631 [États gén. 1789. Cahiers.) la guerre, soit dans celui de la marine, soit dans les autres portions, fourniront un avoir qui absorbe le déficit qui paraît exister. Art. 9. Les susdits députés sont aussi chargés de demander une abréviation sur les procédures, tant pour le particulier que pour les mineurs, lesquelles durent des temps infinis et qui ruinent souvent, par les frais, le particulier et les mineurs. Art. 10. Que la durée des impôts déjà existants, ou de ceux qui seront consentis, ne pourront avoir lieu que pour quatre années, à compter du jour de la dissolution de l’assemblée, lesquels ne pourront plus se percevoir, s’ils ne sont de nouveau consentis par la nation, représentée par les Etats généraux. Art. 11. Les susdits députés sont également chargés de voir et vérifier tous les états qui leur seront présentés, ou qu’ils demanderont qu’on leur représente, pour vérifier et connaître bien particulièrement la situation actuelle des finances de l’Etat, d’après laquelle vérification ils feront et consentiront ce qu’ils croiront convenable aux intérêts de la communauté. Lecture faite, avons persisté et signé les jour et an que dessus, syndic et habitants de ladite paroisse, Signé Nicolas Cochet, syndic municipal ; Jean-Pierre Leroy, Fiacre Mongar; Guy-Georges Jolly; Denis-Louis Noblet; Antoine-Jean-Baptiste Re-noult-; Houfroy; Millet; Toussaint Saulnier; Frambourg, Nicolas Leroy; Martin Collas; Germain Polido'r; Alamon, greffier. CAHIER Des vœux, doléances et remontrances de la paroisse de la Chapelle-Saint-Denis (1). L’ordonnance de M. le prévôt de Paris, n’accordant aux villages situés dans l’étendue de la vicomté de Paris, hors les murs, que trois jours de délai entre la publication des réglements de convocation pour les Etats généraux, et le jour où l’on doit procéder à la nomination des députés et à la rédaction des cahiers, les habitants de la Chapelle-Saint-Denis ne peuvent s’étendre sur tous les objets qui intéressent le bonheur général de la nation ils se persuadent; que les députés des villes seront chargés de cette discussion importante ; et pour eux, ils se bornent à exprimer succinctement leurs vœux, sur les points qui leur paraissent les plus essentiels; ensuite, ils entreront dans quelques détails sur ce qui concerne plus particulièrement leur paroisse. L’harmonie patriotique dont un grand nombre de bailliages a donné l’exemple, ne permet point de redouter que les -députés des trois ordres, réunis à l’assemblée générale de la nation, ne se considèrent comme frères, comme chargés des intérêts d’une famille nombreuse, dont le bonheur sera leur ouvrage et leur récompense, et par suite de l’émulation que les représentants des deux premiers ordres de l’Etat ont déjà manifestée pour une parfaite égalité, on aime à croire que la première application qu’ils feront de leurs principes aussi nobles que justes, sera d’arrêter qu’on opinera par tête et non par ordre, comme cela s’est pratiqué en beaucoup d’occasions; si le Roi ne s’est point expliqué sur cet objet, c’est qu’il a voulu laisser à là noblesse et au clergé, (1) Nous publions ce cahier d’après un mamrscril des Aréhives de T Empire. [Paris hors les murs. J dont il a préjugé les sentiments, la gloire d’acquérir ce nouveau titre à l’estime et à la reconnaissance du troisième ordre de citoyens. L’état malheureux clans lequel se trouvent les finances, étant la cause principale qui a déterminé Sa Majesté à convoquer les Etats généraux, il parait iudispensable d’indiquer la seconde tenue desdits Etats au bout de trois années, et ensuite d’en fixer périodiquement le retour tous les cinq ans. Nous croyons que c’est le seul moyen de remédier aux maux passés, de prévenir les abus dont nous avons longtemps gémi, enfin, d’assurer le bonheur de la nation et du Roi qui, désormais, délivré des inquiétudes, des chagrins même, inséparables d’une administration vicieuse, jouira de la reconnaissance des Français qui, dans des temps moins heureux, n’ont point cessé de le bénir. La première opération sera, sans doute, d’examiner et de constater la situation des finances et le déficit qui existe. Il n’est aucun Français qui ne doive tenir à honneur d’imiter l’exemple remarquable que le Roi donne à ses sujets ; Sa Majesté a bien voulu annoncer qu’elle était disposée à faire tous les sacrifices utiles au bonheur de scs peuples, et tous les individus, qui sont destinés à recueillir le fruit de ses vues paternelles, se réunissent pour offrir ou solliciter la suppression de tous privilèges ou exemptions de telle nature et établis à quelque titre que ce soit. Il est bien vraisemblable que le voeu général sera de voir abolir la taille, la capitation, les aides, gabelles, les droits perçus, tant à l’entrée des villes dans toute l’étendue du royaume, qu’à l’entrée des provinces mal à propos réputées étrangères, impôts dont la dénomination seule est devenue odieuse par les abus auxquels ils ont donné lieu, et ces impôts pourraient être remplacés par un impôt unique, de 400 millions à peu près, de la manière suivante savoir : à raison d’un dixième sur les rentes, d’un sixième sur les maisons et d’un cinquième sur les terres. Tous les privilèges étant détruits, cette somme de 400 millions de livres, non-seulement remplacerait les droits supprimés, mais servirait encore à la diminution d’un déficit; cette opération donnera naissance à des règlements de détails dont il n’appartient qu’à l’assemblée nationale de s’occuper, et c’est à sa sagesse à balancer les intérêts du fermier et du propriétaire, relativement aux baux, dont la nouvelle imposition changerait, pour ainsi dire, la nature, de manière que le fermier ne paye, dans aucun cas, plus qu’il n’a payé jusqu’ici. Deux observations importantes sur l’établissement d’un nouveau droit, c’est : 1° Qu’il ne doit exister qu’un seul rôle d’imposition ; ce ne sera plus la taille, cet impôt avilissant, symbole de la servitude, qu’il faudra payer. Le rôle des impositions ne contiendra, à l’avenir, que le nom des vrais citoyens, des Français qui viennent au secours de leur prince, de leur patrie, et peut-être le jour n’est pas loin où ce sera un honneur d’v être inscrit; c’est d’ailleurs le seul moyen de prévenir tous abus. La seconde observation, c’est que jusqu’ici, on a vu des propriétaires tourmentes, fatigués par les vexations des traitants, persuadés que les sommes considérables qu’ils payeraient ne profiteraient point à l’Etat, faire des déclarations infidèles de la quantité de leurs biens. En vain les intendants ont-ils voulu se procurer à grands frais des connaissances exactes, la fraude, devenue ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 632 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, presque légitime, s’e?t soutenue avec avantage -, mais, à présent que le patriotisme et l’amour du bien vont diriger toutes les opérations, ne serait-il pas suffisant d’ordonner à tous les propriétaires de faire chez le syndic de chaque paroisse des déclarations précises de leurs biens ou possessions, et comme toute loi demande une sanction, prévenir, qu’en cas de fausses déclarations, les terres ou biens seraient affermés pour dix ans au profit de l’Etat? Il n’esi pas vraisemblable qu’une pareille loi serait méprisée. Il paraît presque indispensable d’établir une caisse nationale, dont les opérations seraient dirigées par les préposés de la nation elle-même ; tous les revenus de l’Etat y seraient versés, les fonds des différents départements seraient fixés, suivant les besoins reconnus et avoués, et chaque ministre serait comptable et responsable de l’emploi des fonds dont la nation le rendrait dépositaire; dans le cas de changement de ministre, celui qui sortirait du ministère rendrait ses comptes à son successeur, et ce compte serait particulièrement imprimé dans le compte général que le ministère des finances serait tenu de rendre tous les ans. Cette caisse nationale deviendra naturellement le dépôt général des fonds qui, jusqu’à présent, ont été confiés aux notaires et aux particuliers; mais il est bien à désirer qu’il soit ordonné que les caisses des consignations et celles des saisies réelles, que tous les fonds provenant des successions, ventes et autres fonds qui, en restant entre les mains de gens de pratique, les déterminent quelquefois à prolonger les alfaires, soient versés dans un court délai à la caisse nationale. Ne serait-il pas juste d’assujettir au dixième les rentes viagères ou perpétuelles, et généralement les emprunts faits ou autorisés par le gouvernement, qui n’v avaient pas été assujettis par les édits de création ? Et les rentiers qui, depuis qu’ils touchent leurs arrérages, n’ont point payé ce droit, pourraient-ils se plaindre d’ètre mis au niveau des autres rentiers qui payent depuis longtemps ? Rien ne serait plus simple que d’imposer fous les effets royaux, en les convertissant en contrats ; on pourrait, toutefois, assigner un certain fonds pour en opérer le remboursement à différentes époques. il est une sorte de revenus-qui jusqu’ici n’ont été assujettis à aucun droit. Ce sont les cens, les lods et ventes, il conviendrait, sur le profit de vingt années pour chaque seigneurie, de former une année commune, et cette propriété ainsi fixée serait imposée comme les autres propriétés, mais en raison d’un cinquième, pour satisfaire aux 400 millions dont nous avons parlé plus haut. On a évalué les besoins de l’Etat à 600 millions par an; l’impôt proposé sur toutes les propriétés, les rentes et les maisons, en fournit 400, la ferme du tabac, l’administration des domaines, les droits d’entrée et de sortie du royaume reportés aux frontières, le droit sur les cartes, les loteries, les gains et bonifications de la caisse nationale peuvent être évalués à 100 millions, et l’établissement d’un impôt de 100 millions sur toutes sortes de commerces, dans l’étendue de la France (excepté toutefois celui de cultivateur ou fermier qui ne vend que les productions d’une propriété qui a déjà satisfait à l’impôt) remplirait les 600 millions nécessaires au service des finances. La répartition de cet impôt serait presque insensible. [Paris hors les murs.] D’après ces dispositions, ou toutes autres dignes de la sagesse de nos �présentants, la dette de l’Etat sera reconnue, avouée et assurée sur tous les revenus publics. Les objets qui ont rapport à la liberté publique ou individuelle sont nombreux; il serait presque impossible de les suivre, sans y porter la plus profonde réflexion, et nous bornerons nos vœux à solliciter la suppression des lettres de cachet, l’abolition des capitaineries. Quoi de plus juste que de rendre à l’homme le droit que la nature lui avait primitivement donné de détruire, dans le champ qui lui appartient, un animal qui dévore le fruit de son travail? Nous sollicitons aussi la liberté de la presse, avec cette condition indispensable, que tout homme signera ses productions, et dans le cas où l’écrit serait répréhensible, la loi pourrait toujours exercer sa censure. La réforme dans les lois civiles et surtout dans les lois criminelles, dans l’administration de la justice, estd’une nécessitégénéralement reconnue; mais les génies supérieurs 'qui se sont occupés, sous Louis XIV, de la confection des ordonnances, le temps et le travail opiniâtre que ces mêmes génies ont employés, prouvent combien cette matière est délicate. "Ne serait-il pas nécessaire, avant que ce grand ouvrage, qui demande le concours du temps et des lumières de plusieurs jurisconsultes, fût terminé, ne serait-il pas nécessaire de statuer sur les objets qui paraissent d’une nécessité plus urgente, par exemple la suppression de la vénalité des charges de judica-ture, puisqu’il est bien reconnu que ni la naissance ni l’argent ne donnent ni la capacité ni l’intégrité nécessaires à un magistrat ; de statuer qu’aucun citoyen ne pourrait exercer les fonctions de juge avant trente ans, et que le nom de ceux qui se présenteraient pour remplir une place aussi importante serait écrit dans la salle d’audience, pendant un certain temps, afin que chacun put faire sur son admission les observations qu’il croirait utiles? Toutes les difficultés qui pourraient naître, pour l’interprétation des lois portées par les Etats généraux, pourraient être décidées provisoirement par l’assemblée provinciale du département dans lequel la difficulté aurait été élevée. Il est aussi bien à désirer que les assemblées provinciales soient chargées entièrement de la construction et de l’entretien des chemins, ponts et chaussées, dans toute l’étendue du royaume. Les procès sont le plus grand fléau de la société; leur longueur éternise les haines entre les familles, les dépenses qu’ils entraînent ruinent souvent celui qui gagne, ainsi que celui qui perd ; ajoutons les démarches que les plaideurs font pour en imposer à leurs juges ou les séduire; comptons le nombre de bonnes causes perdues, et nous conviendrons que le plus bel établissement serait un tribunal d’arbitres, où la justice se rendrait gratuitement dans chaque ville. Ceux qui cherchent à soutenir une prétention qu’ils croient légitime, préf reraient, sans doute, un arrêt rendu par des hommes intègres, et rendu sans frais, à tous les détails de la procédure , aux inquiétudes qu’un long procès fait naître, à la crainte de se voir entièrement ruinés; mais il faudrait que les jugements des arbitres fussent définitifs, et qu’il fût défendu aux parties, qui auraient obtenu jugement, de se pourvoir par-devant d’autres juges. Autrefois les banqueroutes frauduleuses étaient rares, parce qu’elles étaient sévèrement punies. 633 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.) [États gén. 1789. Cahiers.] On voit aujourd’hui un grand nombre d’hommes avides et inconsidérés qui, après avoir obtenu la confiance publique, compromettent par des spéculations folles leur bien et celui des autres; il est un grand nombre de ces dissipateurs, par goût et par ton, qui semblent s’honorer du titre d’hommes insolvables. 11 serait bien à désirer qu’un crime, si préjudiciable à l’ordre social, ne fut pas impuni, et que le nom des banqueroutiers frauduleux fût inscrit dans un tableau toujours visible et exposé dans un lieu public. Un abus non moins sensible que la vénalité des charges, c’est la vénalité de la noblesse; les premiers hommes qui, chez les anciens, s’élevèrent au-dessus de leurs semblables par leur force, leur courage ou leur vertu, furent mis au rang des dieux; parmi nous, la première noblesse a été méritée par les services . militaires ; mais comme les privilèges accordés à la noblesse, dès l’origine de la monarchie, établissaient une distinction avilissante entre un noble et un roturier, nous croyons que beaucoup de roturiers refuseraient aujourd’hui la noblesse avec ces avantages, méprisables aux yeux de la raison et de la philosophie; mais tout est changé, et,' à l’avenir, l’ordre de la noblesse qui ne consent à faire un corps séparé que pour donner l’exemple du patriotisme et des vertus, sera la réunion des hommes qui, par leurs aïeux et par eux-mômes, auront bien mérité de l’Etat. Que la nation détruise donc tous les moyens de se procurer à force d’argent la noblesse ..... Ce titre, qui va devenir si pur, si précieux et si désiré, qu’elle ne l’accorde qu’au vrai mérite; qu’elle l’accorde au jurisconsulte qui, par sa probité et ses lumières, aura mérité la confiance et la vénération publique; qu’elle l’accorde au cultivateur qui, par ses soins et ses découvertes, aura enrichi l’agriculture; qu’elle l’accorde au pasteur vertueux qui, pendant une longue suite d’années, aura bien administré le troupeau qui lui est confié, qui aura chassé de sa paroisse la honteuse mendicité, qui aura prévenu les procès, encouragé la vertu par ses conseils et son exemple, qui aura sacrifié son revenu au soulagement des pauvres et des malades ; enfin, que la nation accorde la noblesse à toutes les grandes et belles actions, mais toujours sur le cri public, ou à la sollicitation des assemblées provinciales. 11 est un préjugé contre lequel on s’est élevé depuis longtemps, mais toujours sans succès; il intéresse le bonheur de tous les Français Quelle est la famille honnête qui peut répondre qu’un de ses membres ne méritera pas d’être flétri par un jugement que son crime aura rendu nécessaire; et lorsque le crime est personnel, pourquoi la honte et le déshonneur, qui suivent le châtiment, ne seraient-ils pas personnels? Aussi les suites de ce préjugé national sont terribles. Un père, un frère, un fils, sout obligés de quitter une place honorable, quelquefois même leur patrie; une sœur, une tille, restent sans établissement ou regrettent d’en avoir contracté; liaisons d’intérêt, de considération, d’amitié même, tout est détruit ....... Et c’est un préjugé qui cause tant de maux! Puissent les Etats généraux contribuer à sa destruction ! Telle' sont les matières que les habitants de la Chapelle-Saint-Denis ont jugées les plus importantes ; il ne leur reste qu’à traiter quelques objets qui sont particuliers à la banlieue de Paris, ou à leur paroisse. Il est bien des abus qui seront dénoncés aux tenues subséquentes des Etats généraux ; mais jusqu’à cette époque on souffrira encore avec patience, dans l’espérance d’une guérison sûre. Si le Français ne touche pas au jour du bonheur, au moins est-il heureux d’en voir déjà l’aurore. Si les Etats généraux ne jugeaient point à propos de supprimer les droits d’entrée et autres droits qui se perçoivent à Paris, nous les supplions de prendre en considération particulière l’injustice dont nous sommes, depuis longtemps, victimes. Nous payons tous les droits auxquels sont assujettis tous les habitants de la campagne, la taille, la capitation, le second brevet, la corvée, les vingtièmes produisant au Roi, pour notre paroisse, qui n’a que cent quarante-huit feux,21,2671ivres 16 sous; et par un abus inconcevable, paruneextensionbienvicieusedelapartdes fermiers généraux, nous avons été assujetis, à force de légères concussions multipliées et augmentées par degré, aux droits d’eutrée et autres droits qui n’avaientétéétablisque pour la ville elles faubourgs de Paris, et nullement pour labanlieue. Il est même certains droits qui se perçoivent hors les murs de Paris, dans une fixation double de celle reçue pour la capitale ; les malheurs qui résultent de la perception de ces droits, l’injustice de cette même perception, la conduite malhonnête et criminelle des préposés de la ferme, sont exposés dans un mémoire imprimé qui avait été destiné pour l’assemblée provinciale, avant que la France eût l’espérance de tenir les Etats nationaux, et auquel plusieurs paroisses de la banlieue avaient donné leur approbation. Nous osons croire que nos réclamations ne paraîtront pas indignes de l’attention de cette auguste assemblée, d’abord parce qu’il s’agit d’une injustice dont nous gémissons depuis piusieurs années, et dont les effets sont cruels pour nous, et de plus, parce que la perception de ces droits gêne considérablement la liberté de tout le commerce du royaume. Les paroisses situées dans la bantieue de Paris sont privées du droit, dont jouissent tous les fermiers et laboureurs, d’avoir des moutons pour l’engrais de leurs terre. Le droit de pacagea été accordé exclusivement aux bouchers de la capitale, qui ont obtenu cette prérogative sous le prétexte de l’utilité publique ; mais on sait par tradition qu’en échange de ce droit de pacage, dont on privait les habitants de la banlieue, ils avaient obtenu le privilège d’enlever sans aucune rétribution les boues de Paris déposées dans les voiries, qui sont absolument nécessaires pour l’amélioration de leurs terres : non-seulement ils ont joui longtemps de ce privilège, qui était regardé comme un droit, mais il existe des ordonnances de police qui ont forcé les habitants de la banlieue, à peined’amende, de vider les voiries lorsqu’elles se trouveraient engorgées. Ce ne fut qu’en 1777 qu’on commença à entourer les voiries de barrières, et à exiger un droit de 15 sous pour la charge de chaque cheval ; les habitants de la banlieue ont réclamé contre cette innovation. M. l’intendant de Paris, trouvant leurs réclamations justes, s’était chargé de les soutenir auprès aie M. Lenoir. alors lieutenant de police ; mais tout se réduisit à la correspondance dont copie est ci-jointe, et l’affaire ne fut pas décidée. Si l’intérêt public a été le motif dont on s’est servi pour nous ôter le droit de pacage sur nos terres et pour nous obliger à y recevoir les moutons des bouchers de Paris, la protection que mérite l’agriculture exige que nous soyons dédommagés par ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.J 634 [États gén. 1789. Cahiers.] un autre engrais, indépendamment de l’intérêt que peut avoir la police à affermer les boues. Noys finissons par demander d’être déchargés de l’impôt que nous payons pour l’entretien des casernes des gardes-françaises, situées à Paris ; l’arrêt du conseil en est précis à cet égard ; il n’assujettit aux droits que les habitants de la la ville et faubourgs de Paris, le mot de banlieue n’y est point écrit ; les autres paroisses de la banlieue, excepté la Chapelle et la Viilette, ne payent riçn pour cet objet, et c’est une concussion de faire payer à un village de la banlieue un droit qui n’est maintenant établi par aucun titre. Cet impôt est d’autant plus injuste que nous contribuons au payement des impôts suivants, qui ne sont, pour la généralité de Paris, que la représentation du droit de casernement qu’on paye dans la capitale. Pour notre part dans les 240,000 livres pour les étapes. 240,000 liv. » Dans les 150,000 pour la suppression des corvées militaires. 150,000 » Pour le casernement de la généralité de Paris ........... 158,100 » Total des droits à répartir ~ dans la généralité de Paris ci. 548,100 » Puissent nos plaintes être accueilliés, puissent nos vœux être exaucés ! Ils ne se bornent point à notre intérêt particulier, puisqu’une chaîne patriotique unit tous les membres de l’Etat. S’il résulte de la tenue des Etats généraux tout le bien que nous sommes en droit d’en attendre, nous adorerons le plus grand et le meilleur de nos rois, qui aura fixé irrévocablement le bonheur des Français ; nous chérirons, après lui, le ministre étonnant qui aura préparé de si grandes choses ; nous consacrerons les noms de nos représentants, qui auront consommé ce grand œuvre, et la postérité immortalisera nos sentiments. Signé Delmourt ; Caron ; P. Isnelle ; P. Fiscal ; Portefin ; Chevenin ; J.-P. Cottin ; Trouiller ; F. Cottin ;J.-L.Àuvry ; E. Bouret; Gautier de Saint-Charles ; Duperrier, greffier. CAHIER Des doléances et pétitions de la commune et de la ville de La Ferté-sous-Jouarre pour être remises aux députés qui. la représenteront à l'assemblée générale des trois Etals au châtelet de Paris pour la rédaction du cahier général de la prévôté et vicomté de Paris et la nomination aux Etats généraux du royaume qui doivent avoir lieu à Versailles le 27 avril 1789 (1). Lesdits députés seront chargés de représenter : Art. 1er. Qu’aucun impôt ne pourra être perçu u’il n’ait été consenti et arrêté par les trois or-res du royaume assemblés en Etats généraux. Art. 2. Que leur retour périodique soit fixé à une époque certaine, mais qu’ils ne soient pas permanents. Art. 3. Que les impôts qui seront consentis par les Etats généraux, sous quelque forme et dénomination que ce soit, seront supportés également par tous les ordres, corporations et individus, proportionnellement à leur fortune, sans distinction d’aucune espèce de biens et sans aucune exception ni restriction en faveur de qui que ce soit, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. nonobstant tous affranchissements et abonnements. Art. 4. Que les Etats généraux, divisés par ordre ou opinion par tête, reconnaissent dans les représentants des communes une influence et un pouvoir égal à celui des deux autres ordres. Art. 5. Que les intendants des provinces soient supprimés. Art. 6. Que les ministres, commandants, gouverneurs et toutes les cours supérieures et inférieures soient responsables des abus dont ils se seront rendus coupables. Art. 7. Qu’il soit laissé un libre cours à la justice dans les tribunaux ordinaires; que l’on supprime tous droits de committimus, lettres de garde gardienne, évocations, révocations et attributions, privilèges de bourgeois de Paris et ceux du Châtelet, en sorte que chaque justiciable ne puisse être poursuivi en matière civile ou criminelle, personnelle ou réelle, que par-devant son juge. Art. 8. Que la police des villes soit rendue et exercée par les magistrats municipaux, ‘qui seront toujours éligibles; que pour cet effet les charges soient supprimées et la finance remboursée aux titulaires. Art. 9. Qu’il soit procédé à la réforme des codes civil et criminel. Art. 10. Que la peine due au crime soit égale entre les trois ordres. Art. 11. Que la nomination aux emplois civils, ecclésiastiques et militaires, soit aussi commune aux trois ordres. Art. 12. Que les accusés auront un conseil. Art. 13. Qu’aucun citoyen ne pourra être décrété que par trois juges. Art. 14. Que les lettres de cachet seront supprimées. Art. 15. Que les parents de ceux qui auront été repris en justice n’en soient pas moins habiles à posséder toutes charges et dignités quelconques, avec défense de leur en faire un objet de reproche. • . Art, 16. Que le nombre des degrés de juridiction soit réduit à deux. Art. 17. Que l’impôt de la gabelle et ceux des aides soient supprimés, sauf à les remplacer suivant la prudence des Etats généraux. Art. 18. Que les droits de franc-fief soient supprimés et qu’il soit établi un tarif clair et précis pour la perception des droits de contrôle et d’infirmations. Art. 19. Que les journaliers sans propriété soient exempts de toute espèce de subsides. Art. 20. Que la dette nationale soit reconnue et assurée. Art. 21. Que les droits d’octroi des villes soient à leur profit suivant leur première destination. Art. 22. Que la milice soit supprimée et remplacée de manière à être supportée également par les trois ordres. Art. 23. Que les corvées en nature demeurent supprimées pour toujours et qu’elles soient sup-, portées en argent par les propriétaires des trois ordres. Art. 24. Que les capitaineries soient . supprimées. Art. 25. Que les lapins soient détruits. Art. 26. Que les pigeons soient renfermés lors des semences et moissons des grains, sinon permis aux propriétaires des terres de les tuer. Art. 27. Que les banalités soient supprimées ainsi que les péages, pontonages, etc., en remboursant les propriétaires ou entrepreneurs. Art. 28. Que les baux de gens de mainmorte