[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 avril 1791] «21 L’Assemblée, consultée, rend le décret sui-vaat: « L’Assemblée nationale décrète qu’il sera envoyé un exemplaire du code de l’aliénation des domaines nationaux à chaque directoire de département et de district, et qu’il en sera remis un autre à chacun des membres de l’Assemblée. » M. Lanjuinais, au nom du comité ecclésiastique, propose un projet de décret concernant la liquidation des créances particulières sur les maisons et corps ecclésiastiques supprimés. Les cinq premiers articles de ce projet sont décrétés après quelques débats. M. Martineau. J’observerai qu’on n’a pas prévenu l’Assemblée nationale sur le décret actuellement soumis à sa délibération et je ne peux m’empêcher de m’étonner de la précipitation avec laquelle on entraîne le Corps législatif dans des mesures qui tendent à faire payer à la nation ce qu’elle ne doit pas. Les articles qui suivent renferment des dispositions qui ne doivent être décrétées qu’après le plus mûr examen et, vu leur connexité avec les articles déjà votés, je demande que ceux-ci soient rapportés pour être discutés de nouveau demain avec l’ensemble du projet. (Cette motion est décrétée.) M. le Président. M. Robespierre a la parole pour une motion d’ordre. M. Robespierre. J’ai à faire à l’Assemblée une motion très simple qui ne peut être adoptée utilement que dans le moment où je parle, et qui doit l’être nécessairement avant toutes celles qui tiennent au ministère. Un philosophe dont vous avez honoré la mémoire, et dont les écrits ont préparé la révolution et vos travaux, a dit: « Pour inspirer plus de confiance et de respect pour les lois, le législateur doit en quelque sorte s’isoler de son ouvrage, et s’affranchir de tous les rapports personnels qui peuvent le lier aux grands intérêts qu’il a à décider. >' Gomme le moment où vous pouvez faire l’application de cette maxime la plus honorable à l’Assemblée est sans contredit le moment où, touchant à la fin de votre carrière, vous avez cependant à faire des lois très importantes, et où vous allez régler la responsabilité et les peines et les avantages du ministère, je demande que ce que vous avez déjà fait à l’égard des commissaires du roi, vous le fassiez à l’égard des ministres. Je fais en conséquence la proposition suivante : « L’Assemblée nationale décrète qu’aucun membre de l’Assemblée nationale actuelle, ne pourra être promu au ministère , ni recevoir aucunes places, dons, pensions, traitements ou commissions du pouvoir exécutif ou de ses agents, pendant 4 ans après la fin de l’exercice de ses fonctions. » ( Applaudissements .) Plusieurs membres : Aux voix ! Aux voix ! M. Bouche. Je trouve que M. Robespierre ne donne pas assez d’étendue à sa motion très judicieuse. Vous avez solenntdlement contracté l’engagement d’accueillir la motion qui vient d’être faite; vous l’avez contracté à Versailles dans les premiers jours du mois de septembre; vous l’avez contracté à Paris, au commencement du mois de novembre, mais je trouve, Messieurs, que cette motion n’est pas assez étendue. Je demande en conséquence que, portant vos regards sur l’avenir, vous ne vous borniez pas à décréter la proposition de M. Robespierre, que les membres de l’Assemblée nationale ne pourront pas de 4 ans recevoir de place dans le ministère ; vous devez, Messieurs, décréter en même temps que les membres de l’Assemblée nationale et des législatures à venir ne pourront recevoir ni dons, ni pensions, ni gratifications. ( Applaudissements :.) Je demande que ce décret soit étendu également aux membres de la cour de cassation et à ceux de la haute cour nationale ; les uns pendant 4 ans, les autres pendant 8 ans après avoir cessé l’exercice de leurs fonctions. M. d’André. En appuyant les motions précédemment faites, qui dérivent naturellement du principe que vous aviez déjà établi, je propose d’ajouter non pas un projet de décret, mais une recommandation pour tous les membres de l’Assemblée, recommandation que mon propre exemple autorise, parce que je commence par avouer que je suis tombé dans le tort dans lequel je neveux plus qu’on tombe. Je demande non seulement que tous les membres de l’Assemblée nationale ne puissent avoir ni place, ni dons, ni pensions, ni traitements ou commissions du pouvoir exécutif, ce n’est pas là le tort dans lequel je suis tombé. (Rires.) ; mais je demande en outre que les membres de l’Assemblée prennent l’engagement solennel de ne jamais solliciter pour qui que ce soit aucune place ou emploi, ou pensions, ou... ( Applaudissements unanimes.) C’est là dedans que je suis tombé. M. Carat l'aîné. Pour assurer l’effet de ce nouvel engagement que nous imposons aux fonctionnaires publics du royaume, pour que les intérêts de la nation ne puissent être trahis ni directement ou indirectement, je demande que l’on étende la disposition du décret qui vous est proposé non seulement aux députés, mais à leurs ascendants, descendants et collatéraux. (Murmures.) C’est le seul moyen de laisser subsister dans toute sa pureté les décrets qu’on vous propose. Plusieurs membres : La question préalable ! îvl. Carat l'aîné. Je demande à soutenir ma motion et à combattre la question préalable que l’on invoque. Il m’est égal de me laisser corrompre ou pour mon père, ou pour mon fils, ou pour mon frère si je trouve dans la corruption les mêmes avantages que s’ils m’étaient personnels. Ou la motion que l’on a faite n’est pas nécessaire, ou l’on se propose de lui faire subir des fraudes indirectes. Si vous n’adoptez pas l’extension que je lui donne, vous n’auriez rien fait pour la pureté de tous les corps. Plusieurs membres : La question préalable i M. Pétion de Villeneuve. L’Assemblée se livre à des sentiments généreux avec un abandon qui lui fait honneur; mais il ne faut pas oublier les principes. Il est par trop évident que les membres de cette Assemblée ne peuvent accepter aucune place du pouvoir exécutif , pour que cela souffre contradiction. Les deux premières mo- QÿQ [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [7 avril 1791. J tions proposées sont une conséquence de vos principes, je les adopte, parce qu’un membre du Corps législatif ne peut accepter ni place, ni recevoir aucun don, aucune gratification du pou-voirexécutif. Quant à la proposition de M. d’André, c’estune recommandation qui, pour nous, vaudra le décret le plus solennel ; mais l’Assemblée ne doit pas aller plus loin et je crois que c’est outrer que d’adopter l’idée de M. Carat. M. de Tracy. J’admire votre délicatesse, mais elle me paraît délirante ; et je me crois dans une fort bonne passe pour qu’on ne me puisse pas suspecter, parce que je suis extrêmement certain qu’on ne me viendra chercher pour rien et que je ne veux rien; mais décréter sans réflexion, dans le moment présent, l’exclusion de toutes les places au gouvernement pendant 4 ans, pour toutes les personnes qui sont les seules à même de se faire connaître dans la discussion des grands intérêts publics; il me semble que c’est absolument entraver le choix, et, pour ainsi dire, c’est réduire le gouvernement àchoisir dans le nombre des personnes qu’il est le moins à portée de connaître. Je pense que nous devons lui laisser la latitude de ses choix, je parle en principe et je pense que nous le réduisons à l’impossible ou à peu près. ( Murmures . — Rires. — Applaudissements.) M. Briois-Beaumetz. Est-ce que l’on imagine que nous possédons seuls tontes les lumières, tous les talents de la nation? M. de Tracy. Je n’ai certainement pas dit une absurdité aussi grande. A Dieu ne plaise que je pense que tous les talents de la nation soient concentrés dans cette Assemblée 1 Plusieurs membres : Aux voix ! Aux voix ! M. de Tracy. Je me résume et je dis que cette réflexion-là mérite un examen approfondi; qu’en supposant qu’elle fût admissible dans un autre temps, quand le gouvernement aura acquis quelques amis et fait naître quelques talents, je pense qu’au moins elle doit être renvoyée au comité de Constitution. M. Briois-Beaumetz. Je demande que vous mettiez les propositions aux voix. C’est un mouvement de la conscience et du cœur. Le premier mouvement ne peut jamais nous tromper, (Murmures.) et, quand le pouvoir exécutif éprouverait quelque difficulté dans ses choix, je demande si on peut mettre cet inconvénient e n comparaison avec celui de souiller la Constitution de nos passions personnelles, de nos intrigues. 11 est nécessaire que nous rentrions bientôt dans la classe des simples citoyens; il est nécessaire que nous allions bientôt reprendre le sort de cette égalité dont nous avons établi les principes et qu’il est si aisé d’oublier. Empressons-nous d’adopter les propositions de MM. Robespierre et Bouche. Je pense que ce ne sont pas les dernières que nous aurons à faire pour éviter et la corruption ministérielle et peut-être une fermentation non moins dangereuse, celle des fausses popularités. Je demande qu’on mette aux voix les deux motions. (Applaudissements .) (L’Assemblée ferme la discussion.) M. le Président. Je vais vous faire lecture du projet : « L’Assemblée nationale décrète qu’aucun membre de l’Assemblée nationale actuelle, ni des législatures suivantes, ne pourra être promu au ministère, ni recevoir aucunes places, dons, pensions, traitements ou commissions du pouvoir exécutif ou de ses agents, pendant quatre ans après la fin de l’exercice de ses fonctions. » Voix diverses : Et les membres du tribunal de cassation ?.... Et ceux de la haute cour nationale?.. . M. €larat VaXnè. Je demande que l’on adopte mon amendement ou qu’on le rejette par la question préalable. Je soutiens que l’on n’est pas de bonne foi si l’on ne veut pas l’adopter. (Murmures.) M. Bœderer. Je demande qu’on réduise en lo la proposition qui a été faite par M. d’André comme simple avertissement. En conséquence je propose la rédaction suivante : « L’Assemblée nationale décrète qu’aucun membre du Corps législatif ne pourra solliciter de place du gouvernement, ou de grâces du gouvernement. » Cela ne vaut rien, ni pour autrui, ni pour lui-même. (Applaudissements.) Gomme faire une loi prohibitive en pareil cas, c’est ne rien faire, si on n’en assure l’exécutioa par une loi pénale, je demande que l’on charge le comité de Constitution de proposer la peine à infliger à ceux qui contreviendraient à cette loi, (. Applaudissements .) M. Carat aîné. Bravo ! bravo ! M. Bœderer. Cette rédaction remplira le vœu de M. Garat, sans avoir les inconvénients de sa proposition. Et en effet, Messieurs, s’il est défendu, s’il est sévèrement interdit à des membres du Corps législatif de solliciter aucune place ou grâce pour eux-mêmes et pour autrui, il est clair que leurs parents et amis tomberont dans l’interdiction. M. Begnaud (de Saint-Jean-d' Angély). On peut croire que vous travaillez pour vous quand vous travadlez pour votre frère, pour votre père ou pour votre parent; mais quand vous venez réclamer contre une injustice faite à un étranger, alors vous ne pouvez pas être suspect. Je demande donc qu’on adopte la motion de M. Garat, en interdisant formellement aux comités de l’Assemblée nationale toute influence comme ils en ont déjà eu peut-être sur le choix des ministres, et qu’on réduise la motion de M. Rœderer aux sollicitations pour les parents et non pour autrui ; sans cela, vous ôtez la faculté de désigner quelles sont les personnes dont les lumières et le patriotisme pourraient être utiles; c’est un moyen assez sûr d’écarter le mérite de toutes les places. M. Charles de Tanieth. J’avais demandé la parole pour que les délibérations ne se succédassent pas dans la délibération même. La motion de M. Robespierre doit donc d’abord être mise aux voix, car celle qui vous est faite postérieurement n’est pas un amendement. Un membre : Allons ! allons 1 aux voix ! c’est fort bon. M. Robespierre. Voici ma rédaction : [7 avril 1791.] 623 ] Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « L'Assemblée nationale décrète qu’aucun membre de l’Assemblée nationale actuelle, ni des législatures suivantes, ne pourra être promu au ministère, ni recevoir aucunes places, dons, pensions, traitements ou commissions du pouvoir exécutif ou de ses agents, pendant 4 ans après la tin de l’exercice de ses fonctions. » M. de Folleville. Il faut insérer dans la motion de M. Robespierre : « Sans préjudicier à ceux qui ont droit de prétendre à des pensions après le temps requis par vos décrets. » Un membre : C’est de droit. M. Rœderer. 11 n’est question que des pensions données sur la liste civile. M. de Folleville. Ah ! ah ! c’est différent. Pour ne laisser aucun accès à l’intrigue, il faut ajouter encore qu’un militaire, s’il est député, ne pourra être envoyé dans les grades d’avancement, que 4 ans après la tin de la session. M. d'André. La proposition de M. de Folle-ville est inadmissible, parce qu’il y a deux sortes d’avancement, l’avancement donné par la loi et l’avancement donné par le roi; quant à celui-ci, on ne pourra pas l’avoir. Quant à l’avancement donné par la loi, il est acquis à tous les citoyens; en conséquence, il n’y a pas lieu à faire une exception. M. de Folleville. Mais ce que dit M. d’André est lui-même inadmissible, parce qu’il est une espèce d’avancement dont le roi a la disposition. Un membre: Il ne l’aura pas. M. de Folleville. Je pense donc au moins qu’il y a des cas extraordinaires. L’emploi du mot conserverait les droits accordés à plusieurs individus. Je demande donc par amendement qu’on mette le mot extraordinairement. Plusieurs membres : Non ! non ! la question préalable. M. Legrand. Je demande qu’aucun militaire séant à la législature ne puisse monter au grade de lieutenant général que par tour d’ancienneté, et qu’il ne puisse être envoyé comme tel que 4 ans après la session. M. de Noailles. D’après le décret que vous avez rendu sur l’avancement militaire, il y a deux manières de parvenir aux grades. La première manière est par l’ancienneté, la seconde est le choix du roi; je demande, non as comme M. de Folleville, mais avec M. de Ro-espierre, que ce choix du roi pour des places affectées à des officiers, ne puisse pas tomber sur les officiers séants à la législature, et qu’ils soient obligés d’attendre 4 années pour pouvoir les occuper. M. de Rostaing. J’appuie la motion. M. de Aoaiües. J’ajoute que ceux qui, revêtus de la confiance du peuple, occupent les fonctions les plus honorables dans l’Assemblée législative, ne doivent pas, par des intrigues, par des faveurs particulières, avoir la préférence sur les ofticiers de l’armée qui sont dans une perpétuelle activité ; mais je demande en même temps que la proposition faite par M. Legrand ne soit pas admise, car il me paraîtrait extrêmement dangereux de priver un citoyen estimable qui serait arrivé par l’ancienneté à tous les grades militaires, qui pourrait avoir la confiance du peuple et qui siégerait dans cette Assemblée, de pouvoir donner des preuves de talent, de courage et de patriotisme. Ainsi je réduis donc, pour l’armée, la proposition à ceci : « Les officiers de l’armée qui seront dans la législature ne pourront pas profiter de l’avancement qui leur est donné par le roi, et les grades acquis par droit d’ancienneté seulement pourront leur être déférés. » Plus ieurs membres : Aux voix ! aux voix ! la motion de M. Robespierre. (La motion de M. Robespierre est mise aux voix et adoptée.) M. Rouclie. Je propose maintenant mon amendement : « L’Assemblée nationale décrète comme articles constitutionnels » ... Je regarde ces mots comme nécessaires. Plusieurs membres : Oui ! oui 1 oui ! M. Oouche, continuant la lecture. « ... de décider que ses membres et ceux des législatures à venir, que les membres des tribunaux de cassation et les jurés de la haute cour nationale ne pourront, que 4 ans après la tin de l’exercice de leurs fonctions, être nommés au ministère, ni recevoir du pouvoir exécutif, ni de ses agents, aucuns emplois, places, dons ou gratifications, pensions et traitements d’aucun genre. » M. Le Chamelier. Pour former accidentellement le juré, il faut que les personnes qui auront été convoquées soient sujettes à cette loi, car il n’y a rien de si important que cela, mais il faut examiner avec attention si on doit étendre cette prohibition sur les personnes qui n’auront pas été appelées comme sur les personnes appelées. Plusieurs membres au centre: Non 1 non I nonl M. Ce Chapelier. Ce ne serait pas là mon avis ; je demande que cela soit restreint à ceux qui auront formé un haut juré. ( Applaudissements ). M. Rarnave. Il ne suffit pas d’en exclure ceux qui auront été appelés au grand juré ; il faut encore exclure les grands jurés pendant le temps que la possibilité d’être appelés leur sera donnée. Il faut donc dire que non seulement les grands jurés qui auront été appelés, pour former un jugement ne pourront recevoir de places ou emplois pendant 4 ans après les fonctions remplies, mais encore que cette prohibition s’applique à ceux qui seront inscrits sur la liste du haut juré, pendant tout le temps de cette inscription. M. Le Chapelier. Il faut dire : « Nul ne pourra être appelé au haut juré, aussitôt qu’il aura reçu une place du pouvoir exécutif. » Et ensuite il faut dire que « celui qui aura été appelé au haut juré, ne pourra, pendant 4 ans, recevoir de place du pouvoir exécutif. » C24 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 avril 1791. M. lepelletier Saint-Fargeau. Je ne puis pas adopter le dernier avis de M. Le Chapelier, et voici l’objection que je lui fais, c’est que, si le grand juré peut être choisi par le pouvoir exécutif pour recevoir une place ou un don, alors le pouvoir exécutif aura la faculté de retirer de dessus la liste des jurés, et en quelque sorte de récuser le juré dont il craindrait la fermeté, ou la vertu, ou les lumières. M. d’André. Ces réflexions du préopinant ne peuvent influer sur ce que dit M. Le Chapelier. M. de Menonville de Villiers. Nous sommes accoutumés à être comptés pour peu, mais en vérité il est indécent que l’on tourne le dos au côté droit, quand on parle à l’Assemblée. M. d’André. Je réponds à M. de Menonville qu’il est si souvent arrivé à ces Messieurs de dire qu’ils n’avaient point de voix, que souvent l’on oublie qu’ils doivent prendre part à la délibération. (Applaudissements prolongés à gauche). Ou on aura choisi un juré susceptible de se laisser tenter par une place dans le ministère, et alors il perd sa place de juré, et il est très bon qu’il la perde, puisqu’on aurait eu un homme susceptible de corruption ; ou on a choisi un homme courageux, et alors il est très bon, puis-u’il est au-dessus de la corruption , au moyen e quoi, je conclus à la proposition de M. Le Chapelier. M. Le Chapelier. Monsieur le Président, il faut mettre aux voix la motion de M. Bouche. (L’Assemblée consultée décrète la motion de M. Bouche avec l’amendement de M. Barnave.) M. le Président donne lecture de la nouvelle rédaction des diverses motions adoptées sur cet objet ; elle est ainsi conçue : « L’Assemblée nationale décrète comme article constitutionnel, qu’aucun membre de l’Assemblée nationale actuelle, ni des législatures suivantes, les membres du tribunal de cassation, et ceux qui serviront dans le haut juré, ne pourront être promus au ministère, ni recevoir aucunes places, dons, pensions, traitements ou commission du pouvoir exécutif ou de ses agents, pendant la durée de leurs fonctions et pendant 4 ans après en avoir cessé l’exercice. « Il en sera de même pour ceux qui seront seulement inscrits sur la liste du haut juré, pendant tout le temps que durera leur inscription. » (Cette rédaction est adoptée.) Plusieurs membres : Aux voix la motion de M. Rœderer. M. loys. Je ne m’oppose à la loi qu’a proposée M. Rœderer que parce qu’elle est inexécutable. Un homme qui voudrait ne pas solliciter personnellement, aura mille moyens de solliciter. ( Murmures .) M. llalès. Je vous prie d’observer qu’il existait une ancienne loi qui défendait à tout magistrat juge de recevoir aucun don, gratification ; Eh bien, cette loi, on n’a jamais pu l’exécuter. Plusieurs membres : L’ordre du jour. M. Prieur. Je demande la priorité pour une loi formelle. La responsabilité est la seule sauvegarde de votre liberté. M. Carat aîné. Je soutiens quhl est très possible d’exécuter la loi qu’on vous propose; mais de mauvais procédés, de vilains procédés, de lâches procédés ne doivent pas être abandonnés à l’arbitraire. Je demande qu’on aille aux voix sur le décret et qu’il soit accompagné d’une peine, et que le mode d’exécution soit renvoyé au comité de Constitution. M. le Président. La motion de M. Rœderer est ainsi conçue .- « Aucun membre du Corps législatif ne pourra solliciter, ni pour autrui, ni pour lui-même, aucunes places, dons, pensions, traitements ou gratifications du pouvoir exécutif ou de ses agents. « Le comité de Constitution proposera la peine à infliger à ceux qui contreviendraient au présent article. » (L’Assemblée décrète la motion de M. Rœderer.) M. Carat aîné. Je demande que ma motion soit rappelée et mise aux voix; et je supplie l’Assemblée de me permettre de justifier la nécessité de cette motion. Plusieurs membres : L’ordre du jour! M. le Bois des Cuays. Vous voulez donc frapper de proscription toute la famille d’un membre qui sera nommé aux législatures. Plusieurs membres : Aux voix 1 aux voix 1 L’ordre du jour! (L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) M. Boissy d’Anglas, secrétaire , fait lecture d’une lettre de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères, ainsi conçue ; « Paris, 7 avril 1791. « Monsieur le Président, « J’ai appris qu’on avait dénoncé hier à l’Assemblée nationale les choix que Sa Majesté a adoptés sur ma proposition pour remplir les différentes places qui étaient vacantes dans la carrière politique. Cette espèce de dénonciation, m’a-t-on dit, à la vérité, ne contenait que quelques déclamations vagues et l’Assemblée n’a paru y prendre aucune part... » (Murmures.) Plusieurs membres : Cela n’est pas vrai! M. Boissy d’Anglas. « Je pourrais donc la reléguer dans îa classe de ces moyens employés pour épouvanter les ministres, et celui-ci ne remplissant en aucune manière son objet, me regarder comme dispensé d’y répondre. Cette même dénonciation, déjà préparée ailleurs, était depuis plusieurs jours répandue dans quelques journaux, et je n’avais pas songé à rompre le silence; mais il me suffit qu’elle ait été prononcée dans le sein de l’Assemblée nationale pour prendre à mes yeux un caractère important. La confiance dont l’Assemblée m’a donné des preuves qui me sont toujours présentes, m’est trop précieuse et trop nécessaire pour que je ne m’occupe pas avec le plus grand soin d’écarter tout ce qui pourrait l’altérer et dissiper, jusqu’à l’apparence des nuages qu’on voudrait élever sur ma conduite; ce sentiment me servira d’excuse, je