[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 février 1791.] dites élu moins aux infortunés qui vous ont députés que leurs plaintes ont pénétré jusqu’à nous. ( Applaudissements .) (L’Assemblée renvoie la pétition des Quinze-Yingis au comité des rapports). M. Charles de Canielli. Je demande que le comité soit tenu de faire son rapport sur cette pétition à la première séance du soir du mois de mars. (Cette motion est décrétée.) M. Ce Couteulx de Canteleu. Les électeurs du département de ia Seine-Inférieure ont envoyé une adresse à l’Assemblée nationale, qui est ici depuis trois jours ; je vous prie, Monsieur le Président, de demander à l’Assemblée si elle veut que j’en fasse lecture. M. le Président. Vous la ferez, Monsieur, lorsque nous aurons entendu la troisième députation-. Une députation de la Société des inventions et découvertes est introduite à la barre. M. Servièreg, orateur de la députation. Messieurs, les artistes fiançais, plus s<nsiblesà leur bonheur présent qu’à leurs peines passées ne vous les retraceront pas. En effet, que pourraient-ils vous apprendre que vous ne sachiez parfaitement ? Ils sortent d’une longue léthargie, et de pareils maux sont mieux connus du médecin, qui les a guéris, que du malade qui les a soufferts. Réunis enfin par une joie commune, par l’enthousiasme de nos recherches et de nos travaux pour les biens et les besoins mutuels qui enchaînent tous les arts entre eux, et surtout par cette fraternité civique, avant-goût délicieux des fruits de la liberté, il nous a semblé qu’elle nous suggérait un moyen de réaliser quelques-unes de vos grandes pensées et d’accorder nos efforts pour les progrès de l’industrie. Notre plan, a-t-il dit, et nos motifs ont été communiqués à la municipalité de Paris, et son accueil favorable nous enhardit à vous les offrir. Notre association volontaire admettra tous les citoyens déjà connus ou qui se feront connaître par quelque découverte, invention, ou perfection nouvelle en tous genres d’industrie ; et le premier rassemblement, empressé à se lier par une correspondance active avec tous les articles de toutes les parties de l’Empire, ne les trouvera oint sourds à l’appel du patriotisme et de la fierté; mais comme J’empire des talents ne connaît |ias de frontières, cette société naissante espère étendre un jour ses rapports au delà de nos limites géographiques pour fraterniser avec tous les étrangers distingués dans les mêmes genres, pour rappeler parmi nous des citoyens précieux, qui, dans des temps moins favorables au mérite, ont été chercher une patrie hors de leur terre natale pour acquérir tous les jours de nouveaux émules, et pour ne faire, s’il se peut, de tous les talents et de tous les arts, qu’une même famille, dont la France sera la principale patrie. Là seront appelés tous ceux qui aspirent à remire ce nouveaux services au genre humain, et c’est au milieu d’eux que le génie de l’invention va recevoir enfin un culte digne de lui. L’entreprise eet grande, mais votre énergie et vos triomphes élèveront notre courage ; de la région sublime où vous planez, vous nous guiderez dans la carrière nouvelle où nous nous élançons, comme les astres dirigent de hardis navigateurs sur des mers inconnues. M. le Président. Les découvertes de l’industrie et des arts étaient une propriété avant que l’Assemblée nationale l’eût déclaré ; mais le despotisme avait tout enchaîné, jusqu’à la pensée. Il est des inventions que, sans doute, l’amour de l’humanité publiera, sans en faire une source d’intérêt particulier ; mais ce sacrifice sera du moins volontaire, et la reconnaissance publique deviendra pour leurs auteurs une véritable propriété. Une société, consacrée à favoriser les découvertes, acquitte une dette de la société entière ; l’art de créer le génie n’est peut-être que l’art de le seconder ; et la Société des inventions est déjà une invention d’autant plus utile qu’elle deviendra la source de beaucoup d’aulres. L’Assemblée nationale applaudit à vos vues, et vous invite à assister à sa séance. (. Applaudissements .) (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait, dans le procès-verbal, mention honorable do cette députation.) M. Lecoutéulx de Canteleu fait lecture d’une adresse des électeurs du département de la Seine-Inférieure . Cette adresse est ainsi conçue (1) : « Messieurs, depuis plu sieurs siècles, le peuple avait perdu la faculté de choisir ses pasteurs. La France présentait de toutes parts des prêtres oisifs et opulents, inutile fardeau de la religion. « La cupidité, qui ne se rassasie jamais, accumulait les bénéfices sur leurs têtes, tandis que les ministres nécessaires et laborieux étaient la plupart dans l’indigence et la pauvreté, et que, chargés du poids du jour, ils manquaient souvent du nécessaire. L’intrigue et la naissance portaient seules aux premières places de l’Eglise: on comptait les protections et les aïeux d’un évêque; on ne comptait jamais ses travaux et ses vertus. ( Applaudissements réitérés .j « Les fidèles gémissaient depuis longtemps sur ces abus intolérables qui avilissaient le premier de tous les ministères. Vous êtes venus, Messieurs, par de salutaires réformes dans l’état civil du clergé, remédier à ces maux : vous avez ôté la pierre de scandale, rétabli Je peuple dans ses droits, et le sacerdoce dans sa dignité. « Grâce à vos sages décrets, des prêtres sans fonctions n’étaleront plus un luxe indécent, et ceux qui travaillent vont jouir d’une aisance honnête. ( Murmures à droite ; applaudissements à gauche.) « Nos pasteurs ne seront plus le choix arbitraire du caprice d’un seul ; ils seront les élus de leurs ouailles : estimés et chéris par elles, ils en deviendront les directeurs de confiance et les plus tendres amis. « Ces curés si précieux, dont la piété nous édifie, dont l’instruction nous éclaire, dont la sagesse nous guide, dont la charité nous console, ne seront plus exclus de l’épiscopat ; il sera la récompense de leur mérite et de leur vertu. « En vain les ennemis de la religion, comme de la chose publique, taxant vos décrets d’impiété et de sacrilège, veulent-ils prétendre que vous avez excédé les pouvoirs de la souveraineté civile: vous n’avez fait, Messieurs, comme repré-(1) Ce document n’est pas inséré au Mo niteur.