SENECHAUSSEE DE UIOM. DOLÉANCES DU CLERGÉ De la sénéchaussée d’Auvergne , séant, à Riom , et instructions pour les députés du clergé de la sé-. néchaussée d'Auvergne aux Etats généraux (1). Les députés du clergé de la sénéchaussée d’Auvergne aux Etats généraux fixeront leurs premiers regards sur la religion, l’appui le plus ferme du trône, la conservation des mœurs, le lien le plus intime entre le souverain et les sujets, la base et le fondement de la durée et de la prospérité des empires. ' Art. 1er. Ils demanderont gue la religion catholique, apostolique et romaine jouisse seule de l’exercice et de l’honneur du culte public, et qu’on renouvelle les lois de police concernant le culte extérieur, la sanctification des dimanches et fêtes et le respect dû à nos temples et aux ministres des autels. Art. 2. Les sources empoisonnées de l’irréligion étant multipliées presque à l’infini dans ces temps malheureux, ils demanderont les lois les plus expresses et les plus sévères contre la liberté de la presse, que nous regardons comme le germe le plus fécond de l’incrédulité, de la dépravation des mœurs et de l’esprit d’indépendance qui fait aujourd’hui le système dominant. Art. 3. Rien de plus sacré que le serment, rien de plus commun que l’abus du serment ; ils demanderont qu’il ne soit désormais employé que dans les causes majeures, et qu’on ne l’exige jamais dans les affaires criminelles de l’accusé contre lui-même. Art. 4. Ils prieront les Etats généraux de fixer leur attention principalement sur l’éducation publique; ils demanderont qu’elle soit confiée à des corps autant qu’il sera possible ; que les auteurs classiques soient également religieux et utiles ; ils demanderont aussi que dans les petites villes où il n’y a point de collège, on établisse des maîtres choisis par les officiers municipaux et les curés sous l’inspection de l’ordinaire. Art. 5. Qu’on réforme les universités et qu’on les rappelle à leur institution primordiale; que les examens soient véritablement rigoureux; qu’on n’accorde des grades pour requérir qu’à ceux qui les auront réellement mérités par leurs bonnes mœurs, leurs études et leurs progrès. Art. 6. Nous chargeons nos députés de s’occuper spécialement de la conservation des communautés séculières et régulières, utilesà la religion, à l’Etat, aux familles indigènes, et devenues aujourd’hui presque nécessaires pour l’instruction de la jeunesse. Art. 7. Ils auront également soin de faire des représentations sur la décence et la décoration des églises, dont la plupart se trouvent dans un état (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire. ire Série. T. Y. indigne de la grandeur et de la majesté du culte divin. Art. 8. Ils solliciteront le rétablissement des conciles provinciaux, si utiles et si nécessaires pour le maintien de la discipline ecclésiastique. Art. 9. Ils supplieront Sa Majesté d’établir un conseil de conscience pour la nomination aux prélatures. Art. 10. Ils supplieront aussi très-humblement Sa Majesté d’avoir égard aux remontrances que le clergé assemblé en 1788 a eu l’honneur de lui présenter relativement à l’édit concernant les non catholiques. Art. il. Le gouvernement monarchique, aussi ancien que la nation elle-même, étant reconnu comme le plus convenable aux grands empires, comme le plus conforme aux mœurs, au génie et au caractère des Français, nos députés s’opposeront à toute innovation tendante à altérer la forme constitutive de cet heureux gouvernement. Art. 12. Ils demanderont que la distinction des trois ordres soit reconnue comme un principe fondamental de notre constitution ; ces trois ordres séparés par le rang sont égaux en pouvoirs et indépendants les uns des autres ; leur unanimité seule peut former le vœu de la nation ; aucun de ces ordres ne peut être lié sans son consentement libre, même par le concours des deux autres ordres. Art. 13. Nos députés réclameront le maintien et l’exécution de toutes les lois et ordonnances formant le droit public, ecclésiastique et français. Art. 14. Ils supplieront Sa Majesté de maintenir les différents tribunaux ecclésiastiques et civils, dont l’utilité sera reconnue par les Etats généraux, dans le libre cours et exercice de leurs pouvoirs respectifs; supprimer toute commission, attribution et évocation ; d’abréger la longueur des procédures et diminuer les frais de justice. Art. 15. Ils demanderont que, pour obvier aux dangers de la vacance des bénéfices, et aux abus de la prévention, il soit statué qu’un col-lateur ne puisse être prévenu qu’un mois après la vacance. Art. 16. Que l’ordinaire soit autorisé à nommer à tous les bénéfices dont les patrons seront non catholiques jusqu’à l’époque où ils rentreront dans le sein de l’Eglise, si mieux n’aiment lesdits patrons donner leurs procurations à des catholiques pour l'exercice de leurs droits. Art. 17. Que désormais on né puisse nommer à aucun bénéfice exigeant résidence et nomination ecclésiastique que des personnes engagées dans les ordres sacrés. Art. 18. Que les monitoires ne puissent être demandés que pour des causes très-graves, telles que crimes d’Etat, meurtre, incendie, vol. Art. 19. Que, pour éviter les erreurs et les surprises dans les mariages, on ordonne de publier dans tous les cas les bans de mariage dans le domicile dorigine, et d’inscrire sur les registres la publication des mariages célébrés hors la paroisse. 36 M02 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Art. 20. Que les canons contre la pluralité des bénéfices soient exécutés; que tous les ecclésiastiques pourvus d’un bénéfice suffisant pour fournir honnêtement à sa subsistance, ne puissent en posséder un autre sans abdiquer le premier ; et pour éviter toute sorte de prétexte à cet égard, s’il est des évêchés d’u n revenu trop médi ocre relativem ent à leur importance et à leur étendue, Sa Majesté sera suppliée d’y pourvoir de manière qu’un évêque ne puisse posséder d’autre bénéfice. Art. 21. Que les Etats généraux prennent particulièrement en considération les traitements des curés et qu’ils s’occupent des moyens les plus prompts et les plus efficaces de leur faire un sort proportionné à l’importance de leurs fonctions, au local et à la population de leurs paroisse; qu’à cet effet il soit incessamment procédé à la réunion des bénéfices jugés les moins utiles, sans porter aucune atteinte aux établissements consacrés au culte, et déjà trop grevés par les augmentations progressives des portions congrues ..... Que Sa Majesté soit suppliée d’ôter les entraves qui s’opposent aux réunions et suppressions des bénéfices, d’en diminuer les frais, et d’établir des lois pour abréger les formalités d’usage. Art. 22. Que les curés dépendants de l’ordre de Malte obtiennent le même traitement, et que leur inamovibilité soit prononcée. Art. 23. Que tout casuel forcé soit supprimé, auf aux Etals généraux d’y suppléer. Art. 24. Que dans chaque diocèse il y ait des fonds affectés pour procurer une retraite honnête, ou assurer une pension aux ecclésiastiques qui auront vieilli dans le ministère ou qui ne pourraient plus en remplir les fonctions, à raison de leurs infirmités. Art. 25. Qu’on simplifie les moyens de pourvoir à l’entretien et reconstruction des églises et presbytères sans imposer de nouvelles charges aux décimateurs. Art. 26. Que les économats soient abolis ; qu’il leur soit substitué un régime plus simple, moins onéreux aux familles, et qui pourvoie plus efficacement aux réparations des bénéfices, sans les tenir en séquestre, et les priver de leur titulaire. Art. 27. Que l’aliénation des biens ecclésiastiques soit réprimée par une nouvelle loi qui interdise toute vente, et ne permette les échanges et les baux emphytéotiques que d’après l’examen le plus sévère et l’autorisation de l’ordre et des supérieurs respectifs. Art. 28. Que la déclaration de 1769, qui soustrait aux recherches les unions faites depuis plus de cent ans aux cathédrales, cures, séminaires et hôpitaux, soit rendue commune à tous les bénéfices et établissements ecclésiastiques. Art. 29. Qu’il soit permis aux agents généraux du clergé d’entrer aux Etats généraux pour fournir les instructions nécessaires. Art. 30. Qu’on lève les défenses faites aux curés de s’assembler pour discuter et traiter en commun de leurs intérêts particuliers. Art. 31. Que les Etats généraux tâchent d’acquérir la connaissance la plus exacte et la plus claire de la dette nationale et prennent les moyens les plus efficaces pour l’acquitter. Art. 32. Que tous les impôts actuellement établis soient supprimés et remplacés par des subsides peu nombreux, simples, uniformes, proportionnées aux besoins de l’Etat, aux facultés des contribuables, et dont la perception exigera le moins de frais possible ; que ces subsides di minuent progressivement à mesure que les dettes de l’Etat s’éteindront. Art. '33. Que tous les droits nuisibles au commerce et à l’industrie, tels que aides,- gabelles, traites, douanes, péages et leydes soient abolis. Art. 34. Le clergé faisant le sacrifice de ses privilèges pécuniaires pour subvenir aux besoins de la nation, que les Etats généraux reconnaissent que la dette du clergé devient celle de l’Etat, et qu’ils prennent les moyens les plus efficaces pour acquitter l’une et l’autre. Art. 35. Si les chambres ecclésiastiques sont dans le cas de subsister, qu’elles soient organisées d’une manière plus conforme aux intérêts des contribuables'; que chaque classe de bénéficiers y soit suffisamment représentée par les députés de son choix, qui seront changés tous les trois ans ; qu’il soit fait un tableau général de la cote de chacun, qui sera imprimé et affiché dans la chambre, et qu’on établisse un tribunal supérieur où seront portées et jugées les demandes et surtaxes. Art. 36. Que Sa Majesté soit suppliée de rendre à l’Auvergne ses Etats provinciaux. Art. 37. Qu’il soit établi dans la province une cour souveraine. Art. 38. Qu’il soit formé de nouveaux arrondissements dans chacun desquels il sera établi une justice royale. Art. 39. Que‘la loi qui donne la présidence aux syndics des municipalités, même en présence du curé, soit révoquée, et que dans tout hôpital et administration de charité quelconque, qui n’aura pas de règlement particulier, un curé ne soit jamais présidé par son évêque. Art. 40. Qu’on établisse dans chaque paroisse un bureau de charité, une sage-femme instruite{ et dans chaque arrondissement un chirurgien habile. Art. 41. Qu’il soit érigé un tribunal de paix dans chaque paroisse pour terminer sans frais toutes les petites contestations ; que ce tribunal soit composé du curé, du syndic et d’un notable de la paroisse. Art. 42. Que tous les notaires royaux soient habiles à remplir les fonctions de notaires apostoliques ; qu’on soit plus exact et plus scrupuleux dans l’examen d’usage, avant leur réception; qu’ils mettent leur nom au commencement des actes, et que, pour la sûreté des engagements, il soit pourvu d’une manière plus efficace à la conservation des minutes. Art. 43. Que tous les droits de contrôle soient fixés et réduits aux taux les plus modérés ; qu’on supprime l’arrêt du conseil, clu 5 septembre 1785, qui oblige les ecclésiastiques à passer à l’enchère, et en présence des subdélégués des intendants, les premiers baux de construction, et qu’on mette un terme aux recherches des agents du fisc. Art. 44. Que les biens et les propriétés des hôpitaux et de tous les établissements de charité soient respectés et conservés ; qu’ils ne puissent vendre leurs biens-fonds et qu’ils soient maintenus dans la possession de leurs droits, immunités et privilèges. Art. 45. Que les corps et communautés religieuses soient autorisés à semer et planter des bois, et que les objets mis en valeur appartiennent exclusivement auxdits corps et communautés sans aucun partage avec les abbés et prieurs commendataires. Tels sont les vœux du clergé de la sénéchaussée d’Auvergne. La convocation des Etats généraux est le présage du bonheur de la nation et de la prospérité de la chose publique ; un admi- [États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] 5(53 nisfrateur sage et éclairé en a préparé les i moyens ; l’amour du souverain pour son peuple en assure l’exécution ; le bien public est enfin devenu le sentiment général. L’ordre va renaître, le crédit se rétablir, et l’Etat libéré recouvrera toute sa force et toute sa grandeur ; la confiance réciproque du souverain et des sujets en sont garants. Dans cette intime conviction, nous chargeons nos députés aux Etats généraux de déposer aux pieds du trône nos hommages et nos vœux ; ils consentiront d’après ces instructions, en suivant leurs lumières et leur conscience, à tout ce qu’ils jugeront à propos, utile, bon et nécessaire pour la gloire de la religion, la splendeur du trône, les véritables intérêts de la nation et la félicité publique. Et à la minute ont signé : Thaillaud, curé de Riom ; l’abbé Vertamy-Ter-rasse, prieur, commissaire ; l’abbé de Massais, comte de Brioude ; de La Bastide, curé de Pouil-haques; Majeune, curé de Saint-Beausèze, commissaire ; Fayolle , curé de Saint-Bonnet-les-Champs ; Boyer, secrétaire. S’ensuit la protestation de Mgr l’évêque de Clermont : Nous, évêque de Clermont, avons eu représenta-tiondu présent cahier, seulement signé par tioisde MM. les commissaires sur quinze qui avaient été nommés pour rédiger les instructions y contenues et les vœux du clergé de la sénéchaussée d’Auvergne, déclarons que nous ne croyons pouvoir signer que sous les réserves et protestations suivantes : 1° Contre l’article 30, comme absolument contraire au bon ordre, et tendant à faire un corps particulier dans le clergé de la classe de MM. les curés ; 2° Contre la partie de l’article 33, qui porte sur les péages et les leydes, sans demande d’aucune indemnité, ce qui pourrait donner atteinte aux propriétés; 3° Contre l’article 34, en ce qu’il suppose l’abandon des privilèges pécuniaires fait et consommé, tandis que nous pensons que l’ordre ecclésiastique réuni aux Etats généraux, de toutes les parties qui composent le clergé de France, est seul compétent pour prononcer sur un tel abandon, ou même de combiner avec sagesse les intérêts du corps avec la sûreté de l’hypothèque de ses créanciers, préalable que nous regardons comme essentiellement nécessaire dans l’ordre de la procédure et de la justice ; 4° Contre l’article 35, en tant seulement qu’il a relation avec le précédent, et qu’il pourrait donner à penser que l’ordre du clergé cesserait dans l’hypothèse même de la cession des privilèges de s’imposer lui-même ; 5° Contre l’article 39, en tant qu’il ôte aux évêques un droit inhérent à leur juridiction et à leur dignité, s’il n’y a pas d’erreur de copiste dans cette phrase : « Un curé ne puisse être présidé par son évêque ; » et dans le cas de cette erreur qui consisterait dans l’omission du mot : que , nous protestons contre l’exclusion qui se trouverait donnée aux grands-vicaires ; 6° Contre l’article 45, en ce qu’il n’établit pas une réciprocité 4e justice contre les abbés com-mendataires et les religieux, et qu’il est autre qu’il n’avait été arrêté par l’assemblée. Et a signé T. François, évêque de Clermont. Expédié à M. le lieutenant général, président de l’assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d’Auvergne, par moi, secrétaire-greffier de ladite assemblée, le 13 avril 1789. Signé FAUCON. INSTRUCTIONS Pour les députés de la noblesse aux Etats généraux, arrêtées dans l'assemblée de la sénéchaussée d’Auvergne, séant à Riom (1). Un monarque bienfaisant veut régénérer la France : à sa voix, tant d’intérêts divisés, et même en opposition, depuis trop longtemps, vont se réunir au but commun de l’utilité publique ; et le Français se livre à la plus] douce espérance,' celle d’être libre sous un roi. La noblesse d’Auvergne vous charge de la défense et du recouvrement des droits de la nation. En vous confiant ses intérêts les plus chers, elle vous remet ses instructions. Bien convaincus de l’importance de cette commission, vous la remplirez sûrement avec la générosité qui gagne les cœurs et le patriotisme qui les élève. Souvenez-vous que la nature a fait les hommes égaux, et que les distinctions nécessaires entre eux, particulièrement dans une monarchie, sont fondées sur l’utilité générale. Vous regarderez ces deux vérités comme la base de notre constitution ; elles vous rappelleront à la fois ce que vous devez à la dignité d'un peuple libre et à la prééminence des premiers citoyens de l’empire. Que par vos soins la France soit heureuse ! La reconnaissance d’une nation est le plus bel hommage que puisse obtenir un citoyen : tel sera le prix de vos vertus. Après avoir exprimé le vœu que la majesté du trône et la dignité de la famille royale aient tout l’éclat qui leur est dû, et que leur assurent le respect et l’attachement gravés dans le cœur de tous les Français, nous déclarons que nos principes sont : Art. 1er. Que l'assemblée des représentants de la nation française formant les Etats généraux est la seule puissance compétente pour établir les impôts et faire les lois avec la sanction du Roi. En conséquence, le jour de l’ouverture des Etats généraux, les députés déclareront que tout impôt est cessé ; ils pourront néanmoins consentir à la prorogation de l’impôt actuel jusqu’au 1er janvier 1790. Mais lesdits députés ne s’occuperont des subsides nouveaux qu’après avoir statué sur les droits de la nation ; ils ne les établiront que pour deux ans, époque qu’ils fixeront, pour rassembler les Etats généraux, qui en régleront alors le retour fréquent et périodique; et dans les cas de régence à établir, ils statueront que les Etats généraux s’assembleront le plus promptement possible. Aucun impôt ne sera, à l’avenir, mis ou prorogé sans le consentement des Etats généraux du royaume ; toutes impositions mises ou prorogées par le gouvernement, sans cette condition, ou accordées hors des Etats généraux, par une ou plusieurs provinces, une ou plusieurs villes, une ou plusieurs communautés, seront nulles, illégales; et il sera défendu, sous peine de concussion, de les répartir, asseoir et lever. Les députés demanderont que les Etats provinciaux soient établis dans toutes les provinces ; mais qu’à chaque tenue des Etats généraux, la convocation soit faite, suivant les anciens usages, par bailliages, étant la manière la plus usitée pour connaître les vœux de tous les citoyens, à moins que les Etats généraux ne trouvent une forme de convocation plus utile. Art. 2. Que tous les citoyens français, depuis le premier rang jusqu'au dernier, quelque profession (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. [États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] 5(53 nisfrateur sage et éclairé en a préparé les i moyens ; l’amour du souverain pour son peuple en assure l’exécution ; le bien public est enfin devenu le sentiment général. L’ordre va renaître, le crédit se rétablir, et l’Etat libéré recouvrera toute sa force et toute sa grandeur ; la confiance réciproque du souverain et des sujets en sont garants. Dans cette intime conviction, nous chargeons nos députés aux Etats généraux de déposer aux pieds du trône nos hommages et nos vœux ; ils consentiront d’après ces instructions, en suivant leurs lumières et leur conscience, à tout ce qu’ils jugeront à propos, utile, bon et nécessaire pour la gloire de la religion, la splendeur du trône, les véritables intérêts de la nation et la félicité publique. Et à la minute ont signé : Thaillaud, curé de Riom ; l’abbé Vertamy-Ter-rasse, prieur, commissaire ; l’abbé de Massais, comte de Brioude ; de La Bastide, curé de Pouil-haques; Majeune, curé de Saint-Beausèze, commissaire ; Fayolle , curé de Saint-Bonnet-les-Champs ; Boyer, secrétaire. S’ensuit la protestation de Mgr l’évêque de Clermont : Nous, évêque de Clermont, avons eu représenta-tiondu présent cahier, seulement signé par tioisde MM. les commissaires sur quinze qui avaient été nommés pour rédiger les instructions y contenues et les vœux du clergé de la sénéchaussée d’Auvergne, déclarons que nous ne croyons pouvoir signer que sous les réserves et protestations suivantes : 1° Contre l’article 30, comme absolument contraire au bon ordre, et tendant à faire un corps particulier dans le clergé de la classe de MM. les curés ; 2° Contre la partie de l’article 33, qui porte sur les péages et les leydes, sans demande d’aucune indemnité, ce qui pourrait donner atteinte aux propriétés; 3° Contre l’article 34, en ce qu’il suppose l’abandon des privilèges pécuniaires fait et consommé, tandis que nous pensons que l’ordre ecclésiastique réuni aux Etats généraux, de toutes les parties qui composent le clergé de France, est seul compétent pour prononcer sur un tel abandon, ou même de combiner avec sagesse les intérêts du corps avec la sûreté de l’hypothèque de ses créanciers, préalable que nous regardons comme essentiellement nécessaire dans l’ordre de la procédure et de la justice ; 4° Contre l’article 35, en tant seulement qu’il a relation avec le précédent, et qu’il pourrait donner à penser que l’ordre du clergé cesserait dans l’hypothèse même de la cession des privilèges de s’imposer lui-même ; 5° Contre l’article 39, en tant qu’il ôte aux évêques un droit inhérent à leur juridiction et à leur dignité, s’il n’y a pas d’erreur de copiste dans cette phrase : « Un curé ne puisse être présidé par son évêque ; » et dans le cas de cette erreur qui consisterait dans l’omission du mot : que , nous protestons contre l’exclusion qui se trouverait donnée aux grands-vicaires ; 6° Contre l’article 45, en ce qu’il n’établit pas une réciprocité 4e justice contre les abbés com-mendataires et les religieux, et qu’il est autre qu’il n’avait été arrêté par l’assemblée. Et a signé T. François, évêque de Clermont. Expédié à M. le lieutenant général, président de l’assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d’Auvergne, par moi, secrétaire-greffier de ladite assemblée, le 13 avril 1789. Signé FAUCON. INSTRUCTIONS Pour les députés de la noblesse aux Etats généraux, arrêtées dans l'assemblée de la sénéchaussée d’Auvergne, séant à Riom (1). Un monarque bienfaisant veut régénérer la France : à sa voix, tant d’intérêts divisés, et même en opposition, depuis trop longtemps, vont se réunir au but commun de l’utilité publique ; et le Français se livre à la plus] douce espérance,' celle d’être libre sous un roi. La noblesse d’Auvergne vous charge de la défense et du recouvrement des droits de la nation. En vous confiant ses intérêts les plus chers, elle vous remet ses instructions. Bien convaincus de l’importance de cette commission, vous la remplirez sûrement avec la générosité qui gagne les cœurs et le patriotisme qui les élève. Souvenez-vous que la nature a fait les hommes égaux, et que les distinctions nécessaires entre eux, particulièrement dans une monarchie, sont fondées sur l’utilité générale. Vous regarderez ces deux vérités comme la base de notre constitution ; elles vous rappelleront à la fois ce que vous devez à la dignité d'un peuple libre et à la prééminence des premiers citoyens de l’empire. Que par vos soins la France soit heureuse ! La reconnaissance d’une nation est le plus bel hommage que puisse obtenir un citoyen : tel sera le prix de vos vertus. Après avoir exprimé le vœu que la majesté du trône et la dignité de la famille royale aient tout l’éclat qui leur est dû, et que leur assurent le respect et l’attachement gravés dans le cœur de tous les Français, nous déclarons que nos principes sont : Art. 1er. Que l'assemblée des représentants de la nation française formant les Etats généraux est la seule puissance compétente pour établir les impôts et faire les lois avec la sanction du Roi. En conséquence, le jour de l’ouverture des Etats généraux, les députés déclareront que tout impôt est cessé ; ils pourront néanmoins consentir à la prorogation de l’impôt actuel jusqu’au 1er janvier 1790. Mais lesdits députés ne s’occuperont des subsides nouveaux qu’après avoir statué sur les droits de la nation ; ils ne les établiront que pour deux ans, époque qu’ils fixeront, pour rassembler les Etats généraux, qui en régleront alors le retour fréquent et périodique; et dans les cas de régence à établir, ils statueront que les Etats généraux s’assembleront le plus promptement possible. Aucun impôt ne sera, à l’avenir, mis ou prorogé sans le consentement des Etats généraux du royaume ; toutes impositions mises ou prorogées par le gouvernement, sans cette condition, ou accordées hors des Etats généraux, par une ou plusieurs provinces, une ou plusieurs villes, une ou plusieurs communautés, seront nulles, illégales; et il sera défendu, sous peine de concussion, de les répartir, asseoir et lever. Les députés demanderont que les Etats provinciaux soient établis dans toutes les provinces ; mais qu’à chaque tenue des Etats généraux, la convocation soit faite, suivant les anciens usages, par bailliages, étant la manière la plus usitée pour connaître les vœux de tous les citoyens, à moins que les Etats généraux ne trouvent une forme de convocation plus utile. Art. 2. Que tous les citoyens français, depuis le premier rang jusqu'au dernier, quelque profession (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. K64 [Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] qu’ils exercent , doivent être également soumis aux lois et protégés par elle. Aucun domicilié ne pourra être arrêté sans décret judiciaire, excepté dans le cas de flagrant délit et de désignation d’un coupable par la clameur publique : auquel cas il sera remis, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de son juge naturel. La profession la plus ordinaire de la noblesse étant celle des armes, ses députés seront expressément chargés de demander que tout officier soumis à la discipline militaire, ne pouvant être suspendu dans ses fonctions, ne puisse être destitué de sa charge ou emploi militaire par la volonté arbitraire ; et que dans aucun cas il ne lui soit refusé le jugement d’un conseil de guerre. Art. 3. Que le pouvoir législatif ne devant être exercé que par les représentants delanation , avec la sanction du /toi, le gouvernement ni aucune cour judiciaire ne peuvent promulguer ni consentir , même provisoirement , les lois que la nation n’aurait pas faites, ni différer la publication et l'exécution des lois nationales. Nous demandons qu’il soit arrêté de s’occuper sans délai de la confection d’un code national, qui puisse être connu et étudié par toutes les classes des citoyens ; que ce travail soit confié à des magistrats et jurisconsultes éclairés, à des citoyens de tous les ordres et de tous les états, choisis dans toutes les provinces. Ils prépareront pour les prochains Etats généraux la rédaction des lois civiles et criminelles, dont la hase essentielle doit être le principe, aussi ancien que sacré, du jugement, par pairs, tant au civil qu’au criminel. Ils classeront les délits et les peines, de manière qu’il n’y ait rien d’arbitraire et d’équivoque dans la définition du crime et dans l’application de la peine encourue. Il sera provisoirement demandé aux Etats généraux un conseil pour les accusés, et toutes les autres précautions qui peuvent leur assurer les moyens de justification. Art. 4. Que le pouvoir exécutif doit être exercé par le Roi, dont la personne est sacrée, mais dont les représentants individuels ou collectifs , ministres, commandants, gouverneurs et autres, sont responsables et comptables à la nation de tous leurs pouvoirs, et peuvent être dénoncés à ses représentants, et soumis par lesdits représentants au jugement d’un tribunal compétent, pour les abus dont ils se seront rendus coupables , quelque autorisation qu’ils puissent avoir reçue. Art. 5. Qu’aucun agent de l’administration ne peut prononcer en jugement. Toute évocation au conseil doit aussi être supprimée. Art. 6. Que le Roi ne peut départir à ses officiers aucun pouvoir qui ne soit prévu et défini par la loi. Nous demandons qu’il soit laissé un libre cours à la justice dans les tribunaux ordinaires, et que l’on supprime tout droit de c ommittimus au grand et petit sceau, lettres de garde-gardienne, évocations et attributions à tout tribunal quelconque. En sorte que tout justiciable ne puisse être poursuivi, en matière civile ou criminelle, ailleurs que par-devant son juge naturel. Art. 7. Qu'il ne doit y avoir aucune commission des Etals généraux qui puisse exercer , même provisoirement, aucun acte d’administration, ni aucune portion du pouvoir législatif, en matière de lois et d’impôts , lequel appartient exclusivement à l’assemblée générale de tous les représentants delà nation. Art. 8. Que la liberté des opinions faisant partie de la liberté individuelle, puisque l’homme ne peut être libre quand sa pensée est esclave, la liberté de la presse doit être accordée, sauf les précautions qui seront prises par les Etats généraux. Tels sont les droits et règlements qu’il est expressément enjoint aux députés de faire sanctionner avant de s’occuper de toutes autres opérations, sur lesquelles voici nos instructions : SECTION PREMIÈRE. L’ordre de 1a, noblesse, considérant que le gouvernement monarchique est en France essentiellement constitutionnel, que les distinctions nécessaires dans toute monarchie sont fondées sur Futilité générale, et même que tous les Etats bein constitués ont senti le danger de confondre, dans une délibération par tête, les différentes parties de l’assemblée législative, a expressément ordonné à ses députés de ne jamais perdre de vue ces grands et antiques principes, qui sont fondés sur l’intérêt commun de tous les citoyens, autant que sur les droits particuliers de la noblesse ; et dans le cas où la pluralité des voix de la noblesse obligerait les députés de voter par tête, ils ne le feront, même momentanément, qu’après avoir déclaré que le vœu formel de la noblesse d’Auvergne est de ne voter que par ordre, en avoir demandé et obtenu acte.fLes députés n’accéderont à aucune délibération par bailliage, parce que leurs députations étant inégales, l’équilibre n’existerait plus. Le président de l’ordre de la noblesse aux Etats généraux sera élu librement par son ordre et dans son ordre, sans distinction de province ni de rang. Le vœu de la noblesse de cette sénéchaussée est que, dans la salle des Etats généraux, les places soient occupées sans distinction de provinces et de députations, afin d’éviter tout ce qui pourrait laisser présumer quelque prééminence de l’une de ces provinces sur l’autre. SECTION II. Art. 1er. L’impôt doit être proportionné aux vrais besoins dans l’octroi, et aux vraies facultés dans la répartition. En conséquence, l’ordre de la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne , considérant que les membres qui la composent sont nés citoyens, et voulant donner à ses concitoyens du tiers-état une preuve de l’esprit qui l’anime, et du désir qu’il a de cimenter l’union entre tous les ordres, a fait unanimement le vœu solennel de supporter avec égalité, chacun en proportion de ses facultés, les contributions et impôts qui seront désormais établis par la nation, sous la seule réserve du manoir de chaque gentilhomme , avec sa cour et son jardin, appelé par la coutume le vol du chapon, en fief ou autrement, sous la condition expresse que ce sacrifice de ses privilèges entraîne celui de ces mêmes privilèges pour toutes les villes, communautés, corporations et individus quelconques : « Mais comme Sa Majesté dé-« sire que, dans l’examen des droits et des faveurs « dont jouissent les ordres privilégiés, on montre « des égards pour cette partie-de la noblesse qui « cultive elle-même ses champs, et qui souvent, « après avoir supporté les fatigues de la guerre, « vient encore servir l’Etat, en donnant l’exemple « d’une vie simple et laborieuse, et en honorant, « par ses occupations, les travaux de l’agricul-« ture, » la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne s’en rapporte à la justice des Etats généraux, pour seconder les intentions paternelles de Sa Majesté. Les surcharges de l’Auvergne lui font espérer que le nouvel impôt, mieux réparti entre les dif- [Sénéchaussée de Riom.| g6g [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. férentes provinces du royaume, nécessitera une diminution pour elle. Les députés seront donc chargés de demander aux Etats généraux la déclaration formelle que les impôts établis par la nation doivent être proportionnellement établis entre les provinces du royaume, suivant leurs vraies facultés. Mais il serait essentiel que l’échelle de proportion fût établie avant que l’impôt fût consenti. Ils déclareront ensuite que larépartition faite par les Etats provinciaux doit être proportionnelle entre les citoyens de tous les ordres. Art. 2. Ils demanderont que l’impôt consenti par les Etats généraux soit simple et uniforme -, qu’il diminue progressivement, à mesure que les dettes de l’Etat s’éteindront ; que la recette de chaque province soit versée directement au trésor national, par les préposés des Etats provinciaux, déduction faite de toutes les charges à payer dans la province, et qui y seront acquittées aux parties prenantes. Il sera remis aux députés des instructions suffisantes sur la contribution actuelle de la province d’Auvergne, pour qu’ils puissent prouver démonstrativement que cette contribution ne peut avoir pour base unique les propriétés foncières ; ils insisteront pour que l’industrie des non propriétaires soit soumise à l’impôt; mais[ils exprimeront leur vœu pour que les pauvres habitants des campagnes soient imposés le moins possible ; il est également essentiel et juste que l’on prenne tous les moyens d’atteindre la fortune des capitalistes. Art. 3. Que toutes les charges et commissions de tiïiances soient supprimées et remboursées. Art. 4. Que les aides et gabelles soient supprimées, sauf aux Etats généraux à pourvoir au remplacement de cet impôt, ainsi qu’à la juste indemnité des provinces rédimées. Art. 5. Que toutes les douanes soient portées aux frontières, et que le commerce intérieur soit parfaitement libre. Art. 6. Que tous les droits de fisc, qui nuisent à l’industrie et au commerce, soient abolis ; que ceux de contrôle soient supprimés, s’il est possible, ou du moins modérés, mieux proportionnés, et expliqués d’une manière claire et précise. Que la connaissance des contestations qui pourront s’élever, au sujet des droits de contrôle, appartiennent aux tribunaux ordinaires. Art. 7. Que tous les offices d’huissiers-jurés-priseurs soient supprimés, comme une atteinte manifeste aux droits de propriété, et un moyen de vexation odieux aux pauvres débiteurs. Art. 8. Que toutes les jurandes, ensemble tous riviléges exclusifs, soient supprimés, même celui e roulage et messagerie , sauf à pourvoir à tout remboursement de droit. Art. 9. Que les semis et plantations nouvelles de bois soient favorisées, et déclarées exemptes de tout impôt, attendu la rareté et destruction des bois de cette province. SECTION III. Art. 1er. Que la composition, le ressort et la compétence de tous les tribunaux existants, leur utilité ou leur inutilité soient soumis à l’examen et à la décision des Etats généraux. La noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne demande expressément la suppression de tous les tribunaux d’exception, et notamment des maîtrises des eaux et forêts, bien entendu que les Etats généraux rembourseront lesdites charges au moment de leur suppression ; elle charge ses députés de demander aussi la créatien d’un parlement dans la province. Art. 2 . Que la vénalité des charges soit abolie dans toutes les professions quelconques, militaire, de jüdicatureet autres; que les officiers de justice soient inamovibles, et ne puissent être destitués que pour forfaiture jugée selon les lois du royaume et par juges compétents. Les Etats généraux décideront de quelle manière seront choisis les juges, et quelles épreuves ils auront à subir pour leur élection. Art. 3. Les députés demanderont la suppression de toutes les places et emplois qui ne sont pas évidemment nécessaires. Tous les traitements n’excèderont jamais 20,000 livres. Ils demanderont aussi que le même individu ne puisse jamais occuper plus d’une place ; qu’il soit établi dans chaque département une fixation des sommes accordées en dons, pensions et gratifications, et un état énonciatif des titres et services qui en seront susceptibles, et que le Roi soit supplié de faire publier tous les ans, par la voie de l’impression, l’état motivé desdites pensions, dons et gratifications : ils pourront aussi demander la réduction de celles déjà existantes. Art. 4. Les foi et hommages se rendent toujours avec empressement; mais il est intéresssant d’en supprimer les frais, ainsi que ceux des aveux et dénombrements. Art. 5. Les bureaux des hypothèques, établis pour la conservation des droits de tous les citoyens, ne remplissent pas leur objet ; les députés demanderont que les abus en soient réformés. Art. 6. Que le choix libre des officiers municipaux soit rendu aux villes. Art. 7. Que l’administration des intendants soit abolie; elle sera plus utilement exercée par les Etats provinciaux. SECTION iv. Art. 1er. Que les dépenses de chaque département soient appréciées et vérifiées dans toutes les parties; que tous les abus reconnus soient supprimés, et qu’il soit assigné des fonds fixes à chaque département, excepté la correspondance secrète des affaires étrangères. Que les comptes de chaque département soient rendus publics dans la même forme, par la voie de l’impression, en montrant l’emploi assigné pour chaque objet. Art. 2. Que les comptes soient rendus par les administrateurs, ordonnateurs et trésoriers, chacun dans ce qui les concerne, et que les dépenses ne leur soient allouées que sur des piècesprobantes. Art. 3. Que la comptabilité illusoire des finances par-devant la chambre des comptes soit anéantie, sauf le remboursement des offices. Qu’à l’avenir les comptes de recette et dépense des provinces soient arrêtés par les commissaires dé chaque Etat provincial, et imprimés; et que les recettes et dépenses du trésor public soient arrêtées par les Etats généraux, ou ceux qui seront par eux commis. Art. 4. Que la dette publique soit vérifiée par les Etats généraux, et fixée d’après les règles exactes de la justice; que tout intérêt au delà de celui fixé par la loi soit réduit à ce taux, sauf les distinctions qui seront jugées rigoureusement équitables. Que les capitaux ne soient remboursés qu’au prix de l’intérêt qu’ils produisent, ou à celui que les propriétaires prouveront avoir acheté leurs contrats, et ce, d’après les réductions qu’ils auront éprouvées. Une manière plus juste encore serait un emprunt fait au nom de la nation (ne pouvant à l’avenir y en avoir d’autre), qui offrît aux créanciers de l’Etat le remboursement de leurs créances ; et cet emprunt serait fait au plus modique intérêt possible. 866 [États gén. 1789* Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Art. 5. Que les domaines du Roi soient déclarés aliénables à perpétuité, sans faculté de rachat ; qu’à cet effet il soit dérogé aux anciennes ordonnances par une loi conforme au vœu et aux droits de la nation ; pour le prix desdites aliénations être employé au remboursement des dettes les plus onéreuses de l’Etat, et qui seront indiquées par les Etats généraux; et pour rendre lesdites aliénations valables, les ventes seront précédées d’une estimation préalable par experts choisis par les Etats provinciaux; et après ladite estimation sur affiches et publications, il sera procédé judiciairement à la vente, en faveur du plus haut metteur et dernier enchérisseur, à un prix qui ne pourra être moindre que celui de ladite estimation, et ce, en présence du syndic desdits Etats provinciaux ; et à l’égard de ceux précédement engagés, il sera pareillement procédé à la vente définitive et par enchères, aux mêmes conditions et avec les mêmes formalités; et néanmoins, à enchère égale, les possesseurs seront préférés. SECTION V. Art. 1er. Que le clergé soit tenu d’acquitter sa dette dans le délai qui sera fixé par les Etats généraux, qui statueront sur les moyens les plus convenables pour opérer cette libération. Art. 2. Que les annates et toutes expéditions en cour de Rome soient supprimées ; elles font sortir du royaume dos sommes considérables, qui seraient mieux employées à l’acquit des dettes du clergé. Il serait aussi utile qu’intéressant de supprimer les économats. Art. 3. Que les curés et autres ministres de l’Eglise soient susceptibles de récompenses et de dignités ecclésiastiques; et que, dans le cas où les portions congrues seraient augmentées dans la suite, en considération de ce que le casuel serait supprimé, ou autrement, l’augmentation serait prise uniquement sur les biens du bénéfice éteint ou à éteindre, et non sur les dîmes inféodées, qui n’auraient jamais dû. y être assujetties. Que la dîme ecclésiastique soit rendue à son véritable objet : depuis trop longtemps les communes supportent des charges qui furent, en partie, le motif de l’établissement des dîmes. SECTION VI. Art. I81'. Que l’éducation publique soit établie sur des bases propres à former des citoyens utiles ; qu’il soit institué dans chaque paroisse des métiers pour l’un et l’autre sexe. Que les Etats provinciaux soient spécialement chargés d’encourager la vertu, la perfection et l’agriculture , et tous les arts par des prix d’émulation. Art. 2. Que, pour prévenir et abolir la mendicité, il soit établi une loi de secours qui assure à tous les pauvres valides du travail dans le lieu de leur naissance, et des ressources aux invalides. Que cette classe de citoyens profite enfin de la force commune, en recevant de la loi Ge qu’elle ne doit aujourd’hui qu’à l’importunité ou à la commisération de chaque particulier; ce qui avilit la dignité de l’homme. La loi peut ordonner que les Etats provinciaux se fassent rendre compte des fonds de charité, des revenus des hôpitaux, des fondations, et qu’il y soit suppléé, si cela ne suffit pas, par des fonds pris sur les abbayes, et par les contributions volontaires, que les riches de chaque province se feront un devoir de verser entre les mains des Etats provinciaux. Art. 3. Que les prérogatives et possessions légitimes des trois ordres seront inviolables : celui de la noblesse déclarant qu’il sera constamment attaché à soutenir ceux des deux autres ordres. Nulle propriété ne pourra être attaquée, même sous le prétexte du bien public, qu’il n’y ait eu au préalable une estimation faite par des commissaires nommés par les Etats provinciaux, et que l’identité n’en soit fournie sans délai en biens territoriaux ou en argent. Art. 4. Les députés demanderont que l’on s’occupe avec soin de la police intérieure des hôpitaux, d’en retrancher les abus, et les améliorations qui en proviendront seront utilement employées en augmentation de lits. Il serait à désirer que l’on pût établir des chirurgiens et des sages-femmes dans chaque canton. Que les Etats généraux prennent en considération le soin des enfants trouvés, pour en augmenter les établissements, et qu’il soit spécialement ordonné de n’en jamais refuser. Art. 5. Que toutes punitions avilissantes dans l’opinion française, telles que les coups de plat de sabre, dans le militaire, soient abolies. Art. 6. Que les prisons d’Etat soient supprimées; qu’on s’occupe sans délai de la liberté de ceux qui y sont déetnus, et qu’incessamment ils soient élargis ou remis à leurs juges naturels. SECTION VII. Art. 1er. Que le prêt à intérêt, au taux de l’ordonnance, par billets ou obligations, soit permis indéfiniment, et à toutes personnes, sans distinction, comme essentiellement utile, dans nos mœurs actuelles, au commerce, à l’agriculture et à la société en général ; enfin, comme un frein salutaire contre l’usure. Art. 2. Qu’il soit pris par les Etats généraux les précautions les plus sages pour déterminer dans toutes les provinces les points de communication où il serait le plus avantageux d’ouvrir des canaux ou de nouveaux chemins. Art. 3. Que les Etats généraux s’occupent de rechercher les causes qui arrêtent l’extension du commerce et de la navigation nationale, Art. 4. Que les mines, autres que celles d’or et d’argent, soient déclarées appartenir aux propriétaires des fonds dans lesquels elles sont situées; que toutes concessions qui en ont été faites, au nom de Sa Majesté, soient révoquées, et que les Etats provinciaux s’occupent des moyens de venir au secours de ceux qui se trouveraient hors d’état de faire l’exploitation des mines, si elles sont utiles au public. SECTION viii. Art. 1er. Les députés sont chargés de représenter que, si tous les citoyens sont enfants de la patrie, il n’en est point qui aient autant de droits à ses préférences, et aussi peu de part à ses ressources, que la portion la plus pauvre de la noblesse. L’Auvergne, plus qu’aucune autre province, s’honore d’un grand nombre de gentilshommes, auxquels il ne reste que le souvenir de ce que furent leurs pères, et l’inquiétude de ce que deviendront leurs enfants. Etrangers aux abus qui ont trop souvent enrichi leurs égaux, et à l’industrie qui ouvre tant de moyens de fortune aux autres citoyens, ils n’ontde ressources que dans ce modique patrimoine, autrefois exempt, et qu’ils viennent de soumettre à l’impôt. A peine le gouvernement s’est-il occupé de ses devoirs envers eux, que la faveur est venue s’emparer d’établissements que la justice avait consacrés à un plue S67 [États gén, 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée de Riom.] digne usage. Les députés demanderont que les établissements pour l’un et l’autre sexe soient multipliés, qu’il y ait, dans la province d’Auvergne, des écoles militaires, affectées seulement à cette province�dont les revenus suffisent à l'éducation de la noblesse, ainsi, que des fonds pour soutenir au service, dans les premiers grades, tous ceux qui sortiront de ces écoles ; leur pauvreté bien constatée par les Etats provinciaux, sera le premier titre d’admission. Art. 2. Les ordonnances, pour le port d’armes, ont été souvent publiées, et toujours sans exécution; les députés demanderont que la police fasse cesser cet abus dans les campagnes, surtout pour l’épée, qui fut toujours une prérogative de la noblesse: Art, 3. Le grand abus des anoblissements trop fréquents doit être réprimé ; les députés demanderont qu’à l’avenir la noblesse ne puisse être acquise que par les services militaires, ou dans la magistrature, ou sur les demandes faites par les Etats provinciaux, pour des services importants et pour des actions d’éclat, utiles à la patrie. Les députés s’occuperont plus particulièrement encore de la suppression des charges de secrétaire du Roi, et autres du même genre. Art. 4. Qu’il soit établi une place de cadet gentilhomme par compagnie, qui facilite à tout gentilhomme les moyens de servir sa patrie, et de trouver dans la “seule profession que lui aient transmise ses pères, les moyens de subsistance que la fortune lui refuse. Art. 5. Les députés de la noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne demanderont aux Etats généraux de prendre en considération le sort des cinq maisons religieuses de cette province : Lavène, Blesle, Lavandieu, les Chazes et Courpières; il est à désirer que le gouvernement s’en occupe. Des réunions de bénéfices en faciliteront les moyens. La noblesse de la sénéchaussée d’Auvergne charge ses députés de porter aux pieds du trône les sentiments de respect et d’amour dont elle est pénétrée pour Sa Majesté; elle a dans tous les temps sacrifié son sang et sa fortune pour ses rois, et renouvelle dans ce moment, avec l’enthousiasme de la reconnaissance, le serment de la fidélité la plus respectueuse pour son auguste monarque, qui, en rendant à la France ses assemblées nationales, sent que sa vraie source est dans le cœur de ses sujets, et que son autorité ne sera jamais plus affermie que quand elle aura pour base une constitution libre. MANDAT De la noblesse de la sénéchaussée d'Auvergne à ses députés. Vous êtes nommés par l’ordre de la noblesse de’ la sénéchaussée d’Auvergne pour être un des représentants de la nation dans les Etats généraux du royaume; elle vous a fait connaître ses principes ; c’ést d’après eux que vous fixerez les bases sur lesquelles reposeront à jamais la vraie grandeur du monarque et le bonheur de tous les citoyens français. Agissez d’après votre conscience ; les instructions qui vous sont remises contiennent nos vœux et vos pouvoirs. Nous sommes certains que vous n’oublierez jamais que le caractère distinctif de la noblesse française fut toujours le patriotisme et l’honneur. La durée de vos pouvoirs est fixée à un an, à compter du jour de l’ouverture des Etats généraux. Il vous est expressément recommandé de faire aptoriser par les Etats généraux une assemblée de la noblesse de cette sénéchaussée par-devant ter quelle vous rendrez compte de l’usage que vous aurez fait des pouvoirs qui vous sont confiés. Cette assemblée aura lieu deux mois après la clôture desdits Etats généraux. Vous aurez soin de faire fixer par les Etats généraux la quotité des représentants que chaque ordre aura désormais dans les assemblées nationales, de manière que cette fixation devienne loi constitutionnelle. Clos et arrêté le 24 mars 1789. Signé Langhac, grand sénéchal ; Laqueville ; Lafayette ; Mascon ; Chabrol ; Cheminade de Lor-met ; Larochette d’Auger ; Begon de la Rozière ; Dupeyroux de Salmagne ; La Rochelambert-Lava-lette ; d’Espinchal ; Montagu de Reaune ; de Bosre-dont de Saint-Avit, commissaires. Molen de Saint-Poncey, secrétaire. Montboissier ; Montagu de Bouzols; Merle; Montagu ; Chabannes de Lapalisse ; Montagnac ; Gauthier de Lamblouët de Laboulaye ; Jouvenceau d’Allagnac ; Laroche-Lambert ; Peydière de Bois-sière ; Molette de Morangier-Dumas ; Duclaux de Lestoille ; Bouillé ; Sedades de Vaeheresses ; Navette de Chassignoles ; Navette, chevalier de Cas-signols ; Provenchères ; Du Crozet de Liât ; Molette de Morangier de Beissac ; Vergezac d’Aurat ; Laroche du Ronzet ; Cassaigne de Lots ; Benoît de Barante; de Saulzet ; chevalier de Saulzet; Gou-zel de Lauriac ; Cheminade ; Laizer de Brion ; Laizerde Montaigu ; La Grange ; Teillard ; Rochette deMalauzat; Ferrand de Fontorte; de Bar-de Bar de Murat ; Grangier de Lamothe ; Laval de Muratelle ; Laval ; Dulac du Cluzel ; Chardon de Nohannent ; Ducroc, chevalier de Brassac ; Rey-naud de Monlozier ; de Goy ; de Falvard de Bon-parent ; de Maumont ; Chalier de Pérignat ; Beau-franchet de Lachapelle; de Prad ; Bonnevie de Poigniat ; Montroignon, alias de Salvert ; Bosre-dont de Ligny ; Bosredont de Vatange ; Soubrany deBonnebaud ; Barbat-Duclozel du Cayre; Depons de Lagrange ; de Champs de Blot ; Peydière de Vèze ; Peydière; Labro de Montagnac; Devaulx-Lespi-nasse ; Rochefort de Pommort ; Pelacost de Peletet ; de Varennes de Boisrigaud ; Debaylle ; Rochelam-bert deChadieu ; chevalier de Pons de Lagrange ; Courtèlhe de Giat ; Lecourt de Saint-Aignes; comte de Tallobre ; Monboissier-Beaufort-Canilliac ; Lau-zanne ; Du Vallier ; Montroignon de Salvert ; Du Crozet; Boissieux de Bois-Noir ; Véalle du Blau ; Vallon du Bûcheron d’Ambrugeac; Ghampflour de la Roche ; Sampigny d’Efhat ; La Bastide ; Cathol du Deffan ; Luchapt Debaylle ; Riberolles du Moulin ; Henrion de Bussy ; Moré de Pont-Gibaux ; Des Aix de Rochegude ; Lomenie du Château ; Dienne de Saint-Kustache ; Dauphin de Leyval ; Chardon de Rochedagoux ; Mayet de la Vilatelle ; Lenormand de Flageat ; Dutour de Salvert; Beaufranchet de Relibost; Sampigny de Bussière ; Peghoux de Mardogne ; Froment ; An-drodias de Murol ; Boinville ; Saint-Giron ; Lastic; Ribeyrolles de Beaucenne; Du Montât; chevalier de Sampigny ; La Colombe de la Chapelle ; Méallet de Fargues; Grangier de Cordés ; Bonneval ; Verdalle ; Duchuy d’Arminières ; Daurelie des Cornais ; Varesnes de Bois-Rigaud ; Servières ; DesEscures ; Barbat du Closel de Quaire ; Montmorin de Saint-Herem; Talhandier de Lamberty; chevalier de Tremeuge; Nicolon de Guerines; La Chassignoles de Combalibœuf; L’Etang de Ghalandrat; Ver-dalle de Taury ; d’Estaing ; de La Roche-Lambert ; D’Alexandre, alias de Rouzat Froment de Champ-dumont ; Reboul du Sauzet ; Teyras de Granval ; Bouchard d’Aubeterre; Talhandier; Villelume; 50g [États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Meyras de la Grange ; de Combes des Morelles père; Du Crozet de Cumignat; Rodde de Ver-nières ; Matharel du Chcry ; Mourgue de la Fage ; de Frétât ; Aragonnès de Laval ; Aragonnès d’Or-cet ; Du Croc; chevalier Du Croc ; Cordebceuf de Montgon ; Aldebert de Seveyrac ; de Molen de la Vernede au Mas; La Salle ; Gombarel du Gibanel; Mallet de la Vedrines ; Vissac ; Douet ; Bourdeiiles ; Reinaud de Reauregard ; Rollet d’ Avaux ; Chabrol ; d’Aurelle de Champetières ; La Rochette de Roche-gonde ; Veau-Chaussade de Chaumont; La Velle de Maurissac ; Servières du Telliol ; Rourdeilles ; Autier de Ghazeton de Barmontel; Mallet de Ven-dègre; Bosredont-Vilvoisin ; Guérin de Valljeleix; Durant de Pérignat ; Rigaud de Ghapdes-Beaufort ; de Bonnevic de Poignat ; de Combes des Morelles; Rochette ; Des Aix de Veygoux ; de Panneveyre de Ternant ; de Panneveyre de la Jugie ; Forget ; de La Rochette de Sianne ; Sablon du Corail ; Du Saunier de Bansat; deVissaguet; Pradel deTremeuge des Chareyres; Auzerand de Bénistant de Pome-rols ; de Matharel du Chery ; de Benoît de Fonte-nilles ; Chassaignes du Bort deMontvianeix ; Ribe-rolles; Chassaigne de Franc-Séjour; Torrent; Riberolles des Horts ; de Grillon du Plessis ; Du Félix de Laizer ; Barentin de Montchal ; Du Fraisse de Vermines; de Veny d’Arbouze; Le Groing ; Velx, alias de La Roche; de Pouthe; d’Oradour ; Du Peyron de Bonne-Fou ; Du Crozet de Liât ; Du Li-gondès-Château-Bodeau ; Le Normand de Montper-tuy ; de Vertamy ; de Pons de Frugières. DISCOURS Prononcé par M. Malouet, chargé par la ville de Riom de porter ses cahiers à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d'Auvergne, et instructions pour les députés du tiers-état aux Etats généraux, proposées par les députés de la ville de Riom (1). « Messieurs, « Appelé dans cette assemblée par la confiance dont m’honorent mes compatriotes , il m’est doux de reprendre, au milieu de vous, les fonctions de citoyen, qui me seront toujours plus sacrées qu’aucune autre. « Nous voici réunis, pour concourir, par nos instructions et par le choix de nos représentants, à la régénération de l’empire, au rétablissement de l’ordre et de la prospérité publique ..... Affligé par des calamités récentes, le peuple français souffre depuis longtemps des vices et des erreurs d’un gouvernement arbitraire, dans lequel la modération du prince ne suffît pas pour prévenir ni pour empêcher l’influence tyrannique des richesses, celle du crédit et de l’autorité. Tous les fléaux qu’entraînent à leur suite la cupidité, l’ivresse du pouvoir, l’orgueil de l’ignorance, ont accablé la nation sous le poids des impôts et des abus de tout genre ; le mal était au comble, le caractère national s’effacait, les ressources étaient épuisées ; mais il nous restait un Roi généreux, pénétré de l’étendue de ses devoirs, éclairé sur les désordres dont il gémissait. « Sa Majesté a pris le sage parti de nous lesdévoi-ler et d’appeler la nation à l’examen et à l’exercice de ses droits ..... C’est à nous maintenant, c’est à nous, représentants, à en user avec ce courage religieux et cette prudence éclairée qui peuvent seuls en assurer la stabilité. « Ne nous dissimulons pas, Messieurs, que le (1) Nous publions ce discours et le document qui suit d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. peuple a plus besoin d’être gouverné et d’être soumis à une autorité protectrice, qu’il n’a d’aptitude à la diriger. « Sans doute, il ne peut exister de bonheur public que lorsque la justice, les lumières et les succès du gouvernement maintiennent sa supériorité ; lorsqu’il la perd, lorsque des fautes ou des malheurs lui rendent indispensables les conseils et l’appui des peuples, l’intérêt général, le salut de tous nous commandent de nous rallier avec ordre et respect autour des grandes vérités sur lesquelles l’éternelle justice fonda la base de toute société. « La circonstance importante où nous sommes a développé toutes les idées publiques ; une grande masse de lumières s’est élevée autour de nous ; tous les voiles sont déchirés, on remonte à l’origine de toutes les institutions ; et quand on y est parvenu, quand c’est le peuple en corps, ou la partie éclairée de ce peuple, qui découvre et définit les pouvoirs et les distinctions qu’il a créés ou tolérés, l’agitation que produisent dans les esprits ces hautes pensées ne permet pas toujours de s’arrêter à ce qui est juste et utile. Au milieu de cette foule de maux, nés de l’état social, il est peu d’innovations qui ne paraissent être le vœu de la raison ; mais si nous sommes attentifs à sa voix, nous la trouverons toujours sévère, circonspecte et non inconsidérée dans ses mouvements. « C’est, Messieurs, cette raison supérieure à tous les talents, à toutes les séductions des plus nobles passions, qui doit diriger le zèle ardent dont nous sommes animés pour le salut de la patrie, — et le premier commandement que nous en recevons est l’unité de vues, de sentiments et d’intérêts, dans toutes les classes de la nation. — C’est à vous, qui en représentez la partie la plus nombreuse et la plus utile, à manifester les premiers ces sentiments de concorde, de justice et de modération, qui sont les signes les plus imposants de la force et de l’élévation, les précurseurs des bonnes lois et de la liberté légale à laquelle nous devons tendre. « Unissons-nous donc dans cette fin salutaire, unissons-nous donc avec cordialité aux chefs immédiats de nos tribus, au clergé et à la noblesse, dont nous devons croire les dispositions pour le bien général, aussi sincères et aussi pures que les nôtres. Vous venez d’en avoir la preuve par le discours de M. lesénéchal ; ces sentiments patriotiques, qu’il a si noblement exprimés, vous annoncent combien le respect pour les droits du peuple ajoute à l'éclat d’une haute naissance ; le premier officier de son siège vient de vous rappeler, avec autant de sensibilité que d’énergie, vos devoirs et vos droits : tout nous invite, Messieurs, à la réunion de nos vœux, de nos efforts et de notre zèle; tout nous annonce, après de longs malheurs, des jours purs et prospères. « Si la puissance royale est elle-même intéressée à l’extirpation des abus dont nous avons à nous plaindre, si l’inégale répartition des impôts, les privilèges exclusifs, les usurpations du crédit et de la faveur, les écarts de l’autorité, les mesures oppressives du fisc et de ses agents, nuisent de toutes parts à l’aisance, à la liberté, à l’industrie nationale, quel ordre dans le royaume, quel Français oserait, d’une main sacrilège, s’opposer à la réparation de tant de maux? Nous ne devons point le craindre; les fils aînés de la patrie seront sans doute ses plus zélés serviteurs : ou si quelques préjugés, quelques erreurs de principes ré-sisfent à vos justes réclamations, gardons-nous de 50g [États gën. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] Meyras de la Grange ; de Combes des Morelles père; Du Crozet de Cumignat; Rodde de Ver-nières ; Matharel du Chcry ; Mourgue de la Fage ; de Frétât ; Aragonnès de Laval ; Aragonnès d’Or-cet ; Du Croc; chevalier Du Croc ; Cordebceuf de Montgon ; Aldebert de Seveyrac ; de Molen de la Vernede au Mas; La Salle ; Gombarel du Gibanel; Mallet de la Vedrines ; Vissac ; Douet ; Bourdeiiles ; Reinaud de Reauregard ; Rollet d’ Avaux ; Chabrol ; d’Aurelle de Champetières ; La Rochette de Roche-gonde ; Veau-Chaussade de Chaumont; La Velle de Maurissac ; Servières du Telliol ; Rourdeilles ; Autier de Ghazeton de Barmontel; Mallet de Ven-dègre; Bosredont-Vilvoisin ; Guérin de Valljeleix; Durant de Pérignat ; Rigaud de Ghapdes-Beaufort ; de Bonnevic de Poignat ; de Combes des Morelles; Rochette ; Des Aix de Veygoux ; de Panneveyre de Ternant ; de Panneveyre de la Jugie ; Forget ; de La Rochette de Sianne ; Sablon du Corail ; Du Saunier de Bansat; deVissaguet; Pradel deTremeuge des Chareyres; Auzerand de Bénistant de Pome-rols ; de Matharel du Chery ; de Benoît de Fonte-nilles ; Chassaignes du Bort deMontvianeix ; Ribe-rolles; Chassaigne de Franc-Séjour; Torrent; Riberolles des Horts ; de Grillon du Plessis ; Du Félix de Laizer ; Barentin de Montchal ; Du Fraisse de Vermines; de Veny d’Arbouze; Le Groing ; Velx, alias de La Roche; de Pouthe; d’Oradour ; Du Peyron de Bonne-Fou ; Du Crozet de Liât ; Du Li-gondès-Château-Bodeau ; Le Normand de Montper-tuy ; de Vertamy ; de Pons de Frugières. DISCOURS Prononcé par M. Malouet, chargé par la ville de Riom de porter ses cahiers à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d'Auvergne, et instructions pour les députés du tiers-état aux Etats généraux, proposées par les députés de la ville de Riom (1). « Messieurs, « Appelé dans cette assemblée par la confiance dont m’honorent mes compatriotes , il m’est doux de reprendre, au milieu de vous, les fonctions de citoyen, qui me seront toujours plus sacrées qu’aucune autre. « Nous voici réunis, pour concourir, par nos instructions et par le choix de nos représentants, à la régénération de l’empire, au rétablissement de l’ordre et de la prospérité publique ..... Affligé par des calamités récentes, le peuple français souffre depuis longtemps des vices et des erreurs d’un gouvernement arbitraire, dans lequel la modération du prince ne suffît pas pour prévenir ni pour empêcher l’influence tyrannique des richesses, celle du crédit et de l’autorité. Tous les fléaux qu’entraînent à leur suite la cupidité, l’ivresse du pouvoir, l’orgueil de l’ignorance, ont accablé la nation sous le poids des impôts et des abus de tout genre ; le mal était au comble, le caractère national s’effacait, les ressources étaient épuisées ; mais il nous restait un Roi généreux, pénétré de l’étendue de ses devoirs, éclairé sur les désordres dont il gémissait. « Sa Majesté a pris le sage parti de nous lesdévoi-ler et d’appeler la nation à l’examen et à l’exercice de ses droits ..... C’est à nous maintenant, c’est à nous, représentants, à en user avec ce courage religieux et cette prudence éclairée qui peuvent seuls en assurer la stabilité. « Ne nous dissimulons pas, Messieurs, que le (1) Nous publions ce discours et le document qui suit d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. peuple a plus besoin d’être gouverné et d’être soumis à une autorité protectrice, qu’il n’a d’aptitude à la diriger. « Sans doute, il ne peut exister de bonheur public que lorsque la justice, les lumières et les succès du gouvernement maintiennent sa supériorité ; lorsqu’il la perd, lorsque des fautes ou des malheurs lui rendent indispensables les conseils et l’appui des peuples, l’intérêt général, le salut de tous nous commandent de nous rallier avec ordre et respect autour des grandes vérités sur lesquelles l’éternelle justice fonda la base de toute société. « La circonstance importante où nous sommes a développé toutes les idées publiques ; une grande masse de lumières s’est élevée autour de nous ; tous les voiles sont déchirés, on remonte à l’origine de toutes les institutions ; et quand on y est parvenu, quand c’est le peuple en corps, ou la partie éclairée de ce peuple, qui découvre et définit les pouvoirs et les distinctions qu’il a créés ou tolérés, l’agitation que produisent dans les esprits ces hautes pensées ne permet pas toujours de s’arrêter à ce qui est juste et utile. Au milieu de cette foule de maux, nés de l’état social, il est peu d’innovations qui ne paraissent être le vœu de la raison ; mais si nous sommes attentifs à sa voix, nous la trouverons toujours sévère, circonspecte et non inconsidérée dans ses mouvements. « C’est, Messieurs, cette raison supérieure à tous les talents, à toutes les séductions des plus nobles passions, qui doit diriger le zèle ardent dont nous sommes animés pour le salut de la patrie, — et le premier commandement que nous en recevons est l’unité de vues, de sentiments et d’intérêts, dans toutes les classes de la nation. — C’est à vous, qui en représentez la partie la plus nombreuse et la plus utile, à manifester les premiers ces sentiments de concorde, de justice et de modération, qui sont les signes les plus imposants de la force et de l’élévation, les précurseurs des bonnes lois et de la liberté légale à laquelle nous devons tendre. « Unissons-nous donc dans cette fin salutaire, unissons-nous donc avec cordialité aux chefs immédiats de nos tribus, au clergé et à la noblesse, dont nous devons croire les dispositions pour le bien général, aussi sincères et aussi pures que les nôtres. Vous venez d’en avoir la preuve par le discours de M. lesénéchal ; ces sentiments patriotiques, qu’il a si noblement exprimés, vous annoncent combien le respect pour les droits du peuple ajoute à l'éclat d’une haute naissance ; le premier officier de son siège vient de vous rappeler, avec autant de sensibilité que d’énergie, vos devoirs et vos droits : tout nous invite, Messieurs, à la réunion de nos vœux, de nos efforts et de notre zèle; tout nous annonce, après de longs malheurs, des jours purs et prospères. « Si la puissance royale est elle-même intéressée à l’extirpation des abus dont nous avons à nous plaindre, si l’inégale répartition des impôts, les privilèges exclusifs, les usurpations du crédit et de la faveur, les écarts de l’autorité, les mesures oppressives du fisc et de ses agents, nuisent de toutes parts à l’aisance, à la liberté, à l’industrie nationale, quel ordre dans le royaume, quel Français oserait, d’une main sacrilège, s’opposer à la réparation de tant de maux? Nous ne devons point le craindre; les fils aînés de la patrie seront sans doute ses plus zélés serviteurs : ou si quelques préjugés, quelques erreurs de principes ré-sisfent à vos justes réclamations, gardons-nous de 569 [États gén. 1189 Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.[ penser qu’aucune portion de la nation puisse s’en déclarer L’ennemi, et s’élever au-dessus de la volonté générale qui est la véritable et souveraine puissance, devant laquelle tous les obstacles disparaissent. « Ce serait donc une précaution dangereuse, Messieurs, que celle qui vous mettrait en défiance des autres ordres. Eh que deviendrait cette noble et antique monarchie, si les diverses corporations, si chaque ville, chaque district, chaque province, ne se présentait dans l’assemblée nationale qu’avec des projets et des intérêts divergents? « Alors, dans ce coupable délire, ce ne seraient plus la liberté, l’honneur et la puissance qui pourraient être l’apanage du nom et du peuple français... L’ignominie et des fers! voilà le funeste présent que nous ferait la discorde, et que nous transmettrions à nos enfants... Mais une pensée consolante écarte ces sinistres images... Considérez, en effet, Messieurs, que cette grande nation, à laquelle nous appartenons, ne saurait avoir qu’une volonté puissante pour le bien. Quels obstacles pourrions-nous rencontrer? Serait-ce dans nos mœurs douces et franches, dans un sol fécond, sous un climat tempéré? La nature et l’art nous ont comblé de biens, et la nation n’a essentiellement à se plaindre que de ses préposés : car ce n’est point vous, paisibles agriculteurs, qu’il s’agit de réformer : nommes précieux, qui supportez la plus grande part des travaux et des peines de l’humanité, et qui avez tant de droits à la protection sociale... Certes, nous n’avons point à craindre que vous défendiez les abus dont vous avez tant à souffrir, et que vous éleviez même au milieu de nous des prétentions exagérées : justice... justice et bienveillance, voilà tout ce qu’ils demandent ! Les artisans, les bourgeois, les négociants, les hommes voués aux arts libéraux, la pauvre noblesse, la classe vénérable de nos pasteurs, tous ceux que la soif de l’or n’a point corrompus, tous ceux qui ne sont point à la solde du trésor public, n’en favoriseront pas la déprédation. Leur intérêt, leur sûreté, ne peuvent se trouver que dans la liberté et la félicité publiques. Ainsi, le corps national, sain, vigoureux, mais souffrant, victime sans être complice des désordres actuels, a un intérêt démontré à les réparer, et une volonté aussi ferme qu’éclairée d’obtenir cette réparation. « Quels seront donc nos adversaires dans cette grande entreprise? Nous en trouverons, Messieurs, dans tous les ordres ; car il ne faut imputer exclusivement à aucun les erreurs de l’amour-propre, les prétentions de la cupidité qu’il s’agit de soumettre à la puissance réprimante des lois, dans quelque condition qu’elles se rencontrent... Nous trouverons des contradicteurs dans les hommes, intéressés aux abus de la finance, de la robe, de l’épée, de l’administration et de l’Eglise ; mais ne nous permettons pas de considérer comme enne-mis-nés de la société aucune classe de citoyens. Il est peu, il n’est point de principes consacrés par le temps et par les mœurs des peuples policés, qu’il ne soit indispensable de respecter. Ainsi, le caractère auguste de la royauté, les distinctions propres aux ministresde la religion, aux anciennes familles, les prééminences de rang et de fonctions, les droits de propriété ne sont point au nombre de ces institutions mobiles, qui subissent le joug des circonstances et des opinions nouvelles ; ce sont les premiers éléments de la législation et du repos des nations. Mais dans cette hiérarchie nécessaire, si les princes s’élèvent au-dessus des lois, si les ministres se mettent à la place des princes, et s’attribuent les droits de la toute-puissance ; si les magistratures civiles et militaires exagèrent leurs prérogatives, et atténuent leurs obligations ; si les deniers du fisc deviennent la conquête de ses agents ; si la corruption attente même à la sainteté du sacerdoce; si une ambitieuse aristocratie altère la pureté des principes qui font le caractère distinctif de la noblesse française ; si enfin, dans les classes subalternes, quelques esprits turbulents s’élancent au delà jdes limites de la raison et de la justice, jugez, Messieurs, en remontant dansjtous les rangs que nous venons de parcourir, voyez l’étendue de nos ressources et de nos espérances! « Premièrement, une nation éclairée et plus forte que les maux qui l’affligent, un monarque vertueux, digne de tout notre amour (on a tant loué ses prédécesseurs, bénissons celui-ci), qui ne craint pas d’abaisser volontairement son sceptre devant la majesté des lois, qui les propose, qui les invoque comme le plus solide appui de sa puissance! La sagesse de ses conseils nous garantit aujourd’hui la vertu de ceux qui les composent : au milieu d’eux parait le ministre citoyen, que la calomnie a poursuivi, malgré l’estime èt la faveur publique dont il est environné, qui, dans les temps où l’autorité ne reconnaissait point de frein, lui opposa celui de la morale, et recommandait les droits des peuples à la conscience des rois : plus heureux maintenant de pouvoir les mettre sous la sauvegarde des lois, vous l’avez entendu manifester les intentions du Roi, comme l’orateur de la nation en aurait exprimé les vœux. Enfin, la renommée vous désigne, dans les deux premiers ordres, les noms les plus illustres, les personnages les plus distingués dans l’Eglise et dans l’Etat, rendant hommage aux droits, à la dignité, à l’importance du peuple, et proscrivant avec vous tout ce qui peut l’avilir. « Non, non, Messieurs, ils ne reviendront plus ces temps d’ignorance et de stupidité ou la multitude avait tout à craindre de l’audace d’un seul, où de vains titres suffisaient pour commander le respect et l’obéissance, où les hommes, dépourvus de l’appareil de la force, ne pouvaient prétendre qu’à la pitié... L’empire de la raison est enfin arrivé, et il nous annonce celui de la justice et de la paix publique : préparons-nous donc sans inquiétude et sans aigreur à la lutte des petites passions contre les intérêts d’un grand peuple qui peut et qui veut être gouverné sensément... Attendons-nous à voir, de la part des derniers employés de l’administration, comme chez les plus grands seigneurs, des mesures et des dispositions industrieuses pour défendre et légitimer des abus. N’exigeons pas que les gardes des fermes sollicitent avec nous la suppression des gabelles. Mais qu’importent les vaines clameurs de l’intérêt personnel, lorsque 25 millions de voix applaudiront avec transport à nos résolutions patriotiques, lorsque nos représentants auront recherché avec la plus sévère attention ce qui nuit au bien générai, et adopté ce qui peut l’opérer! Craindrions-nous même une nation ennemie qui voudrait s’y opposer? Ah ! c’est alors qu’une puissance irrésistible, émanée du trône et du sein de la nature, fera fléchir les plus superbes têtes, et que nous serons tous égaux devant la loi. « C’est pour aider nos représentants dans cet important travail, que nous avons l’honneur de soumettre à votre examen le cahier d’instructions, vœux et demandes, dont nous allons vous faire lecture. f Dans la rédaction de ces cahiers, nous avons 370 [États gén, 1789, Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom. 1 suivi, Messieurs, les principes qui viennent de vous être exposés. V assemblée municipale de Riom s’est pénétrée de l’esprit public et des vues générales qui doivent déterminer le régime politique et civil de la monarchie. Nous nous sommes considérés comme membres de la grande famille, et non comme circonscrits dans une cité ! Nous n’avons vu d’avantages pour nous que dans de bonnes lois communes à tous, et de griefs que dans leur infraction. Ainsi, chacun de vous, Messieurs, vos villes et vos villages, se trouvent associés au vœu national que nous avons formé; mais en éloignant tous les intérêts locaux, en renonçant absolument à ceux qui préjudicient à l’intérêt général, nous ne repoussons pas ceux qui ne les contrarient pas, et comme vos représentants, qui sont premièrement les hommes de la nation, vous doivent aussi, et à vos communautés, leur zèle et leurs services, en tout ce qui pourra se concilier avec le bien public, nous avons l’honneur de vous proposer de classer toutes vos recommandations particulières sous les divers titres qui leur sont propres, tels qu 'impôts, chemins, secours , établissements publics, etc., et d’en former un cahier de supplément, qui n’occupera que le second rang dans l’attention et les devoirs de vos représentants. » INSTRUCTIONS Pour les députés du tiers-état aux Etats généraux, proposés par les députés de la ville de Riom. L’estime et la confiance de vos citoyens vous appellent à une des plus augustes fonctions que les hommes puissent remplir; députés de notre ville, vous allez vous asseoir parmi les représentants d’une grande nation, discuter ses intérêts et ses droits ; mais en vous invitant nous-mêmes à reconnaître toute la dignité de votre mission, et à ne la mettre au-dessous d’aucune autre, notre première recommandation sera de vous rappeler que vous la tenez de nous, que ce sont nos pouvoirs que vous allez exercer, et qu’il n’en est aucun qui n’émane du peuple; qu’ainsi, rien ne doit être proposé ni consenti par ses délégués contre le vœu et au préjudice de l’intérêt de tous; que cette grande vérité, qui sera la seule limite de nos pouvoirs, soit aussi la règle invariable de votre conduite; qu’elle dirige toutes vos délibérations, et vous ramène au milieu de nous, dignes de nos éloges et de notre reconnaissance. BASES DE LA CONSTITUTION. Accablés depuis longtemps par le pouvoir absolu, mais éclairés maintenant sur tout ce qui peut nous servir et nous nuire, nous avons à réparer les fautes et les malheurs de plusieurs siècles. La liberté s’offre à nous, un Roi citoyen nous propose de l’unir à ses droits et aux nôtres. Nous vous députons pour contracter cette sainte alliance : posez les bases, élevez les colonnes du plus beau monument qui puisse sortir de la main des hommes, car telle est une constitution nationale qui détermine les droits de tous, et les lois qui les maintiennent. Yoici nos vœux et nos demandes; elles ne contrarieront point les intentions généreuses du monarque, qui a reconnu le premier le danger et les abus de l’autorité arbitraire. Art. 1er. Que l’assemblée des Etats généraux soit reconnue solennellement la seule puissance compétente pour consentir et sanctionner les lois et les impôts. Art. 2. Qu’il soit invariablement arrêté que les Etats s’assembleront tous les trois ans à un jour déterminé ; qu’aucun impôt ne puisse, sous aucun prétexte et sous aucune forme, être prorogé et perçu au delà de ce terme, à moins qu’il ne soit, à l’expiration des trois années, confirmé par les Etats généraux, et ce, sous peine, contre les percepteurs, .d’être poursuivis comme concussionnaires. Art. 3. Que les impôts qui seront consentis par les Etats généraux, sous quelque forme et dénomination qu’ils puissent l’être, soient supportés également par tous les ordres, corporations et individus, proportionnellement à leur fortune, sans distinction d’aucune espèce de biens, et sans aucune exception ni restriction en faveur de qui que ce soit, et nonobstant tout affranchissement et abonnement. Art. 4. Que les Etats généraux, divisés par ordre ou opinant par tête, reconnaissent, dans les représentants des communes, une influence et un pouvoir égaux à celui des deux autres ordres. Art. 5. Que tous les sujets de l’empire, depuis le premier rang jusqu’au dernier, dans les villes comme dans les campagnes, soient également soumis aux lois, et protégés par elle ; qu’aucun domicilié qui ne sera pas actuellement dans les liens de la discipline militaire ne puisse être arrêté sans décret judiciaire, excepté dans le cas de flagrant délit, et de désignation d’un coupable par la clameur publique, auquel cas il sera remis, dans les vingt-quatre heures, entre les mains de son juge naturel. Art. 6. Qu’il soit permis à tout homme qui signera un manuscrit de le faire imprimer, soit pour sa propre défense, soit pour l’instructiou publique, sans autre censeur que sa conscience et les lois. Art. 7. Que les Etats provinciaux soient rétablis dans toutes les provinces d’une manière uniforme, et avec la même organisation, autant que faire se pourra, des Etats généraux. Ces points fondamentaux étant les conditions absolues delà liberté nationale, aucun autre point de législation ou administration ne sera traité avant que ceux ci-dessus énoncés ne soient arrêtés, et quoique nous n’employions ici, pour y obliger nos représentants, aucune formule limitative de pouvoir, nous ne pensons pas qu’aucun d’eux s’expose à l’indignation et au désaveu de la nation, en adéh-rant à aucun statut contraire. LÉGISLATION. Art. 8. Le pouvoir législatif ne doit point être exercé par le Roi, sans le concours de la nation assemblée par ses représentants, et aucune ordonnance émanée de l’autorité royale, en l’absence des Etats généraux, ne peut être considérée que comme un acte d’administration provisoire, auquel les tribunaux ne sauraient donner force de loi sans le consentement de la nation, qui a le droit de rejeter et annuler lesdites ordonnances. Art. 9. Aucun parlement ou cour souveraine ne peut exercer, même provisoirement, le pouvoir de consentir et promulguer des lois que la nation n’aurait pas consenties, ni rejeter, modifier ou différer la publication et l’exécution des lois que les Etats généraux auraient sanctionnées. Art. 10. Que la vénalité des charges soit abolie ; que cependant tous les officiers de judicature soient inamovibles, et ne puissent être destitués que pour forfaiture jugée selon les lois du royaume ; qu’aucun sujet ne puisse être admis sans avoir donné preuve de ses suffisance et capacité ; qu’à cet effet, il soit nécessaire d’avoir [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.l 571 exercé utilement la profession d’avocat dans les cours souveraines, ou dans les justices royales inférieures, pendant le temps que les Etats généraux jugeront à propos de fixer. Art. 11. Le Roi, premier organe du pouvoir législatif, doit avoir la plénitude du pouvoir exécutif dans toutes les parties de l’administration de l’empire, et ne pourra jamais être responsable de l’abus qui en serait fait par ses représentants individuels ou collectifs. Art. 12. Mais lesdits représentants, ministres, commandants, gouverneurs et autres délégués, et toutes les cours supérieures et inférieures seront responsables à la nation de tous les pouvoirs militaires, judiciaires et d’administration, qui leur seront confiés, et pourront être cités devant ses représentants pour les abus dont ils se seront rendus coupables. Art. 13. Les Etats généraux pourront demander au Roi l’érection des nouvelles cours, ou de nouveaux tribunaux qu’ils jugeront nécessaires, pour juger de tous les abus d’autorité, et le Roi ne pourra s’y refuser. Art. 14. Que la composition, le ressort et la compétence de tous les tribunaux existants, leur utilité ou leur inutilité, soient soumis à l’examen et à la décision des Etats généraux ; et les provinces qui demanderont la suppression ou l’érection dans leur ressort de nouveaux tribunaux, seront entendues, . et il ‘sera fait droit à leur demande; mais qu'aucun tribunal supérieur ou inférieur ne puisse être supprimé ou démembré dans une province ou converti en un autre tribunal, sans le vœu des Etats provinciaux exposé aux Etats généraux. Art. 15. Que les intendants soient supprimés, leur administration pouvant être utilement exercée par les Etats provinciaux et leurs commissaires. Art. 16. Que le Roi ne puisse départir à ses officiers aucun pouvoir qui ne soit prévu et défini par la loi ; en conséquence, qu’il soit laissé un libre cours à la justice dans les tribunaux ordinaires. Que l’on supprime tout droit de committi-mus au grand et petit sceau, lettres de garde-gardienne, évocations, révocations et attributions à tout tribunal quelconque, en sorte que chaque justiciable ne puisse être poursuivi en matière civile ou criminelle, personnelle ou réelle, ailleurs que par-devant son juge naturel. Art. 17. Que la police des villes soit exercée par les magistrats municipaux, librement élus par les communes, approuvés par le Roi, et distingués de ceux qui seront chargés de l’administration des affaires et deniers de là commune. Art. 18. Que, pour prévenir et abolir la mendicité, il soit établi une loi de secours, en assurant du travail à tous les pauvres valides, des moyens de soulagement aux infirmes, et des emprunts faciles aux laboureurs et artisans, qui manquent d’ustensiles pour travailler ; qu’il soit représenté aux Etats généraux que les pauvres appartiennent à la société comme les riches ; qu’il est temps qu’ils recueillent quelques avantages de la force commune ; et que, l’instruction publique étant plus avancée qu’elle ne l’a jamais été, la législation ne peut plus livrer uniquement à la charité des riches la subsistance des pauvres ; que l’amélioration des mœurs, le bonheur et la sûreté de tous, dépendent essentiellement d’établissements propres à prévenir le désordre et les crimes que produisent la misère et l’oisiveté, et qu’à cet effet les dépôts de mendicité, constitués tels qu’ils sont, soient supprimés pomme abusifs, Art. 19. Qu’il soit arrêté de s’occuper sans délai de la confection d’un code national, civil et criminel, qui puisse être connu et étudié par toutes les classes des citoyens ; qu’il soit nommé à cet effet une commission dont la durée sera déterminée par les Etats généraux, laquelle sera composée de magistrats et de jurisconsultes éclairés, choisis et nommés par lesdits Etats, et par eux pris dans les différentes provinces ; qu’il soit prescrit, dans la rédaction des lois criminelles, de classer les délits et les peines, de telle manière qu’il n’y ait rien d’arbitraire et d’équivoque dans la définition du crime commis par l’accusé, et dans l’application de la peine encourue, et qu’il soit inviolablement prescrit aux juges d’attendre les ordres du pouvoir législatif, lorsque l’accusation et les informations ne mettront pas en évidence un tel délit, auquel une telle peine s’applique. Et cependant il sera représenté aux Etats généraux de prendre en cônsidération si, dans l’état actuel de notre code criminel, et en attendant la perfection du nouveau, il ne serait pas nécessaire de statuer provisoirement que les accusés pourront s’assister d’un conseil ; que toutes les instructions et procédures seront faites en sa présence, et que les jugements de toutes les affaires criminelles seront portés à l’audience. Art. 20. Qu’en ce qui regarde le code civil, les lois romaines , les coutumes des provinces qui ont acquis force de loi, et les lois du royaume, seront fondues en un seul code, sous chacun des titres qui comprennent tous les droits à toutes les actions civiles, et qu’une des dispositions principales de ce code soit la maxime de droit naturel, de justice et de raison. Art. 21 . Que les agents supérieurs et inférieurs de l’administration ne puissent jamais prononcer en jugement , et que le conseil clu prince ne connaisse jamais par évocation d’aucune affaire contentieuse, ni d’aucune inculpation, contre un citoyen non soumis actuellement à la discipline militaire Art. 22. Que toutes les lois et ordonnances d’administration des divers départements soient revisées et réformées en ce qui pourrait être contraire à la liberté civile et à la trop grande influence des agents de l’administration sur les droits et actions des citoyens et à la bonne régie et économie des fonds assignés auxdits départements. Art. 23. Que l’éducation publique soit réformée, ou plutôt établie de manière à former des citoyens utiles dans toutes les professions ; qu’on rédige et qu’on mette au nombre des livres classiques ceux qui contiendront les principes élémentaires de la morale et de la constitution fondamentale du royaume; qu’ils soient lus dans toutes les écoles et paraisses de campagne ; qu’il soit établi dans toutes les villes des maîtres de dessin et de géométrie pratique et de mathématiques pour les enfants du peuple. Qu’il soit établi des distinctions et des récompenses publiques pour les laboureurs, artistes et artisans qui excelleront dans leur art, qui perfectionneront les machines et ustensiles fie l’agriculture et du commerce. Art. 24. Que toute loi avilissante pour le tiers-état soit abolie. Art. 25. Que la dignité et le traitement des curés ainsi que de leurs secondaires, soient pris on considération ; qu’il soit pourvu à leur honnête entretien, et que ceux distingués par leurs verfus et leurs services soient récompensés et appelés aux dignités ecclésiastiques. Art. 26. Qu’il soit assuré, autrement que par rétention sur ]es portions congrues, une retraite g72 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] aux curés vieux ou infirmes, ainsi qu’il y sera pourvu par les Etats généraux. Art. 27. Que les prérogatives et possessions légitimes des deux premiers ordres soient invio-liables ; que les usurpations et prétentions manifestement préjudiciables à l’intérêt général soient constatées et réprimées. ADMINISTRATION DES FINANCES. Art. 28. Que la dette nationale et les dépenses nécessaires de l’Etat soient invariablement fixées par les Etats généraux ; que tous les impôts actuellement établis, sous quelque dénomination que ce soit, soient supprimés, et qu’il en soit établi de nouveaux selon la proportion qu’exigeront les besoins de l’Etat, et que ces impôts soient réduits au moindre nombre possible ; qu’ils soient simples et uniformes, qu’ils ne puissent jamais affecter la personne, qu’ils diminuent progressivement à mesure que les dettes de l’Etat s’éteindront, et que la recette de chaque province soit versée directement au trésor royal par les préposés des Etats provinciaux, déduction faite de toutes les charges à payer dans la province et qui y seront acquittées aux parties prenantes. Art. 29. Que la comptabilité illusoire des finances par-devant les chambres des comptes soit anéantie et remplacée par une comptabilité réelle par-devant les commissaires de chaque Etat provincial, pour les recettes et les dépenses de province, et par-devant les commissaires des Etats généraux, pour la recette et dépense du trésor royal. Art. 30. Que les comptes soient rendus par les administrateurs et ordonnateurs, plus que par les trésoriers, et que les pièces en forme ne suffisent plus que pour valider les dépenses exagérées, les marchés onéreux, les frais inutiles, les bénéfices illicites; que les acquits de comptant non motivés pour telle dépense publique ne puissent jamais être alloués dans les comptes. Art. 31. Qu’on poursuive la suppression de toutes les places et emplois qui ne sont pas évidemment nécessaires, et la réduction de tous les traitements qui excèdent 20,000 livres ; que plusieurs places réunies sur une même tête ne puissent jamais procurer que le plus fort traitement d’une de ses places; que toutes les pensions réunies à des appointements qui excèdent 20,000 livres, soient déduites de ces appointements; qu’il soit établi dans chaque département une fixation de _ sommes accordées en dons , pensions et gratifications, et un état énonciatif des titres et services qui en seront susceptibles, et que le Roi soit supplié de faire publier, tous les ans, la liste desdites pensions, dons et gratifications. Art. 32. Que la rentrée du Roi dans ses domaines engagés ou échangés, soit effectuée, autant qu’elle sera jugé praticable, et que l’aliénation de tous lesdits domaines soit consentie et autorisée pour, ladite vente, être faite avec les formes judiciaires par adjudication, et en détail, autant que faire se pourra, et dans les provinces où lesdits domaines sont situés, et non ailleurs, et le prix desdites ventes être employé au remboursement des dettes les plus onéreuses de l’Etat, selon l’avis des Etats généraux. Art. 33. Que les immeubles des hôpitaux aient la même destination, en leur assignant et leur garantissant par les Etats généraux un revenu supérieur au produit actuel desdits immeubles, et au moins égal à la progression graduelle des denrées, dont le payement sera fait annuellement de trois en trois mois et par avance, sur les premiers fonds des provinces, par privilège et préférence à tous autres objets, et qu’il soit accordé des secours à ceux desdits hôpitaux qui en ont besoin, pour le soutien d’établissements aussi utiles pour le bien de l’humanité. Art. 34. Qu’il soit aussi accordé des fonds suffisants pour la nourriture et l’entretien des enfants trouvés, à la conservation desquels, dans toutes les provinces, l’Etat est également intéressé, et qui méritent les mêmes soins et la même protection ; qu’il soit fait un règlement à cet égard, pour établir un régime uniforme. Art. 35. Que le clergé soit tenu d’acquitter sa dette dans le délai qui sera fixé par les Etats généraux ; que, pour cet effet, on ordonne d’abord la vente des biens des bénéfices et maisons supprimées et réunies à d’autres bénéfices, maisons et communautés, comme aussi la vente des biens des bénéfices dont les titres ont été supprimés, et les revenus appliqués à d’autres établissements. Subdiairement, en cas d’insuffisance, qu’on ordonne la vente des biens des bénéfices simples les moins utiles dans l’ordre de la religion, et ■ toutefois, sans qu’aucune suppression, réunion ou application de biens puissent jamais être faites sans le concours et le consentement exprès des Etats généraux. Art. 36. Qu’il soit établi une commission des Etats, assistée des ingénieurs les plus éclairés, pour déterminer .dans toutes les provinces les points de communication, où if serait le plus avantageux d’ouvrir des canaux ou de nouveaux chemins. Art. 37. Que tous les droits de fisc qui nuisent à l’industrie et au commerce soient abolis, et que ceux du contrôle soient réduits au taux le plus modéré, et ne deviennent jamais progressifs en raison de la plus longue durée des baux à fermes, et que lesdits baux ne soient sujets à aucuns droits de lods et ventes, ni autres droits seigneuriaux, et que la connaissance des contestations qui pourront s’élever au sujet desdits droits de contrôle appartienne aux juges royaux ordinaires. Art. 38. Qu’il soit établi une commission des Etats, pour rechercher les causes qui arrêtent l’extension du commerce et de la navigation nationale. Art. 39. Que le prêt de l’argent à intérêt au taux de l’ordonnance par billet ou obligation, soit permis indéfiniment, et à toutes personnes sans distinction, comme essentiellement utile, dans nos mœurs actuelles, au commerce, à l’agriculture et à la société en général, enfin, comme un frein salutaire à l’usure. Art. 40. Que toutes les charges des finances soient supprimées, remboursées et réduites à de simples commissions. Art. 41. Que tous les offices d’huissiers-jurés-priseurs soient supprimés, comme une atteinte manifeste aux droits de propriété, et un moyen de vexation odieuse aux pauvres débiteurs. Art. 42. Que toutes les grandes compagnies de finances, résidantes à Paris, soient subdivisées par province, sous l’autorité et administration de chaque état provincial. Art. 43. Que toutes les douanes soient portées aux frontières ; que toutes les leydes, de quelque espèce qu’elles soient, soient supprimées, sauf l’indemnité ; que tous les péages soient abolis, tous les privilèges de roulage, de messageries soient supprimés. Art. 44. Que les aides et gabelles soient supprimées, sauf aux Etats généraux à pourvoir au remplacement de cet impôt, ainsi qu’ils avise- [États gén. 1789. Cahiers. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] 573 ront, et à pourvoir aussi à la juste indemnité des provinces rédimées. Art. 45. Que toutes les jurandes, ensemble tout privilège exclusif, soient supprimées, sauf à pourvoir à tout remboursement de ce droit. GUERRE ET MARINE. Art. 46. Que les dépenses de la guerre et de la marine soient appréciées et vérifiées dans toutes les parties, et qu’il soit assigné des fonds fixes pour chaque objet des deux départements, d’après les propositions du gouvernement, telle que la somme de ...... pour tant de régiments d’infanterie, celle de ..... pour tant de cavalerie, celle de ..... pour l’artillerie et le génie , et de même pour la marine, divisée en construction et approvisionnement, armement et frais d’administration ; que les comptes de chaque département soient rendus dans la même forme par les ordonnateurs, en montrant l’emploi des sommes assignées pour chaque objet. Art. 47. Qu’il soit pourvu au recrutement de l’armée, autrement que par des moyens oppressifs pour la nation. DETTE DE L’ÉTAT. Art. 48. Que la majesté du trône et la dignité de la famille royale soient honorablement soutenues, et que toutes les dettes actuelles de la couronne soient garanties et acquittées, et que des commissaires nommés par les Etats généraux veillent, dans l’intervalle d’une séance à l’autre, au maintien de la constitution, avec pouvoir de convoquer les députés, si, avant] l’expiration du terme des trois années, il survient quelque infraction non réprimée des lois constitutives. Tels sont les objets principaux de réclamation ; comme citoyens et sujets de la monarchie, nous ne pensons pas qu’il puisse y avoir parmi nous un gouvernement libre, juste et prospère, si les principes que nous venons d’exposer ne deviennent ceux de la législation; mais en vous renouvelant la recommandation de provoquerl’adoption des articles que nous avons ci-dessus déclarés fondamentaux, et dont nous espérons que vous ne vous départirez pas, nous laissons à votre prudence de proposer les autres, ou de vous unir aux propositions qui seraient faites dans le même esprit. Nous ne vous présentons aucune des vues générales sur le commerce, la navigation et l’agriculture, que nous savons devoir être développées par des hommes éclairés, et produites par plusieurs départements; nous ne doutons pas que vous n’appuyez avec zèle tous les plans qui tendront à l’accroissement et à la liberté de l’industrie nationale. Nous vous recommandons particulièrement de faire connaître à Sa Majesté les sentiments de respect, d’attachement et de fidélité dont nous sommes pénétrés pour sa personne sacrée, et la reconnaissance profonde que nous conservons de ses généreuses dispositions pour le bonheur de ses sujets. Nous vous chargeons de vous unir à tous les Français qui désirent que le souvenir en soit transmis à la postérité, par un monument élevé à la gloire de Louis XVI le Bienfaisant, roi-citoyen, restaurateur et modérateur de l’empire. En ce qui concerne particulièrement notre sénéchaussée d’Auvergne, et la ville de Riom qui en est le chef-lieu, nous sommes si convaincus que tous les intérêts privés doivent être subordonnés à l’intérêt général et que tous les avantages légitimes auxquels tout individu peut prétendre, se trouvent nécessairement liés et confondus dans le bonheur de tous, que nous nous abstenons de toutes demandes et observations qui ne seraient relatives qu’à nous et à notre territoire; si, au contraire, il existe aux extrémités du royaume quelques calamités qui nous soient inconnues, et s’il parvient à votre connaissance qu’un village éloigné, même un seul homme, éprouvent une oppression, nous vous recommandons d’être ses défenseurs auprès du souverain et des Etats généraux, et de ne solliciter pour nous aucune grâce, aucune faveur, qui préjudicient de quelque manière que ce soit aux intérêts de la nation, et attendu que toute espèce de vexations, à quelque distance qu’elle soit de nous,- retentit au fond de nos cœurs, et que nous en souffrons comme hommes, et comme citoyens; instruits des maux que produisent les capitaineries dans les campagnes qui environnent la capitale, nous vous recommandons d’en solliciter la suppression , en ayant grande attention d’aller au-devant de toutes les dispositions qui pourraient assurer à Sa Majesté la jouissance de la chasse, sans nuire aussi essentiellement aux propriétés. Et ont signé : MM. Malouet, conseiller du Roi en ses conseils, intendant de la marine au département de Toulon. Archon-Desperouses, lieutenant de maire. Redon, échevin. Granchier, id. Salles, id. Prohet, id. Legay, assesseur. Deparade, id. Ürouzet, id. Ducrohet, procureur du Roi de ville. Faydit, conseiller en la sénéchaussée d’Auvergne et siège présidial de Riom. Gatbol, avocat du Roi audit siège. Gerzat,’ président en l’élection. Valeix, conseiller en l’élection. Chassaing, maître particulier des eaux et forêts. Brugière de Laverchère, maître particulier honoraire en ladite maîtrise. Ducrohet, juge, garde de la Monnaie. Assolent, procureur du Roi à la Monnaie. Mioche, lieutenant au dépôt des sels. Bessier, négociant, premier juge consul. Leyx, négociant, second juge consul. Beaulaton, avocat au parlement. Massonet, avocat au parlement. Boirat, docteur en médecine. Chassaing, maître en chirurgie. Mazuer, maître en chirurgie. Bertin, docteur en médecine. Verny, notaire royal. Morahge, notaire royal. Ferrières, procureur en la sénéchaussée d’Auvergne. Pagès aîné, procureur en la sénéchaussée. Mandet, procureur au bureau des finances. Crozier, procureur audit bureau. Vallet., syndic du corps des marchands. Ghassagne, négociant. Delarbre père, apothicaire. Dufaud, apothicaire. Delarbre, marchand orfèvre. Phelut, marchand orfèvre. Jourdan, marchand tanneur. 574 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom. J MM. Barrière-Tailand, marchand tanneur. Gipierre, marchand chapelier. Armand, perruquier. Delalet, tapissier. Frelut, teinturier. Faure fils, serrurier. Dousse l’aîné, maréchal. Morel, boulanger. Collas, charron. Grasset, cordonnier. Conchon, tailleur. Allègre fils, menuisier. Gacon, charpentier. Mallet, maçon, entrepreneur. An net Sauret, marchand boucher. Bonnin père, ferblantier et fontanier. Mayrand, limonadier et cafetier. Gilïe, tisserand. Dubreuil, directeur des postes. Carton, laboureur. Cailhe père, ancien notaire royal. Et Bernard, secrétaire-greffier, garde des archives. Paraphé, ne varietur , après l’avoir coté par premier et dernier, par nous, conseiller du Roi, lieutenant de maire, à Riom, à l’hôte'l-de-ville, le 8 mars 1789. Signé ArchON-ÜESPEROUSES. CAHIER Des plaintes et doléances des habitants du bailliage de Montaigut (1). AU ROI. « Sire, « Plaintes et doléances de vos fidèles sujets habitant la ville et le ressort du bailliage de Montaigut-les-Combrailles en la province d’Auvergne. « Les habitants du bailliage royal de Montaigut désireraient, comme tous ceux de la province, donner au Roi des preuves de la fidélité et de l’amour inviolables qui les attachent à leur auguste souverain ; sensibles aux maux de la France, ils voient avec la plus respectueuse reconnaissance que son cœur paternel s’est ouvert pour tous ses sujets, qu’il veut entrer dans leurs peines, les connaître et les alléger ; et c’est pour cela, sans doute, qu’il les appelle auprès de lui, qu’il les prend pour conseil, et qu’il veut travailler avec eux au bonheur commun de la patrie. « Que de reconnnaissance, que de vénération, le peuple fidèle ne doit-il pas avoir pour un Roi si bienfaisant ! Et que d’efforts, en même temps, une conduite aussi noble, aussi généreuse, n’est-elle pas capable d’inspirer à un peuple de Français, idolâtres de leur Roi, et pour lequel, dans toutes les occasions, ils ont porté le dévouement aux sacrifices de leurs personnes et de leurs biens ! « C’est particulièrement le peuple de votre royaume, le tiers-état, Sire, qui vous a donné des preuves de ses sentiments; soumis à vos ordres, il les a toujours reçus avec respect ; et malgré qu’ils fussent accablants pour lui seul, il n’a pas laissé de les exécuter et de se prêter à vos volontés. Vous l’avez reconnu, Sire, vous avez jugé la fidélité de ce peuple, et, profondément pénétré de ses malheurs, vous avez désiré de les (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. faire cesser, et vous lui en avez facilité les moyens en lui permettant de vous faire entendre ses plaintes, de vous exposer ses doléances. Quelque tableau qu’on vous ait fait de sa malheureuse situation, on ne vous l’aura pas sans doute présenté au naturel; il aurait été trop affligeant pour le cœur d’un bon Roi. « Surchargés par toutes sortes d’impôts, les habitants du bailliage de Montaigut les ont acquittés sans murmure, et ont toujours respecté le souverain au nom duquel ils se lavaient. Devenus excessifs par la facilité des ministres à les demander, et des peuples à les consentir, et frappant essentiellement sur la classe la plus pauvre et la plus misérable, il n’est plus possible de les augmenter» Vos fidèles sujets vous en demandent au contraire la diminution. Oui, Sire, si vous les laissez subsister sur le même taux, votre peuple ne pourra plus les acquitter, et loin de tourner au profit de l’Etat, ils en produiraient infailliblement la ruine ; vous avez conçu, Sire, sans qu’il soit besoin de vous le représenter, cette vérité frappante. Les impôts excessifs, en enlevant aux laboureurs tous les moyens et toutes les avances nécessaires pour la culture , étouffent dans les villes la population, le commerce, les arts et toute espèce d’industries ; et les malheureuses victimes de l’impôt, sans ressources pour les payer, finiraient par préférer une invertie ruineuse pour l’Etat, plutôt que de se livrer à des travaux infructueux pour leur bonheur et l’amélioration de leur sort. « S’il est reconnu dans toute la France que les impositions à la charge du peuple sont exorbitantes, les habitants de ce bailliage ont plus sujet de se plaindre que qui que ce soit. La ville de Montaigut, chef-lieu pour l’administration de la justice, est, on peut le dire, non-seulement la plus imposée de l’Auvergne, mais encore de toute la France, et on ne trouverait pas une ville où l’excès de l’impôt fût parvenu à un point égal, eu égard à sa population et à ses richesses. « Cette ville pauvre, n’ayant aucun commerce ni genre d’industrie dans son enceinte , qui comprenait autrefois plus de trois cents feux, réduite maintenant tout au plus à deux cents, paye, et vous serez, Sire, étonné de l’apprendre, tarit en taille, impositions, accessoires, capitation, industrie, que don gratuit, la somme de 5,312 livres, et en vingtièmes, sous pour livre et corvées, celle de 1,110 livres 9 sous, en tout 6,422 livres il sous 9 deniers. « Cette imposition, qui frappe simplement sur sur les maisons, et quelques petits jardins faits sur les ruines d’un ancien château, dont les frais de culture surpassent le produit, est supportée entièrement par les habitants de cette petite cité. Les fonds composant ses environs, appelés la Franchise, sont compris dans un cahier à part, et l’imposition en est acquittée indépendamment de cette ville. « Ne croyez pas, Sire, que si l’imposition de la ville de Montaigut est aussi considérable, ce soit en raison de la richesse de ses habitants, et que leurs cotes personnelles soient le rejet du produit de leurs fortunes et de l’étendue de leurs revenus ; non, Sire, ce n’est pas la mesure qui peut avoir servi de base pour la répartition, n’y ayant point de fortunes à Montaigut, point d’états productifs; on ne peut les avoir pris pour règle, et les habitants de cette ville, peut-être la plus malheureuse de votre royaume, vous en convaincraient, Sire, s’il leur était permis de vous présenter les différents rôles où ils sont imposés ; vous y aperce- 574 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom. J MM. Barrière-Tailand, marchand tanneur. Gipierre, marchand chapelier. Armand, perruquier. Delalet, tapissier. Frelut, teinturier. Faure fils, serrurier. Dousse l’aîné, maréchal. Morel, boulanger. Collas, charron. Grasset, cordonnier. Conchon, tailleur. Allègre fils, menuisier. Gacon, charpentier. Mallet, maçon, entrepreneur. An net Sauret, marchand boucher. Bonnin père, ferblantier et fontanier. Mayrand, limonadier et cafetier. Gilïe, tisserand. Dubreuil, directeur des postes. Carton, laboureur. Cailhe père, ancien notaire royal. Et Bernard, secrétaire-greffier, garde des archives. Paraphé, ne varietur , après l’avoir coté par premier et dernier, par nous, conseiller du Roi, lieutenant de maire, à Riom, à l’hôte'l-de-ville, le 8 mars 1789. Signé ArchON-ÜESPEROUSES. CAHIER Des plaintes et doléances des habitants du bailliage de Montaigut (1). AU ROI. « Sire, « Plaintes et doléances de vos fidèles sujets habitant la ville et le ressort du bailliage de Montaigut-les-Combrailles en la province d’Auvergne. « Les habitants du bailliage royal de Montaigut désireraient, comme tous ceux de la province, donner au Roi des preuves de la fidélité et de l’amour inviolables qui les attachent à leur auguste souverain ; sensibles aux maux de la France, ils voient avec la plus respectueuse reconnaissance que son cœur paternel s’est ouvert pour tous ses sujets, qu’il veut entrer dans leurs peines, les connaître et les alléger ; et c’est pour cela, sans doute, qu’il les appelle auprès de lui, qu’il les prend pour conseil, et qu’il veut travailler avec eux au bonheur commun de la patrie. « Que de reconnnaissance, que de vénération, le peuple fidèle ne doit-il pas avoir pour un Roi si bienfaisant ! Et que d’efforts, en même temps, une conduite aussi noble, aussi généreuse, n’est-elle pas capable d’inspirer à un peuple de Français, idolâtres de leur Roi, et pour lequel, dans toutes les occasions, ils ont porté le dévouement aux sacrifices de leurs personnes et de leurs biens ! « C’est particulièrement le peuple de votre royaume, le tiers-état, Sire, qui vous a donné des preuves de ses sentiments; soumis à vos ordres, il les a toujours reçus avec respect ; et malgré qu’ils fussent accablants pour lui seul, il n’a pas laissé de les exécuter et de se prêter à vos volontés. Vous l’avez reconnu, Sire, vous avez jugé la fidélité de ce peuple, et, profondément pénétré de ses malheurs, vous avez désiré de les (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. faire cesser, et vous lui en avez facilité les moyens en lui permettant de vous faire entendre ses plaintes, de vous exposer ses doléances. Quelque tableau qu’on vous ait fait de sa malheureuse situation, on ne vous l’aura pas sans doute présenté au naturel; il aurait été trop affligeant pour le cœur d’un bon Roi. « Surchargés par toutes sortes d’impôts, les habitants du bailliage de Montaigut les ont acquittés sans murmure, et ont toujours respecté le souverain au nom duquel ils se lavaient. Devenus excessifs par la facilité des ministres à les demander, et des peuples à les consentir, et frappant essentiellement sur la classe la plus pauvre et la plus misérable, il n’est plus possible de les augmenter» Vos fidèles sujets vous en demandent au contraire la diminution. Oui, Sire, si vous les laissez subsister sur le même taux, votre peuple ne pourra plus les acquitter, et loin de tourner au profit de l’Etat, ils en produiraient infailliblement la ruine ; vous avez conçu, Sire, sans qu’il soit besoin de vous le représenter, cette vérité frappante. Les impôts excessifs, en enlevant aux laboureurs tous les moyens et toutes les avances nécessaires pour la culture , étouffent dans les villes la population, le commerce, les arts et toute espèce d’industries ; et les malheureuses victimes de l’impôt, sans ressources pour les payer, finiraient par préférer une invertie ruineuse pour l’Etat, plutôt que de se livrer à des travaux infructueux pour leur bonheur et l’amélioration de leur sort. « S’il est reconnu dans toute la France que les impositions à la charge du peuple sont exorbitantes, les habitants de ce bailliage ont plus sujet de se plaindre que qui que ce soit. La ville de Montaigut, chef-lieu pour l’administration de la justice, est, on peut le dire, non-seulement la plus imposée de l’Auvergne, mais encore de toute la France, et on ne trouverait pas une ville où l’excès de l’impôt fût parvenu à un point égal, eu égard à sa population et à ses richesses. « Cette ville pauvre, n’ayant aucun commerce ni genre d’industrie dans son enceinte , qui comprenait autrefois plus de trois cents feux, réduite maintenant tout au plus à deux cents, paye, et vous serez, Sire, étonné de l’apprendre, tarit en taille, impositions, accessoires, capitation, industrie, que don gratuit, la somme de 5,312 livres, et en vingtièmes, sous pour livre et corvées, celle de 1,110 livres 9 sous, en tout 6,422 livres il sous 9 deniers. « Cette imposition, qui frappe simplement sur sur les maisons, et quelques petits jardins faits sur les ruines d’un ancien château, dont les frais de culture surpassent le produit, est supportée entièrement par les habitants de cette petite cité. Les fonds composant ses environs, appelés la Franchise, sont compris dans un cahier à part, et l’imposition en est acquittée indépendamment de cette ville. « Ne croyez pas, Sire, que si l’imposition de la ville de Montaigut est aussi considérable, ce soit en raison de la richesse de ses habitants, et que leurs cotes personnelles soient le rejet du produit de leurs fortunes et de l’étendue de leurs revenus ; non, Sire, ce n’est pas la mesure qui peut avoir servi de base pour la répartition, n’y ayant point de fortunes à Montaigut, point d’états productifs; on ne peut les avoir pris pour règle, et les habitants de cette ville, peut-être la plus malheureuse de votre royaume, vous en convaincraient, Sire, s’il leur était permis de vous présenter les différents rôles où ils sont imposés ; vous y aperce- [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] 575 vriez que, quoiqu’il y ait tout au plus huit privilégiés indépendamment des ecclésiastiques, ces privilégiés ne payent point de taille personnelle, mais bien la capitation et la taille réelle pour leurs propriétés foncières; les onze douzièmes des autres habitants sont journaliers, ouvriers, marchands ou voituriers, n’ayant aucunes facultés personnelles, et ne faisant ces diverses professions fatigantes, auxquelles ils sont obligés de se livrer nuit et jour, que parce qu’ils n’ont pas d’autres ressources, et que leurs moyens ne leur permettent pas de prendre d’autres j états pour se procurer leur subsistance. « Les habitants du bailliage et de la ville de Montaigut ne croiraient pas avoir rempli les intentions bienfaisantes de Votre Majesté, s’ils ne vous avaient fait connaître le taux de leurs impositions, et, en même temps, s’ils ne vous avaient exposé, Sire, combien, loin de vous, les peuples et les provinces gémissent sous le poids de l’oppression; et pour vous former l’idée de l’excès de l’impôt, les habitants de ce bailliage prendront pour terme de comparaison l’imposition de la ville de Montaigut, qui ne devrait pas être la plus considérable de son ressort. « Ils ont eu, Sire, l’honneur de vous le dire, la ville de Montaigut est composée tout au plus de deux cents feux ou maisons ; à peine, dans ce nombre, y en a-t-il cinq ou six qui s’élèvent au-dessus dès autres, ce qui ne doit faire exception pour le taux commun de l’estimation, n’y ayant point de fortunes en cette ville; et ne pouvant répartir l’imposition à raison des facultés d’un chacun, il a fallu nécessairement la rejeter sur les propriétés, qui sont les maisons. Ges maisons, dont la plus grande partie est en très-mauvais état et menaçant ruine, calculées avec leurs jardins sur le revenu que ce genre de propriété pourrait produire, et à raison de la somme de 35 livres, qui sera l’estimation pour chaque maison, terme qu’elles ne sauraient cependant atteindre dans la plus scrupuleuse exactitude, donneraient un produit de la somme de 7,000 livres, sans déduction de cens et réparations. « En prenant sur ce produit le montant des impositions en taille, capitation, accessoires, industrie, don gratuit, vingtièmes, chemins royaux et autres charges locales et particulières; et en supposant qu’elles dussent être payées sur le taux des propriétés foncières de la province, c’est-à-dire à raison de 12 sous 7 deniers, qui fait le plein tarif, l’imposition de la ville de Montaigut ne devrait s’élever qu’à la somme de 4,050 livres, et non à celle de 6,422 livres il sous 9 deniers qu’elle paye actuellement; mais les impositions des villes d’Auvergne, et du surplus de la France ne se calculant pas ainsi, et les maisons nécessaires à l’habitation ne s’estimant pour l’imposition, tout au plus qu’au mi-tarif des autres propriétés foncières, la ville de Montaigut, où l’impôt ne peut se répartir différemment, à défaut, comme on l’a dit, de facultés personnelles, ne devant payer que sur ce taux, son imposition se réduirait à une somme de 2,025 livres. Gonséquemment cette ville paye les deux tiers et au delà de sa dette et de sa portion contributive aux charges publiques. Donc, il est fait à la ville de Montaigut la plus grande injustice, qui sera encore bien plus frappante, si on joint à cette imposition les cens qui vont près du cinquième .de son revenu; alors on verra que cette ville est accablée d’impôts, qu’elle supporte un fardeau inouï qui va au moins aux 21 sous pour livre du produit. « Vous êtes étonné, Sire, de cet aperçu ; il n’est que trop vrai dans son exactitude, et trop affligeant dans ses effets. Il semble que, jusqu’à ce jour, la ville et le ressort de Montaigut composant la subdélégation, n’ayant été connus des préposés du gouvernement que pour le pavement de l’impôt, jamais cette ville ne s’est ressentie des soins vivifiants et protecteurs que l’œil d’une sage administration est dans l’habitude d’accorder; on a, au contraire, tout négligé à l’égard de cette ville, soit pour son utilité, soit pour son embellissement. Une route de communication entre l’Auvergne et le Bourbonnais, qui pouvait être, et était son unique ressource, est commencée depuis vingt ans, sans qu’elle soit achevée. De cet ensemble de maux, en est résulté la destruction de la ville de Montaigut. Plus du tiers des maisons sont tombées en ruine, les familles les plus aisées ont déserté, et sont allées chercher ailleurs des séjours plus tranquilles et moins onéreux; malgré cela, l’imposition a toujours demeuré et n’a fait qu’accroître. Elle est venue au point que les habitants, ne pouvant plus la payer, ont demandé, lors de la dernière confection des rôles, des commissaires de l’assemblée du département de Riom, pour que la distribution de l’impôt se fît en leur présence; c’est à cette époque.que l’état des contribuables a été mis à découvert, que leurs fortunes ont été discutées, et qu’il a étéjreconnu que l’imposition de cette ville excédait de plus des deux tiers de sa juste proportion, et ce qu’elle était en état de payer pour sa contribution. « Les paroisses et collectes composant ce bailliage ne sont pas moins accablées que la ville de Montaigut, soit en impôt envers vous, Sire, soit en cens envers différentes seigneuries dépendantes de l’élection de Riom, c’est-à-dire étant jointes pour l’imposition à un des pays les plus fertiles de la France ; c’est sur ce taux que les paroisses et collectes ont été taxées, et sans aucun égard pour la différence des sols, et des productions de la terre, étant, en outre, les plus éloignées de l’élection, sans protection, comme sans secours. C’est toujours sur ce bailliage qu’on a reporté le fardeau de l’impôt; ceux qui étaient chargés de sa distribution, croyant avoir rempli leurs fonctions et gagné beaucoup, lorsque par ce moyen •ils pouvaient s’éviter les cris, les réclamations de leurs concitoyens et des personnes avec lesquelles ils pouvaient tous les jours avoir à faire, de manière que les impôts se sont accumulés sur ce bailliage, sans aucune proportion avec le surplus de l’élection ; et les habitants des paroisses et collectes désireraient ardemment, Sire, d’être à même, par une vérification et une estimation des produits, de vous démontrer l’égalité proportionnelle qui a régné jusqu’à ce jour dans la répartition. « Il est incontestable et reconnu, Sire, que la subdélégation de Montaigut, ou le ressort du bailliage, est le moins fertile de l’élection de Riom et cle toute l’Auvergne ; ce petit pays, situé dans les montagnes arides de la basse Auvergne, est, en général, entrecoupé de ruisseaux faisant torrents, et dégradant tous les lieux où ils passent ; la cime de ces montagnes infertiles et couvertes de bruyères ombrageant considérablement les vallons, nuisent à leur fertilité, et les pierres et graviers qui en descendent occasionnent des ravins considérables, encombrent les prés, et enlèvent leurs récoltes pendant plusieurs années. Il est d’autres parties de terrains de nature forte et argileuse, qui craignent beaucoup les influences 576 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] des temps, et singulièremet la gelée, en sorte que l’estimation commune du produit de ce petit pays, dont les meilleures terres ne rapportent que tous les deux ans, tandis que celles de médiocre qualité sont obligées de reposer au moins douze ans après trois récoltes, ne peut être porté, tout au plus, qu’un grain deux pour les terrains qui sont en valeur; néanmoins, dans une étendue, tout au. plus de six à sept lieues carrées, il se perçoit une somme de 106,962 livres 10 sous 11 deniers, de toute espèce d’impôts. « S’il était permis aux habitants de ce bailliage d’entrer dans quelques détails à cet égard, ils vous prouveraient, Sire, d’après les rapprochements du produit aux charges, combien est grand leur malheur; ils vous feraient voir, bien que ce soit dans les paroisses desservant Virlet ou autres, des biens du produit de 60, 80 ou 100 livres plus ou moins, vérifiés d’après les tarifs, épreuve à laquelle les paroisses de ce bailliage ont passé; ces biens, calculés sur le détail exact des propriétés qui les composent, et qu’on a supposé devoir produire tous les ans des récoltes, acquittent en impositions réelles des sommes égales à leur produit, sans compter celles qui frappent indirectement sur les cultivateurs ; enfin, ils vous démontreraient que les sommes qu’ils payent sont des plus exorbitantes ; qu’elles enlèvent aux habitants de la campagne tout le produit de la terre, et qu’il ne leur reste, après la semence et le payement de l’impôt, aucuns moyens de subsistance, pas même l’acquittement de leur cens. « Si un écrivain de la province vous a déjà démontré cette vérité, elle reçoit plus d’application pour le bailliage de Montaigut que pour tout autre endroit. L’exemple détaillé que les habitants du bailliage vous ont donné de la ville de Montaigut, et qu’ils auraient également pu tirer d’une paroisse ou collecte, explique avec évidence l’espèce de surcharge que souffrent les habitants de ce bailliage. Il prouve en même temps que les impôts y sont montés au dernier période, que les cultivateurs, ne retirant aucune chose des produits de la terre après le payement des charges, et que même étant obligés de fournir pour leur acquittement, c’est sur leur industrie, qu’ils ne peuvent mettre à profit dans le pays, où il n’y a aucun commerce, et qu’ils sont obligés de faire valoir au loin, que roulent tous leurs moyens de subsistance, d’entretien et de leurs familles ; c’est en la mettant à toute épreuve qu’ils parviennent, Sire, à se procurer leur nécessaire. Mais cette conduite n’étant pas aussi active et heureuse chez les uns que chez les autres, plusieurs habitants de ce bailliage, ne pouvant supporter les maux qui les accablent, sont forcés d’abandonner la terre qui les a vu naître ; aussi, n’y a-t-il pas de pays où il y ait plus d’émigration que dans ce bailliage, d’abandons de biens aux consuls, de banqueroutes, où il existe autant de familles réduites à la misère, des maisons détruites ; enfin, oseront-ils vous le dire, c’est en transgressant vos ordres, en se livrant à la contrebande, que leur situation leur facilite, qu’ils parviennent à vivre ; c’est en s’exposant aux plus grands dangers, à la honte et à la flétrissure, qu’ils acquittent les impôts qui se lèvent en votre nom. « Si les maux de tous genres que souffrent vos sujets de ce bailliage sont effrayants , il est, Sire, un motif de consolation, c’est qu’ils ne sont pas sans remède. « Ne pouvant supporter les sommes d’impôts qui les accablent, vous ne sauriez leur demander d’augmentation. Ils s’attendent, au contraire, au soulagement quela plus déplorable situation exige. « Vous pouvez, Sire, venir à leur secours. Veuillez commencer par rendre aux habitants de cette province leurs Etats particuliers, et les substituer aux administrations provinciales, formées sur le modèle de ceux de la province du Dauphiné. Les membres de ces Etats, choisis par eux-mêmes et parmi eux, et chargés de l’assiette de l’impôt, s’empresseront, sans doute, de connaître la valeur des fonds de la province, d’en calculer le produit, et, d’après une scrupuleuse estimation, de fixer, dans une juste et équitable proportion, la contribution que chaque propriété doit supporter dans les charges publiques, la capitation séparée du principal de la taille, comme les habitants de ce bailliage se proposent de vous le démontrer, les Etats de la province le taxeront par tête en raison proportionnelle des facultés d’un chacun ; et enfin, mettant à profit toutes les ressources de l’Etat, ils fixeront l’industrie de manière à ne pas la décourager, mais, au contraire, à la rendre plus active. « La base de l’impôt, devenaut tout autre, on ne sera pas longtemps à en apercevoir la différence ; et les contribuables, à portée de se faire entendre et de se garantir de l’influence meurtrière de l’autorité et de la force qui les réduisaient au silence, voyant donc cesser l'arbitraire et l’inégalité de la répartition des subsides, pour laquelle ils ont toujours eu la répugnance la plus marquée, les acquitteront alors sans se plaindre. Ils sauront, Sire, que l’impôt qu’ils vous payent est leur portion contributive pour le maintien de la sûreté J publique et de la tranquillité individuelle ; et lors même que vous n’auriez pas la force pour l’exiger, ils seraient les premiers à vous l’offrir. « Le moment est sans doute venu, où, rendant à chaque espèce d’impôt sa nature et sa destination, vous ne souffrirez pas que la capitation, qui est entièrement à la charge du peuple, continue à suivre les accroissements de la taille, et ose régler, comme par le passé, au marc la livre de ce premier impôt ; destinée dans son origine à être imposée par tête, la capitation n’a conservé que le nom de son établissement, et se trouve confondue par les taillables avec l’impôt qui, jusqu’à ce jour les a conservés en seul. « Le but de la loi et l’intention des législateurs, qui était de faire porter cette taxe sur la nation entière, sur le riche comme sur le pauvre, et sans autre distinction, dans la répartition, que celle provenant des fortunes d’un chacun, se trouvant manqués par l’abus qu’on a fait de cette loi, vous allez à coup sûr, Sire, la ramener à sa primitive origine, et, en chargeant les Etats particuliers de sa répartition, vous ne permettrez pas que votre peuple supporte autant de différentes cotes de capitation qu’il possède, ou qu'il exploite de corps de biens séparés, indépendamment de sa cote personnelle, fixée au lieu de son domicile, tandis ue le riche, le grand et celui qui est élevé en ignité ne paye qu’une seule taxe qui n’est aucunement en proportion avec ses facultés. « Quoique le peuple paye moins, par les opérations bienfaisantes que vous avez conçues pour l’amélioration de son sort, et qu’il était réservé à votre sagesse de réaliser, l’Etat n’en sera pas moins riche, abstraction faite de la maxime que le peuple est la richesse de l’Etat; le clergé et la noblesse, dont les richesees sont excessives, et qui possèdent, suivant qu’ils en sont convenus, les trois quarts de la France, ue payant rien, ni presque rien, et jouissant de privilèges reconnus 577 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.] abusifs et qui n’ont jamais été consentis par la nation, venant à partager les impôts, comme tous les autres sujets de l’Etat, c’est une nouvelle source de richesses qui lui est ouverte, et qu’il est de votre justice de mettre à profit. « Ces deux corps, jusqu’à présent privilégiés, concevant bien qu’ils n’existent plus dans l’Etat uniquement pour jouir de leurs richesses, tandis que le peuple est dans la souffrance, et que les causes, pour lesquelles ces privilèges leur avaient été accordés ne subsistent plus, de même que les charges que lëur imposait le régime féodal, ont, dans l’Assemblée des Notables de 1787, exprimé leurs�œux, et offert, pour le soulagement de la nation, de sacrifier toutes exemptions personnelles et pécuniaires. « Cet exemple généreux, qui leur avait été donné par les princes de votre sang et les plus grands du royaume, qui ne peut manquer d’être suivi par tous les membres de ces deux ordres, les rendant sujets à l’impôt et à toutes les charges de l’Etat, et y concourant proportionnellement à leurs facultés, vous allez trouver, dans cette offre volontaire, dans ce sacrifice patriotique, et sans établir de nouveaux impôts, les moyens de réparer les maux de la France, de procurer du soulagement à votre peuple, et de parvenir au comble de vos souhaits, en assurant la félicité commune. « Dans cette restauration générale, vos peuples et les habitants de ce bailliage, ne pouvant méconnaître l’insuffisance des lois tant civiles que criminelles, et le peu d’application et de rapport qu’elles ont au caractère moral d’un peuple libre et au temps présent, vous en demanderont de nouvelles, ou que vous vous occupiez, Sire, efficacement avec vos sujets, àla perfection des anciennes. Il est temps, sans doute, que des lois obscures et barbares inspirées par la force, et faites pour d’autres siècles, soient remplacées par des lois sages qui assurent l’honneur et la vie des citoyens, et fixent irrévocablement leurs droits et leurs fortunes , de manière à éviter à l’avenir tout arbitraire et méprise judiciaire, et les garantir des ressources fécondes de la chicane. Ilsvous demanderont aussi que les droits de votre domaine, inintelligible pour votre peuple, et même pour les gens les plus versés dans les affaires, soient restreints et expliqués d’une façon claire et précise à ne plus laisser de doute et d’arbitraire dans la perception qu’en feront vos préposés. « Les habitants de ce bailliage, qui se voient enlever, par les seigneurs décimateurs, les fruits de leurs travaux, par les dîmes immodérées appelées percières, vous en demanderont la suppression, ainsi que de la dîme ordinaire, sous les sou-missio ns* qu’ils font d’acquitter les portions congrues des curés et vicaires, et de fournir à toutes réparations, charges et entretien des paroisses. « Les cens étant pour votre peuple une des charges les plus onéreuses, et les habitants de ce bailliage se voyant dans l’impossibilité d’en demander la suppression par l’offre d’en faire le rachat, vous supplierontnéanmoins de les dégager de l’article de la solidarité, qui est la source d’une infinité de vexations et de procès. « Depuis longtemps, votre cœur paternel gémit, Sire, de l’espèce de guerre intestine qui règne parmi vos sujets, et qu’occasionne la gabelle odieuse pour tous vos peuples. Ils vous demanderont la suppression de ce fléau destructeur, qui enlève à l’agricultureles bras les plus nerveux, etoccasionne dans les campagnes les plus grands désordres. Ils espèrent, Sire, que vous aurez égard aux affranchissements acquis par vos provinces, et que les taxes lre Série, T. Y. qui seront faites en remplacement ne porteront que sur ceux de vos sujets en faveur de qui l’exception n’a pas été prononcée. « Les habitants de ce bailliage voient avec peine que son ressort de la plus petite étendue est formé de différentes parties de paroisses ou de collectes, et qu’une même paroisse dépend de deux, même de trois juridictions. Embarrassés dans les réclamations qu’ils ont à faire, ils ignorent souvent à quel tribunal ils doivent s’adresser, et la mauvaise foi, profitant de tout, se sert fréquemment de ce prétexte pour des difficultés, et éloigner sa condamnation : c’est pourquoi ils vous demanderont, Sire, que vous leviez, à leur égard, cet inconvénient. « Les habitants des paroisses et collectes de Peyrousse et Ghassière, dépendant de la justice de Beauvoir, réclamée par le bailliage de Montaigut et la sénéchaussée de Moulins, qui se disputent le ressort, se trouvent dans la perplexité la plus désagréable, formant le patrimoine du bailliage de Montaigut, suivant qu’il est attesté par le père Anselme, qui rapporte la charte de concession de la justice de Beauvoir à la charge du ressort à Montaigut, et encore suivant qu’il a été constaté par M. Follet, commissaire du Roi, pour le relevé général du duché de Bourbonnais fait en 1568, qui comprend expressément cette justice dans le ressort de Montaigut; les habitants de ces paroisses et collectes vous supplieront, Sire, de vouloir fixer leur sort d’une manière irrévocable, et tous les habitants vous demanderont, qu’en vous occupant de cette partie de l’administration de la chose publique, vous vouliez rapprocher les justiciables. de leurs juridictions; et pour cela, qu’il soit formé des arrondissements de justices royales assez considérables pour occuper les juges et les fixer particulièrement à leur état. « Tels sont, Sire, les vœux et les supplications que forment vos fidèles sujets habitant le bailliage royal de Montaigut, et qu’ils déposent aux pieds de votre trône. Puissiez-vous les accueillir favorablement; puissiez-vous les exaucer ; puissent aussi tous les ordres qui vont travailler concurremment avec vous au rétablissement et à la restauration de la chose publique, y porter les vues bienfaisantes qui vous animent ! Vos sujets seront assurés d’en voir naître le plus grand bien, heureux toujours du désir que vous avez, Sire, de faire le bonheur de votre peuple; il doit en concevoir l’espérance, et il vous en décerne par avance le prix, en vous plaçant à côté des rois Louis XII et Henri IV, et en vous surnommant comme eux le Père du peuple. » La minute, déposée au greffe du bailliage royal de Montaigut, est signée Baret du Coudert ; Richard; Thevenin; Panin; Rougeron; Boutin; Rame; Bernard; Jouhet; Gaby; Sinturel ; Sivade; Malleret ; Bidou ; Guiot ; Durin ; Baynal ; Midon ; Audrivon ; Varrin ; Cailher ; Monin“; Nigou-Sole , Labarre ; Moureau et Rondaire , greffier. Expédié et collationné par nous, greffier du bailliage royal de Montaigut, sur la minute déposée en ce greffe, à MM. les députés pour l’assemblée générale de la sénéchaussée de Riom. Signé Rondaire, greffier ; Baret du Coudert; Richard; Thevenin; Panin; Rougeron; Rame; Bidou; Sinturel ; Malleret et Jouhet. Expédié à M. Dufraisse-Duchey, lieutenant général, président de l’assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d’Auvergne, par moi, secrétaire greffier de ladite assemblée. Signé FAUCON. 37 578 [Etais gén. 1789. Cahiers,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom. CAHIER Des doléances, vœux et réclamations des villes, paroisses et communes de la châtellenie royale d’Ussonet Nonette, première et principale d'Auvergne; moyen de remédier à l'état actuel des finances, et d’établir un ordre dans certaines parties du gouvernement (1). Puîsqu’il est, permis a n moindre des sujets de faire entendre sa voix des extrémités du royaume, et que le monarque, moins roi que père de son peuple, veut bien, pour ainsi dire, descendre de son trône pour le consulter sur les difficultés où il se trouve relativement à l’état de ses finances, soit sur l’ordre qu’il veut établir dans toutes les parties du gouvernement, qui intéressent le bonheur de ses sujets et la prospérité du royaume, soit enfin sur leurs besoins particuliers, leurs vœux et réclamations, les villes, paroisses et communautés de la châtellenie royale d’Usson et Nonette, pénétrées de reconnaissance, exposeront, avec toute la confiance que leur inspire la promesse sacrée d’un roi qu’elles chérissent, le sujet de leurs vœux et doléances, pour répondre, autant qu’il est en elles, au désir et à l’attente de Sa Majesté; elles s’occuperont de chaque objet en particulier. Leur voix est faible, mais elle est l’organe de la vérité; et, passant par la bouche des députés pour l’assemblée des Etats généraux, elle acquerra un nouveau degré de force. Moyens de remédier à l'état actuel des finances, et de soulager le tiers-état. Ce n’est pas en établissant de nouveaux impôts que l’on peut remédier au mauvais état où se trouvent actuellement les finances; ceux sous le poids desquels la France entière gémit depuis longtemps sont au delà de ses forces ; un nouvel impôt, en accablant le peuple, renverserait les plus fermes soutiens de la monarchie. Il est des moyens moins violents, indiqués par les justiciables de cette châtellenie. Le premier serait, sans doute, d’ôter cette différence qui se trouve entre les deux premiers ordres et le tiers-état, en les faisant également contribuer aux besoins de l’Etat. Tout Français y est obligé sans doute ; c’est une dette qu’il* contracte en naissant, et qu’il ratifié encore plus strictement, en restant dans son sein. L'inégalité choquante qui a régné jusqu’à présent entre les tributs que payent les deux premiers ordres de l’Etat, et le tiers-état, les villes franches abonnées où privilégiées, et celles qui ne le sont pas, répugne à la nature, tend au découragement. Il n’est pas juste que la classe des citoyens la moins riche, la plus laborieuse, la mère nourricière des deux autres, celle qui vivifie l’agriculture, le commerce et les arts, supporte seule tout le fardeau. Cette inégalité a été entantée par les privilèges de toute espèce dont jouissent les deux premiers ordres : exemption de cote personnelle, au moyen de laquelle ils affranchissent leurs rentes, leurs dîmes, leurs censives, et les autres droits de leur directe ; exemption de contribuer aux corvées et chemins ; privilège de faire valoir des terres sans payer aucune rétribution, ce sont autant de prérogatives qui ne peuvent tendre qu’au détriment de tout l’État, en accablant le tiers-état. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. On peut dire la même chose des villes privilégiées, franches ou abonnées. Pourquoi le fardeau auquel elle devraient contribuer rejaillit-il sur les villes qui n’ont pas le même avantage? Est-ce parce qu’elles sont commerçantes, fréquentées, peuplées ; qu’elles ont des hôtels somptueux, des palais, des tribunaux, des académies ,’ qu’elles sont opulentes? Et c’est là précisément une raison pour ne ne pas les exempter. En rétablissant donc l’égalité qui doit régner entre tous les sujets d’un même souverain, il est visible que l’on trouverait un moyen aussi facile que simple de rétablir les finances, et, en même temps, de soulager le peuple qui supporte seul tout le fardeau, qu’on allégerait encore en supprimant tous les receveurs, tant généraux que particuliers, de finances, ainsi que les fermiers généraux, et établissant, dans chaque province, un seul receveur général, chargé de verser immédiatement dans la caisse de l’Etat les seuls fonds qui ne doivent point revenir dans la province, et comptable envers les Etats provinciaux du surplus des fonds destinés aux besoins d’icelle en augmentant les droits du contrôle sur les métaux précieux comme objets de luxe, sur les cartes, ainsi que par le moyen d’une imposition sur divers objets de luxe, par la rentrée du Roi dans ses domaines, ou du moins par les sommes proportionnelles aux revenus des terres domaniales que seraient tenus de donner, les, divers seigneurs engagistes, à raison des parties domaniales qu’ils ont achetées à vil prix. En cela, les prérogatives des deux premiers ordres ne sauraient être blessées : les richesses territoriales, les honneurs, les dignités, les grâces, les retraites, les gouvernements, les écoles gratuites, les fondations pour les demoiselles, les chapitres richement dotés, les établissements de tous genres ; et il resterait par dessus tout à ceux ui auraient bien mérité de leur patrie, l’honneur e l’avoir servie utilement, privilège qui vaut seul tous les autres, et dont un véritable Français sent si bien le prix. Le second moyen de rétablir les finances, serait de retrancher les pensions onéreuses qui ne sont dues qü’à la faveur et au Crédit. Enfin, il en est un autre, non moins efficace, c’est de séculariser certains ordres qui, s’étant éloignés de ieur première institution, sont devenus inutiles à la société, et qui pourraient la servir utilement, redevenant citoyens ; qu’on devrait les tous pensionner, efle surplus de leurs immenses revenus serviraient â amortir une partie des dettes de l’Etat. Réflexions touchant l’ordre à établir dans plusieurs parties du gouvernement. La première réflexion que présentent les villes et communes de cette châtellenie, est, dlabord, que, dans un Etat monarchique, il ne doit être établi aucun impôt qu’il n’ait, été préalablement consenti par la nation assemblée, et que les ministres doivent être garants des sommes levées sur le peuple. Quant à l’égalité dans la répartition de l’impôt entre les trois ordres de l’Etat, on en a déjà parlé. Mais il est une autre égalité que la province a également droit de réclamer; elle paye, depuis longtemps, des vingtièmes et deux sous pour livre, que d’autres provinces ne payent point. On ne voit pas d’autres raisons de cette différence, que la résistance qu’ont faite leurs parlements à enregistrer la loi qui ordonnait la levée de cet impôt. 11 est d’ailleurs d’aütaht plus onéreux qüé les ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom.J 579 [États gén. 1789. Cahiers.] gratifications des contrôleurs des vingtièmes, étant proportionnées à raccroissement de l’imposition, la délicatesse ne saurait être qu’un frein impuissant pour les retenir dans leurs devoirs, exemple qui reçoit également son application aux autres emplois dont les gratifications sont aussi proportionnées à. leur perception. . Enfin, les rôles des vingtièmes étant formés sur les rôles des tailles, les taillables payent les vingtièmes des rentes sur lesquels les rentiers se sont déjà retenus, et ceux de leur travail et de leurs facultés mobilières, dont ils sont obligés de faire l’avance pour l’exploitation de leurs biens ruraux. L’administration de la justice est un objet qui est également aussi important pour mériter les regards du prince. Depuis longtemps la nation désire un code civil qui embrasse toutes les matières, qui éclaire les citoyens sur leurs intérêts, et qui assurent leurs conventions; un code criminel qui fixe les droits de l’humanité, et abolisse ces procédures secrètes et suspectes; un code qui débarasse les procédures de ces subterfuges et de ces labyrinthes indignes de servir d’instrument à la justice. Mais qu’il serait à désirer qu’en travaillant à un si bel ouvrage, on cherchât, en même temps, les moyens de rendre l’accès üe la justice plus facile, en proscrivant, comme indigne du prince qui nous gouverne, la vénalité des charges de ju-dicature, qui cause tant de maux, et en rendant aux sujets gratuitement une justice qui n’est pas faite pour êire achetée ! Un abus, qu’il est aussi urgent de réformeraient des disputes qui naissent fréquemment entre _ les différents tribunaux au sujet de la prévention. Combien ne serait-il pas à désirer qu’on terminât pour toujours ces querelles scandaleuses, en forçant les tribunaux supérieurs à se renfermer dans les bornes de l’autorité qu’on leur a confiée, et que l’intérêt des justiciables leur prescrit, et à ne point intervertir l’ordre que l’intérêt public a fait établir. On n’entreprendra point ici de faire le tableau de tous les abus qui se sont glissés dans l’administration de la justice; mais on ne peut passer sous silence l’abus qui règne dans l’établissement des justices seigneuriales, qui ne doit, sans doute, naissance qu’à ces temps d’anarchie féodale, dont on abhorre jusqu’au souvenir. Il est temps, enfin, que le prince apprenne ses droits, qui sont imprescriptibles, comme ceux de la nation : le droit qui rend le souverain semblable à la divinité, le droit de rendre lui-même la justice à ses sujets, pour obvier aux abus que les officiers seigneuriaux sont dans le cas de tolérer par une crainte de la révocation de la part du seigneur qui même n’a ni auditoire ni prisons. L’établissement d’une cour souveraine dans les provinces où il n’y en a point, est un autre objet qui n’est pas moins intéressant pour le bien de l’Etat. L’Auvergne, privée de cet avantage, ne cesse de gémir de se voir forcée d’aller réclamer, à plus de cent lieues, une justice qui pourrait être plus prompte et plus facile. Mais le rétablissement des Etats provinciaux, dont jouissent d’autres provinces, est surtout ce que l’Auvergne a le plus de droit de réclamer ; par sa fidélité inviolable à son prince, elle ne mérite pas moins que tant d’autres sa protection et ses bontés. Comment ne pas parler de l’abus des lettres de cachet et des prisons d’Etat, qui ne servent souvent qu’à assouvir les vengeances particulières des ministres ; du refus que font les cours d’admettre-dans leur sein des roturiers, qui sont exclusivement les juges naturels du tiers-état ; de l’exclusion des places, que la noblesse s’est appropriées, comme s’il n’y avait qu’elle qui pût les mériter, et si, quand il s’agit de servir le Roi ou la patrie, tout Français n’était pas noble ; de ces droits onéreux, tels que les aides, gabelles et douanes, qui gênent le commerce et la circulation intérieure ; de ces autres droits, non moins onéreux, tels que la banalité des fours, pressoirs et moulins, droits de leyde, péages banvin, de mainmorte et droits usurpés et qui septent si fort la servitude, dont ils ont pris naissance, droits que tout Français abhorre, et dont le rachat devrait être permis ? O11 ne peut passer sous silence l’abus qui résulte de l’interdiction où sont les corps et communautés d’aliéner, de la pluralité des bénéfices sur une même tête, et de l’avilissement du bas clergé, qui en est une suite, de la cumulation des charges et emplois, qui fait qu’ils sont mal exercés, et qui rend un seul individu l’arbitre souverain des conventions les plus sacrées et de la fortune des citoyens. On ne parle plus des greniers d’abondance, qu’on devrait établir dans la province pour soutenir les denrées de première nécessité à un prix honnête, et pour en prévenir la disette, ainsi que de plusieurs autres établissements utiles, dont la sagesse des Etats provinciaux s’occupera probablement dès qu’ils seront rétablis. Mais on ne doit pas passer sous silence la nécessité d’une réforme dans le code militaire, afin que le soldat, mieux payé, puisse aspirer et parvenir, par son mérite, aux honneurs et grades supérieurs; la nécessité des maréchaussées, soit à cheval, soit à pied, dans lesquelles on ne devrait admettre que d’anciens militaires, qui eussent bien mérité de la patrie ; la suppression, ou, du moins, un régime moins avilissant pour le tiers-état dans la milice qui est levée dans la province. Enfin, on passera sous silence mille et mille autres abus à corriger et mille réformes qui sont à faire. Des objets importants ne sauraient échapper à l’œil éclairé et vigilant du ministre protecteur de la France, qui, de concert avec le monarque qui la gouverne, ne veille, jour et nuit, que pour faire sa félicité et son bonheur. Après avoir parlé du bien général, on va passer à ce qui regarde plus particulièrement le bien des villes, communes et paroisses de la châtellenie d’Usson et Nonette. Doléances, vœux et réclamations des paroisses du bailliage de la ville d’ Usson et Nonette Toutes les communes et paroisses de ce bailliage se réunissent sans exception à réclamer contre l’immensité des impôts en tout genre, contre le mode de la perception des impôts par la voie des garnisons multipliées qui portent ordinairement sur les plus pauvres du tiers-état, dont la taille se trouve quelquefois doublée par ce moyen. Quoique la province entière gémisse sous un fardeau si pesant, l’élection d’Issoire , où se trouvent les communes de cette châtellenie, est encore bien plus chargée en proportion. En effet, que l’on prenne pour comparaison un habitant de l’élection de Clermont , possesseur d’un domaine de 20,000 livres, et qu’on fasse le parallèle, soit de sa cote personnelle, soit de sa cote d’exploitation de son domaine, avec celle ! d’un habitant «de l’élection d’Issoire, et l’on re- .580 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Riom. marquera que le premier ne paye pas le quart de ce que paye le dernier. Cette différence ne peut provenir que de la faveur et du crédit. Mais c’est bien pis, si l’on met en parallèle un habitant de l’une des capitales avec un habitant de village; on voit l’un avoir des possessions immenses, faire un commerce considérable, avoir des hôtels somptueux, et ne supporter que peu d’impôts; l’autre, au contraire, réduit à une simple chaumière, trouvant à peine sa subsistance et celle de sa famille dans un travail forcé, est chargé d’impôts. Ce qui achève d’aggraver le sort du tiers-état qui habite l’élection d’Issoire, c’est la multiplicité des privilèges, qui abondent plus qu’en toutes autres élections, outre que ces privilégiés sont exempts de cote personnelle, que leurs rentes constituées échappent à l’impôt, qu’ils ne payent rien pour les corvées et chemins publics, quoiqu’ils soient beaucoup plus à leurs usages, et qu’ils ont même étendu ce privilège à leurs droits de directe, à leurs dîmes; et comme ils ont des possessions immenses, ils placent encore leurs privilèges de quatre charrues sur les meilleurs fonds, ceux, par conséquent, qui, à raison de leur produit, devraient supporter davantage, et font ainsi retomber tout le poids du fardeau sur les plus mauvais fonds possédés ordinairement par le tiers-état. Ce n’est pas tout : la capitation des privilégiés était autrefois fixée et déterminée; aujourd’hui, et depuis 1781, au contraire, on impose, d’abord, secrètement la capitation sur les non privilégiés au marc la livre de l’autre taille, et le surplus, seulement, sur les privilégiés, de manière que si le principal de la taille pouvait éprouver une augmentation, le montant de la capitation serait absorbé sur les taillables, et qu’il n’en resterait rien pour les privilégiés. Ces injustices ne sont pas les seules : il règne dans la répartition de la taille de l’élection d’issoire les mêmes injustices. En effet, dans, la distribution particulière de la taille de cette élection, on ne fait pas attention que la plupart des communes de la châtellenie d’Usson sont asservies à des cens considérables, à d’autres droits onéreux, des directes et des dîmes, etc. ; lesquelles communes ne sont situées que sur des rocs, presque découverts, qui ne produisent pas même des pacages pour les bestiaux; que les quelques autres n’ont qu’un terrain pierreux et argileux, et qu’enfin, presque toutes étant situées sur des côtes et montagnes, outre la douleur de voir le peu de terrain, qui n’est autre chose lui-même que du rocher, converti en terre à force d’art et de travail, entraîné par les torrents, ravins et inondations, qui ne laissent aucun espoir de récolte pour l’année et pour plusieurs autres. Qu’à raison de leur position, à défaut de rivière, de chemins praticables, de foires, de marchés, de manufactures, et de l’éloignement de villes commerçantes, elles ne peuvent, non-seulement faire aucun commerce, pas même le débit de leurs denrées, pour l’employer, soit à leur subsistance, soit au payement des impôts auxquels ils sont assujettis. Que la misère force les habitants à s’expatrier, et y cause une dépopulation dont des vestiges de villages, de vieilles masures attestent la réalité. Un autre sujet de doléances de toutes les communes, est que les forains, qui possèdent la majeure partie des biens, ne soient imposés, dans les rôles des paroisses où sont situés les biens, qu’à mi-tarif ; ce qui fait que les paroisses où ils ne font pas leur domicile sont souvent grevées , et que d’ailleurs le forain échappe à l’impôt par ces sortes de transport, et quelques-uns par des cotes d’office; qu’on les force à contribuer à la confection et réfection tant des chemins des autres provinces du royaume, que de ceux de l’Auvergne, dont d’autres' communes ressentent l’avantage ; et que des sommes considérables, qu’elles supportent à raison de ces chemins, on ne lui en attribue pas même une faible portion pour lui ouvrir des débouchés et un commerce, en leur facilitant la communication avec les autres villes et lieux voisins. Telles sont les plaintes et doléances de toutes les paroisses de la châtellenie d’Usson et Nonette en général ; mais il en est quelques-unes qui ont des sujets particuliers de plaintes. Celles d’Usson et de Nonette se plaignent ; 1° de ce qu’elles n’ont aucuns deniers patrimoniaux pour les nécessitésde leurs villes ; 2° de ce qu’elles n’ont ni foires, ni marchés, ni chemins pour communiquer avec les villes principales; 3° de ce que la justice a été démembrée et aliénée à différents seigneurs en grande partie, et de ce qu’elle ne reçoit pas même les appels de ses justices démembrées ; 4° de la difficulté qu’il y a d’être obligé d’aller faire sceller ou contrôler au bureau d’Issoire, éloigné de deux lieues , et séparé par la rivière d’Allier, souvent impraticable, faute d’un bureau établi à Usson ; cette ville observe que le jeudi de chaque semaine serait le plus convenable pour les marchés , et les 1 5 mars et 3 novembre pour les deux foires qu’elle réclame. La ville de Nonette, en son particulier, demande le rétablissement de ses foires, de ses marchés, de son bureau de contrôle, de ses matrices, et surtout de la châtellenie royale avec ses dépendances. La municipalité de Condat demande, pour sa part, d’avoir son sel franc, et d’être dégagée des entraves de la petite gabelle; et toutes les municipalités observent qu’il serait avantageux à l’Etat de les affranchir d’impôts de mauvais terrains qu’ils sèmeraient en bois, sauf à les imposer à la première coupe ; et qu’aucune d’elles ne peuvent au besoin trouver des places dans les hôpitaux, quoiqu’elles en supportent les charges, et contribuent à leur entretien. Arrêté en l’assemblée générale du tiers-état de la châtellenie royale d’Usson et de Nonette, première et principale d’Auvergne, et sénéchaussée secondaire en cette partie, et ont signé ceux des membres qui ont su le faire, le 10 mars 1789, entour six heures du soir ; Christophe, lieutenant général d’Usson et Nonette, sans approuver la réclamation du comté de Nonette pour le démembrement de cette justice , ayant été procédé à la réunion en considération de cause, par édit de 1781 ; Filère, procureur du Roi; Cathol, syndic ; Gayte la Rigaudie ; Amarython de Beau - rëgard; Pineau, docteur en médecine ; Rochon du Verdier; Foughasse; Fayolle; Girou; Bou-rasset ; Raymond ; Roubille ; Peuf ; Marsepoil ; Peuf et Roubille. Et à la marge est écrit : Paraphé ne varietur, suivant notre procès-verbal de ce jour, fait le 10 mars 1789. Signé Christophe. Expédié à M. Dufraisse Buchey, lieutenant général, président de l’assemblée du tiers-état de la sénéchaussée d’Auvergne, par moi, secrétaire-greffier de ladite assemblée. Signé Faucon.