[Assemblée nàtiOtt&lé.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19aoAtl790,] 4 tioil ; car il serait bien étrange que l’on eût en France de plus fortes raisons qu’en Russie, de mettre à mort les coupables, et que ces raisons fussent tellement évidentes qu’elles ne permissent pas même la discussion. Je crois donc, Messieurs, que cette question ne doit être décidée qu’après l’examen le plus sévère, puisque vous avez promis que les peines que vous établiriez seraient modérées, Vous avez déclaré que la loi ne doit prononcer que des peines évidemment nécessaires ; il faut donc se convaincre, que, dans certaius cas, il est indispensable de punir de mort. Vous avez pris pouf base de votre Constitution, les principes immuables du droit naturel; il faut donc examiner si la peine de mort peut s’accommoder avec ces principes. Vous vous proposez de faire un nouveau code pénal; il faut, donc s’assurer avant tout, quel doit être le caractère, l’objet et l’effet des punitions légales. Mais surtout, Messieurs, vous devez observer avec soin, jusqu’où s’étendent à cet égard les droits des législateurs, s’ils ne dépassent pas leur pouvoir en établissant la peine capitale et si, en voulant maintenir la paix et la sécurité dans l’ordre social, ils n’outrageraient pas l’humanité dans ses droits naturels et sacrés. Quand vous aurez examiné cette question sous tous les rapports que je viens d’indiquer* ce sera alors que vous pourrez asseoir les fondements de vos lois pénales. Avant cet examen préliminaire* vous risquez de prendre pour des vérités démontrées, d< s préjugés reçus, mais qui disparaîtront au flambeau de la discussion. Au reste, Messieurs, il s’agit ici du plus précieux de tous les intérêts, il s’agit de la vie de l’homme. Cette réflexion suffit pour faire sentir le danger d’une délibération précipitée. D’ailleurs, il résultera d’une discussion profonde de cette grande question, l’une de ces deux choses. Vous vous convaincrez que vous devez établir la peine de mort et ainsi vous justifierez à vous-mêmes vos propres décrets, ou bien vous jugerez que vous ne devez pas l’admettre, et alors vous aurez la gloire d’avoir respecté les droits de l’homme en punissant les coupables* Je demande donc que tous les articles du projet qui prononcent la peine de mort soient ajournés, que l’Assemblée mette à l’ordre du jour, qu’il lui plaira de fixer, cette question constitutionnelle : « La peine capitale sera-t-elle admise au rang des peines légales dans la jurisprudence française? » Si l’Assemblée adopte cette motion, je la prie de m’accorder la parole le premier pour la négative. M. de La Touche. La motion qui vient d’être faite serait toute dans les souhaits des lâches et des criminels. Je demande l’adoption pure et simple de l’article 5 proposé par le comité. (L'article 5 est mis aux voix et adopté sans changement.) M. de Champagne, rapporteur , continue la lecture des articles aiusi qu’il suit : « Art. 6. L’homme condamné à la mort, et qui devra être exécuté à bord, sera fusillé sur la patte de l’ancre, jusqu’à ce que mort s’ensuive. {Adopté.) « Art. 7. Tout homme condamné aux galères pouf un temps quelconque, ne pourra plu» être employé sur les vaisseaux de l’Etat, en quelque qualité que ce soit. {Adopté.) « Art. 8. Tout officier-marinier condamné à la bouline ou à la cale, sera, par l’effet même de cette condamnation, cassé de son grade d’officier-marinier, et réduit à la basse paye de matelot. Tout matelot qui aura subi une pareille condamnation, sera pareillement réduit à la basse paye. {Adopté . ) « Art. 9. Tout homme coupable d’avoir tenu des propos séditieux ou tendant à affaiblir le respect dû à tout genre d’autorité qui s’exerce à. bord du vaisseau ou de l’escadre, sera mis en prison pendant six jours. {Adopté.) « Art. 10. Tout nomme coupable d’avoir concerté aucun projet pour changer ou arrêter l’ordre du service, s’opposer à l’exécution d'un ordre donné ou d’une mesure prise, sera frappé de douze coups de corde au cabestan, et mis à la queue de l’équipage, et s’il est officier, sera renvoyé du service. {Adopte.) « Art. 11. Tout matelot ou officier-marinier, coupable d’un complot contre la sûreté ou la liberté d’un officier de l’état-major, sera condamné à trois ans de galères. {Adopté.) « Art. 12. Tout matelot, officier-marinier Oîi officier de Pélat-major, coupable d’un complot contre la sûrete, la liberté ou l’autorité du commandant du vaisseau, ou de tout autre officier occupant un poste supérieur, sera condamné aux galères perpétuelles. {Adopté.) « Art. 13. Tout homme coupable de trahison, ou d’avoir eu aucune intelligence perfide avec l’ennemi, sera condamné à la mort; et si quelque malheur public avait été la suite de ses mesures, il sera exécuté sur-le-champ à bord du vaisseau. {Adopté.) « Art. 14. Tout matelot oü officier-marinier, coupable d’une désobéissance envers l’officier de service, ou l’officier commandant, sera frapoé de douze coups de corde au Cabestan. {Adopté.) « Art. 15. Si la désobéissance est accompagnée d’injures et de menaces, le matelot ou officier-marinier qui s’en sera rendu coupable, sera condamné à la cale {Adopté.) « Art. 16. Tout matelot ou officier-marinier, coupable d’avoir levé la main contre un officier, sera condamné à trois ans de galères. {Adopté.) « Art. 17. Tout matelot ou officier-marinier, coupable d’avoir frappé un officier, sera condamné à la mort. {Adopté.) « Art. 18. Tout officier coupable d’avoir désobéi à son chef, et d’avoir accompagné sa désobéis-' sance d’un refus formellement énoncé d’obéir, sera mis au grade immédiatement inférieur à celui qu’il remplit. « Si la désobéissance est accompagnée d’injures et de menaces, il sera cassé; « Et sera, dans tous les cas, responsable sur sa tête des suites de sa désobéissance. {Adopté.) « Art. 19. Tout commandant d’un bâtiment de guerre, coupable d’avoir désobéi aux ordres ou aux signaux du commandant de l’armée, encadre ou division, sera privé de son commandement ; et si sa désobéissance occasionne uoe séparation* soit de son vaisseau, soit d’un autre vaisseau de l’escadre, il sera dégradé et déclaré indigne de servir. « Si elle a lieu en présence de l’ennemi, il serai condamné à la mort. » M. Robespierre. Je trouve un contraste étonnant entre les peines portées contre les matelots et celles contre les officiers* EsWfê d’apîè» 164 [Assemblée nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19aoû 1790.] l’égalité du droit que pour un même genre de délit on propose de donner la cale aux soldats. et simplement de casser les officiers? Si ces principes sont vrais, si ce sont ceux de la justice et de la liberté, je demande que les mêmes fautes soient punies par les mêmes peines; que si on les juge trop sévères pour les officiers, ou les supprime pour les soldats. M. Dcfermon. Si le préopinant avait comparé les articles, il aurait vu qu’il n’y a pas de disproportuin dans les peines. Les officiers sont punis par la perte de leur honneur, et c’est ce qu’un Français peut avoir de plus cher. (L’art. 19 est adopté.) « Art. 20. Tout matelot ou officier-marinier, coupable d’avoir quitté, dans le cours ordinaire du service, un poste particulier du vaisseau à la garde duquel il aurait été proposé; « Si c est pendant lejour, sera attaché au grand mât pendant une heure, et réduit à la paye immédiatement inférieure à la sienne ; « Si c’est pendant la nuit, il sera attaché au grand mât pendant deux jours, trois heures chaque jour, et sa paye éprouvera une réduction double de celle ci-dessus énoncée. » M. Robespierre. Le délit dont il est question dans l’article, est un des plus dangereux dont on pui'Se se rendre coupable dans le service militaire; ce délit ne doit-il pas être réparé par les peines les plus sévères, lorsque pour une simple faute de discipline vous condamnez le matelot à mort? M. de Murinais. On ne doit pas souffrir de factieux dans la tribune. Je demande que ce tribun du peuple soit rappelé à l’ordre. M. Robespierre. On criera aussi haut que l’on voudra, c’est le meilleur moyen d’étouffer la vérité. M. d’André. M. Robespierre n’a pas entendu les principaux décrets, car il aurait vu que l’égalité dont il parle si souvent avec tant de chaleur, n’est pas blessée dans les articles que l’on propose. Je demande, parexempie, si pour un même délit, lorsqu’on donne douze coups de câble à un soldat et que l’on casse i’oflicier, ce n’est px ans de service effectif sur mer, pendant lesquels il sera privé de tous les avancements auxquels il pourrait pié-teudre. « S’il n’est ni officier, ni officier-marinier, ni matelot, il payera, par forme d’amende, deux fois la valeur de la marchandise. « Dans tous les cas, la marchandise sera confisquée au profit de la caisse des Invalides. « Art. 26. Tout matelot ou officier-marinier, coupable d’avoir transporté à bord aucune matière imflammable, sans en avoir reçu l’ordre, sera frappé de douze coups de cordeau cabestan, et, en cas de récidive, aura la cale. t Art. 27. Tout homme coupable, d’avoir, en temps de guerre, allumé ou tenu allumé ries feux défendus, sans précaution, et de manière à compromettre lasûreté du vaisseau, sera cassé, s’il est oi licier ou officier-marinier ; recevra la cale, s’il est matelot, et dans le cas où il en aurait été fait défense expresse par une proclamation faite daus les formes ordinaires, o u si son action avait donné lieu à quelqu’accident ; de ce reconnu cou-