188 (Assemblée nationale.] préopinant vient de présenter à l’Assemblée prouvent la sagesse des vues du directoire, mais ils ne prouvent pas qu’il ait eu le droit de faire l’arrêté qui est émané de lui. 11 ne s’agit pas d’examiner si les dispositions qu’il renferme sont fondées sur l’utilité publique, mais de s’assurer si elles sont attentatoires à l’autorité du Corps législatif. Or, je soutiens que ces dispositions y portent une atteinte manifeste. Elles suppléent aux lois que l’Assemblée aurait dû porter; elles autorisent des établissements nouveaux; elles donnent aux religieuses des moyens qui pourvoient à l’insuffisance des lois portées par l’Assemblée nationale, mais ces moyens, ces mesures ne sont autre chose que des actes législatifs, que des entreprises faites contre la puissance législative. Que résulte-t-il de ce qui vous a été dit par le directoire? C’est qu’il se croit autorisé à faire ce que vous n’avez pas fait, et à établir les lois de développement, que l’Assemblée était seule en droit de porter. Quant à la position du directoire, elle n’a pu l’autoriser à faire une loi sur cet objet, mais seulement à demander que l’Assemblée portât une loi qui pût prévenir les troubles, et assurer la tranquillité publique. L’arrêté du directoire ne porte aucune atteinte à la religion ; il renferme des principes de tolérance qui sont aussi conformes au véritable esprit de la religion qu’aux principes de la saine raison; mais je trouve qu’il porte une atteinte formelle à la puissance législative, et c’est sous ce point de vue que je le combats. Qu’a fait le département? Il a tiré les conséquences d’un principe consacré par la déclaration des droits de l’homme. Mais ces conséquences sont des lois de développement. Notre Constitution elle-même est une conséquence des principes de la déclaration des droits. Dira-t-on pour cela que les corps administratifs ont le droit de faire les lois constitutionnelles qui dérivent de ces principes? Si vous admettiez de pareilles entreprises, vous prépareriez la ruine de votre Constitution. Il est établi par la déclaration des droits de l’homme que nul ne doit être troublé dans la manifestation de ses opinions religieuses, que la confusion des pouvoirs produit le despotisme. Quelles sont les conséquences naturelles qui résultent de ces principes? C’est que les citoyens ne doivent pas être troublés dans la manifestation de leur culte; c’est que les pouvoirs doivent être divisés. Mais s’ensuit-il de là que chaque corps administratif doive faire les lois qui résultent de ces principes; qu’ils doivent autoriser la publicité des cultes; et faire eux-mêmes la séparation des pouvoirs? A quels maux ne nous exposerions-nous pas? Combien les conséquences ne différeraient-elles pas? car les hommes ne tirent pas toujours les mêmes conséquences d’un principe établi. Quelle confusion ! quel bouleversement! La Constitution se trouverait bientôt anéantie. Les départements deviendraient des États fédérés, et l’unité monarchique serait détruite. Je n’attaque ici que la forme de ces dispositions, et je demande le renvoi au comité de Constitution de l’excellent projet d’arrêté du directoire du département pour faire une loi générale. M. l’abbé lllaury et M. Bouchotte se présentent à la tribune. M. Blin. Tous les orateurs, soit qu’ils aient Il 8 avril 1791.] approuvé l’arrêté ou qu’ils ne l’aient pas approuvé, en ont demandé le renvoi au comité. Si quelqu’un veut parler contre ce renvoi, il doit avoir la parole. M. le Président donne lecture de l’ordre du jour de la semaine et de la séance de demain ; il donne eusuite communication d’une lettre de M. Lasnier de Vaussenay, qui prie l'Assemblée d’agréer sa démission, et d’une adresse des États plaignants de la principauté de Porentruy. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette adresse au comité diplomatique et décrète qu’il en sera fait lecture à la séance de mardi soir. La discussion sur l'arrêté du directoire du département de Paris est reprise. M. le Président. La parole est à M. l’abbé Maury. M. l’abbé llanry. J’ai demandé la parole pour inviter l’Assemblée nationale à déclarer nulle et comme non avenue la délibération du département de Paris et pour répondre à M. l’abbé Sieyès. Je serai très court, très précis et, j’ose ajouter infiniment modéré. (. Applaudissements .) Il est d’autant plus nécessaire que l’Assemblée nationale s’occupe de la proclamation du directoire du département de Paris, qu’un très grand nombre et peut-être la totalité des départements du royaume, ont pris des mesures absolument semblables, relativement au culte public. L’orateur du département de Paris a fait des efforts très ingénieux pour prouver que ce département s’était renfermé dans les objets de pure police, qui appartiennent essentiellement à sa compétence, mais avant d’écarter les sophismes que l’on a développés dans cette tribune pour justifier le département delà ville de Paris, il me semble, Messieurs, que la seule date de cette proclamation aurait dû avertir ce corps ad-ministratif de rester dans les bornes du respect qu’il doit aux représentants de la nation, en les consultant avant de rendre une loi qui pouvait troubler la tranquillité. Qu’un corps a iministratif, dans l’intervalle d’une session à l’autre, pressé par le besoin, rende des proclamations provisoires sur des cas que les législateurs n’ont pas pu prévoir, alors les circonstances excusent tout. Mais que, dans une ville, où les représeniants de la nation sont assemblés, le directoire du département ait cru être autorisé à voir dans l’administration de la religion ce que les représentants de la nation n’y avaient point aperçu, c’est sans doute une indiscrétion qui doit être réprimée avec d’autant plus de célérité, que c’est le premier exemple que ce corps vous ait donné. Vous savez, Messieurs, qu’il est de l'essence de tousles corps administratifs de prétendre sans cesse à l’accroissement de leur autorité. Le département de Paris vous avertit ici, au nom de tous les départements du royaume, qu’il doit être réprimé, qu’il doit être contenu dans les bornes que la Constitution lui a données, parce que rien ne sollicitait sa décision. Tout au contraire semblait l’inviter avenir à cette barre avertir la sollicitude des représentants de la nation . C’était au département de Paris à vous dénoncer les scandales inouïs dont cette capitale a été malheureusement témoin; mais, le département a cru qu’il était plus instant de faire fermer les églises que d’arracher des mains d’un peuple séduit des ins-ARCHIVES PARLEMENTAIRES.