664 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] nouveau code pour l’abréviation de la procédure. Art. 10. Nous demandons la liberté de l’impression et l’extinction des lettres de cachet. Art. 11. La suppression des justices seigneuriales, établissement de sièges royaux, qui jugent sans appel les petites causes, de façon qu’établis à deux lieues les uns des autres, ils évitent aux citoyens les frais immenses d’appel et de transport. Art. 12. Qu’au greffe de chaque municipalité, il soit déposé copie du terrier ou fait incessamment un nouveau, si la vétusté du dernier l’exige, pour y avoir recours en cas de contestations particulières. Art. 13. Nous demandons que les officiers municipaux tiennent dans ldur paroisse, siègent pour y juger sans appel les causes consulaires et de police dont l’administration leur sera commise. Art. 14. Que les charges de la magistrature ne soient héréditaires ni vénales, mais données au mérite. Art. 15. Pour éviter les frais immenses de titres nouvels engendrés par les mutations dans les familles, nous demandons que le remboursement des rentes dues aux gens de mainmorte, au taux du principal, ou, si mieux estiment les Etats généraux, au profit du Roi, qui recevra moitié en sus et acquittera, à l’avenir, lesdites rentes au taux de la création. Art. 16. Que les voiries envahies par les seigneurs, qui nous dépouillent des pâtures sans y faire aucun entretien, soient rendues aux communes, qui, par le prolit des arbres qui les bordent, se chargeront de l’entretien, et le surplus employé par la municipalité au soulagement des pauvres. Art. 17. Nous demandons la suppression de tous péages sur les routes ; l’institution chargeait les propriétaires de l’entretien desdites routes, et même de leur sûreté ; nous payons maintenant cet entretien, conséquement, droit abusif. De Saint-Denis à Clermont en Beauvoisis, six péages, douze lieues ; trois péages et demi au profit du même seigneur. Le Roi, à son avènement au trône, nous en avait promis prochaine extinction. Art. 18. Nous demandons l’abolition des droits féodeaux, reste de l’ancienne servitude. Art. 19. La suppression des capitaineries et le droit accordé à tous cultivateurs du royaume de détruire, par toute voie autre que celle"d’arme à feu, le gibier qui détruit sa récolte; et il en résultera une meilleure de vins, bois, grains et autres denrées dont le cultivateur se voit dépouillé sans obtenir satisfaction. Art. 20 Nous désirons que le prix du blé ne puisse en aucun temps excéder celui de 24 à 26 livres le septier, les tristes circonstances présentes nous mettant à la veille d’éprouver les plus grands malheurs. Nous supplions les Etats généraux d’y pouvoir, même provisoirement. Que le prix du pain et autres denrées de bouche soit fixé par les municipalités, à qui la police en sera exclusivement confiée. Ar.t, 21. Qu’il y ait poids et mesures uniformes dans tout le royaume. Art. 22. Que les impôts sur les denrées de première nécessité soient abolis, le prix du sel diminué, les droits d’aides réformés quant au gros manquant, don gratuit et autres. Art. 23. Nous demandons la suppression des dîmes, la réduction des bénéfices simples, leur extinction après le décès du titulaire, pour le montant de leurs revenus être versé dans une caisse dont il sera tiré somme pour faire établis-| sement de charité dans chaque paroisse et détruire ' la mendicité. \ Art. 24. Que les curés et vicaires jouissent d’un | revenu honnête, de façon qu’ils ne vivent plus 1 de l’autel et n'exigent aucun honoraire pour baptême, mariage et sépulture. Art. 25. Plus de tirage annuel de milice; chaque garçon sujet au tirage y suppléerait par une somme modique. Art. 26. Nous demandons que les voitures publiques ne jouissent plus de privilèges exclusifs, de sorte qu’il soit libre à tout citoyen de se faire conduire sans impôt par qui bon lui semblera.. Art. 27. Que les arrêts et règlements sur le fait des pigeons soient exécutés; que tous les ans visite soit faite des grains, pour, suivant l’exigence annuelle, la fermeture des colombiers être réglée et ordonnée par la municipalité, même la destruction de ceux errants. Art. 28. Nous demandons que les marchands j colporteurs sans titre, domicile ni qualité de ci-; toyen, en ce qu’ils ne supportent point propor-| tiônnellement à leur commerce inconnu les char-; ges communes de l’Etat, acquittent, chacun en ! droit soi, une cote personnelle et ne puissent, au | préjudice des marchands domiciliés et stables, I vendre ni colporter leurs marchandises autres | jours que ceux des foires et marchés. i Le tout à la gloire du Roi et le bonheur de son j peuple. | Signé Lejolumeau de Jeyeural ; Grognet ; San-| droit ; J. Martin , Imbert ; Roberge ; Picque ; Petit; Luquet ; Legrand laine ; Bouly ; üefevre ; David ; Mathas; Gorneaux; Budin; Vallet ; Givdieu, Petit, Monpré ; Desserguelle ; François Gudde ; Hudele; Sarda; Félix Fanin ; Colleau ; David; Valle ; David ; Thiverny ; Vernon ; Roset ; Vallé ; Vallet; Laville ; Mansion; Brados ; Mansion; Famin; Félix Lechevin; Glestelgrand ; Testart ; Isoré; Petou ; Lacour; Crosnier; Pierre Marié ; Regnaud; Pierre Nicolas Métas; Roy; P. Lefèvre; Gosborme ; Regnard. GAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants de la paroisse de Maf (tiers, du ressort de la prévôté et vicomté de Paris (1). Art. 1er. La destruction du gibier de toute espèce, ainsi que la grande bête, excepté dans les parcs fermés et enclos de murs. Personne n’ignore que la disette des blés que le royaume éprouve ne vienne en partie du dommage que cause ce gibier. Get objet est d’autant plus important pour l’Etat, qu’il est privé par cette disette . d’une branche de commerce avec l’étranger qui faisait rentrer dans le royaume des deniers considérables; d’ailleurs, si on n’y apportait pas un prompt remède, le cultivateur tombe.- rait dans le découragement et se trouverait dans une impuissance absolue de payer les impôts. Art. 2. L’impôt territorial est celui de tous les impôts le plus juste et le plus indispensable pour remédier aux besoinspressantsde l’Etat. Tous lesbons sujets du Roi le demandent avec empressement ; il n’aurait jamais dû éprouver la moindre résistance ; maisil convientque tous les ordres y soient assujettis sans aucune exception. Cet impôt, réparti avec exactitude, produira des sommes immenses et met-(l)Nous publions ce cahier d’après un manuscrit de* Archives de l’Empire. 665 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mors.] tra le gouvernement en état de supprimer la taille, la capitation et les vingtièmes même les corvées dont la perception est difficile et lente. Art. 3. Réduire les revenus des évêchés et des abbayes et prendre sur les revenus de quoi payer toutes les pensions militaires et celles de tous ceux qui ont servi l’Etat avec fidélité sans s’enrichir. Art. 4. Pour éviter les vexations que les sujets du Roi éprouvent dans les justices seigneuriales par des délais affectés et des subtilités qui ne tendent qu’à multiplier les frais et ruiner les justiciables, leur accorder le droit de porter leurs causes devant les juges royaux du ressort, sans essayer de revendication de ia part du seigneur et de son procureur fiscal. Art. 5. Rendre le transport des blés libre daus toute l’étendue du royaume, de manière qu’ils ne soient plus retenus par les compagnies de commerce qui les retiennent où bon leur semble, et que tous les marchés soient suffisamment fournis, surtout ceux des environs de Paris. Fait et arrêté dans ladite assemblée, et ont tous les comparants signé les jours et an susdits. Signé Fourquet ; Charpentier ; Guibert ; Pierre Le Duc ; Remy Pottier ; Masson ; Pierre Duprude ; Dupau / Charpentier ; Le Blond ; Boderlique; François Gardan; Etienne Dupin; Ragirelle ; Fillerin, syndic. CAHIER Des doléances et remontrances de la paroise de Magny-Lessart (1). Il n’est point d’époque aussi intéressante dans notre histoire que celle où, pa'r suite d’une chaîne non interrompue d’erreurs politiques et d’administration, l’opinion publique vient enfin briser le prestige qui attachait la nation à un joug aussi obscur dans sa marche, qu’elle était hérissée de principes arbitraires qui servaient à en lier toutes les parties bizarres. Cet échafaudage, composé des prétentions en tous genres soutenues par des pouvoirs exercés par les ministres comme par toutes les classes qui se sont déclarées privilégiées, se dissipent et s’évanouissent au jour heureux et brillant de la raison. C’est elle seule qui va dicter les instructions dont nous entendons charger nos députés; la droiture du jugement est à préférer à l’éloquence, puisque ce sont les intentions les plus droites qui doivent être les plus persuasives. Nous ne ferons que poser des principes .d’après lesquels doivent ressortir nos droits politiques. CONSTITUTION NATIONALE. L’assemblée des Etats généraux n’est autre que la représentation de la nation convenue exister, par un nombre de délégués chargés de traiter des intérêts de l’universalité des commettants. Nos députés, à ce litre, ne sont donc que les organes par lesquels nous entendons que les Etats généraux prennent en considération nos demandes. Que ce soit comme membres du tiers ordre que nous agissons, toujours est-il vrai que nous avons, autant que tous autres citoyens d’ordres quel-! conques, le droit de discuter comme eux, libre-j ment et honorablement la constitution. (1) Nous publions ce® aider d’après un .nanuscrit des Archive t de l’Empire. A ces titres, présumant que la première question qui sera agitée dans l’assemblée des Etats généraux portera sur la forme de délibérer, Nous observons que la distinction des ordres en trois degrés étant plus l'ouvrage d’un usage arrogé que consenti par une loi nationale, nous demandons qu’il soit délibéré s’il convient toujours de laisser subsister la division du corps politique en trois ordres, ou s’il ne serait pas plus convenable qu’il n’eu existât que deux, savoir : le corps national, plus la noblesse, qui en est une émanation distinguée. 11 suit de cette explication que le troisième ordre se fonderait dans l'une des deux parties, suivant ses droits honorifiques. Alors on parviendrait plus aisément à détruire cet esprit d’ordres qui, comme les esprits de corps, font que leurs membres s’isolent de l’intérêt général pour ne s’occuper que de leur intérêt particulier. C’est cette même raison qui nous prescrit d’exiger que, dans toutes les délibérations des Etats généraux, les opinions soient prises par tète. Nous croyons aussi qu’il est de la saine politique que toutes les matières qui donneront lieu à des motions quelconques ne soient jamais agitées et délibérées le même jour, mais remises sur le bureau à huitaine et n’être jamais adoptées qu’a-près deux pluralités d’opinions bien constatées. Il est encore conforme au droit public que l’assemblée des Etats généraux n’a d’action qu’eu vertu des pouvoirs qui sont délégués à ses membres. Les Etais généraux sont obligés de rendre leurs conférences publiques à chaque tenue de session, par la voie de l’unpression,. en spécifiant le nombre des voix pour ou contre les motions. Cette formalité est la seule manière de justifier aux commettants l’acquit précis des engagements de leurs mandataires et devient aussi obligatoire que l’est le compte que rend un fondé de procuration à son commettant; i’observation de ces règles doit assurer l’exécution de celles relatives aux différents objets de la constitution nationale. Les deux principaux sont la liberté de la propriété et la liberté individuelle. Nous sommes persuadés que les cahiers des principaux bailliages et villes du royaume ont trop bien développé ces droits politiques pour nous étendre beaucoup sur cette matière. 11 nous suffira de dire, quant à la liberté de la propriété, qu’elle consiste à n’en jamais pouvoir être dépouillé pour quelque raison que ce soit ; que la seule volonté du propriétaire doit amener sa cession, et que s’il y consent à raison de l’intérêt public, il en doit être dédommagé au plus haut prix et sans délai. La liberté individuelle comprend : le droit de vivre où l’on veut, de venir, demeurer où il plaît et de ne pouvoir être arrêté ou constitué prisonnier qu’en vertu seulement d’un décret décerné par les juges ordinaires. Il sera donc défendu à toute autre personne que celle devant mainforte à justice, soit officier, soldat, exempt et cavalier de maréchaussée ou autre, d’attenter à la liberté d’aucun citoyen, sous peine de mort, ou tout autre châtiment qui sera décidé aux Etats généraux. Dans cette même punition devra être comprise toute personne qui aura sollicité, signé ou favorisé tout ordre semblable. La liberté de penser étant une suite des deux premiers principes, il esta présumer que les Etats généraux régleront pareillement les conditions