gg [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 janvier 1790. fauteuil, prononce un discours dans lequel, après avoir réclamé l’indulgence de l’Assemblée, il fait sentir que pour achever le grand édifice commencé, elle avait besoin de calme dans ses délibérations. Quoi que nous ayons fait jusqu’à présent, a-t-il dit, pour la chose publique, les craintes et les transes ne se dissipent pas encore. La patrie, en quelque façon, est en deuil... Ses ressources sont entre nos mains, il n’y a que l’union la plus parfaite qui puisse la rassurer. J’exhorte tous les membres à la concorde et à la paix dans le sein de l’Assemblée. MM. Bailly, maire de Paris, et le marquis de Lafayette, commandant de la garde nationale, viennent assister à la séance en qualité de membres. Des applaudissements réitérés leur marquent la satisfaction de l’Assemblée nationale de les voir dans son sein. M. Massicu, l’un de MM. les secrétaires , donne lecture du procès-verbal de la séance du 2 janvier. M. Le Chapelier. Le procès-verbal relate la motion de M. Duport tendant à fixer les dépenses du Roi dans la liste civile. Cette motion ne devait éprouver aucune difficulté et il est bien étonnant qu’elle n’ait pas été décrétée par acclamation; il n’est pas convenable qu’on puisse supposer que l’Assemblée a hésité pour adopter une mesure si conforme au vœu de toute la France, et qui lui fournissait une occasion d’exprimer son respect et sa reconnaissance pour un monarque qui, par tant de soins et de travaux, a contribué à rendre à la nation sa liberté et ses droits. En conséquence, je propose le décret suivant : « Qu’il soit fait une députation au Roi pour demander à Sa Majesté, quelle somme elle désire que la nation vote pour sa dépense personnelle, celle de son auguste famille et de sa maison, et que M. le Président, chef de la députation, soit chargé de prier Sa Majesté de consulter moins son esprit d’économie que la dignité de la nation, qui exige que le trône d’un grand monarque soit environné d’un grand éclat. » M. le duc de Liancourt. J’appuie la motion, et j’ajoute que, dans tous les cahiers, la nation française a recommandé la plus grande déférence et le plus grand respect pour son chef. M. Delley-d’Agier. Je crois qu’on devrait au préalable connaître l’état des dépenses et des recettes et savoir quelles sont les ressources de la nation. M. Thouret. Je demande que la motion soit mise aux voix tout de suite. (De tous côtés on crie : Aux voix , aux voix.) M. le Président. Je consulte l’Assemblée. Le décret est adopté à l’unanimité moins la voix de M. le marquis de Foucault et d’un ecclésiastique. Les membres nommés pour la députation vers Sa Majesté sont : MM. Garat l’aîné. le marquis de Lafayette. ci’Ailly. Colbert de Seignelay, évêque do Rodez. Le Chapelier. Dufraisse-Duchey. MM. Despatys de Cour teilles. Buzot. de Montlosier. Agier, député du Poitou. Charles de Lameth. le marquis d’Ambly. Maréchal. Bailly, maire de Paris. Goupil de Préfeln. de Prez de Crassier. Germain. Millon de Montherlant. de Bonnal, évêque de Clermont. Enjubault de La Roche. le comte Mathieu de Montmorency, Berthereau. Rewbell. de Menou. Le Grand, député du Berry. Fournier de La Pommeraye. Andurand. le duc de Liancourt. Lanjuinais. Loys. le baron d’Aurillac. Nicodème. Le Pelletier de Saint-Fargeau. Gillet de Lajacqueminière. le comte de Croix. Hardy de La Largère. de Vismes. le duc Du Châtelet. Fermond des Chapelières. l’abbé Goutlet. Martineau. de Curt. Guillaume. Alquier. l'abbé de Ruallem. le duc de La Rochefoucauld. La Poule. Barnave. Muguet de Nanthou. le comte de Montcalm-Gozon. le marquis de Roslaing. Renaud, député d’Agen. Dom Gerle. le marquis de Fumel-Montségur. le vicomte de Beauharnais. Le Bois-Desguays. Gérard, député de Toul. M. Idémeunïer monte à la tribune et donne lecture d’une lettre qu’il avait été chargé d’écrire, en qualité de Président de l'Assemblée nationale, à tous les régiments de l’armée française; ladite lettre conçue en ces termes : « L’Assemblée nationale m’a chargé par un décret, Messieurs, d’avoir l’honneur de vous assurer, en son nom, qu’elle a vu avec peine plusieurs régiments donner à une phrase isolée de l’opinion de M. Dubois de Crancé une interprétation bien éloignée de l’intention de ce député, et qu’il s’est empressé de développer dès qu’il s’est aperçu que sa pensée était mal entendue. « Ce n’est pas, Messieurs, au milieu des représentants d’une nation dont l’armée a si dignement assuré la gloire dans tous les temps, dont elle vient si récemment encore de soutenir les droits avec tant de patriotisme, que l’hommage dû à la valeur, à la délicatesse et à l’honneur pourrait être un instant méconnu. Ils chérissent trop ces hautes qualités, inhérentes aux oftlciers et aux soldats irançais, pour ne pas saisir avec une véritable satisfaction l’occasion qui se présente de donner à l’armée le témoignage d’estime qu’elle mérite. « L’Assemblée nationale, occupée sans relâche de la régénération de ce grand empire, établira, pour la constitution militaire, des bases qui, as- 69 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 janvier 1790.1 surant à jamais le bonheur et l’avancement de tous les individus de l’armée, uniront indissolublement le citoyen et le soldat par les liens communs de la félicité publique. « Le salut de la France dépend, vous le savez, Messieurs, de l’accord intime de tous les bons citoyens. Sous ce grand et important rapport, les représentants de la nation se reposent sur les sentiments de l’armée. Ils recommandent au soldat une subordination entière à ses supérieurs, et ils sont assurés de n’être pas trompés dans cet espoir. La soumission aux lois, la fidélité à la constitution désirée par la nation, et acceptée par son chef ; l’obéissance et le respect pour le Roi, centre nécessaire de toutes les forces de l’Etat : voilà, Messieurs, les premiers devoirs et les seuls moyens de bonheur pour tout homme digne désormais de porter l’honorable nom de Français. J’ai l’honneur d’être avec un sincère attachement, Messieurs, votre très humble et très obéissant serviteur, Démeunier, Président. Paris, le 4 janvier 1790. Plusieurs membres demandent à discuter les termes de cette lettre. M. le vicomte de Mirabeau. Je prédis à l’Assemblée que cette lettre sera cause de la désertion totale de l’armée française. (Une grande partie de la salle crie : Aux voix , aux voix. M. le vicomte de Mirabeau, malgré ses efforts, ne parvient pas à se faire entendre.) L’Assemblée décide qu’il n’y aura pas de discussion ; elle adopte la lettre et ordonne qu’elle sera envoyée à tous les régiments de l’armée. On a fait la lecture des adresses suivantes : Adresse de félicitations, remerciements et adhésion de la communauté de Chérencé-Leheron en Normandie; elle demande d’être comprise dans l’arrondissement du district à établir dans la ville de Ville-Dieu. Adresse de dévouement de la garde nationale de Blois; elle demande que cette ville soit le chef-lieu d’un département. Adresse de renouvellement d’adhésion de la ville de Graponne en Velay; elle instruit l’Assemblée d’une émeute arrivée dans ses environs, et des mesures que sa garde nationale a prises pour en arrêter l’effet. Adresse de dévouement de la troupe nationale de Bedée près Rennes, et de trois mille autres citoyens, il n'en est aucun qui ne soit déterminé à sacrifier sa vie et sa fortune pour le maintien de la nouvelle constitution, qui leur offre l’image du bonheur. Adresse du même genre des officiers de la garde nationale de Retnel ; ils demandent 400 fusils pour armer leurs soldats. Adresse d’adhésion de la communauté d’Ille-ville-sur-Monfort en Normandie; elle dénonce les abus importants qui se commettent dans l’administration de la forêt royale de Monfort. Adresse de la ville de Monistrol en Velay, contenant l'expression d’une parfaite adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale. Dans une assemblée générale, les habitants ont arrêté, par acclamation, d’offrir en don patriotique, indépendamment du quart de leur revenu, le produit de l’imposition sur les ci-devant privilégiés; 1- - quel don ils auraient augmenté, sans l'extrême misère du pays, qu’ils ont cherché à diminuer en faisant chaque semaine une distribution de quatorze à quinze cents livres de pain ; distribution qui, par les précautions qu’on a déjà prises, sera continuée pendant les quatre mois les plus rigoureux de l’année. Adresse de félicitations sur le renouvellement de l’année des administrateurs de l’hôpital général de la ville de Moulins. Adresse d’adhésion des communautés de Pé-pieuxet Castelnau-Rive en Languedoc; elles demandent d’être comprises dans l’arrondissement du district à établir dans la ville d’Azille. Adresse de félicitations, remerciments et adhésion des villes d’Andely en Saintonge, de celle de Bonneval, de la ville de Manosque en Provence, et de celle de la Lampe, bailliage de Chartres. Toutes ces villes demandent l’établissement dans leur sein d’une assemblée de district et d’une justice royale. Les habitants des villes d’Andely offrent à la patrie leurs boucles d’argent et le produit des impositions sur les ci-devant privilégiés. Suit la teneur de l’adresse d’un ancien recteur de l’université : Messieurs, « Persuadé, comme le sage et célèbre orateur romain, que l’Etre suprême réserve une place distinguée à ceux qui s’empressent de venir au secours de la patrie, et qu’il n’y a de vrai et bon citoyen que celui qui, pénétré de la vérité de ce grand principe, agit en conséquence; je viens avec allégresse offrir à cette auguste Assemblée un calice que j’avais destiné pour le service des autels de l’Eglise; mais j’ai cru que j’en ferais un meilleur usage, et même plus agréable à la divinité, si, dans les circonstances présentes, je le plaçais sur l’autel de la patrie, au milieu de ses plus zélés défenseurs, pour être employé aux besoins de l’Etat. » Je reconnais, Messieurs, la ténuité de mon offrande ; et je sens qu’elle ne peut avoir de prix et de mérite que parce qu’elle prouve ma soumission à la sagesse de vos décrets, et qu’elle exprime le désir sincère que j’ai, depuis longtemps, de payer à cette auguste Assemblée le tribut de reconnaissance, de respect et d’admiration, que tout bon citoyen doit lui rendre avec empressement. » Adresses de la ville de Bergins, de celle de Sainte-Menehoult en Champagne, de celle de Landaw en Alsace, de celle de Dieppe et de Chaumont en Bassigny, qui saisissent avec empressement l’occasion de renouvellement d’année, pour donner à l’Assemblée nationale un nouveau té~ moignage d’admiration, de reconnaissance et de dévouement; elles forment les vœux les plus ardents pour le succès de ses travaux, qui doivent assurer à jamais le bonheur des Français. Adresse du même genre des membres de la municipalité de la ville de Dax, et du comité de correspondance de la sénéchaussée de Launes; ils espèrent que l’Assemblée agréera d’autant plus leur encens, qu’il leur est offert par des hommes libres. Adresse de la ville et communauté de Monein en Béarn, contenant félicitations, remerciements et adhésion à tous les décrets rendus et à rendre par l’Assemblée nationale, avec promesse de les défendre, de tout son pouvoir, contre les ennemis du bien public. Adresse du même genre du comité municipal de la ville de Saint-Claude en Angoumois ; il déclare que toute manœuvre, tout complot pour rendre les décrets de l’Assemblée illusoires, est