[24 février 1791 .J 503 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale,] « Décrète que, conformément audit résultat, il sera payé par la caisse de l’extraordinaire, la somme de 15 millions 153,924 livres 11 sous 6 deniers, à l’effet de quoi les leconnaissances de liquidation seront expédiées aux officiers liquidés, en satisfaisant par eux aux formalités prescrites par les décrets. » (Ce décret est adopté.) L’ordre du jour est la suite de la discussion de l’affaire de Mmes (i). M. Rabaud de Saint-Etienne. Messieurs, si j’ai demandé la parole sur celte affaire, c’est qu’il fallait un député de Nîmes pour éclaircir quelques faits, pour répondre aux calomnies répandues contre une partie de ses habitants. Je ne retracerai pas tous les détails que vous adonnés le rapporteur; je ne m’attacherai pas à suivre M. le maire de Nîmes dans le dédale de son récit ; je me crois seulement obligé de repousser quelques faits inexacts. La municipalité de Nîmes cherche à vous séduire par des procès-verbaux qif elle-même a dressés comme elle a voulu; elle s’est flattée que le masque d’authenticité pourrait vous en imposer; mais les procès-verbaux sont des pièces extrajudiciaires; elles sont suspectes; ce sont des déclarations dont la plupart ont été recueillies après coup. Je vous demande si la municipalité accusée peut vous donner en témoignage son témoignage, si elle a pu informer quand les tribunaux informaient légalement et par vos décrets, et si vous pouvez balancer entre l’information publique et juridique, qui eA déposée au comité, et l’information illégale et secrète que la municipalité lui oppose. Après cette observation, je vais droit au fait, je laisse de côté la discussion. M. de Marguerittes a paru éloigner soigneusement les faits qui déposent contre la municipalité, et détourner de votre attention les circonstances frappantes du projet de contre-révolution, formé dans les murs de ma malheureuse cité : je vais vous présenter la question sous son vrai point de vue. La municipalité de Nîmes accuse les protestants d’avoir formé et exécuté le complot de massacrer les catholiques. Voilà crûment et simplement son assertion. Les ménagements dont M. le maire de Nîmes a usé dans sa défense ne sauraient effacer ce que la municipalité elle-même a écrit; et ce moyen, plus dangereux qu’une attaque même qui pouvait affaiblir la défense de mes concitoyens, ne m’empêchera pas de dire la vérité. Je soutiens au contraire et je vous prie, Messieurs, de bien peser la justesse de mes expressions. Je soutiens qu’un certain nombre de factieux soutenus par la municipalité avaient formé le projet d’exécuter une guerre civile dans le Languedoc pour y opérer une contre-révolution; ils ont lout tenté pour faire battre les protestants avec les catholiques, ce à quoi ils n’ont pu réussir. Voici, Messieurs, les deux points dont je vous supplie de ne pas écarter votre attention. La municipalité prétend que les protestants ont formé et exécuté le projet de massacrer les catholiques. Cette assertion est surtout souverainement injuste aux yeux des hommes sans passion. Les protestants” ne sont dans la ville de (1) Voy. ci-dessus, séance du J9 février 1791, p. 299, le rapport de M. Alquier sur cet objet. Nîmes qu’un sur trois. Dans le ci-devant diocèse, ils ne sont que comme un à six; dans le Languedoc, ils ne sont que comme un à neuf et peut-être à dix ; à qui persuadera-t-on qu’étant dans une proportion aussi faible, ils aient formé le projet aussi absurde que barbare, de massacrer les catholiques. L’accusation est donc absurde, on n’a pu les persuader dans les faubourgs de Nîmes qu’à quelques ignorants qu’on avait intérêt de séduire. Et, Messieurs, les protestants qu’on s'efforce de retirer malgré eux de l’obscurité, pour en faire un motif de guerre civile, que vous demandent-ils ? Rien. Vous avez tout fait pour eux, en déclarant pour tous les citoyens les droits de l’homme. Vous avez semé pour tous les Français le germe de la liberté; ils auront aussi leur part de la récolte; voilà leur intérêt, et ils entendent leurs intérêts. On ne fera donc croire à personne qu’ils aient voulu obtenir, par une force qu’ils n’ont pas, des bienfaits déjà obtenus, et qu’ils ne peuvent conserver que par la sagesse et la modération. ( Applaudissements .) 11 y a deux partis dans Nîmes. Comme dans plusieurs villes ces deux partis sont les amis et les ennemis de la Constitution; et je vous supplie, Messieurs, de ne pas perdre de vue cette considération importante et qui vous donnera la clef de la conduite des municipaux. Il y a deux partis dans Nions, dont l’un sont tous les gens de l’ancien régime ; j’avoue que presque tous ces messieurs sont catholiques, mais iis ne sont pas catholiques de Nîmes. Dans l’autre parti sont les protestants et les catholiques, qui aiment le nouveau régime ; les commerçants qui chérissent une Constitution qui doit affranchir le commerce de ses entrave?; les propriétaires de tous genres, qui vous bénissent de les avoir affranchis de la gabelle et de la dîme, de? conseillers catholiques, des procureurs et des avocats de l’une et de l’autre religion. 11 y a deux partis à Nîmes, l’un est mixte et l’autre ne l’est pas: l’un veut la paix et la tranquillité, et l’autre le trouble. Le cri du premier est : Vive la nation , vivent le roi et la loi ! Le cri du second est: Vive le roi , vive la croix , vive l’aristocratie, à bas la nation ! Un membre à droite applaudit. ( Tumulte prolongé.) Plusieurs membres : C’est un malentendu, {Le tumulte continue.) M. le Président. Il n’y a personne dans cette Assemblée capable d’insulter à ce point la nation; c’est un malentendu. M. Rabaud de Saint-Etienne. Tout est mixte dans le parti des citoyens qui dénoncent la municipalité; et les catholiques et les protestants l’ont condamnée également. Le procureur du roi qui a fait informer, et que la municiprdité inculpe, est catholique; les juges dont elle se plaint sont catholiques; les témoins qui ont déposé contre elle sont protestants et catholiques, et les plus fortes dépositions sont celles des prêtres. Dans l’insurrection du 13 juin, dont l’objet était de dissiper le corps électoral et d’empêcher la formation des départements, les gardes nationales accoururent à Nîmes au secours de leurs électeurs, dont quelques-uns catholiques avaient été blessés ou menacés. Ces généreux citoyens étaient mixtes; des curés se mirent eux-mêmes à la tête des bandes courageuses, et les conduisirent eux-mêmes dans notre infortunée cité. Si