SÉANCE DU 4 BRUMAIRE AN III (25 OCTOBRE 1794) - N° 13 57 [Les citoyens Bertrand et Yoanne, anciens militaires, à la barre de la Convention nationale, le 4 brumaire an III] (28) Pères de la Patrie, Vous voyez à votre barre deux de vos enfants qui pour le soutien des droits du peuple, dési-reroient n’y pas être afin d’être utiles aux frontières à repousser les satellites des tyrans couronnés. Les combats que nous avons essuyés nous privent d’une partie de nos membres, mais n’a rien diminué en nous pour le courage; et s’il étoit encore besoin de courir venger la Représentation nationale, nous ne serions pas les derniers. Le sort à la maison nationale des invalides où est notre résidence a fait choix de nous pour vous présenter nos hommages le 5e jour de la sans-culotide et d’assister aux honneurs que vous avez rendus à l’Ami du peuple, et nous a procuré l’avantage de voir nos généraux sous les ordres desquels nous avons acquis nos blessures. Chargés par la Convention nationale de porter le drapeau quelle a décernée à l’armée du Rhin, nous ne pouvons pas lui dire l’enthousiasme avec lequel tous les républicains de cette armée l’a reçûe, ainsi que les tableaux de la Déclaration des Droits de l’homme et l’acte constitutionel. Tous les cris de vive la République, vive la Convention, vive les Français, ont retentit au milieu de deux cent mille soldats, au bruit du canon et de la musique, en face des armées des despotes. Après l’inauguration, la voiture sur laquelle nous étions placés a été entourée de dix mille défenseurs. Nous soutenions la Déclaration et l’acte constitutionelle et le drapeau de la nation française au milieu de ce cortège y a resté tout le tems de notre séjour. Trois attaques ont été faites devant nous, les 13, 17, et 20 vendémiaire, nous avons vus avec égal courage les Représentans du peuple, les généraux et les soldats, tous charger l’ennemi avec la même valeur. Nous avons vus ces esclaves mordrent la poussière, nous avons suivis les représentants Féraud, Neveu et le général Michaud, qui ont fait flotter le drapeau que nous avons porté au milieu de la plus grande victoire. L’ennemi a été repoussé de trente quatre lieues, nous avons vus arrêter leurs convois, dix sept voitures chargées de vivres, le courrier portant les correspondances de Worms et Malène. Il y a eut six cents de ces coquins en bas, trois cents faits prisonniers et cinq cents chevaux de pris avec leurs hussards. Nous n’avons rien autre à vous dire que de vous remercier des honneurs que nous avons (28) C 325, pl. 1403, p. 31. Bull., 4 brum.; J. Mont, n° 13; Débats, n° 762, 504; Moniteur, XXII, 354; J. Fr., n° 760; M. U., XLV, 76; F. de la Républ., n° 35. reçus, nous sommes chargés de vous remettre un paquet de la part du général en chef. Yoanne, Bertrand. [{On applaudit.)] (29) 13 On fait lecture d’une lettre du général en chef Michaud, commandant l’armée du Rhin. Elle renferme les expressions de la plus vive reconnoissance pour le don du drapeau fait par la Convention nationale à cette armée ; elle annonce qu’elle est déjà sous les armes, impatiente d’en faire sentir tout le prix à l’ennemi. Mention honorable, insertion au bulletin (30). Un secrétaire fait lecture de la lettre suivante, renfermée dans le paquet (31). [Michaud, commandant l’armée du Rhin à la Convention nationale, au quartier général à Neustadt, le 20 vendémiaire an III] (32) Citoyens Représentants, A la vue du drapeau que la Convention a - envoyé à l’armée et des héros mutilés qui en le portant, ajoutaient à sa majesté, les soldats de cette armée ont éclaté par des acclamations unanimes, qui prouvent combien ils sont sensibles au souvenir et aux regards de la patrie, et combien ils sont empressés de décerner à leur tour à la Convention les honneurs du triomphe pour ses travaux et ses succès. L’enthousiasme républicain, un frémissement guerrier se sont mêlés aux sentiments et aux expressions de notre reconnaissance. Nous n’avons pas renouvellé le serment de vaincre; mais nous sommes déjà tous sous les armes, impatiens de faire sentir à l’ennemi le prix de vos dons. Portées dans les combats, ces couleurs nationales feront baisser devant elles les orgueilleuses enseignes des despotes. Flottantes sans cesse à nos yeux, elles nous rappelleront qu’elles se flétriraient si elles n’étaient pas ombragées par des lauriers. L’armée a reçu avec la même satisfaction un autre drapeau, auquel tous les enfants de la patrie se sont ralliés depuis longtemps, les Droits de l’homme et l’Acte constitutionnel; celui-là a déjà vaincu; il a fait le tour du globe, porté l’épouvante et la terreur dans les palais, et secoué la mort chez les tyrans. Ah ! combien, en lisant le livre de notre constitution, cette horde de despotes, partout battus, partout (29) Débats, n° 762, 504. (30) P.-V., XL VIII, 43. (31) Moniteur, XXII, 354. (32) C 323, pl. 1376, p. 16. Bull., 4 brum.; Moniteur, XXII, 354-355; Rép., n° 35; J. Perlet, n° 762; M.U., XLV, 100; F. de la Républ., n° 35; J. Mont., n° 13. 58 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE humiliés, doit regretter d’avoir irrité et outragé une nation si impétueuse et si terrible dans les combats, qui ne fesait de loix que pour assurer la tranquillité et la justice dans ses foyers, et qui ne voulaient connaître le mot de guerre, que pour l’écarter à jamais de ses frontières ! Salut et fraternité. Michaud. Le Président répond à ces braves défenseurs en ces termes (33) : C’est toujours avec un nouvel intérêt que la Convention nationale voit dans son sein les enfants de la patrie, et surtout ceux qui en répandant leur sang, ont donné comme vous des preuves de leur amour pour elle. En envoyant à l’armée du Rhin un drapeau qui doit être le palladium de la liberté et le gage de nouvelles victoires, en lui envoyant la Déclaration des Droits, la Convention nationale ne pouvoit confier ces précieux dépôts en des mains plus agréables aux défenseurs de la patrie. La présence des braves vétérans de la révolution ne pouvoit que porter au plus haut degré le courage de nos guerriers. Vous avez été témoins de leurs victoires, vous désirez partager encore leurs travaux : la Convention applaudit à votre zèle; mais avant tout, réparez dans un glorieux repos vos forces épuisées par les blessures, pour les consacrer de nouveau à la patrie. La Convention nationale a décrété l’insertion au bulletin des lettres et adresses. 14 La société populaire de Vais, département de l’Ardèche, félicite la Convention nationale sur ses glorieux travaux, l’invite à rester à son poste et lui envoie 405 L pour servir à l’armement d’un vaisseau. Mention honorable, insertion au bulletin (34). [Le vice-président de la société populaire de Vais, au citoyen président de la Convention nationale, le 24 vendémiaire an III] (35) Citoyen président, Je t’envoie le produit d’une souscription ouverte dans notre société et l’adresse quelle a voté pour la Convention. Tu voudras bien lui en donner connaissance. Salut et fraternité X. Champanhets vice-président, Giraud père. (33) Bull., 4 brum. Moniteur, XXII, 355; Rép., n° 35. (34) P.-V., XL VIII, 43. (35) C 323, pl. 1378, p. 12. [La société populaire de Vais à la Convention nationale, s. d.] (36) Augustes représentants Un tyran usurpateur cherchait à setablir sur les ruines de celui quon appellait héréditaire mais nouveaux Hercule vous laves écrasé avec la meme massue que vous écrasâtes le premier, cependant vos pénibles et immortels traveaux ne sont peut etre pas encore finis ; il peut exister des nouveaux Anthées qui reprennent des forces en mordant la poussière. Laristocratie agonisante, le modérantisme désolé, les intriguants toujours audacieux vous entourent encore de leurs serpents mais vous les etoufferes comme hercule ceux de son berceau. Restez donc à votre poste infatiguables Représentants, la société populaire de Vais vous y invite, le salut de la patrie lexige, la République serait perduë si vous labandonies un instant vous en etes les fondateurs et les peres, notre confiance en vous nous fait espe-rer que vous en serez les sentinelles vigilantes et nous promettons den etre les invariables défenseurs. La société désirant donner des preuves constantes de son amour pour la patrie ouvrit une souscription le vingtième thermidor pour contribuer a larmement et équipement dun vaisseau monté pardes républicains capables de purger lempire des mers de ces forteresses flottantes dont linfeste le tyran d’Albion cette souscription a fourni la somme de quatre cents cinq livres que nous nous empressons de vous envoyer avec la protestation de faire touts les sacrifices que les besoins de la république exigeront nous navons tant tardé à faire cet envoy que pareeque la plupart des sociétaires vrais sans culottes étaient occupés aux pénibles traveaux quexige la culture de cette commune. Du moment que nous avons appris la reddition de Bellegarde à la république notre joye sest manifestée par des chants dallegresse par une illumination ordonnée par la municipalité et des fêtes civiques aux quelles ont assistés touts les habitants de cette commune dans lan-thousiasme qui nous transportait chacun disait quavec les sages représentants qui gouvernent et les armées courageuses qui deffendent la république on pouvait lappeller avec assurance impérissable. Vive la République, vive la Convention, vive la Montagne. X. Champanhets, vice-président, Giraud, secrétaire. (36) C 323, pl. 1378, p. 11. Mention marginale de la réception des 405 L.