428 [Assemblée nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 décembre 1789.] deux séances de la veille. Il est dit dans la séance du matin que le 8e article du comité de constitution a été rejeté à une petite majorité. M. Martineau. Aucun des procès-verbaux antérieurs ne nous fournit pareille indication; j’en demande le retranchement parce qu’elle est une injure au Corps législatif dont la majorité plus ou moins grande doit toujours faire loi. M. Chasseeleuf de ’Voiney. H est de l’intérêt de la nation et des législatures suivantes de connaître le point fixe de la valeur d’un décret; il y a donc avantage à consigner au procès-verbal le chiffre des voix qui se prononcent dans un sens ou dans un autre. M. le Président consulte l’Assemblée qui décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur la question soulevée par M. de Volney et prononce la suppression de la partie du procès-verbal attaquée par M. Martineau. M. Anson, l'un de MM. les secrétaires du comité des finances, demande que le comité soit autorisé à faire imprimer deux rapports concernant : 1° les dépenses du département de la marine ; 2° les dépenses des colonies. ( Voyez ces deux documents annexés à la séance.) L’Assemblée décide que les rapports seront imprimés. Un membre critique la manière employée jusqu’à ce jour pour recueillir les voix à l’appel nominal ; après avoir fait apercevoir les inconvénients de cette méthode, il fait la motion suivante : « Attendu que, dans la manière usitée de recueillir les voix à l’appel nominal, il existe des différences inévitables entre les résultats des secrétaires, d’où suit pour les résultats une sorte d’incertitude qui pourrait, en certains cas, rendre un appel indécis et nul, a demandé : « Qu’il soit dorénavant procédé à l’appel par liste de noms des membres, dont chaque secrétaire aura un exemplaire sur lequel il notera le oui ou le non, de manière que par la confrontation de ces listes, l’on puisse reconnaître où se trouvent les différences, et, par là, obtenir le moyen de les redresser. » Cette motion est ajournée. On lit ensuite plusieurs adresses de différentes villes ou provinces du royaume, exprimant leur adhésion aux décrets de l’Assemblée et dont la teneur suit : Adresse de félicitations, remercîments et adhésion de la ville de Vatan en Berry, et de quinze communautés voisines ; elles demandent l’établisement d’un siège royal dans ladite ville. Adresse du même genre de la ville d’Yvetot en Normandie; elle déclare renoncer expressément à tous les privilèges dont jouissait, de temps immémorial, sa principauté. Elle demande la création d’un bailliage royal en remplacement de sa justice seigneuriale. Délibération du même genre de ville de Cannes en Languedoc; elle demande une justice royale. Adresse du même genre du comité permanent de la ville de Luze ; il forme des vœux pour qu’elle devienne le chef-lieu d’un district et le siège d’un bailliage royal; il annonce qu’il a pris les mesures les plus actives pour arrêter les dévastations inappréciables qui se commettaient dans les bois du chapitre de cette ville. Adresse du même genre de la ville de Galvinet en Auvergne ; elle demande la conservation de son siège royal. Adresse du même genre de la ville de Castres en Languedoc ; elle adhère notamment au décret concernant la contribution patriotique, et demande d’être le chef-lieu d’un département. Adresse du même genre de la municipalité et comité de la ville de Saint-Maixent en Poitou ; ils demandent la conservation de deux monastères de religieux Bénédictins et Bénédictines établis dans cette ville, qui sont de la plus grande utilité. Adresse du même genre de la ville d’Àlbi en Languedoc ; elle déclare qu’elle improuve toute délibération prise ou à prendre, tendante à affaiblir le respect dû aux décrets de l’Assemblée nationale, ou à en éluder l’exécution. Adresse du même genre de la ville de Qüimper en Bretagne; elle se glorifie à juste titre d’être la première ville du royaume qui le 13 novembre 1788, ait offert à l’Etat un don patriotique, et qui, le 2 octobre dernier, ait donné l’exemple de faire hommage à la nation de ses boucles, et de ses bijoux en or et argent; elle se flatte encore d’avoir vu dans son sein les premiers gentilshommes bretons joindre leurs offres patriotiques à celles de la commune, et se déclarer ouvertement pour les décrets de l’Assemblée nationale ; elle espère qu’elle voudra bien lui témoigner son approbation. Adresse du même genre de la ville de Falaise en Normandie. Adresse de la gardé nationale de Strasbourg, qui s’empresse de détruire les soupçons qu’on a voulu jeter dans un libelle sur son patriotisme et son dévouement absolu pour l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale. Adresse des officiers du bataillon de chasseurs royaux de Dauphiné, en garnison à Romans, qui, considérant que d’après le mémoire sur la constitution militaire il pourrait être supposé que l'officier aurait sollicité une augmentation de traitement, assurent à l’Assemblée, qu’en désirant que le sort de leurs braves soldats soit amélioré, ils n’ont rien sollicité pour le leur, et qu’ils se font gloire d’être toujours guidés par le même désintéressement dont s’honoraient les officiers français sur les remparts de Prague et dans les plaines de l’Allemagne. Adresse de la ville d’Eauze, sénéchaussée de Lectoure, qui adhère avec une respectueuse reconnaissance à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et demande une justice royale. Délibération de la communauté de Château-neuf d’Isère en Dauphiné, qui jure d’être invio-lablement attachée à la constitution française, et adhère à tous les décrets de l’Assemblée nationale, notamment à celui de la contribution patriotique, quoique la rigueur du dernier hiver ait causé la mortalité des arbres dans son arrondissement ; elle désapprouve formellement toute assemblée de la province qui ne serait pas légalement convoquée, et proteste contre ce qui pourrait y être fait de contraire au désir du Boi et de l’Assemblée nationale. Adresse des officiers municipaux de la ville de Nangis, tendant à obtenir une assemblée de district,' placée dans le département de Provins, et que Provins soit le chef-iieu du département. Adresse du défi niteur général de l’ordre de la Trinité, et de deux religieux, qui offrent à l’Assemblée nationale tous les biens du monastère de Montpellier, qu’ils évaluent à 100,000 livres, s’en rapportant à la justice de l’Assemblée nationale pour pourvoir à leur subsistance. Adresse de 35 curés du diocèse de Mâcon, qui ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 décembre 1789.] 424 [Assemblée nationale.] adhèrent avec reconnaissance aux décrets de l’Assemblée nationale, et notamment à celui concernant la disposition des biens ecclésiastiques ; ils assurent que leur empressement sera toujours sans bornes lorsqu’il s’agira d’inspirer à leurs paroissiens la plus entière confiance, le plus parfait dévouement et la plus grande vénération pour la sagesse des lois qui émanent de l’Assemblée. Délibération des habitants de la ville et banlieue de Carcassonne en Languedoc, assemblés en conseil général, contenant leur renouvellement d’adhésion à tous les décrets de l’Assemblée nationale, leur engagement à les faire exécuter, et leur déclaration qu’ils regardent comme ennemis du bien public, traîtres au Roi et à la nation, tous ceux qui s’élèvent contre la validité de ses décrets. Adresse de la ville de Montréal, du diocèse de Carcassonne en Languedoc, du même genre; elle demande d’être autorisée à mettre à exécution une ordonnance de l’intendant de la province, pour procurer des armes à sa garde nationale. Délibération prise parle district de la place aux Clercs et Saunière de la ville de Valence, lequel, pénétré du plus profond respect et du plus inviolable attachement à la personne du Roi et à l’Assemblée nationale, a fait célébrer, le 22 du mois dernier, une messe solennelle pour demander à Dieu la conservation des jours précieux de Sa Majesté, celle des députés et la prospérité de l’Etat, et a arrêté qu’il serait célébré une pareille messe tous les dimanches et fêles pendant la session actuelle. Adresse de la ville et municipalité du Mur-de-Barrez en Bouergue, portant adhésion à tous décrets pris et à prendre par l’Assemblée, et dénonciation des corps religieux et bénéficiers qui dévastent les bois de leurs bénéfices et maisons, et jusqu’aux arbres fruitiers ; demandent que leur municipalité et toutes celles des environs soient autorisées à faire arrêter les arbres coupés, planches et mairrain. M. Chassebeuf de Volney, l’un de MM. les secrétaires , donne lecture d’une adresse de la ville de Nantes qui est ainsi conçue : « C’est avec autant de surprise que d’indignation, que la ville de Nantes a appris que la Chambre des vacations du parlement de Bretagne a poussé la témérité jusqu’au point de méconnaître l’autorité de l’Assemblée nationale et celle du Roi, en refusant d’enregistrer le décret sanctionné par Sa Majesté, qui ordonne à cette cour de prolonger ses vacances. « Des magistrats, qui par état sont établis pour faire respecter les lois, en seront donc les premiers transgresseurs ? Ils donneront donc aux peuples qu’ils devraient guider l’exemple d’une désobéissance aussi étrange que dangereuse ? N’auraient-elles donc, ces cours de judicature, réclamé les anciens Etats généraux que dans la coupable espérance que cette Assemblée consacrerait d’anciens privilèges, extorqués dans des siècles où l’on insultait à la dignité de l’homme? auraient-elles formé la prétention inouïe d’élever au sein de la nation, un tribunal supérieur à la nation même? Non, non, cette nation aussi brave qu éclairée s’est ressaisie de ses antiques droits ; et son contrat social, depuis si longtemps égaré, vient de se retrouver sous les débris de l’édifice féodal. « C’est à l’Assemblée nationale que nous devons le plus précieux de tous les biens, la liberté. G’est à ses pénibles travaux, c’est à ses lumières bienfaisantes, c’est à son courage inébranlable, c’est enfin à son union avec le meilleur des rois, que l’empire français est redevable de son salut. « Que tout bon Français s’empresse de se rallier à cette auguste Assemblée ; qu’il repousse avec cette énergie naturelle aux nommes libres les nouveaux efforts du despotisme aristocratique ; que les ennemis publics sachent donc que, s'il est malheureusement trop facile de prolonger l’esclavage d’un peuple, il est impossible de l’enchaîner de nouveau lorsqu’une fois il a brisé ses fers et qu’il s’est placé courageusement au rang des nations libres. L’homme qui s’est élevé à la hauteur de la liberté périra plutôt que d’en descendre. « Ils ne sont plus, ces temps désastreux d’un régime oppresseur pour les Bretons ; nous ne verrons plus cette classe privilégiée tirer une ligne de démarcation humiliante entre elle et la nation. Non, nous ne verrons plus un homme enorgueilli du hasard de sa naissance se présenter hardiment pour être juge et, sans autre privilège ue ses titres et sa fortune, prétendre avoir le roit exclusif de posséder les premières places de magistrature de la province, tandis que le mérite modeste et plébéien frappait inutilement à la porte du sanctuaire des lois. Vos vrais tuteurs, ô Bretons, ne seront plus ceux que leur noblesse et leur or ont placés sur les fleurs de lys, mais ceux que vous choisirez librement dans vos assemblées, sans distinction d’ordres et de classes : alors on verra l’homme, dans quelque état qu’il soit né, recevoir de vos mains impartiales la récompense de ses vertus et le prix de ses talents. Alors, alors seulement vous aurez vraiment une patrie, et vous pourrez être fiers d’être Français. « Si, contre tout espoir, le parlement de Bretagne persistait dans son insubordination, la ville de Nantes se croirait obligée de ne plus le reconnaître et demanderait à l’Assemblée nationale, et au Roi provisoirement, le droit de juger en dernier ressort pour tous les tribunaux royaux de la province. « La ville de Nantes se hâte d’offrir un nouvel hommage de sa reconnaissance aux représentants de la nation, et une nouvelle protestation de sa soumission à ses décrets. Elle désavoue hautement la démarche incendiaire du parlement de Bretagne, et fait le serment d’employer tout ce que ses généreux habitants ont de fortune et de courage, pour maintenir les décrets de i’Assem-blée nationale. « Fait et arrêté en l’hôtel de ville de Nantes, le 29 novembre 1789, le bureau municipal et le comité permanent y séant. « Signé : DE Kervegan, maire ; J. Legris aîné, échevin ; F. RORIER, échevin; Var-SAVAüx DE Cheulée, député suppléant, échevin; DüBERN, échevin; COMET, échevin; Duval; Drouin de Parçay; J. Chameau-lin; Bridon ; F. Pineau -/Foullois; Four-MY père; DüPERRlER DE La RiVAUDlÈRE ; Th. Lambert; Guillot ; Coustard de Massy ; J. Guesdon ; J. le Cadre ; Carreau ; Delaiiaye; Bellier jeune; Guy-vois ; Fruchard ; Delcataud ; Roche ; Cantin-, Fellonneau-, Laennec, D. M. ; Clavier; Julien Le Roux; G. Callon père ; GËDOIN; Le Bas , chevalier de Saint-Louis, lieutenant de maréchaussée ; VAU-dez ; P.-F. Delaville; Pussui. »