SÉANCE DU 5 MESSIDOR AN H (23 JUIN 1794) - N° 60 133 moignage éclatant de la reconnaissance publique, en faisant écrire à sa famille une lettre de satisfaction par votre président. Vous placerez aussi sous le glaive de la loi les perfides meurtriers de Malignon père et leurs barbares complices. Vous ordonnerez leur traduction au tribunal révolutionnaire, qui seul doit connaître les attentats commis envers le patriotisme. Ce serait assurer l’impunité aux assassins de Malignon que de les laisser devant le tribunal criminel du département de l’Ardèche, dont les membres, si l’on excepte l’accusateur public, n’ont jamais dissimulé leur haine pour la révolution, et ont fort bien répondu aux insinuations de certains conspirateurs en se constituant, dans toutes les occasions, en tribunal de clémence, ou plutôt d’absolution de tous les ennemis du peuple. Félicitez-vous d’avoir ordonné, par 2 décrets, l’examen de la conduite de ces juges prévaricateurs. En frappant les assassins du patriote Malignon, vous frapperez cette faction infernale de l’étranger, qui a soufflé sa rage dans les cœurs, qui médite, qui dirige tous les crimes, qui soudoie parmi nous des scélérats de toutes les couleurs. Elle voulut dès les premiers temps étouffer la liberté dans son berceau; aujourd’hui elle voudrait la ruiner dans son triomphe même. Elle tient à sa solde les alarmistes qui découragent; les indulgents qui préconisent audacieusement la liberté de conspirer, les assassins qui privent le peuple de ses plus ardents défenseurs, les calomniateurs qui percent de leurs traits envenimés ceux que le fer des assassins ne peut atteindre, les diviseurs qui tentent d’allumer la guerre civile, et de perdre la représentation nationale en la divisant. C’est avec cette horde de conspirateurs, de traîtres, de monstres, qu’elle entreprend d’anéantir le gouvernement révolutionnaire, ce puissant et seul moyen de salut, la cause de nos victoires, le boulevard de la liberté, le désespoir de Pitt, l’effroi des tyrans, l’écueil où viennent se briser tous leurs horribles complots. Représentants du peuple, voulez-vous perdre la faction exécrable de l’étranger, voulez-vous déconcerter tous les scélérats qu’elle met journellement en action; ralliez-vous au gouvernement révolutionnaire ! La liberté ne peut périr sans doute, puisqu’elle a pour appui la vertu et la volonté toute-puissante du peuple; mais ces combats peuvent se prolonger et devenir pénibles. Abrégez-en la durée, et accélérez la défaite de ses ennemis. Il ne vous reste qu’un pas à faire : vous touchez déjà la victoire; gardez-vous de rétrograder. Représentants du peuple, patriotes, vous tous amis sincères de la liberté, songez que l’union seule fait votre force; serrons-nous plus que jamais; soyons sourds à toutes les suggestions, poursuivons sans relâche la faction qui veut perdre la liberté, regardons, frappons comme ennemi du peuple tout ennemi du gouvernement révolutionnaire qui le défend des attentats de la tyrannie, et cependant honorons et vengeons ceux qui sont tombés sous ses coups, victimes de leur dévouement héroïque (1) . [Applaudissements] . (1) Mon., XXI, 45; J. Univ., n°s 1673, 1674. [COUTHON] propose ensuite un projet de décret, qui a été adopté ainsi qu’il suit: « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du comité de salut public, décrète : «Art. I. Le nom de Vincent Malignon, agent national de la commune de Cruzières-Saint-André, assassiné lâchement par d’infâmes contre-révolutionnaires, le 2 floréal de l’an II de la République française, sera inscrit sur la colonne du Panthéon. « II. La Convention nationale charge son président d’écrire une lettre de consolation à la famille de ce martyr de la liberté, dans laquelle le président exprimera en même temps la satisfaction de la Convention pour la conduite héroïque que Malignon fils a tenue au siège de Toulon. « III. La veuve et les enfans de Vincent Malignon jouiront d’une pension de 300 liv. chacun, payable par quartier et d’avance, sur la présentation du présent décret, à compter du 2 floréal dernier, jour de l’événement affreux qui les priva de leur époux et père. «IV. Tous les individus arrêtés comme prévenus d’être les auteurs ou complices de l’assassinat de Vincent Malignon, seront traduits sur-le-champ au tribunal révolutionnaire, pour y être jugés sans délai; l’accusateur public fera les diligences nécessaires pour découvrir les autres auteurs et complices de cet attentat, et les fera pareillement traduire au tribunal révolutionnaire pour y subir aussitôt leur jugement. « V. Le nom de la commune de Cruzières-Saint-André est supprimé, et remplacé par la dénomination de commune de Claisse, du nom de la rivière qui arrose son territoire. « VI. L’insertion du présent décret au bulletin tiendra lieu de publication. » Un membre demande l’impression et la distribution du rapport, et son insertion au bulletin. Cette proposition est décrétée. [Applaudissements] (1). [St-Martin observe que ce fut sur son rapport que la convention accorda à Malignon une indemnité provisoire de 2000 liv. pour les pertes qu’il avoit essuyées, et que l’indemnité totale étoit beaucoup plus considérable; il pense qu’elle s’élevoit à 15000 liv.; il pense encore qu’il seroit juste d’accorder aux héritiers du patriote Malignon le supplément de l’indemnité. — Bréard est du même avis; il demande que l’on saisisse cette occasion d’acquitter la patrie envers Malignon. — On observe que l’on n’est pas très-fixé sur la quotité de la somme] (2). Un membre [St. MARTIN] observe que la maison du patriote Malignon ayant été pillée et incendiée lors des troubles occasionnés par la rébellion du traître Saillant, la Convention nationale n’a point encore prononcé sur la pétition, en indemnité, que ce patriote lui avoit présentée; que seulement elle lui avoit, par décret du 3 septembre 1793 (vieux style), (1) P.V., XL, 112. Minute de la main de Couthon. Décret n° 9637 (C 307, pl. 1175, p. 15 et 16). (2) Débats, n° 641. SÉANCE DU 5 MESSIDOR AN H (23 JUIN 1794) - N° 60 133 moignage éclatant de la reconnaissance publique, en faisant écrire à sa famille une lettre de satisfaction par votre président. Vous placerez aussi sous le glaive de la loi les perfides meurtriers de Malignon père et leurs barbares complices. Vous ordonnerez leur traduction au tribunal révolutionnaire, qui seul doit connaître les attentats commis envers le patriotisme. Ce serait assurer l’impunité aux assassins de Malignon que de les laisser devant le tribunal criminel du département de l’Ardèche, dont les membres, si l’on excepte l’accusateur public, n’ont jamais dissimulé leur haine pour la révolution, et ont fort bien répondu aux insinuations de certains conspirateurs en se constituant, dans toutes les occasions, en tribunal de clémence, ou plutôt d’absolution de tous les ennemis du peuple. Félicitez-vous d’avoir ordonné, par 2 décrets, l’examen de la conduite de ces juges prévaricateurs. En frappant les assassins du patriote Malignon, vous frapperez cette faction infernale de l’étranger, qui a soufflé sa rage dans les cœurs, qui médite, qui dirige tous les crimes, qui soudoie parmi nous des scélérats de toutes les couleurs. Elle voulut dès les premiers temps étouffer la liberté dans son berceau; aujourd’hui elle voudrait la ruiner dans son triomphe même. Elle tient à sa solde les alarmistes qui découragent; les indulgents qui préconisent audacieusement la liberté de conspirer, les assassins qui privent le peuple de ses plus ardents défenseurs, les calomniateurs qui percent de leurs traits envenimés ceux que le fer des assassins ne peut atteindre, les diviseurs qui tentent d’allumer la guerre civile, et de perdre la représentation nationale en la divisant. C’est avec cette horde de conspirateurs, de traîtres, de monstres, qu’elle entreprend d’anéantir le gouvernement révolutionnaire, ce puissant et seul moyen de salut, la cause de nos victoires, le boulevard de la liberté, le désespoir de Pitt, l’effroi des tyrans, l’écueil où viennent se briser tous leurs horribles complots. Représentants du peuple, voulez-vous perdre la faction exécrable de l’étranger, voulez-vous déconcerter tous les scélérats qu’elle met journellement en action; ralliez-vous au gouvernement révolutionnaire ! La liberté ne peut périr sans doute, puisqu’elle a pour appui la vertu et la volonté toute-puissante du peuple; mais ces combats peuvent se prolonger et devenir pénibles. Abrégez-en la durée, et accélérez la défaite de ses ennemis. Il ne vous reste qu’un pas à faire : vous touchez déjà la victoire; gardez-vous de rétrograder. Représentants du peuple, patriotes, vous tous amis sincères de la liberté, songez que l’union seule fait votre force; serrons-nous plus que jamais; soyons sourds à toutes les suggestions, poursuivons sans relâche la faction qui veut perdre la liberté, regardons, frappons comme ennemi du peuple tout ennemi du gouvernement révolutionnaire qui le défend des attentats de la tyrannie, et cependant honorons et vengeons ceux qui sont tombés sous ses coups, victimes de leur dévouement héroïque (1) . [Applaudissements] . (1) Mon., XXI, 45; J. Univ., n°s 1673, 1674. [COUTHON] propose ensuite un projet de décret, qui a été adopté ainsi qu’il suit: « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport du comité de salut public, décrète : «Art. I. Le nom de Vincent Malignon, agent national de la commune de Cruzières-Saint-André, assassiné lâchement par d’infâmes contre-révolutionnaires, le 2 floréal de l’an II de la République française, sera inscrit sur la colonne du Panthéon. « II. La Convention nationale charge son président d’écrire une lettre de consolation à la famille de ce martyr de la liberté, dans laquelle le président exprimera en même temps la satisfaction de la Convention pour la conduite héroïque que Malignon fils a tenue au siège de Toulon. « III. La veuve et les enfans de Vincent Malignon jouiront d’une pension de 300 liv. chacun, payable par quartier et d’avance, sur la présentation du présent décret, à compter du 2 floréal dernier, jour de l’événement affreux qui les priva de leur époux et père. «IV. Tous les individus arrêtés comme prévenus d’être les auteurs ou complices de l’assassinat de Vincent Malignon, seront traduits sur-le-champ au tribunal révolutionnaire, pour y être jugés sans délai; l’accusateur public fera les diligences nécessaires pour découvrir les autres auteurs et complices de cet attentat, et les fera pareillement traduire au tribunal révolutionnaire pour y subir aussitôt leur jugement. « V. Le nom de la commune de Cruzières-Saint-André est supprimé, et remplacé par la dénomination de commune de Claisse, du nom de la rivière qui arrose son territoire. « VI. L’insertion du présent décret au bulletin tiendra lieu de publication. » Un membre demande l’impression et la distribution du rapport, et son insertion au bulletin. Cette proposition est décrétée. [Applaudissements] (1). [St-Martin observe que ce fut sur son rapport que la convention accorda à Malignon une indemnité provisoire de 2000 liv. pour les pertes qu’il avoit essuyées, et que l’indemnité totale étoit beaucoup plus considérable; il pense qu’elle s’élevoit à 15000 liv.; il pense encore qu’il seroit juste d’accorder aux héritiers du patriote Malignon le supplément de l’indemnité. — Bréard est du même avis; il demande que l’on saisisse cette occasion d’acquitter la patrie envers Malignon. — On observe que l’on n’est pas très-fixé sur la quotité de la somme] (2). Un membre [St. MARTIN] observe que la maison du patriote Malignon ayant été pillée et incendiée lors des troubles occasionnés par la rébellion du traître Saillant, la Convention nationale n’a point encore prononcé sur la pétition, en indemnité, que ce patriote lui avoit présentée; que seulement elle lui avoit, par décret du 3 septembre 1793 (vieux style), (1) P.V., XL, 112. Minute de la main de Couthon. Décret n° 9637 (C 307, pl. 1175, p. 15 et 16). (2) Débats, n° 641.