199 SÉANCE DU 18 THERMIDOR AN II (5 AOÛT 1794) - N“ 15-16 15 Deuxième décret La Convention nationale, sur la proposition [de MUSSET] d’autoriser les représentai du peuple en mission à faire mettre en liberté les citoyens qui auroient été mis en état d’arrestation par d’autres représentans du peuple, sur de légers motifs, passe à l’ordre du jour, motivé sur les pouvoirs illimités dont sont revêtus les représentans du peuple envoyés en mission (1). 16 Troisième décret La Convention nationale décrète : I. Le Comité de sûreté générale est chargé de faire mettre en liberté tous les citoyens détenus comme suspects pour des motifs qui ne sont pas désignés par la loi du 17 septembre dernier (vieux style). IL Tous les comités de surveillance ou révolutionnaires de la République seront tenus de donner aux détenus, ou à leurs parens et amis, copie des motifs de leur arrestation. III. Les motifs des mandats d’arrêt décernés par les représentans du peuple, et par les comités de salut public et de sûreté générale, seront également communiqués aux détenus, ou à leurs parens ou amis (2). BOURDON (de l’Oise) : Il faut que la justice soit mise à l’ordre du jour le plus permanent; rien n’est plus facile pour les détenus; la loi du 17 septembre définit tout ce qu’on entend par gens suspects. Eh bien, les motifs des arrestations sont laissés au comité de sûreté générale : ce travail est bien fait, il est rangé par département, par section; il ne s’agit donc plus que de confronter les motifs d’arrestation avec la loi, et de mettre en liberté tous ceux dont les causes d’arrestation ne sont pas énoncées dans cette loi. C’est ainsi que la Convention prouvera au peuple quelle veut la justice; c’est ainsi qu’elle recueillera les bénédictions universelles. (On applaudit). Je fais encore une proposition : c’est que les comités révolutionnaires soient tenus de donner (1) P.-V., XLIII, 57. Décret n° 10 241. Rapporteur: Musset. Ann. R. F., n° 148 (pour 248); J. Fr., n° 681; Moniteur (réimpr.), XXI, 402; Débats, n° 684, 311; Ann. patr., n° DLXXXII; C. univ., n° 948; Mess. Soir, n° 716; M.U., XLII, 303; Rép., n° 229; J. Lois, n° 679; J. Sablier (du soir), n° 1 481; C. Eg., n° 717; J. Perlet, n° 682; Audit, nat., n° 681; F.S.P., n° 397; J. Paris, n° 583; J. Mont., n° 98; J. S. -Culottes, n° 537; J. univ., n° 1 717. (2) P.-V., XLIII, 57, Décret n° 10 242. Rapporteurs : Bassal et Bourdon de l’Oise. Bm, 20 therm.; Audit, nat., n° 681; Rép., n° 229; J.S.-Culottes, n° 537; Ann. R.F., n° 147 (pour 247); C. univ., n° 948; J. Lois, n° 679. aux parents des détenus les motifs de leur arrestation. (Nouveaux applaudissements). Je citerai un fait que je ne voulais pas croire, mais j’en ai la preuve. Dans une section, des citoyens avaient demandé le renouvellement du comité révolutionnaire; ce comité les a fait arrêter, et depuis ce temps ils sont restés au violon, sans avoir été transférés dans une maison d’arrêt. BENTABOLE : Il y a des détenus qui n’ont pas de parents : je demande donc que les motifs d’arrestation soient communiqués aux détenus et à leurs parents. Les propositions de Bourdon sont décrétées, avec l’amendement de Bentabole. Un secrétaire fait lecture de la rédaction du décret portant que les motifs de l’arrestation d’un citoyen seront communiqués à ses parents. FAYAU : La Convention nationale ne doit pas oublier les grands principes de la liberté. Elle ne croit pas sans doute que tous les aristocrates soient punis, et que tous les détenus soient innocents. Quel est donc le système de ceux qui, dans ce moment, veulent que les motifs de l’arrestation soient communiqués aux parents des détenus ? (Murmures). Sans doute, il y a eu des vexations exercées contre des patriotes, et il est du devoir de la Convention de faire des recherches à cet égard. Quant aux détenus, il existe un décret qui porte qu’ils seront tenus de donner des preuves de leur civisme depuis le mois de juillet 1789; il est donc inutile de leur communiquer les motifs de leur arrestation, puisqu’il suffira d’exécuter votre décret. (De violents murmures s’élèvent dans toutes les parties de la salle. Aux voix la rédaction du décret ! s’écrient plusieurs membres). On ne m’a pas entendu : il est clair que, si votre décret est exécuté, il est inutile de communiquer aux parents des détenus les motifs de leur arrestation. (Nouveaux murmures). On demande l’ordre du jour. TALLIEN : Citoyens, s’il y avait à s’étonner de quelque chose, ce serait des principes qui viennent d’être proférés dans cette tribune; nous ne sommes plus au temps où la main de fer qui a pesé pendant quelques mois sur le peuple français faisait sentir ici sa funeste influence : nous avons reconquis notre liberté dans la nuit du 9 au 10 thermidor; il faut que le peuple en jouisse ! (On applaudit). Et moi aussi je suis bien éloigné de vouloir défendre la cause des ennemis du peuple; depuis longtemps nous leur avons voué une haine éternelle; la mort leur est réservée; mais les citoyens paisibles, les bons citoyens doivent être protégés : c’est le vœu de la Convention nationale. (On applaudit). Pourquoi donc veut-on laisser ignorer aux détenus les motifs de leur arrestation ? Quoi ! l’on plongera les citoyens dans les cachots sans leur en dire les motifs ! Cette maxime est horrible; elle répugne à tous les membres de cette assemblée (Vifs applaudissements). Sans doute, il a dû être pris des mesures extraordinaires de sûreté générale, commandées par les dangers de la patrie; et il en faut prendre encore dans ce moment contre les restes impurs de la faction que vous avez abattue; il en faut prendre contre ces caméléons 200 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE en politique, contre ces hommes qui, au moment où Robespierre était à cette tribune, avaient peut-être pour le soutenir un discours préparé dans leur poche. Mais c’est assez nous occuper des individus; il faut, comme je l’ai déjà dit, ne s’occuper ici que des grands intérêts de la patrie, et que l’union la plus intime règne entre les hommes qui ont abattu le tyran, afin qu’une nouvelle tyrannie ne s’élève pas sur les débris de l’ancienne. Je reviens aux principes. Il ne faut plus qu’un citoyen ait à se plaindre d’avoir été arrêté d’une manière arbitraire; il faut donner aux patriotes qui, dans ce moment, gémissent dans les cachots, les moyens de faire éclater leur innocence, et peut-être ceux qui s’opposent à cette mesure veulent-ils empêcher que le peuple sache que plusieurs de ses défenseurs ont été arrêtés sans motifs. Le décret qu’on vous propose est bienfaisant et juste; il rend la liberté aux citoyens que l’arbitraire seul avait pu frapper, et vous met à même de connaître et de faire punir les vrais ennemis du peuple. Citoyens, la tyrannie a plané pendant quelque temps sur cette enceinte; mais la Convention a recouvré toute son énergie, et la justice doit maintenant la faire bénir de tous les Français. Guerre à mort aux ennemis du peuple et aux fripons ! Protection et justice à l’innocent opprimé 1 Je demande que l’ordre du jour fasse justice de la proposition du préopinant. [ Vifs applaudissements ] BOURDON (de l’Oise) : Afin que tout le peuple sache que cette proposition, digne de l’inquisition d’Espagne, a été punie comme elle le mérite, il est bon de dire qu’elle n’a été appuyée par personne. (On applaudit). La Convention passe à l’ordre du jour (1). 17 Quatrième décret Un membre [GUFFROY] dénonce à la Convention, 1) Que, par arrêté de Joseph Le Bon, les oisifs et les fainéans d’Arras reçoivent 22 sous et demi par jour sur 78 000 liv. qu’il a mises à la disposition de la commune; 2) Que par autre arrêté, Joseph Le Bon a fait salarier la garde nationale toute entière, comme si la place avoit été en état de guerre, et a menacé de réputer suspects ceux qui ne voudroient pas recevoir; 3) Que Joseph Le Bon, en partant d’Arras, primidi 11 de ce mois, a dit qu’il re-(1) Moniteur (réimpression), XXI, 402-403; Débats , n° 684, 311 et 312-314; Ann. R.F., n° 148 (248); Ann. pair., n° DLXXXII; Mess. Soir, nos 716 et 717; J. Mont., n° 98; M.U., XLII, 303; C. Eg., n° 717; J. Paris, n° 583; J. Perlet, n° 682; J. Fr., n° 680; F.S.P., n° 397; J. univ., n° 1 717. viendroit sous 6 jours; et pour maintenir la terreur à l’ordre du jour, il a fait laisser la guillotine toujours plantée. Demande que ces deux soldes soient supprimées, et que la guillotine soit déplacée après chaque exécution. La Convention renvoie toutes ces propositions au comité de salut public (1). 18 Cinquième décret On admet à la barre une députation de la commune de Landrecies, qui présente une pétition d’après laquelle le décret suivant est rendu (2) : La Convention nationale, sur la pétition de la commne de Landrecies (3), [convertie en motion par LESAGE-SENAULT], décrète que l’administration et le tribunal du district, précédemment établis au Quesnoy, tiendront provisoirement leur séances à Landrecies; renvoie au comité de division l’examen de la double question de savoir si le district du Quesnoy doit subsister, et s’il doit être définitivement maintenu à Landrecies (4). 19 CHARLIER : Je reçois une lettre de Lebois, accusateur public près le tribunal criminel de Paris, qui annonce que l’identité de Coffinhal a été constatée et qu’il a été livré à l’exécuteur (5). [On applaudit ]. [L’accusateur public du tribunal criminel de Paris au cn présid. de la Conv.; 18 therm. Il] (G) Citoyen président, D’après l’arrêté du comité de sûreté générale et de surveillance de la Convention nationale, en datte du 17 thermidor présent mois, portant que le tribunal criminel, attendu la suspension du tribunal révolutionnaire, est requis de constater l’identité de la personne du traître (1) P.-V., XLIII, 58. Décret n° 10 243. Le rapporteur serait Guffroy. Moniteur (réimpr.), XXI, 402; Débats, n° 684, 310; J. Sablier (du soir), n° 1 481; M.U., XLII, 304; Ann. R.F., n° 148 (248); Rép., n° 229; J. Fr., n° 680; J. Mont., n° 98; C. univ., n° 948; Mess. Soir, n° 716; F.S.P., n° 397; J. Perlet, n° 682; Audit, nat., n° 681; J. Paris, n° 583. (2) Moniteur (réimpr.), XXI, 402. (3) Nord. (4) P.-V., XLIII, 58. Décret n° 10 244. Rapporteur: Guffroy. J. Paris, n° 583; J. Fr., n° 680 (selon ces deux gazettes, c’est Lesage-Senault qui convertit en motion la pétition de la commune de Landrecies); Débats, n° 684, 310; Rép., n° 229; J. Perlet, n° 682; Audit, nat., n° 681; F.S.P., n° 397. Mentionné par J. Mont., n° 98 et J. Sablier, n° 1 482. (5) J. FY., n° 680; Moniteur (réimpr.), XXI, 403. (6) C 312, pl. 1 243, p. 40. En mention marginale : renvoyé aux Archives. 200 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE en politique, contre ces hommes qui, au moment où Robespierre était à cette tribune, avaient peut-être pour le soutenir un discours préparé dans leur poche. Mais c’est assez nous occuper des individus; il faut, comme je l’ai déjà dit, ne s’occuper ici que des grands intérêts de la patrie, et que l’union la plus intime règne entre les hommes qui ont abattu le tyran, afin qu’une nouvelle tyrannie ne s’élève pas sur les débris de l’ancienne. Je reviens aux principes. Il ne faut plus qu’un citoyen ait à se plaindre d’avoir été arrêté d’une manière arbitraire; il faut donner aux patriotes qui, dans ce moment, gémissent dans les cachots, les moyens de faire éclater leur innocence, et peut-être ceux qui s’opposent à cette mesure veulent-ils empêcher que le peuple sache que plusieurs de ses défenseurs ont été arrêtés sans motifs. Le décret qu’on vous propose est bienfaisant et juste; il rend la liberté aux citoyens que l’arbitraire seul avait pu frapper, et vous met à même de connaître et de faire punir les vrais ennemis du peuple. Citoyens, la tyrannie a plané pendant quelque temps sur cette enceinte; mais la Convention a recouvré toute son énergie, et la justice doit maintenant la faire bénir de tous les Français. Guerre à mort aux ennemis du peuple et aux fripons ! Protection et justice à l’innocent opprimé 1 Je demande que l’ordre du jour fasse justice de la proposition du préopinant. [ Vifs applaudissements ] BOURDON (de l’Oise) : Afin que tout le peuple sache que cette proposition, digne de l’inquisition d’Espagne, a été punie comme elle le mérite, il est bon de dire qu’elle n’a été appuyée par personne. (On applaudit). La Convention passe à l’ordre du jour (1). 17 Quatrième décret Un membre [GUFFROY] dénonce à la Convention, 1) Que, par arrêté de Joseph Le Bon, les oisifs et les fainéans d’Arras reçoivent 22 sous et demi par jour sur 78 000 liv. qu’il a mises à la disposition de la commune; 2) Que par autre arrêté, Joseph Le Bon a fait salarier la garde nationale toute entière, comme si la place avoit été en état de guerre, et a menacé de réputer suspects ceux qui ne voudroient pas recevoir; 3) Que Joseph Le Bon, en partant d’Arras, primidi 11 de ce mois, a dit qu’il re-(1) Moniteur (réimpression), XXI, 402-403; Débats , n° 684, 311 et 312-314; Ann. R.F., n° 148 (248); Ann. pair., n° DLXXXII; Mess. Soir, nos 716 et 717; J. Mont., n° 98; M.U., XLII, 303; C. Eg., n° 717; J. Paris, n° 583; J. Perlet, n° 682; J. Fr., n° 680; F.S.P., n° 397; J. univ., n° 1 717. viendroit sous 6 jours; et pour maintenir la terreur à l’ordre du jour, il a fait laisser la guillotine toujours plantée. Demande que ces deux soldes soient supprimées, et que la guillotine soit déplacée après chaque exécution. La Convention renvoie toutes ces propositions au comité de salut public (1). 18 Cinquième décret On admet à la barre une députation de la commune de Landrecies, qui présente une pétition d’après laquelle le décret suivant est rendu (2) : La Convention nationale, sur la pétition de la commne de Landrecies (3), [convertie en motion par LESAGE-SENAULT], décrète que l’administration et le tribunal du district, précédemment établis au Quesnoy, tiendront provisoirement leur séances à Landrecies; renvoie au comité de division l’examen de la double question de savoir si le district du Quesnoy doit subsister, et s’il doit être définitivement maintenu à Landrecies (4). 19 CHARLIER : Je reçois une lettre de Lebois, accusateur public près le tribunal criminel de Paris, qui annonce que l’identité de Coffinhal a été constatée et qu’il a été livré à l’exécuteur (5). [On applaudit ]. [L’accusateur public du tribunal criminel de Paris au cn présid. de la Conv.; 18 therm. Il] (G) Citoyen président, D’après l’arrêté du comité de sûreté générale et de surveillance de la Convention nationale, en datte du 17 thermidor présent mois, portant que le tribunal criminel, attendu la suspension du tribunal révolutionnaire, est requis de constater l’identité de la personne du traître (1) P.-V., XLIII, 58. Décret n° 10 243. Le rapporteur serait Guffroy. Moniteur (réimpr.), XXI, 402; Débats, n° 684, 310; J. Sablier (du soir), n° 1 481; M.U., XLII, 304; Ann. R.F., n° 148 (248); Rép., n° 229; J. Fr., n° 680; J. Mont., n° 98; C. univ., n° 948; Mess. Soir, n° 716; F.S.P., n° 397; J. Perlet, n° 682; Audit, nat., n° 681; J. Paris, n° 583. (2) Moniteur (réimpr.), XXI, 402. (3) Nord. (4) P.-V., XLIII, 58. Décret n° 10 244. Rapporteur: Guffroy. J. Paris, n° 583; J. Fr., n° 680 (selon ces deux gazettes, c’est Lesage-Senault qui convertit en motion la pétition de la commune de Landrecies); Débats, n° 684, 310; Rép., n° 229; J. Perlet, n° 682; Audit, nat., n° 681; F.S.P., n° 397. Mentionné par J. Mont., n° 98 et J. Sablier, n° 1 482. (5) J. FY., n° 680; Moniteur (réimpr.), XXI, 403. (6) C 312, pl. 1 243, p. 40. En mention marginale : renvoyé aux Archives.