour l’aider à retourner dans son domicile. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (38). d La Convention nationale après avoir entendu le rapport de [Roger Ducos, au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Jacques-André-Fran-(37) P.-V., XLV, 346-347. C 318, pl. 1288, p. 4. Décret n° 10 956. Minute de la main de Merlino, rapporteur. Bull., 1er vend, (suppl.). (38) P.-V., XLV, 347-348. C 318, pl. 1288, p. 5. Décret n° 10 957. Minute de la main de Roger Ducos, rapporteur. Bull., 1er vend, (suppl.).