46 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. M. Enjubault, rapporteur , lit les articles 3, 4 et 5 qui sout décrétés, sans discussion, en ces termes : « Art. 3. La présente révocation aura son effet à l’instant même de la publication du présent décret, pour tous les droits ci-devant dits régaliens, ou qui participent de la nature de l’impôt, comme droits d’aides et autres y joints, contrôle, insinuation, centième denier, droits de nomination et de casualité des offices, amendes, confiscation, greffes et sceaux, et tous autres droits semblables dont les concessionnaires jouissent à titre d’apanage, d’engagement, d’abonnement ou de concession gratuite, sur quelques objets ou territoires qu’ils les exercent. « Art. 4. Les droits utiles meutionnésdans l’article précédent seront à l’instant même réunis aux finances nationales, et dès lors ils seront administrés, régis et perçus selon leur nature, par les commis, agents et préposés de compagnies établies par l’administration actuelle, dans la même forme, et à la charge de la même comptabilité que ceux dont la perception, régie et administration leur est respectivement confiée. « Art. 5. Les apanagistes continueront de jouir des domaines et droits fonciers compris dans leurs apanages, jusqu’au mois de janvier 1791 ; ils pourront même faire couper et exploiter à leur profit, dans les détails ordinaires, les portions de bois et futaies dûment aménagées, et dont les coupes étaient affectées à l’année présente par leurs lettres de concession, et par les évaluations faites en conséquence; en se conformant par eux aux procès-verbaux d’aménagement et aux ordonnances et règlements intervenus sur le fait des eaux et forêts. M. Enjubault, rapporteur. Voici la teneur de l’article 6 : « Art. 6. 11 sera payé tous les ans, à partir du premier janvier 1791, par le trésor national, à chacun des trois princes dont les apanages sont supprimés, tant à titre de remplacement que d’indemnité, si aucune leur est due, une rente apa-nagère d’un million pour chacun d’eux. » M. de Ea Touche (Le Vassor, ci-devant comte de). Je ne veux point apporter ici un intérêt contraire au bien public, mais réclamer la justice pour M. Louis-Philippe d’Orléans, qui, par ses sentiments, est un de ceux qui ont le plus contribué à la Révolution. (On applaudit dans une grande partie de la salle.) M. d’Orléans s’est rendu garant des dettes que lui a laissées son. père, dont il pouvait très bien refuser la succession. Avec quatre millions cent mille livres de rente, il pouvait les acquitter ; il lui était impossible de prévoir alors les changements qu’on ferait à sa fortune. Je demande donc que le comité des domaines se réunisse pouf aviser au payement des dettes dévolues à M. d’Orléans par la succession de son père. M. Camus. Je demande d’abord si ce sera le seul traitement qu’ils auront sur le Trésor public 7 M. Enjubault. Non, le traitement à assigner aux princes est renvoyé au comité des finances. M. Camus. Si l’on propose ensuite d’accorder un autre traitement aux princes, c’est une injustice sensible. Tous les apanages, si l’on en excepte un seul, ne se montaient pas à 1,000, 000 livres; il est vrai qu’ils avaient ensuite 3, 500, 000 li-[13 août 1790.] vres à partager entre la maison du prince et celle de la princesse. On donnait encore au prince pour son comptant 96,000 livres, à la priucesse 48,000 livres, pour ses étreunes 6,000 livres, pour la foire Saint-Germain 6,000 livres ; je liens entre mes mains l’état de dépense de la maison de M. d’Artois, en 1777, les sommes en sont énormes. On trouve à un article 497,000 livres pour l’écurie extraordinaire, 163,000 livres pour l’écurie anglaise, encore pour une autre écurie 60,000 livres. Est-ce donc pour cela qu’il faut fournir des sommes immenses, et être encore obligés de payer leurs dettes? Je demande qu’on fixe dès ce moment le montant du traitement total des princes. Il faut savoir ce que les frères du roi doivent coûter au Trésor public. Je ne connais en France que le roi et les citoyens. L’héritier présomptif de la couronne ne fait, en quelque sorte, qu’un avec le roi. Il faut dans un grand empire, dit-on, des personnes qui aient de la majesté et de grandes fortunes; oui, pour jeter le peuple dans la misère. Si l’on voit devant soi un homme dont la fortune soit montée à un si haut degré, on calcule de son côté les degrés auxquels on peut-parvenir, et on ne fait la mesure de son bonheur, qu’autant que l’on en est plus rapproché. Il faut aux princes, je l’avoue, un traitement convenable à leur naissance, mais cependant modéré. Il me semble qu’un million c’est déjà beaucoup ; car il ne leur faut plus ni écuries extraordinaires, ni écuries anglaises. Il est aussi un autre article que l’on doit retrancher, c’est la dépense de la maison militaire. Il est absurde qu’un particulier ait une maison militaire; ainsi plus de ce genre de dépense. Dans le cas où l’on croirait devoir délibérer, je demande que les princes ne puissent avoir qu’un seul traitement; il faut qu’on ne touche qu’à un seul endroit, et qu’on ne prenne qu’avec une seule main. M. de Custine. M. Camus n’a fait qu’effleurer les motifs qui nécessitent la suppression de la maison militaire des princes. Cela ne ferait que grossir la liste des officiers sans expérience, et des preneurs sur le Trésor public. (On demande l’ajournement.) M. l’abbé Maury. L’ajournement est nécessaire, car il s’en faut de beaucoup qu’on ait donné les motifs des charges dont M. d’Orléans est grevé. Ce n’est pas sur les apanages d’Orléans qu’il doit payer les dettes de son père, mais bien sur les propriétés dont il a hérité par la mort de mademoiselle de Montpensier. Vous avez décrété que les charges de la maison du roi et des princes seraient payées sur le Trésor public, cette question n’est donc pas liée à celle des apanages. Je demande l’ajournement, afin qu’on examine la dotation de la maison de Montpensier, afin qu’on ne s’expose pas à une injustice, et qu’on ne charge pas le Trésor public de dettes qu’il ne doit pas payer. M. d’Ambly. Quand on nous a ôté nos droits féodaux, cela ne nous a pas empêchés de payer les dettes de nos pères. M. le Président met aux voix l’ajournement de l’article 6. L’ajournement est prononcé. M. Enjubault. Le vote que vous venez de rendre nécessite également l’ajournement des articles 7 et 8. (Cet ajournement est aussi prononcé.)