[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [26 août 179I»J lesdites aliénations seront terminées, il sera fait une expédition en parchemin, contenant l’état de toutes les municipalités adjudicataires de domaines nationaux, à laquelle expédition le sceau de l’Etat sera apposé, et elle sera remise aux archives nationales. » L’admission de cet article amènera une économie d’environ 40,000 éc us. (L’article additionnel proposé par M. Camus est mis aux voix et adopté.) En conséquence, le décret est rendu dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d’aliénation, décrète; Art. 1er. « A compter du 1er septembre prochain, le commissaire du roi, administrateur de la caisse de l’extraordinaire, sera chargé de la suite des opérations relatives à la vente des domaines nationaux; en conséquence, le comité d’aliénation lui fera remettre tous les papiers, mémoires et états existant dans ses bureaux, autres que les minutes de décrets, et états de ventes faites aux municipalités, lesquels seront déposés aux archives de l’Assemblée nationale. Le ministre de la justice adressera au commissaire du roi, administrateur, une expédition en forme, de tous les-dits décrets, et de ceux qui seront rendus à l’avenir. Art. 2. « Les directoires de département entretiendront avec le commissaire du roi une correspondance exacte sur tous les objets concernant la vente des biens nationaux, et lui adresseront régulièrement les extraits des procès-verbaux d’estimation ou d’évaluation, exemplaires d’affiches, expéditions des procès-verbaux d’adjudication, et généralement tous les états qu’iis étaient tenus d’adresser au comité d’aliénation; ils lui adresseront également tous les éclaircissements qu’il pourra leur demander, conformément à la loi du 15 décembre 1790. Art. 3. « Le commissaire du roi surveillera toutes les opérations, maintiendra l'observation des règles et conditions prescrites pour la validité des adjudications, et indiquera aux adjudicataires les moyens d’exécuter les lois. Art. 4. « Il veillera pareillement à ce que les procureurs généraux syndics, et les procureurs syndics, sous leurs ordres, poursuivent avec exactitude contre les adjudicataires le payement aux termes prescrits, et la folle enchère à défaut de payement, et à ce qu’ils dénoncent à l’accusateur public, et poursuivent devant les tribunaux tous les délits, fraudes et prévarications qui pourraient se commettre dans les enchères. Art. 5. « En cas de négligence grave de la part des administrateurs, ou de contravention aux lois concernant la vente des biens nationaux, le commissaire du roi en instruira le ministre de l’intérieur, afin que le roi, sur le compte qui lui en sera rendu, puisse annuler les actes irréguliers ou contraires aux lois que les corps administratifs se seraient permis, et employer contre eux tous les moyens que la Constitution remet en son pouvoir; et quel que sqit le résultat du conseil, le ministre dp l’intérieqr eq cjonnergi connaissance officielle aq cpmmissqire du rqi. Art. 6. « Le commissaire du roi s’adressera �gaiement au ministre de l’intérieur, toutes les lois que l’exécution des lois relatives à l'aliénation des domaines nationaux lui pqraîtrq, exiger des proclamations, Art. 7. « A compter de l’époque fixée par l'article 1er du présent décret, le comité d’aliénation n’exercera plus d’autres fonctions que celles qui vont être désignées. 11 préparera et rapportera à l’Assemblée nationale leq projets de lois nécessaires à la suite de l’opéFatiQU de raiiëpation deq biens nationaux. Il lui fera également le rapport deq décrets qui restent à rendre au profit dpq municipalités ; il surveillera, de cpnpért avec les commissaires de le caisse de l’extraordipaire, ]eq opérations confiées au commissaire du roi, administrateur, pour en instruire l’ÂsqemfiJée nationale, toutes les fois qu’il sera nécessaire. Art. 8. « 11 ne sera plus fait d’expédition en perche-? min des décrets d’aliénation des domaines nationaux aux municipalités, ni des états joints âuxfiif� décrets, soit dé ceux q pi ont été rendus jusqu’à ce jour, et qui n’ont pas encore été expédiés, qoif de ceux qui le seront 4 l’avenir ; mais, après que lesdites aliénations seront terminées, il sera fait une expédition ep parchemin, concernant l’état de toutes les municipalités adjudicataires de domaines nationaux, a laquelle expédition hj sceau de l’Eiat sera apppsê, et e|le. sçra femtSé aux archives nationales. > M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires�à’uneadresse des habitants de la ville de Valence, a laquelle est jointe copié d’une lettre par eux adressée au mfpistre dp guerre, relativement â là translation de l’école d’artillerie de Valence I Grenofiïë. (L’Assemblée ordonné le renvoi dp cette adresse au comité militaire.) M. le Président, conformément à ce qui avait été proposé à l’ouverture de (a séance,' avertit les membres du comité des rapports qui ne péu-vent pas en suivre assidûment les travaux, d?en prévenir l’Assemblée, pour qu'il soit pourvu à leur remplacement. : MM. Brevet de Roaujour, Barnier et Régnier, membres, de ce comité , prient l'Assemblée de vouloir bien recevoir leur démission. L’ordre du jour est la suite de la discussion, des articles q ajouter dans Pacte constitution *> nel (1). M. Démeunier, rapporteur (en P absence de M-Thouret). Vous vous rappelez, Messieurs, les points que vous avez décidés hier. Après avoir discuté longtemps le projet des comités, on est convenu qu’on irait aux voix sur 5 questions ; la première et la seconde de ces questions ont été résolues ; vous avez décrété : 1° Que les membres de la famille du roi jouirai* nt des droits de citoyen, actif ; 2° Qu’ils ne seraient pas éligibles aux places et emplois à la nomination du peuple. (1) Voy. ci-dessus, séance (lu 28 août 4701, p. 108. 126 août 1791 .J 72« [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Il s’agit maintenant d'examiner : 3° Si les membres de la famille du roi seront éligibles aux places et emplois qui sont à la nomination du pouvoir exécutif; 4° Si les membres de la famille du roi auront une dénomination particulière; 5° Enfin, quelle sera cette dénomination. Avant de reprendre la troisième question, il est bon de faire à l’Assemblée quelques observations très courtes que la discussion d’hier a rendues nécessaires. Les deux comités ne sont allés chercher dans aucun pays l’exemple qu’ils vous proposent, mais, comme on a articulé nettement un fait d’une fausseté manifeste, qui pourrait induire en erreur, je demande à le relever en peu de mots. On vous a dit qu’en Angleterre, les membres de là farailh’ du roi n’étaient pas distingués des autres citoyens. Le fait est complètement faux : tous les membres mâles de la famille du roi sont pairs-nés; ils entrent dans la Chambre des pairs et jouissent du droit de pairie, privilège unique qui leur est spécialement réservé ; en effet, les autres pairs sont divisés en 5 classes, les ducs, les comtes, les vicomtes, marquis et barons, à la suite du régime féodal. Cette Constitution anglaise a imaginé des bizarreries, nommément sur les droits des fils des pairs de la Grande-Bretagne : le fils aîné du pair, qui est duc, entre dans la Chambre des pairs ; tous les autres fils, marquis, vicomtes ou barons, ne peuvent y entrer que lorsque la pairie leur survient par droit d’hérédité. Ainsi, en Angleterre, par un privilège spécial inhérent à la royauté, conséquence immédiate de la succession héréditaire, les parents mâles de la famille du roi forment une classe tellement particulière que chacun de ces enfants mâles entrent de plein droit dans la Chambre des pairs. Je n’ai voulu que détruire un fait et rétablir la vérité ; il faut maintenant examiner les seules uestions qui restent à résoudre : les membres e la famille du roi peuvent-ils être éligibles aux emplois et places à la nomination du pouvoir exécutif, faut-il leur donner une dénomination, et enfin, quelle sera cette dénomination? Je serai très court sur cette question. D’après rle décret que vous avez rendu hier, nous devons marcher avec circonspection et examiner avec soin le décret qui va nous occuper. Il est des fonctions données par le pouvoir exécutif qui présentent quelques, dangers ; mais il en est qui n’en offrent aucun, parce qu’elles sont assujetties à une marche constitutionnelle dont on ne peut s’écarter. Nous pensons qu’il n’y a pas d’inconvénient à laisser les membres de la famille du roi exercer ces sortes d’emplois, tels que ceux de l’armée, par exemple, s’ils y ont du goût. Ainsi un membre de la branche d’Orléans (le duc de Chartres) se distingue déjà par une conduite non seulement héroïque , mais patriotique et sage dans tous les sens ; il serait cruel de lui faire abandonner la carrière dans laquelle il est entré et qui semble lui être destinée ; car le même citoyen, quoique appelé éventuellement au trône ou à la régence, d’après l’organisation militaire et les décrets que vous avez rendus ne peut jamais monter en grade qu’à son tour : il se trouve colonel maintenant ; il ne pourra devenir maréchal de camp et officier général qu’après avoir passé, comme tous les autres citoyens, par un temps d’exercices et de grades. Il est donc évident qu’un membre de la dynastie sera désormais obligé de commencer, comme le dernier de tous les citoyens, par le dernier des grades, de parcourir tous les grades et d’y arriver à son tour. Il y a, à la vérité, des places dans l’armée qui sont à la nomination du roi; mais, rappelez-vous, Messieurs, que le pouvoir exécutif ne donne c�s emplois qu’à un certain degré de l’échelle, et qu’alors même son choix sera restreint parmi ceux qui auront passé par les grades inférieurs. Il ne peut donc y avoir de danger pour la liberté publique, et la justice et l’équité paraissent demander que vous laissiez les membres de la famille royale courir la carrière des armes. Pourront-ils commander en chef les armées? Cette question au premier abord est beaucoup plus délicate, mais si les membres de la famille du roi ne peuvent arriver aux grades d’officiers généraux, soit de maréchal de camp, soit de lieutenant général ou de maréchal de France, que comme tous les autres citoyens, après avoir parcouru tous les grades, on ne peut pas craindre qu’il y ait un grand inconvénient a ce qu’ils soient généraux d’armée; d’ailleurs le nombre en sera peu considérable, et il me semble que, puisque vous les avez rangés dans la classe des citoyens actifs, rien ne s’oppose à ce qu’ils puissent parvenir aux grades conformément aux principes de la Constitution. Le point le plus difficile est la place au ministère. Par une fiction de la loi, le roi est irresponsable; la responsabilité qu’on n’a pas pu placer sur la tête du roi est placée sur la tête des ministres ; le roi est censé faire pour le bien du peuple ce qui est le plus convenable ; il est censé toujours exécuter les lois ; mais, comme il ne peut donner un ordre ou du moins le faire exécuter s’il n’est contresigné par un ministre, qui répond de toutes les actions du roi, il s’agit de voir si la responsabilité des membres de la famille du roi qui occuperaient le ministère serait aussi sûre que celle des autres citoyens ; auraient-ils assez d’influence ou de prépondérance pour se soustraire à l’action du pouvoir législatif instruit contre eux? Cest le point le plus difficile de la question. Vos comités ont pensé que cette raison était plus que déterminante pour exclure du ministère les membres de la famille royale. La question relative aux ambassades ne présente pas le même degré d’intérêt que celle relative aux ministres. On ne peut se dissimuler qu’après une certaine époque, lorsque la Révolution sera affermie, la France n’aura que des alliés dans la plupart des cours de l’Europe. Si les membres de la famille royale ont, à l’avenir, des sentiments patriotiques, comme probablement ils en auront, il n’y aura pas encore d’inconvénient à leur laisser exercer les places diplomatiques. (Murmures.) Je suis étonné, qu’en général, on ne veuille pas sortir des circonstances du moment, quand il s’agit de faire une Constitution pour des siècles. Si l’on veut arrêter l’acte constitutionnel relativement aux circonstances où nous nous trouvons, je crois devoir déclarer qu’il sera extrêmement vicieux. Quant à la dernière question qui, seule, a donné lieu à toute cette discussion, les comités se sont assez expliqués; je n’ai plus qu’un mot à dire. On ne peut craindre qu’un trop grand nombre de membres de la famille du r<>i, portant une dénomination particulière, ne forme une sorte de bigarrure; cela ne présente aucune sorte de danger, au milieu de l’égalité politique de tous les autres citoyens. Ou vous a démontré, je crois, que la conséquence immé- 729 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* * [26 août 1791* diate de la royauté héréditaire que vous avez déclarée, qui est la base fondamentale de la Constitution représentative et du gouvernement monarchique que vous avez établie, faisait des membres appelés successivement au trône, à la régence, à la garde du roi mineur, une classe séparée dans l’Etat; que les membres de cette famille, avec leurs droits politiques inhérents à leur naissance, indépendamment de leurs mérites, de leurs vertus, ne pouvaient être assimilés auxau-tres citoyens; que le meilleur moyen de maintenir l’égalité, de la consacrer par la Constitution, était de leur réserver une dénomination particulière. Et, il faut le dire encore aujourd’hui, que l’on ne craigne pas que cette dénomination particulière rappelle de-* distinctions abusives; on ne peut pas croire que l’on veuille rétablir les distinctions si, pour calmer les inquiétudes de quelques personnes, on veut fixer le mode par lequel les membres de la famille du roi auront quelque titre, et le vrai moyen d’extirper ces distinctions, c'est de les réserver aux seuls membres de cette famille. Je reviens, Messieurs, à la troisième question qui doit actuellement faire l’objet de votre délibération et qui consiste à savoir si les membres de la famille du roi seront éligibles aux places et emplois, à la nomination du pouvoir exécutif. Les comités, je le répète, sont d’avis qu’ils doivent être exclus du ministère et qu’on peut les déclarer éligibles aux autres places. M. Babey. Je demande à l’Assemblée qu’elle veuille bien subdiviser en 3 points la proposition actuellement soumise à la délibération et qu’elle aille aux voix sur les questions ainsi posées : 1° Les membres de la famille du roi pourront-ils être ministres ? 2° Pourront-ils être ambassadeurs? 3° Pourront-ils être généraux d’armée? M. Rewbell. On reprochait hier aux comités de Constitution et de révision qu’ils trouvaient la Constitution bien faible, puisqu’ils craignaient de la compromettre en admettant les membres de la famille royale aux places qui sont à la nomination du peuple, auxquelles ils seraient parvenus fort rarement. Aujourd’hui ces mêmes comités trouvent la liberté bien robuste, puisqu’ils ne la croient pas en danger, quand même Damnée nationale serait commandée par un des ci-devant princes du sang, actuellement fugitifs. J’ai entendu dire autour de moi que la nation pouvait déclarer, par l’organe du Corps législatif qu’un général a perdu sa confiance. Je réponds que le Corps législatif n’a constitutionnellement le pouvoir de faire cette déclaration que pour les ministres : secondement que ce n’est qu’un avertissement. Si le pouvoir exécutif persiste, il est évident qu’il n’y a point de loi dans la Constitution qui puisse vaincre sa résistance. Par le décret que vous avez rendu hier, vous avez mis les membres de la famille du roi dans une classe absolument distincte et séparée de celle des autres citoyens de l’Empire. Il ne faut pas les comparer à de simples particuliers qui seraient revêtus d’une commission du pouvoir exécutif; ces derniers ont ce qui s'appelle une garantie qui les lie à la nation et qui est de nature à rassurer celle-ci, garantie qui n’existe pas chez les parents du roi. En effet, Messieurs, la situation est toute différente : tout individu, agent de pouvoir exécutif, si celui-ci commet vis-à-vis de lui une injustice quelconque, ou si les fonctions qu’il en a reçues lui déplaisent, peut abdiquer son emploi, y renoncer pour s’attacher à mériter la confiance publique et obtenir une de ces places qui sont à la nomination et au choix du peuple; or, c’est ce que ne peuvent pas faire les membres de la famille royale qui ne tiennent à la nation par aucun lien et que vous avez déclarés inéligibles aux places et emplois à la nomination du peuple. La nation n’a donc aucune espèce de garantie vis-à-vis d’eux. Je vous rappellerai, d’ailleurs, que du moment que vous avéz déclaré que les membres de la famille royale sont des pensionnaires de la nation, ils ne peuvent naturellement obtenir aucune place, parce qu’on sait bien qu’à ces places sont attachés des traitements et que, d’après vos décrets, on ne peut avoir à la fois pensions et traitements. Il est impossible, à moins que vous ne vouliez compromettre entièrement la liberté, que vous adoptiez toutes les conséquences du décret que vous avez rendu hier ; il est impossible, qu’après avoir tellement séparé les parents du roi du reste de la nation, vous leur confiiez une place aussi importante que celle de commandant de l’armée nationale. Ils ont déjà une fonction que la Constitution leur donne; elle est trop belle; ils en sont trop bien salariés pour en désirer une autre. On vous a dit qu’en Angleterre, ils siègent de droit dans la Chambre des pairs. En ce cas, mettez-les dans le conseil du roi, qu’ils y aient voix consultative, qu’ils y déjouent les intrigues des ministres ambitieux ; lorsqu’ils ne seront plus dangereux, je ne serai pas plus chiche qu’un autre à leur donner des qualités, et je consens à ce qu’ils aient le titre de princes. Je conclus, Messieurs, àceque les membres de la famille royale ne puissent obtenir aucune place à la nomination du roi. Plusieurs membres : Aux voix I aux voix ! M. Démeunier, rapporteur. Donner aux membres de la famille royale voix dans le conseil, ce serait la destruction entière de l’organisation du ministère, et, selon moi, la chose la plus dangereuse. M. Prieur. Les comités proposent en délibération la question générale de savoir : si les parents du roi seront éligibles aux places, à la nomination du pouvoir exécutif. Les uns veulent qu’ils puissent être commandants d’armée; moi, je ne le veux pas. Je suis d’avis, comme on l’a demandé tout à l’heure, de consulter l’Assemblée pour savoir: 1° s’ils peuvent être ministres; 2? s’ils peuvent être généraux ; 3° s’ils peuvent être ambassadeurs. Voilà, à mon sens, la seule manière d’arriver promptement à une décision. M. Boutteville-Bumetz. Je demande la parole pour la disposition de l’article proposé par les comités. Je vous prie, Messieurs, d’ob-erver que les questions qui se présentent doivent être envisagées sous deux points de vue. Je croisdonc qu’il est impossible ne présenter plus sagement un autre ordre de discussion, que de réunir la question comme l’a fait le rapporteur des comités. Plusieurs membres : La question préalable sur la motion de M. Boutteville-Dumetz. M. fioupil-Préfeln. Gomme on s’est attaché 730 [Assemblée nationale* 1 .ARCHIVES PARLEMENTAIRE S. [26 août 1791. j à prouver que, par votre décret d’hier, vous avez Séparé les membres de [a famille royale de la nation, je ne suppose point qu’qn ait voulu, par là, faire une critique indirecte de ce décret, dont il serait bien facile et infiniment superflu de justifier la sagesse ; car je vous prie d’observer, Messieurs, que vous n’avez pas plus séparé les membres de la famille royale de la nation, que yqus n’en avez séparé le roi lui-même. Je passe maintenant à quelques réflexions sur les places à la nomination du pouvoir exécutif. Certainement, Messieurs, les membres de (a famille royale doivent être susceptibles d’être appelés par le roi dans son conseil lorsque, par Ipuis lumières et par la sagesse de leur conduite, le roi trouvera qu’ils méritent sa confiance; mais ils ne peuvent pas être ministres signataires et responsables, ce serait présenter les plus grands obstacles à l’exercice précieux de la responsabilité. Une autre raison non moins importante, c’est cette vocation politique que leur donne leur naissance, d'être les assistants, les défenseurs et les conseillers de la couronne ; mais personne de nous ne prétendra sans doute que le roi doive être forcé par la Constitution de donner sa confiance aux membres de sa famille. Le gouvernement français est monarchique : or, il n’pst pas compatible avec la Constitution monarchique que le roi ait des conseillers qui ne soient pas à son choix. Que les membres de sa famille cherchent donc à mériter d’être choisis popr les assistants, les conseillers intimes, les défenseurs du trône. Je demande donc la question préalable sur l’amendement de M. Rewbell. Quant aux fonctions d’ambassadeur, je vous prie d’observer que, par la nature même des choses, cela est presque impraticable, parce qu’un ambassadeur est toujours nécessairement enveloppé et dq secret de sa cour, et du secret de sa négociation, en sorte qu’à moins de la maladresse inconcevable d’avoir donné preuve matérielle contre lpi, par la signature d’un traité contenant une conspiration contre la nation, dans tous les autres pas, il n’est guère possible d’avoir prise sur uu ambassadeur. Je vous supplie de considérer encore que si malheureusement il arrivait qu’il fût question d’une conspiration du pouvoir exécutif avec de3 puissances étrangères contre la liberté nationale, et qu’on voulût employer, à l’ai freuse négociation qui aurait un semblable objet, un membre de la famille royale, on ne prendrait pas le parti de l’envoyer avec ce grand caractère d’ambassadeur, mais il serait chargé d’une mission secrète et particulière ; voilà comment s’ourdissent les grandes conspirations; ainsi point de motif pour l’écart des fonctions d’ambassadeur. Quant au commandement en chef des armées de terre et de mer, si vous croyez qu’il y ait en cela quelque chose d’inquiétant pour la tranquillité publique, je proposerai, par amendement, [que les membres delà famille du roi ne puissent avoir le commandement en chef d’une armée de terre et de mer, sans y avoir été autorisés par un décret du Corps législatif rendu sur la proposition du roi ( Murmures .), comme dans la matière de la paix et de la guerre, où vous lui avez donné l’initiative. M. Pétion de 'Villeneuve. Les comités demandent que les membres de la famillp du roi puissent être appelés par le roi aux emplois qu’il a à nommer, si ce n’est cependant au ministère. Rappelea�vous, Messieurs, la discussion d’hier, et dp quelle manière elle s’est engagée ; vous avez cru que les membres de la famille royale n’étaient pas susceptibles d’être admis aux places et emplois à la nomination du peuple. Une conséquence qui paraissait assez nécessaire, c’est qu’ils ne pouvaient pas être également investis d’autres fonctions; car, remarquez bien que, quoiqu’ils ne parviennent pas à la place de général, qu’uniquement par leur ancienneté, ces places sont cependant au choix du chef du pouvoir exécutif. À la vérité, il serait obligé de choisir parmi ceux qui, parleur ancienneté, par leur grade, se trouveraient dans la position d’y être appelés, mais c’est toujours à lui à choisir ; et alors je vous demande s’il est sans danger de laisser au rpi la liberté de mettre à la tête des armées un membre de sa famille; s’il ne serait pas possible, en admettant la double opération qui fut faite hier relativement à la nomination des emplois du peuple, que le membre de la famille royale fût également dangereux dans les deux hypothèses. Ainsi il me semble que vous ne pouvez pas, sous aucun prétexte, admettre l’article des comités pour ce qui concerne le commandement en chef des armées, soit de terre, soit de mer. M. Goupil vient de vous proposer un amendement qui a paru frapper l’Assemblée. J’avoue que cet amendement présente des avantages; il y a cependant une circonstance où il pourrait avoir des inconvénients. Soyons bien convaincus que le moment viendra où le roi aura dans le Corps législatif, comme le roi a dans le Parlement d’Angleterre, une majorité à peu près assurée. (Murmures et applaudissements.) Les ministres sont admis parmi vouscumme dans le Parlement d’Angleterre et croyez bien que, quand un ministre aura été plusieurs fois dans le Corps législatif en minorité, quand ses avis n’obtiendront pas la majorité, il en arrivera comme dans le Parlement d’Angleterre. Nous pouvons croire à cet égard que ce que nous voyons se passer chez nos voisins, qui avaient cependant pris toutes les précautions possibles pour maintenir leur liberté, se réalisera aussi chez nous. Craignons alors que, toutes les fois que le roi aura des propositions à faire au Corps législatif, il ne veuille s’assurer préalablement du succès et que la fréquente intervention des ministres pour exercer une initiative sur l’Assemblée nationale, ne parvienne à corrompre celle-ci. Je crois donc que nous ne pouvons pas admettre l’amendement qui nous est proposé par M. Goupil, en ce qu’il donnerait au roi pour la nomination des membres de sa famille au commandement des armées une initiative qu’il ne peut exercer sans danger, et je rejette l’article des comités en ce qui concerne le point d’appeler les parents du roi indistinctement à tous les postes à la nomination du pouvoir exécutif. (Applaudissements à l’extrême gauche .) M. Delandine. Les membres de la famille royale, admis au rang de citoyen actif, ont été cependant privés des places qui sont à la nomination du peuple; dès lors, ils me paraissent évidemment avoir un droit incontestable aux places qui sont à la nomination du pouvoir exécutif : sans cela, au lieu d’être citoyens actifs, ils seront les personnages les pins inactifs, les plus passifs du royaume. Et, en ce qui concerne particulièrement le droit qu’ils peuvent avoir de suivre l’avancement militaire et d’être à la tête des armées, je me demande pourquoi, si le roi [Assemblée nationale.] lui-même a, comme chef suprême de l’armée, le droit de la commanchp eq p�rsqnqe, il ne pourrait pas la faire commander car les memhres de sa famille. J’adopte toutefois, à cet égard, l'amendement de M. Goupil et je conclus à l’adoption du projet des comités avec la modification contenue dans pet amendement. Plusieurs membres : Aux voix ! qpx voix ! (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Salle. Je demande la question préalable sur l’amendement de M. Goupil. Re général d’armée doit être responsable; si, lorsque le roi aura nommé un commandant en chef, l’Assemblée nationale était dans le cas de sanctionner ce choix, de le confirmer, ju pis qu’elle participerait jusqu’à un certain point à la nomination et qu’elle prendrait sur elle, par cela même, une pq.piiede la responsabilité, ce qui ne p ut pas être. ( Ap-r plaudissements à l'extrême gauche .) (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il u’y a pas lieu à délibérée sur l’amendement de M. Goupil-Préfeln.) M. Démeunier, rapporteur. Voici comme je prie M. le Prési dent de poser la question : « A l’exception des divers departements du ministère, les membres de la famille du roi seront-ils éligibles aux places et emplois à la nomination du roi? >? ( Murmures à l’ extrême gauche.) M. Rewbell. D’après la décision que l’Assemblée vient de prendre, je propose par amendement à la proposition des P mités d’excepjpr également des places à la nomination du roi auxquelles pourront prétendre les membres de la famille royale, les commandements en chef et les ambassades. Plusieurs membres : Aux voix l’amendement ! M. I�avle. Je demande la question préalable sur l'amendement de M, Rewbell. Plusieurs membres : La division de la question préalable ! M. le Président. On demande la division de la question préalable. Je la mets aux voix sur la première partie, de l’amendement de M. Rew-bell tendant à excepter des places auxquelles pourront être éligibles les membres de la famille royale, celles de commandants en chef. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer sur la première partie de l’amendement.) M. de Croix. Si l’Assemblée délibère sur cette proposition, je demande que ce soit pour la rejeter formellement. J’ai l’honneur de vous rappeler qu’à l’époque de là minorité de Louis XIV, le prince de Coudé sauva la France d’que invasion étrangère. A l'extrême gauche : Aux voix l’amendement 1 M. Démeunier, rapporteur. Les membres de la famille du roi..... A l'extrême gauche : Aux voix ! aux voix ! M. le Président. Les cris de quelques indi-126 août 1791, J 731 vidus ne sont pas la volonté de l’Assemblée. Je vais la consulter pour savoir si la discussion sera ouverte sur l’amendement. (L’Assemblée, consultée/décrète que la discussion est ouverte sur l’amenderqpnt.) M. Démeunier, rapporteur. Les comités croient avoir prouvé que l’intérêt de la liberté publique exige de prononcer �exception à l’égard du ministère. Voyons si l’intérêt national exige également que vous prononciez d’une manière positive à l’égard du commandement en chef de l’armée. Remarquez que le roi ne pourra élever un membre de sa famille au grade de colonel que lorsqu’il aura parcouru les grades subalternes, et le temps llxépour tous les autres citoyens. 1! est évident, d’une part, qu’il ne faut pas craindre de voir des membres de la famille dp roi arriver sitôt aux places de maréchal de camp ou de lieutenant général. 11 est évident ensuite qu’à l’avenir le nombre de ceuxqui seront susceptibles de commander les armées sera très peu considérable. Je n’entrevois même, pour arriver à cette haute fonction, que ceux qui, comme un rejeton de la branche d’Orléans, se trouvent en ce moment-ci colonels. Eh bien, lorsque vous ne pouvez redouter qu’un ou deux individus de cette famille susceptibles du grade de commandant en chef, comment l’imérêt national, avec les précautions que vous avez prises avec les lois militaires que vous avez établies, pourrait-il vous déterminer sans calculer les circonstances à venir, à faire la loi qu’on vous propose. D’ailleurs, si celui dont j’ai parlé continue sa carrière comme il l’a commencée, il est clair qu’il aura autant de patriotisme qu’aucun des citoyens qui sont dans l’armée. (Applaudissements.) Si j’examine maintenant la marche des passions huniain' S, quicertes sont les mêmes pour les princes, que pour les autres citoyens, comment pourriez-vous leur ouvrir la carrière militaire, et les arrêter par un décret? Certes, ou vous devriez leur interdire la carrière militaire, ce qu’on n’a pas proposé et ce qu’on n’a pu proposer, ou, si vous leur ouvrez cette carrière, il faut que leur zèle leur donne une arène plus étendue. Gomment peut-on ne pas tenir compte des circonstances qui peuvent survenir, et comment nous propose-t-on de mettre dans la Constitution, en l’année 1791, dans un temps de révolution, un décret qui, dans telle circonstance donnée, peut priver la nation des plus grands avantages possibles, le tout en considération des circonstances qui nous environnent, en considération des émigrés et des fugitifs? Je conclus à ce que la proposition qui vous a été faite soit rejetée et qu’on adopte la disposition des comités. M. Barrère de Vieuzac. J’avais vu, ce me semble, l’opinion de l’Assemblée se diriger vers l’amendement deM. Goupil queje voulais appuyer parce qu’il me paraissait propre à faire fraterniser les pouvoirs et à détruire la nullité des membres de la famille royale en les rendant sensibles à l’opinion publiques Applaudissements.) Si l’Assemblée voulait ordonner le rapport du décret par lequel elle a écarté cet amendement par la question préalable, je terminerais là mon opinion ; sinon, je demande que l’amendement de M. Rewbell soit adopté et je suis décidé à m’élever de toutes mes forces contre l’opinion des comités dans laquelle j’aperçois mille fois plus d’inconvénients que d’avantages, M. de Saint-Martin. Je demande qu’on rapporte l’amendement pe M. Goupil. ARCHIVES jPARLRMENTAIRpS,