72 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE sages et vigoureuses qu’elle prend pour les découvrir et pour arracher le masque qui cache leurs crimes ; ils s’agitent en tous sens, et semblables à l’homme qui en se noyant s’attache à tout ce qu’il rencontre, eux dans leur désespoir, ils font jouer tous les ressorts de la perfidie la plus noire et de la scélératesse la plus profonde pour parvenir à leurs fins liberticides. Mais ils auront beau faire, ces scélérats, l’être suprême, le génie de la france protègent notre liberté, et si un peuple immense et vertueux est tout entier debout et armé pour affermir son indépendance, il scaura aussi, vrais Législateurs, déffendre les fondateurs de la félicité et écraser de sa massue exterminatrice tous ceux qui oseraient porter atteinte à sa souveraineté et à sa représentation. Oui, dignes représentants, tous ces noirs complots, toutes ces trames perfides, tous ces crimes atroces, dirigés particulièrement contre la Convention nationale, font frémir d’horreur tous les vrais amis de la liberté, et croyez qu’il n’est pas un des membres de notre société dont l’âme n’ait été émue d’indignation au récit de cette nouvelle et affreuse conspiration; nous, ennemis de toutes les factions, nous, qui ne les avons jamais connues que pour les combattre ; nous, chez qui le fédéralisme n’a trouvé que des hommes armés pour l’écraser; nous ne reco-noîtrons jamais d’autre souverain que le peuple et d’autres dépositaires de sa volonté suprême que la représentations nationale. Continuez donc, courageux et vertueux législateurs, de parcourir la carrière révolutionnaire ; continuez de démasquer tous les traîtres, quelqu’ils soient, de quelque masques et de quelques noms qu’ils se couvrent; continuez hommes probes d’écarter de vous tous ceux dont la vie privée et politique ne présente qu’un tissu de crimes : les mains sanguinaires sont indignes de travailler au grand oeuvre de notre régénération. C’est donc de vous seuls mandataires fidèles, hommes justes et vertueux dont la vie politique est soutenue par la pratique des vertus privées ; de vous seuls, qui avez toujours aimé la vertu et abhorré le vice, qui avez dans tous les temps combatu l’aristocratie; toujours lutté contre la tyrannie et qui avez écrasé les tyrans uniquement pour le triomphe de la liberté ; c’est donc de vous seuls que le peuple attend l’achèvement de la Révolution et la consolidation de son bonheur. Mais intrépides déffenseurs des droits de l’homme, si nous comptons sur votre zèle infatigable pour nous conduire à ce terme si désirable, vous pouvez aussi compter sur le plus entier dévouement du peuple fraçais et sur son attachement le plus inviolable à vos principes, il vous en a déjà donné mille fois des preuves. Pour nous, particulièrement, nous jurons tous unanimement que nous n’aurons d’autre point de raliement que la représentation nationale, nous jurons aussi la haine la plus irréconciliable à tous les ennemis, aux factieux, aux dominateurs, aux intrigans, aux fédéralistes et aux modérés ; nous jurons encore que nous ne donnerons jamais notre confiance qu’aux sincères amis de la liberté et que nous répéterons sans cesse. Vivent la Répubhque et la Convention nationale. Auger, président, Ananem, vice-président, Le Breton, secrétaire. 6 La société populaire de Tournon [Ardèche] manifeste son indignation contre les intrigans accapareurs de pouvoirs pour dominer et asservir ensuite la République, et jure un attachement inviolable à la Convention. Mention honorable, insertion au bulletin (10). [La société populaire de Tournon à la Convention nationale, le 13 vendémiaire an III] (11) Citoyens Représentans, A peine venions-nous de nous livrer à la joie que nous causa la chute du dernier tyran et de ses complices, que nous eûmes la douleur d’apprendre l’odieux et nouvel attentat commis dans la personne d’un de nos fidèles représentans, par l’impulsion sans doute, de quelques restes impurs d’une faction scélérate et liberticide. A cette affreuse nouvelle, les coeurs des vrais patriotes furent navrés et saisis d’effroi; ils craignirent un moment de se voir retomber dans l’abyme profond d’où ils venoient naguère de sortir. Heureusement que cet exécrable forfait n’a pas eu les suites funestes que s’en étoient promis ses monstrueux auteurs. Au contraire, donnant l’éveil au corps législatif, cette catastrophe n’a servi qu’à en resserrer davantage les membres et à leur communiquer une énergie tout à la fois salutaire pour eux et pour la chose publique. Instruits et avertis par l’expérience de longs et grands malheurs, constamment unis, attentifs, fermes et courageux, veillés, citoyens représentans, veillés et sur vous-mêmes et autour de vous. Ne soufïrés pas que des intrigans astucieux, avides, accaparent tous les pouvoirs pour vous dominer d’abord, et asservir ensuite la république entière ; gardés-vous de laisser occuper les places par des sujets incapables, improbes et cupides; préservez-nous surtout des hommes de sang qui, déshonorant et desservant la révolution, sembloient avoir résolu, dans le plus affreux délire, de ne faire de leur patrie désolée qu’un vaste cimetière, qu’un horrible entassement de ruines. Citoyens Législateurs, que la liberté, la justice, la vérité ne soient plus de vains noms ; que leurs zélés partisans puissent toujours, sans (10) P.-V., XL VII, 120. (11) C 322, pl. 1353, p. 9. Débats, n" 750, 315-316. SÉANCE DU 21 VENDÉMIAIRE AN III (12 OCTOBRE 1794) - N° 7 73 danger, s’en montrer les organes et les dignes défenseurs ; que le règne de la vertu s’établisse enfin d’une manière solide et qu’elle seule fasse la loi. Si, comme nous n’en doutons nullement, vous n’avés, Législateurs, que des intentions pures, si pleins de vues sages et profondes, vous ne voulés que le bien et le bonheur de votre pays; alors nous n’aurons plus à redouter le fléau de nouvelles factions; alors sans doute, un génie créateur et bienfaisant succédera à celui de l’oppression et de la destruction; alors les loix étendant leur empire sur tous les esprits, établiront l’ordre, ramèneront le calme, et précipiteront dans le néant l’hydre de l’anarchie; alors l’espoir et la confiance renaissant dans les coeurs, en banniront à jamais la terreur et l’abattement. Il est tems que les sciences, les arts, l’agriculture et le commerce anéantis ou languissants, se voient affranchis de la crainte et des entraves qui les enchaînoient et que, se ranimant insensiblement, ils réparent leurs pertes et nous enrichissent de leurs nouveaux bienfaits. C’est sur ces importants objets que roule principalement le rapport de vos trois comités réunis, rapport dont on a fait lecture dans notre dernière séance, et qui n’a pas été entendu sans le plus vif intérêt. Nous n’avons pas moins applaudi à l’esprit qui l’a dicté qu’aux grandes vues qu’il renferme. Il fallait voir, pendant cette lecture intéressante, comme la joie et la satisfaction se peignoient sur tous les visages des auditeurs, comme l’espérance et la confiance sembloient renaître dans les âmes. Dépositaires de la volonté générale, le destin de la france est dans vos mains; son salut dépend de vous, et c’est de vous que vingt-cinq millions d’hommes attendent leur bonheur. Sou-venés-vous bien qu’il ne peut être que le fruit de l’harmonie, de la justice et de l’énergie. Que l’exemple de l’union, de la concorde et de la fraternité, partant du sein du sénat fran-çois, dissipe donc en tous lieux les divisions, les partis, et ramène les esprits à un but commun, celui du bien général. Pour nous, invariablement attachés aux principes, pleins de confiance dans la représentation nationale, et promettant de n’avoir d’autre point de ralliement que la Convention, nous lui jurons un attachement inviolable, et les Ardêchiens ne jurent point en vain. Vivent la république et nos fidèles représentans ! Perruv, président, Paquet, Guysolle, secrétaires. [On applaudit ]. 7 Le district d’Orléans [Loiret] témoigne sa joie du rétablissement de TalÜen ; il ajoute que la terreur est l’apanage de la férocité, et que le gouvernement révolutionnaire n’est autre chose que l’activité permanente de la justice nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (12). [Copie de l’adresse des administrateurs du district d’Orléans à la Convention nationale , du 8 vendémiaire an HT] (13) Représentants, L’espoir criminel des hommes de sang, des terrifers vient d’échouer, Tallien respire, la Patrie n’a point à pleurer la perte d’un de ses enfants chéris. Oui représentants le coup qui l’a frappé en nous éclairant sur vos périls, ajoutent aux devoirs que nos fonctions nous imposent. Notre surveillance en deviendra plus active s’il est possible, et nous parviendrons à écraser ces reptiles venimeux dont l’existence sera bientôt un problème à résoudre. Vainement ils protestent de leur dévouement à la représentation nationale. Ces hommes qui chaque jour l’avüissent dans une société trop célèbre, par l’expulsion arbitraire des membres qui en furent les fondateurs et les soutiens. Vainement ils persistent à se dire les organes du peuple dans des adresses liberticides que le crime seul a tracées à la suitte des orgies, a tracées dans son laboratoire ténébreux. Le peuple tant de fois abusé a brisé l’idole. Le peuple qui foule aux pieds les cendres de l’odieux Mirabeau, qui révère la mémoire de Marat, n’accordera point son estime à ses faux amis. Il ne croit plus à la métamorphose de ces valets de cour, qui sous l’ancien régime humblement prosternés aux pieds d’un grand ou d’une actrice en sollicitoient un regard comme une faveur signalée. Le peuple sait aujourd’hui que la terreur est l’appanage de l’ignorance et de la férocité; il veut le gouvernement révolutionnaire, qui n’est autre chose que l’activité permanente de la justice nationale; il ne connoit d’autre représentants que vous, d’autres législateurs que vous, d’autre point de ralliement que la Convention nationale. Pour copie conforme, Désir, secrétaire du district. Boissy d’Anglas demande que la Convention ordonne de même l’insertion au bulletin du discours prononcé hier par le président de la Convention nationale au Panthéon. Cette proposition est décrétée (14). (12) P.-V., XLVII, 120. J. Fr., n“ 747; M.U., XLIV, 331. (13) C 321, pl. 1346, p. 8. Cette adresse a été lue le 18 vendémiaire (note marginale). Voir séance du 18, n” 8. (14) J. Montagne, n' 1 ; F. de la Républ., n° 21; J. Fr., n 747; M.U., XLIV, 331.