30 [Assemblés nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Ie? ji)in 1796.1 M. Pét|on «Je Villeneuve. J’appuie l'obser� vation du préopinant; l’état des finances est encore un seçret impénétrable. On ue dit pas si l’on a vérifié la recette... I! nous faut un bilan exact, Tous les mois on yiendra nous demander 10 ou 2Q millions, M. Fréteaif, Comment est-il possible que dans un royaume où le peu pie paye 4 pu 500, 000,000 livres d'impositions, ••• (Il s’élève des murmures ; lusieurs voix disent : « On ne pave pas! ») Un onorable membre m'atteste que dans une des grandes provinces de France, pans la Bretagne, la perception des impositions n’éprouve pas le moindre retard-Je sais qu’il en est de même dans les provinces voisines de Paris. Dans d’autres les contribuables demandent qu’on fasse les recouvrements. L’Assemblée nationale devrait être informée d’une manière exacte pourquoi de 36 millions d’impositions qu’on devrait recevoir par mois, on u’en reçoit que neuf, On se demande pourquoi, quand les fermiers payent la taille, les propriétaires les vingtièmes, et quand les privilégiés sont assujettis aux impositions, il faut vivre sur les capitaux de la nation, au lieu de vivre sur le produit des contributions? M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angely). Il est bon que ta nation connaisse les motifs qui nous déterminent à faire le service sur les capitaux et non sur les revenue oous ayons demandé les états des receveurs généraux des finances. Ces états, qui paraissaient faciles à présenter, donneraient de très grandes lumières ; les receveurs généraux pouvaient dire : « Nous avons reçu tant, il reste tant à recevoir. » On pouvait présenter également des bordereaux des aides. Si ces états avaient été envoyés à domicile, chacun de nous pourrait en ce moment voter de manière à ne pas compromettre sa délicatesse envers ses commettants. Ce que M. Fréteau a dit est vrai, mais il faut aussi qu’on sache que dans plusieurs pro-vincesles intendants et lès subdétégués s’étant retirés pour cause, les rôles ne sont pas faits. Je cite notamment la mienne, mais on peut voir combien les impositions produisaient; les receveurs généraux savent chacun ce que doit produire leur généralité. Je demande donc que-tous les mois ils présentent un état de recette avec Jes indications des parties payantes. Un receveur général dira : « J’ai reçu dans ce mois de tel receveur particulier la somme de tant. » Leg détails vous seront remis, vous les comparerez à la recette du Trésor royal, et il se fera çje cette manière un contrôle très utile. Nous pourrons échauffer le zèle des habitants des campagnes, ou y applaudir. Je demapdedonc que, soit pour l’arriéré de 1789, soit pour le courant de 1790, l’état des sommes reçues des receveurs particuliers soit envoyé avec l’état de recette du Trésor royal à chaque député, de mois en mois. M, de Toulongeon, Je prie JM, le président de demander à la section 4u comité fies finances si elle a les pièces probantes pour la rentrée des impositions de mois en mois; sinon il me semble convenable de nommer fies commissaires. M. de Çernon. Si j’avais prévu que l’Assemblée désirât, en cette occasion, un compte du travail de la section, je me serais muni des pièces nécessaires. J’observe cependant à M. Fréteau que les receveurs généraux n’ont rien reçu des fonds de l’année 1790. Sur 32,000 rôles il n’v en a encore que 14,000 de faits, Quant à la recette de 1789, le terme du payement est arrivé; les fonds doivent être rentrés au Trésor public, La gabelle est remplacée, mais les rôles du rempl&r cernent ne sont point encore rédigés ;dQRG H n’y a pas encore de recette sur cet objet ; la ferme du tabac éprouye une diminution presque totale; les droits d’aides sont aussi diminués parce que la récolte a été mauvaise, d’ail|eurs les rocou-vrements sp font presque toujours en automne; les impôts des barrières ont donné peu de produit, à cause des contraventions et du dépérissement du commerce, Voilà les causes des embarras dû Trésor public. Les 20 millions demandés aujourd’hui sont destinés A payer les anticipations dont vous avez défendu le renouvellement, ce ne sont donc pas des anticipations qu’on propose, mais un emploi déterminé: vous avez de même ordonné que les rentes seraient payées en assignats, Ainsi on ne sollicite pas un secours pour le Trésor public, mais les moyens d’un acquittement que vous avez ordonné. Quant à la demande de M, Regnaud, l’envoi à domicile serait déjà fait si nous y avions été autorisés par un décret. A l’exception de l’état de l’arriéré des receveurs particuliers, tous les autres états sont entre les mains dp comité, fi vérifiera l’état général sur les états particuliers, et l’Assemblée trouvera dans ce travail, qui ipi sera incessamment présenté, dp quoi satisfaire sa juste impatience. M, Fréteau. % Regnaud se trompe sur l’état de sa province. J’ai dans les mains des extraits de rôles faits depuis un mois pour les paroisses voisines de Saintes. Je demande à M. Regnaud. que les états des receveurs particuliers nous soient envoyés et que les membres de l’Assemblée veuillent, par Ipurs relations/ s'assurer de leur exactitude, M. le Président consulte l’Assemblée qui adopte la proposition du comité des finances et celle de M. Regnaud (de Saiot-Jean-d’Angely). fin conséquence, les deux décrets suivants soni rendus : PREMIER ÜÉfiBIT, « L’Assemblée nationale, considérant le délai indispensable dans la fabrication des assignats, et la nécessité de réunir toutes les précautions possibles pour garantir et éviter la contrefaçon ; considérant également que leur emploi est urgent pour le service du Trésor public dans le courant du mois de juin, a décrété que la Caisse d’escompte fournira au Trésor public la somme de 20 millions en billets-assignats, lesquels seront remplacés eu assignats aussitôt après leur fabrication. » DEUXIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale décrète que chaque mois les receveurs généraux des finances et ceux des impositions de Paris fourniront uq état de leur recette, tant sur l’arriéré des rôles de 1789 et années antérieures, en énonçant le montant de l’arriéré restant à rentrer, que sur les recouvrements à compte de ceux de 1790. * Ils désigneront dans les états les sommes (Assemblée nationale.) ARCHIVES PA] reçues de chaque receveur particulier, et si elles l’ont été en espèces, assignats, promesses d’assignats ou lettres de change. « Ces états seront imprimés et distribués cha-que mois aux membres de l’Assemblée, avec les états généraux de recette du Trésor public - pendant ce même mois. ? On passe à l’ordre du jour qui consiste dans la discussion des articles du titre premier du projet de décret proposé par le comité des offices ecclésiastiques. Les six premiers articles sont relatifs à l’épiscopat. (Voyez le rapport de M. Martineau du 24 avril 1790. — Archives parlementaires, t. XIII, p. 166). M. de Bonnal, évêque de Clerrpont. Vous avez fermé la discussion, je ne me permettrai pas de” la recommencer; mais je crois devoir à mon ministère et à mon caractère d’adhérer à la demande d’un concile national, pour prononcer sur tout ce qui concerne la discipline ecclésiastique, sauf l’accession et la protection de la puissance civile. Autant j’ai de respect pour les décrets rendus par cette Assemblée, sur tout ce qui est temporel, autant je me dois de déclarer que je ne puis reconnaître la compétence de l’Assemblée pour ce qui concerne le spirituel. (Quelques ecclésiastiques de la partie droite de l’Assemblée se lèvent pour adhérer à cette déclaration.) M. Diilau, archevêque d’Arles. Je supplie l’Assemblée de statuer sur la demande d’un renvoi à un concile national. Cette demande est appuyée ; l’Assemblée peut décider par oui ou par non. M. Oobel, évêque de Lxdda (1). Messieurs, votre intention n’a jamais été et ne sera jamais de dépasser la ligne de démarcation qui sépare les pouvoirs des deux puissances spirituelle et temporelle, et, en respectant les droits de la première, vous n’entendez pas soustraire à l’obéissance due à ses lois et définitions, en ce qui regarde la validité des sacrements et les choses nécessaires au salut, les fidèles soumis à votre autorité temporelle. Il est donc de votre volonté, que tout ce que les conciles généraux et œcuméniques ont défini et décrété dans des matières purement spirituelles et notamment concernant les choses nécessaires à la validité des sacrements, soit religieusement observé en France, et vous ne voulez pas établir de loi qui y soit contraire. Il s’ensuit que les canons et décrets du concile de Trente, qui portent sur des objets par lui reconnus nécessaires à la validité des sacrements, par conséquent au salut, et par là même des objets purement spirituels, sont obligatoires en France, quoique le même concile n’y ait pas été reçu quant à la discipline. Voilà donc une vérité irréfragable et un principe qu’il faut allier avec les vues salutaires dé notre comité ecclésiastique sur la réforme et l’organisation du clergé de France. Et c’est sur cela que je dois vous faire une observation. Le concile de Trente, session 14 de la pénitence, chap. 7, a déclaré nulle l’absolution donnée par un prêtre à une personne sur laquelle il n’a aucune juridiction ordinaire ou déléguée. De plus, en son canon 9 du même titre, il dé-(i) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du discours de M. Gobel. ÆMENTAÏRES. [le-juin 1790.) 31 finit l’absolution sacramentelle être un acte judi-ciel. Et, au canon 11, il prononce anathème contre ceux qui diront que les évêques n’ont pas le droit ne se réserver des cas, si ce n’est pour la police extérieure, et conséquemment que cette réservation n’empêche qu’un prêtre pé puisse véritablement en absoudre. Je me borne à cet article du sacrement de pénitence, pour n’êlre pas trop long, d’autant qu’il suffit pour vous proposer ma difficulté. Selon cette définition du concile de Trente, les pouvoirs que le prêtre a reçus dans son ordination de remettre ou de retenir les péchés, ne suffisent pas pour la validité de l’absolution. Il lui faut encore une juridiction sur la personne qu’il veuf absoudre, soit ordinaire, soit déléguée, et que le cas ne soit pas réservé à l'évêque. Ceci, nous sommes tous tenus de le croire en France, comme dans le surplus de la chrétienté (1). Voyons maintenant comment il faudra faire pour concilier, avec cet objet de notre foi catholique, ladivision du royaumeenquatre-yingt-trois évêchés. Et, pour rendre la chose plus sensible, supposons, pour un instant, qu’il ne s’agisse que du démembrement de la ville et dp territoire de Lille en Flandre, du siège de TpurnaL dont ils dépendent présentement, quant au diocèse, et (je leur union à un siège établi en France. Il est hors de doute qu’en ordonnant ce démembrement et cette union, vous ne fassiez une chose utile aux habitants de la ville et du territoire de Lille, puisqu’ils leur présentent un intérêt à la fois spirituel et temporel. Mais l’intérêt spirituel que vous voulez procurer aux habitants de Lille dépend de la réalité des pouvoirs qu’exercera leur nouvel évêque , ainsi que les prêtres par lui institués ou délégués ; l’exercice de ces pouvoirs tient incontestablement à la nécessité de leur salut. Il faudra donc arranger les choses de manière que lesdits habitants puissent être valablement absous sous le nouveau régime dans le tribunal de la pénitence, et que, voulant contracter un mariage (1) Parce que c’est une définition d’un concile général et œcuménique, représentant l’église universelle, seule et légitime interprète des paroles de Jésus-Christ et du sens des saintes écritures; définition qui porte sur une matière purement spirituelle ; savoir, sur l’essence et la validité d’un sacrement nécessaire au salut ; définition qui règle notre foi sur cet objet, et laquelle à cet égard est absolument indépendante de notre acceptation. 11 n’est donc pas possible d’admettre le principe qu’on a mis en avant, lorsqu’en combattant celte opinion, on a dit que si le concile de Trente n’eût proposé en matière de foi que des articles nouveaux, et non déjà définis par des conciles généraux antérieurs, il eût eu en France le même sort pour le dogme que pour la discipline. Cela suppose nécessairement que lorsque l’église universelle s’occupe pour une première fois de la discussion et de la condamnation d’une erreur, en définissant le contraire comme un objet de croyance, il est au pouvoir de la puissance temporelle d’accepter, ou non, l’article de foi défini par l’église, et libre aux fidèles de le croire, ou non. Mais comment allier ce principe avec les paroles de Jésus-Christ, lorsqu’il nous ordonne (en Saint-Mathieu) d'écouter l’Église sous peine de passer pour payens et pour publicains, et cela sans marquer aucun temps, aucune limite à la docilité qu’il exige de nous envers elle ? Certes, un tel exemple anéantirait tous les jugements que l’Eglise a jamais rendus ; et il n’y aurait plus d’Eyangile ni de règle de foi.