[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [21 juin 1791.] 37g parties de la salle, vient d’exprimer à l’Assemblée nationale sa fidélité envers la nation. Il assure l’Assemblée nationale qu’il n’obéira qu’à ses ordres ; qu’il ne se regarde pas comme un auxiliaire étranger, mais comme un officier français qui se fera un devoir de mourir pour la patrie. (. Applaudissements vifs et réitérés de toutes les parties de la salle.) Messieurs, M. d’Affry a déterminé l’expression de ses sentiments, en demandant une faveur à l’Assemblée nationale : c’est celle qu’attendu son grand âge, il puisse se faire suppléer, dans ses fonctions, par ceux de ses officiers qui, dans la hiérarchie militaire, se trouvent immédiatement placés après lui. (S’adressant à M. d’Affry). Monsieur, l’Assemblée nationale ne doute point de votre disposition à vous confirmer à ses intentions ; et elle se flatte que vous mériterez son entière confiance. Si vous voulez vous retirer à la chancellerie, M. le ministre de la guerre vous y communiquera les ordres qu’il jugera convenables. M. lie Bois des Guays. M. le président a oublié de vous dire que M. d’Affry, dans le peu de mots qu’il vous a adressés, avait aussi assuré l’Assemblée du patriotisme des officiers de son état-major et de leur zèle à servir la cause de la nation française. ( Applaudissements .) M. Begnaud (de Saint-Je an-d'Angêly). Vous vous rappelez, Messieurs, que M. Duveyrier a été envoyé à Worms, porteur des lettres du roi et du décret de l’Assemblée nationale, sur M. de Condé. Dans ce moment-ci, on conçoit quelques alarmes sur les difficultés qu’il éprouverait à son retour : on vient de lui envoyer un passeport signé de tous les ministres ; mais ceux qui connaissent le patriotisme de M. Duveyrier désireraient que, pour assurer plus promptement son retour, ce passeport fût signé par M. le président de i’As-semblé nationale; et j’en fais la proposition à l'Assemblée. (Oui! oui!) M. le Président. Personne ne s’oppose à la proposition de M. Regnaud? (Non! non!)... Je signerai le passeport. M. Fréteau-Saint-Jnst. En exécution des décrets de l’Assemblée, les officiers de l’Assemblée nationale ont accompagné M. de Montmo-rin depuis son hôtel jusqu’à la salle ; il est donc nécessaire que cette garde, qui avait été établie à la prière de M. de Montmorin, cesse sur-le-champ, et qu’il puisse aller et venir comme il voudra. (Oui! oui!) (La motion de M. Fréteau est adoptée.) MM. de Jüfontmorin, d’Affry et les officiers de l'état-major des gardes suisses se retirent. M. Rewbell. Je suis chargé, au nom du comité de la caisse de l’extraordinaire, de prendre vos ordres pour l’exécution du décret que vous avez rendu hier. Vous avez décrété que la caisse de l’extraordinaire verserait 28 millions dans le Trésor public : on demande aujourd'hui l’exécution de ce droit. Nous n’avons pas pu prendre sur nous de le faire exécuter, parce que le décret n’est point sanctionné ; mais nous pensons, Messieurs, qu’on ne doit pas arrêter un instant les payements publics, et nous demandons les ordres de l’Assemblée pour pouvoir faire ce versement, en conséquence du décret. (Oui! oui!). (La motion de M. Rewbell est adoptée.) M. Rewbell. Il serait également nécessaire de faire vérifier l’état de la caisse. M. d’André. Je demande, Messieurs, que la décision que vous venez de prendre relativement aux recettes et dépenses de la caisse de l’extraordinaire, soit étendue aux décrets qui n’ont point encore été présentés à la sanction. M. Démeunier. Tout cela est compris dans le décret que vous avez rendu ce matin. Le voici : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : « Article 1er. Les décrets de l’Assemblé nationale déjà rendus, qui n’auraient été ni sanctionnés ni acceptés par le roi, ainsi que les décrets à rendre qui ne pourraient être ni sanctionnés, ni acceptés à raison de l’absence du roi* porteront néanmoins le nom et auront dans toute l’étendue du royaume la force de loi, et la formule ordinaire continuera d’y être employée ...... » M. Tuaut de la Bouverie. Les mots à raison de l'absence duroi doivent être placés au commencement de l’article et non pas où ils sont. M. Démeunier ..... « Article 2. Le ministre de la justice est autorisé d’y apposer le sceau de l’Etat, sans qu’il soit besoin de la sanction, ni de l’acceptation du roi, et de signer tant les minutes des décrets qui doivent être déposées aux archives nationales et à celles de la chancellerie, que les expéditions des lois qui doivent être envoyées aux tribunaux et aux corps administratifs. M. Dupont. Il faut mettre : « Il est enjoint au ministre de la justice ..... » M. Démeunier. Je crois qu’il serait possible de faire de tous les décrets de ce matin un seul décret, d’y mettre un préambule de la manière qui convient à la position où nous nous trouvons ; car il peut nous être éc happé dans une telle crise quelques fautes de rédaction. M. Rewbell. Vous voyez, Messieurs, qu’il nous faut néanmoins une formalité, qu’il nous faut même l’expédition du décret. En attendant, je demande que les commissaires de la caisse de l’extraordinaire se rendent à l’instant à la caisse pour prévenir le trésorier de vos intentions, et que ceux de la trésorerie en fassent autant. (Oui! oui !) M. Barnave. Je crois qu’il est de la plus haute importance que la rédaction des décrets, que vous avez rendus ce matin, reçoive toute la perfection possible, soit par l’ordre dans lequel ils seront placés, soit par la rédaction même. La publicité, l’extrême publicité que recevra votre procès-verbal, deviendra la véritable relation du grand événement qui nous occupe, le point de ralliement de toutes les opinions, et même un grand moyen de pacification et de confiance pour le royaume. Je vois en même temps que ce moyen-là ne saurait être retardé. En conséquence, l’Assemblée nationale ferait peut-être bien, attendu que les décrets qui ont été faits pourraient recevoir une perfection de rédaction, et même être changés dans l’ordre successif qui leur a été donné, d’autoriser son président à nommer 6 commissaires qui, adjoints à MM. les secrétaires, se retireraient à l’instant même, avec ou sans eux, pour s’oc- 376 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* (21 juin 1791.] cuper de cette rédaction, pour la présenter à l’Assemblée, et l’envoyer immédiatement à l’impression. M. Fréteau-$aint-Just. Il est bien entendu que ceux qui sont déjà envoyés aux départements ne sont pas compris dans la proposition du préopinant, j’observe aussi à l’Assemblée qu’il y a plusieurs parties du royaume, pour lesquelles les courriers ne partent que deux fois par semaine. Il est dans les mesures de sagesse d’en faire partir sur-le-champ d’extraordinaires. Les minis res viennent de me faire part de cette observation. L’Assemblée n’a pas besoin d’un décret pour cela. Plusieurs membres : Il est rendu. M. Charles de Fameth. Il serait de la plus grande importance que l’Assemblée nationale ordonnât à son comité de Constitution de se réunir dans la journée pour lui présenter le plus tôt possible un projet de proclamation du Corps législatif, dont l’objet serait, si l’absence du roi prend un peu de consistance, d’ordonner à chaque département de s’assembler, d’entretenir l’ordre dans le rovaume, le respect de la propriété, le payement des impôts, la protection des travaux de l’agriculture, enfin l’attention d’exiger toute espèce de dénombrement dans les vides, pour que tous les citoyens montent la garde, et qu’ils fassent, le service de la garde nationale. Par ce moyen, les gens malintentionnés seront contenus par les bons citoyens. Je demande que le comité de Constitution se réunisse dans la journée, pour nous présenter un plan d’adresse. (Applaudissements.) M. le Président. M. Regnaud, qui a la parole, appuie lui-même cette motion. (La motion de M. de Laraeth est adoptée.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). Je rappelle la dernière proposition de M. lVwbell. Il est très important, dans un moment où tout va se reposer sur vous, où toute l’administration se reportera à son cotre, que vous sachiez dans quel état sont les différentes caisses qui doivent fournir aux besoins publics; car c’est pour ainsi dire un nouveau genre de responsabilité et de comptabilité qui s’établit en ce moment. Je demande que les commis-aires près la trésorerie nationale et la caisse de l’extraordinaire, de concert avec les commissaires du roi pour ladite trésorerie et ladite caisse, vérifient sur-le-champ l’état actuel desdites caisses et trésoreries et dressent un procès-verbal qui sera incessamment rapporté à l’Assemblée. (Cette motion est adoptée.) M. le Président. Il reste une dernière proposition, c’est celle de M. Barnave relative à la rédaction du procès-verbal. M. Barnave. Ma proposition consiste à adjoindre à celui de MM. les secrétaires qui a pris les notes du procès-verbal 6 commissaires chargés avec lui de la rédaction de ce procès-verbal et de la classification des décrets rendus dans la iéance; ils seraient autorisés à introduire dans ces décrets les quelques changements d’expression qu’ils croiraient nécessaires. (La motion de M. Barnave est adoptée). M. Boutteville-Dumetz. Monsieur le Président, nommez les commissaires de suite, s’il vous plaît. M. le Président. Je nomme MM. Barnave, Lanjuinais, Dupont (de Nemours), d’André, Barrère et Garat jeune. (Ces commissaires se retirent immédiatement.) M. le Président. Quelques membres demandent-ils encore la parole sur les événements du jour? Un membre: M. de Laporte a-t-il été mandé? M. le Président. Oui I nous pourrions passer à l’ordre du jour. M.de Fa Tour-Maubourg. L’Assemblée nationale, ayant ordonné à M. de Bia �zat et à moi d’aller faire partir les deux aides de camp de M. de La Fayette qui avaient été arrêtés au pont Louis XVI, nous les avons conduits jusqu’à la porte Saint-Martin. Nous avons été fréquemment entourés par le peuple; mais, au milieu de la consternation, nous n’avons démêlé que le doux sentiment, que le désir de l’ordre, de la paix et de la tranquillité, que des bénédictions pour l’Assemblée nationale. Ces sentiments, je l’espère, vont détruire tous les complots des malintentionnés. (Applaudissements.) M. le Président. Personne n’a plus à faire de propositions relatives aux circonstances?... L’Assemblée jugera peut-être bon, jusqu’à ce que ses comités soient prêts à lui rendre compte des divers objets qui leur ont été renvoyés, de passer à l’ordre du jour? (Oui! oui!) M. d’André. Plusieurs membres ont demandé que la séance ne soit point levée sans un décret de l’Assemblée elle-même et que l’Assemblée reste sans désemparer jusqu’à ce décret. Je renouvelle cette motion. (La motion de M. d’André est adoptée.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion du Code pénal (1). M. Fe Pelletier - Saint -Fargeau , rapporteur. Nous sommes restés, Messieurs, à l’article 6 de la première section du titre II du Gode pénal; par suite des modifications que vous avez déjà introduites dans cette section, cet article devient le septième, le voici : « Or les cas déterminés par les précédents articles, tout homicide commis volontairement envers quelques personnes, avec quelques armes, instruments, et par quelque moyen que ce soit, sera qualifié et puni ainsi qu’il suit, selon le caractère et les circonstances du crime. » Nous avons cru devoir ajouter à cette nouvelle rédaction le mot qualifié, afin que les jurés ne puissent pas qualifier arbitrairement le crime d’homicide. L’article suivant a d’ailleurs une connexité intime avec celui dont je viens de vous donner lecture; on pourra les décréter tous les deux ensemble. Voici cet article : « L’homicide commis sans préméditation sera qualifié meurtre, et puni de la peine de 20 ans de chaîne. (Ces deux articles sont mis aux voix et adoptés.) (1) Voy. ci-dessus, séance du 18 juin 1791, page 302.