131 [Assemblée nationale.] l’assemblée des ponts et chaussées les deux projets dont je viens de parler. Sous 8 jours ils peuvent vous être remis. C’est diaprés leur examen que vous serez à portée de juger cette grande question, qui forme autant de partis que d’opinions. Alors, surtout, vous reconnaîtrez l’importance et la nécessité de bien distinguer l’administration de la société : vous reeonnaîirez la nécessité de conserver l’une et de modérer l’effort de l’autre. Quant à présent, je croirai avoir fait quelque chose d’utile pour mon pays, si j’ai le bonheur de vous faire adopter le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, voulant mettre en activité l’assemblée des ponts et chaussées, dont elle a décrété l’établissement le 31 décembre, décrète ce qui suit : « 1° La place de premier ingénieur sera donnée à M. de Peyronnet. « 2° Des 8 places d’inspecteurs généraux, 5 seront données aux anciens inspecteurs généraux des ponts et chaussées, une autre à l’inspecteur des turcies et levées, 2 aux premiers employés du grade correspondant, dans les deux ci-devant principaux pays d’Etats. « 3° Le cas de vacance arrivant, le premier ingénieur et les 8 inspecteurs généraux seront remplacés en la manière déterminée parle décret du 31 décembre. « 4° La nouvelle assemblée des ponts et chaussées ainsi formée présentera incessamment deux projets de règlement; le premier sera relatif aux fonctions et à la subordination des employés, l’autre à la conduite et à la classification des travaux publics. « 5° Le ministre de l’intérieur présentera le tableau des employés nommés pour remplir les fonctions d’ingénieurs en chef, d’inspecteurs et d’ingénieurs des départements. « L’Assemblée ajourne jusqu’à la discussion des deux projets de règlemënt qui lui seront présentés, conformément à la disposition de l’article 4, tout ce qui peut être relatif au complément de l’administration et de l’établissement des ponts et chaussées. » (L’Assemblée ordonne l’impression du discours et du projet de décret de M. Ramel-Noga-ret.) (La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance du soir.) M. le Président annonce qu’il a reçu une réclamation du sieur Rémy, sous-officier de dragons, sur son arrestation à Mercy, àl’occasion des événements du 21 juin. (L’Assemble ordonne le renvoi de cette réclamation et des pièces y jointes au comité des rapports, pour en rendre compte très incessamment.) Un membre observe que, le rapport du comité militaire sur l’organisation des gardes nationales soldées de Paris étant mis à l’ordre du jour de demain, les gardes nationales désirent assister à la séance et en demandent l’autorisation ; il propose à cet effet que les tribunes leur soient réservées. ( Marques d'assentiment .) (L’Assemblée consultée ordonne que les tribunes seront réservées pour la séance de demain aux gardes nationales soldées de Paris.) M. le Président lève la séaDce à neuf heures. [3 août 1791.] ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAÜHARNAIS. Séance du lundi 3 août 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. M. le Président fait donner lecture d’une adresse de la municipalité d’Aix. (L’Assemblée applaudit à cette adresse et ordonne qu’il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du lundi 1er août. Plusieurs membres présentent des observations sur la rédaction de deux des décrets rapportés dans ce procès-verbal. Les unes ont pour objet les formalités prescrites pour les passeports. (Ces observations sont adoptées,) Les autres portent sur le décret relatif à l’admission aux emplois vacants dans l’armée; il est proposé à cet égard la disposition additionnelle suivante : « Les fils de citoyens actifs qui, pour cette fois seulement, prouveront avoir étudié les mathématiques dans les différentes écoles ou collèges, pour se rendre capables d’entrer dans les corps de l’artillerie, du génie et de la marine, et qui, par cette raison, n’auront pu servir dans la garde nationale, seront également susceptibles d’occuper les emplois vacants dans l’armée. » (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette motion au comité militaire.) M. le Président met aux voix le procès-verbal. (Ce procès-verbal est adopté.) M. Bouche. Je demande la parole pour une motion d’ordre. Dans le compte qui vous a été rendu hier par le ministre, il ne nous a pas été parle des mesures prises pour l’exécution du décret du 13 juin dernier concernant M. de Condé ; je demande que l’Assemblée ordonne pour la deuxième fois au ministre de vous rendre compte de tout ce qu’il a fait à cet égard. Il est temps enfin que les décrets de l’Assemblée nationale ne soient pas de vains épouvantails et qu’ils soient exécutés dans toute leur étendue, M. Fréteau-Saint-Jnst. Monsieur le Président, les comités sont entrés dans les vues de M. Bouche. Il y a eu trois conférences du suite entre les membres des 6 comités réunis pour s’en occuper. Après avoir longtemps agité cette question, après avoir médité sur les points de prudence, de politique, de justice, ils ont pensé qu’il était convenable que la charte constitutionnelle fût au moins notoire et connue de l’Assemblée; vous savez qu’elle doit être distribuée demain, aujourd’hui peut-être. Demain au soir, si vous voulez, les comités s’assembleront pour prendre de nouvelles mesures. {Murmures.) Il est difficile de vous donner toutes les raisons pour lesquelles le comité en a agi ainsi. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 août 1791.] m M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). Il ne faut pas que Yk? semblée nationale ail l’air de rendre des décrets qui ne servent que d’épouvantails aux nations étrangères; il faut, quand elle s’est portée à en rendre de sévères, qu’elle ait la bonne foi, la loyauté de les rétracter, si elle croit s’être trompée, ou la juste sévérité de les faire exécuter. Cest le seul caratère qui convienne à l’Assemblée nationale et j’ose dire que c’est le seul qui en imposera à ses ennemis ; c’est souvent en montrant de la faiblesse qu’on les encourage et, certes, nous avons trop de moyens, nous avons trop de motifs de ne pas les craindre pour ne pas déployer, à leur égard, la fermeté qui convient si bien à une nation libre. Nos ennemis nous menacent, eh bien ! menaçons-les à notre tour. Je demande donc que M. Fréteau veuille bien demander au comité diplomatique sa dernière opinion relativement à M. de Condé. Il est un autre point sur lequel le comité diplomatique nous doit un rapport, c’est relativement au traitement qu’a reçu M. Duveyrier chargé d’une mission spéciale du roi. Il me semble que, sous tous les rapports, les agents de la nation française ont droit au respect et aux égards de tous les individus et de toutes les nations voisines dont nous traitons bien les envoyés. Je demande que ces deux rapports soient faits demain matin. (Applaudissements.) M. Salle. J’avoue que je suis surpris de ce que vient d’exposer M. Fréteau. Je suis membre des comités ; j'ai assisté à la première des conférences, et je crois que c’est la seule que les comités aient eue. A cette conférence, Messieurs, il avait été convenu que la politique de la France devait être ia justice; que les voies détournées ne lui convenaient pas; il avait été convenu que le ministre nous ayant fait passer la pièce officielle qu’on lui avait demandée, et celte pièce confirmant ce que M. Duveyrier avait dit, on devait proposer à l’Assemblée de décider que M. de Condé avait encouru les peines portées dans ce décret. Je m’attendais à ce que cette proposition soit faite à l’Assemblée. Je n’ai pas assisté aux conférences tenues depuis au comité. Je dois donc déclarer que je n’ai point de part aux mesures molles qu’on parait avoir adoptées. M. Fréteau-Salnt-Just. Il ne faut pas qu’on croie qu’il y a de la mollesse dans les délibérations prises par le comité', mais c’est d’après les considérations les plus sûres qu’on s’est déterminé aux mesures à proposer à l’Assemblée; si l’Assemblée veut les prendre aujourd’hui, elle en est bien la maîtresse. J’observerai toutefois qu’il est impossible de mettre à exécution le décret dont il s’agit, sans suivre les formes établies en pareille matière. M. Delavigne. Il ne s’agit pas ici de menaces réciproques, de mollesse ni de conférences de vos comités. Les comités n’ont plus rien à faire. Je soutiens que tout est fait par votre décret du 13 juin; il porte avec lui son exécution en cas de désobéissance ; le délai est expiré, il ne reste plus qu’à faire exécuter, par le ministre de l’intérieur, les dispositions pénales contenues dans votre décret. Je demande qu’il en soit fait lecture. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). Je vous prie, Monsieur le président, de mettre ma proposition aux voix. M. Delavigne. J’insiste sur la représentation du décret. (Oui! oui 1) (L’Assemblée ordonne qu’il lui sera fait lecture du décret du 15 juin concernaut M. de Condé.) (Voir ci-après page 134.) Un membre remet sur le bureau 1 eprotès-ver-bal de la prestation de serment de toute la garnison de Montreuil-sur-Mer par-devant les officiers municipaux autorisés à le recevoir par les commissaires envoyés dans le département du Nord. (L’Assemblée décrète qu’il sera fait mention honorable de ce document dans te procès-verbal.) M. le Président. Une députation composée de trois ou quatre citoyens de la ville de Paris , porteurs d’une pétition revêtue de trois à quatre cents signatures, demande à être admise à la barre. M. Salle. Cette pétition est relative à la distribution et à l'échange des petits assignats. Ces citoyens étaient à recueillir des signatures, lorsque apprenant que vous deviez vous occuper aujourd’hui des petites monnaies, ils sont venus pour se présenter à l’Assemblée. (L’Assemblée ordonne que la députation sera admise à la barre). (La députation est introduite.) L'orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, nous venons dénoncer à votre sollicitude l’abus le plus criant, le désordre le plus propre à renverser la chose publique. Pour faciliter la circulation des assignats et déjouer l’agiotage, vous avez décrété des petits billets de 5 livres, et une monnaie en cuivre dans une proportion suffisante pour changer ces petits bi Jets. >• Votre intention a été de secourir le pauvre, de vivifier le commerce, d’alimenter les manufactures et d’éloigner la classe indigente des manœuvres des ennemis du bien public, qui u’attendent que le moment de la détresse pour en faire un moyeu de désordre et de contre-révolution. « Messieurs, vos vues bienfaisantes sont trompées; les petits assignats et la monnaie de cuivre sont devenus la pâture des sangsues de l’Etat. Tant que leur trafic mercenaire u’a porto que sur les gens aisés, le mal a été effrayant; mais quand il porte sur le nécessaire du pauvre, ui sait où ce désordre peut porter la patrie ? Il urera tant que le numéraire ne tombera pas à la fois par tous les canaux dans la circulation, comme une rosée salutaire ; tant que la distribution n’en sera pas confiée à des mains pures. « En effet, vous attribuez la distribution des assignats aux caisses publiques. Au milieu de vos immenses travaux, vous avez pu être induits en erreur. Sont-ils donc si purs ces hommes instruits dans les anciennes compagnies des finances, ces payeurs de rentes qui forment encore aujourd’hui une compagnie malgré vos salutaires décrets et quand bien même encore ils seraient aujourd’hui des gens aussi estimables qu’ils ont été justement détestés dans l’ancien régime, quand bien même ils mériteraient aujourd’hui la confiance de l’Assemblée nationale, nous répondront-ils que leurs commis, que leurs caissiers, que tous ces agents subalternes, nourris dans l’ancienne fiscalité, accoutumés à l’agiotage, ennemis nés de vos sages décrets, et toujours avides de richesses à quelque prix qu’elles s’acquièrent,