(Assemblée nationale.] ARCHIVES , PARLEMENTAIRES. [13 février 1790.] mais, Messieurs, la vérité est eue ; il ne peut donc y avoir qu'une seule religiou vraie. Un individu, qui professerait indistinctement toutes les religions, n’en aurait aucune; et on peut dire également qu’une nation qui les reconnaîtrait toutes indistinctement n’en reconnaîtrait aucune. De toutes les religions, la religion chrétienne est la seule qui porte les caractères d’une religion vraiment divine; vous les trouvez ces grands et frappants caractères dans la sainteté de son auteur, dans la sagesse de ses préceptes, dans la pureté de sa morale, dans l’idée qu’elle nous donne de la grandeur de T litre-Suprême, de la dignité de l’homme, de son origine et de sa fin, de l’étendue de ses devoirs résultant de ses rapports avec Dieu et avec ses semblables. Enfin, cette religion auguste ne se trouve dans toute son intégrité que dans l’église catholique, apostolique et romaine, à laquelle la France s’est fait, un devoir, dans tous les temps, d’être invio-laidement attachée. C’est là, cette cité bâtie sur la montagne , visible à toutes les nations ; c'est là où se trouve cette succession de légitimes pasteurs jamais interrompue, cette unité de régime et d’enseignement, qu'en vain vous chercheriez dans toute autre société religieuse; c’est là, en un mot, où se trouve dans toute sa pureté le dépôt précieux de la foi que nos pères nous ont transmis au prix de leur sang, et que nous conserverons, sans doute, au prix du nôtre, s’il le faut. Cependant, Messieurs, vous le savez, la foi de nos pères s’altère, le respect pour la religion s’affaiblit de plus en plus. Et, qui sait jusqu’où peut aller ce dépérissement de la foi, si vous ne prenez dans votre sagesse des mesures pour arrêter leprogrès de l’irréligion? l’oubli des principes, la dépravation des mœurs, les libelles, les brochures aussi immorales qu’irréligieuses qui se répandent partout, et qu’on ne craint pas d’étaler jusque sous vos yeux et aux portes de cette Assemblée, les maximes perverses d’une philosophie insensée, qui, dans le délire de son orgueil, ne respecte rien, et, dans les accès de sa fureur, attaque tout, renverse tout dans l’ordre de la religion et de la morale, comme dans l’ordre de la politique, semblent menacer également d’une ruine totale l’autel et ses ministres. Hâtez-vous donc, Messieurs , pendant qu’il est encore temps, hâtez-vous de la protéger, cette religion sainte, contre les coups qu’on lui porte de toute part; hâtez-vous de calmer nos craintes, de dissiper nos inquiétudes. Nous vous le demandons et en notre nom et au nom de nos commettants; nous vous le demandons au nom de la nation dont vous êtes les représentants ; nous vous le demandons surtout au nom des malheureux de toutes les classes, qui, souvent, dans leur malheur, n'ont de ressources que dans les consolations que leur offre la religion ; c’est elle qui leur apprend à souffrir sans se plaindre et à mourir sans s’effrayer. Ce n’est pas dans les froides maximes d’une philosophie orgueilleuse, qui d’ailleurs n’est jamais consolante que pour ceux qui n’ont pas besoin de consolation , qu’ils trouveront cette force, ce courage, qui leur est souvent si nécessaire pour s’arracher aux horreurs du désespoir, pour se préserver de ces excès affreux dont les exemples scandaleux se sont multipliés à la honte et pour le malheur de l’humaoité en proportion des progrès de cette prétendue philosophie. En attendant que vous puissiez vous occuper des lois de détail que vous croirez, dans votre lrc Série. T. XI. 5Ô3 sagesse, devoir faire relativement à ce grand objet, consacrez dès aujourd’hui dans un arrêté solennel le respect dont vous êtes pénétrés pour la religion de vos pères. Votre silence seul dans cette disposition de malveillance contre la religion, qui se manifeste de toute part, votre silence seul, dis-je, sur un objet aussi important, affligerait sensiblement toutes lésâmes honnêtes, ajouterait aux inquiétudes et aux alarmes, dont elles ne sont déjà plus les maîtresses, et accroîtrait l’audace des ennemis de la religion, qui, n’en doutez pas, seront toujours également les ennemis de la patrie. Déclarez donc dès aujourd’hui que la religion seule de l’église catholique, apostolique et romaine, estla religion de l’Etat et que le seul culte public et solennel qui est et sera à jamais admis et reconnu en France, est le culte de l’église catholique, apostolique et romaine, et que le présent décret sera mis à la tête des décrets constitutionnels comme étant la base la plus solide de la constitution. Ce sera, Messieurs, celui de tous vos décrets qui portera le plus de consolation dans le cœur du roi et de son auguste épouse qui partage ses sentiments comme ses malheurs, de ce roi trè3 chrétien, dont la piété et l’attachement à la religion vous sont connus, de ce roi si justement, si profondément affligé depuis longtemps, et par ses malheurs personnels, et plus encore par ceux de la nation, que son amour pour son peuple lui rend toujours plus sensibles que les siens propres. 2e Annexe à la séance de l'Assemblée nationale du 13 février 1790. M. ISlin, député de Nantes. Opinion sur le clergé (1). Messieurs, il est temps que l’Assemblée nationale s’explique définitivement sur le clergé. J’ai toujours pensé que le clergé ne devait point faire un ordre séparé dans l’Etat, qu’il ne devait pas non plus rester organisé en grande corporation. Chaque district a ses besoins à part. Il n’est pas nécessaire que ses ecclésiastiques fassent corps avec ceux d’un autre district. La nécessité des évêques pour le culte romain ne change rien à la justesse de cette politique. Quand on aura réduit les évêques au nombre convenable dans une étendue de pays comme la France, il sera facile de donner à chacun d’eux plus ou moins de districts, plus ou moins de départements à surveiller pour tout ce qui regarde la religion. 11 ira une fois tous les ans, ou tous les deux ans, tenir ses assises épiscopales dans chaque district pour y ordonner des prêtres, etc., etc. C’est tout ce qu’il faut. J’ai toujours pensé aussi que le clergé pouvait être regardé comme une profession publique. Non pas que je croie à la nécessité d’une religion dominante , la religion et encore moins ses ministres ne doivent rien dominer ; chacun pense comme il veut, ou comme il peut, et la loi ne s’étend pas jusqu’à régler les choses de l’autre monde. Mais dès que la presque totalité d’un pays professe le même culte, ce culte qui n’est fonciè-(1) Celte opinion n’a pas élé insérée au Moniteur. 38 594 [Assemblés nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 février 1790.] rement que l’affaire des particuliers, peut bien devenir l’objet de la sollicitude générale; et sans gêner jamais la conscience ou la liberté de personne, il est raisonnable cependant de diriger jusqu’à un certain point la partie extérieure de ce culte, pour l’intérêt même de ceux qui le professent, et surtout à cause des facilités qu’il offre pour l’enseignement de la saine morale. On voit que, sous ce dernier point de vue, les religions rentrent très particulièrement sous l’inspection publique, et que tous leurs ministres peuvent, en qualité d’officiers de morale, être considérés comme des hommes publics, et comme appartenant aux départements de l’instruction. Cette idée peut s’étendre davantage. Le clergé était si riche, et le peuple a tant besoin d’instruction, qu’il était permis de voir à une distance assez rapprochée, qu’une partie des biens ecclésiastiques serait destinée à fonder le nouveau département de l’instruction publique. Enfin, sans manquer à l’intention des fondateurs, il était permis encore de songer à créer dans chaque district un bureau des pauvres, qui serait alimenté par les biens ecclésiastiques. Ce sont là en effet les trois grands objets qu'il convient de donner aux fondations ecclésiastiques. Quiconque fera attention que le législateur a le pouvoir d’interpréter sous ces rapports l’intention des fondateurs, s’apercevra aisément que ce plan pourrait s’exécuter sans rencontrer beaucoup d’opposition. Ainsi, les biens du clergé pourraient bien donner l’existence dans tous les districts à un bureau des pauvres; soutenir toutes les parties de l’instruction publique, et ce second objet est bien plus étendu qu’on ne pense; enfin il en resterait une portion suffisante pour entretenir le culte catholique et ses ministres. L’ensemble des officiers publics attachés à ces trois parties d’administration pourrait être regardé comme le nouveau clergé. Ce serait véritablement une profession publique, une partie de l’administration nationale. Bientôt les deux tiers de ce nouveau clergé seraient des laïques, des pères de famille; rien de plus convenable, car pour avoir soin des pauvres, et pour être les organes de l’instruction publique, il n’est pas nécessaire sans doute d’être prêtre. Enfin, les prêtres eux-mêmes deviendraient des citoyens comme les autres, et, en vérité, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas nous accoutumer à entendre prêcher, au nom de Dieu, sur les devoirs d’époux et de fils, de respectables pères de famille, qui ajouteraient la force de l’exemple à celle de leurs leçons. Je pense, comme M. l’abbé Sieyès, que pour aller à un but aussi désirable, il n’était nullement nécessaire d’abolir les dîmes, car la dîme n’appartient certainement pas à celui qui la paie. Quand un propriétaire a acheté son champ, ou qu’il l’a reçu d’une manière quelconque, il l’a acheté ou il l’a reçu, à la charge de payer la dîme, et il n’a jamais dû penser que la nation lui en ferait présent. Vous dites que l’obligation de payer la dîme est dure pour les propriétaires. Je réponds que l’obligation de payer ses dettes est dure pour le débiteur. Vous dites que cette charge nuit à l’agriculture; entendons-nous: est-ce du fermier que vous voulez parler? Mais qui ne sait que le fermier sera forcé, dans son bail, de donner au propriétaire ce qu’il donnait auparavant à son curé ? Est-ce du propriétaire riche? Certainement il sera avantageux pour lui de retirer 11,000 livres au lieu de 10,000 livres. Mais qu’importe pour l’agriculture que ces 11,000 livres soient touchées par le même homme ou par deux copropriétaires, le propriétaire de la terre et le décimateur ? Quant aux petits propriétaires, je conviens qu’ils doivent vous inspirer plus d’intérêt; aussi, aurait-il fallu les favoriser particulièrement dans le rachat de la dîme. Le rachat de la dîme ! Eh oui, c’est ce qu’il fallait décréter, et non son abolition. Il fallait dire : partout où le décimateur touche cent pistoles net de dîme, le propriétaire paie en nature la valeur d’environ 15 à 16,000 livres; offrons-lui de le décharger de sa dette, en remboursant seulement le fonds de 1,000 livres; bien évidemment il y gagnera beaucoup, le décimateur n’y perdra rien; je ne parle encore que des gros propriétaires. 11 fallait charger les administrations de district et les municipalités, sous l’inspection du district, de veiller à l’acquittement libre et volontaire de ces rachats, de les diriger, de les faciliter, etc. 11 fallait dire ensuite: une dîme de 1,000 livres net, rachetée au denier 25, vaudra 25,000 livres; laissons 5,000 livres au district, et portons 20,000 livres à l’emprunt national: sur cela, je remarque que les 5,000 livres que je laisse au district, ou plus généralement la cinquième partie des rachats aurait donné la facilité d’amortir la dîme des plus petits propriétaires, au moindre taux possible, en venant à leur secours. J’aurais mieux aimé ce plan de conduite que celui de les affranchir purement et simplement. Suivons les 20,000 livres portées à l’emprunt national : je sais bien que les rachats n’auraient été que successifs, que l'argent serait venu peu à peu. Mais je ne doute pas un instant que cette opération n’eût suffi à remonter tout de suite le crédit public. Je dis plus ; si l’on avait eu soin, en même temps, de défendre de nommer à aucun bénéfice vacant, ceux qui vaquaient déjà, et ceux qui vaquent continuellement par la mort des titulaires, nous auraient permis de faire une excellente opération. Nous aurions décrété que le Trésor public ne paierait que 3 0/0 des sommes provenant des rachats des dîmes, sauf à dédommager les districts par le revenu des bénéfices vacants. Je ne veux pas développer davantage ces deux idées. On s’aperçoit assez qu’elles se prêtent un mutuel secours, et enfin que c’était une opération digne de l’Assemblée nationale que de remonter le crédit, et de faire baisser le taux de l’intérêt, dans un moment où la France paraissait écrasée sous le terrible fardeau de sa dette, de son déficit, et de la cessation partielle des impôts. Je n’ai rien dit encore qui ne soit l’opinion de M. l’abbé Sieyès ; je puise dams ses observations sommaires sur les biens ecclésiastiques, et dans son dire sur la question des dîmes ; c’est exactement le plan qu’il nous a indiqué. Je pense encore, comme ce député, que nulle autorité sur la terre n’a le droit de faire des lois rétroactives, etqu’ainsi lorsque la loi regardait comme inamovibles des bénéfices donnés à un ecclésiastique, lorsqu’il n’y avait pas d’exemple qu’un bénéfice eût été ôté, autrement que par un jugement légal prononcé en matière criminelle, lorsqu’il n’y avait pas un homme en France qui ne sût très-bien que le don d’un bénéfice était irrévocable; c’est dis-je, un évènement inattendu que celui qui prive les titulaires actuels d’une partie ou de la totalité de leurs bénéfices. Faites des lois pour l’avenir, décrétez, si vous voulez, que l’on pourra ôter arbitrairement à un prêtre son salaire, son bénéfice, tout comme il [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 février 1790.] 595 vous plaira ; mais vous ne pouvez pas dire que ce qu'il a reçu à titre inamovible, vous pouvez le lui ôter. C’est là un véritable renversement de principes. J’ai cherché à cet égard à pousser la sévérité jusqu’où elle peut aller, sans manquer tout à fait à la justice, et voici tout au plus ce que l’on pourrait tenter de soutenir. On pourrait dire : les bénéfices ont été donnés à titre inamovible, soit ; mais ceux qui par la pluralité, des bénéfices, ont accumulé cent, deux cents, cinq cent mille livres de rentes, avaient-ils bien le droit de les solliciter, de les recevoir? à la bonne heure que celui qui a renoncé à tout autre état, qui, sous la bonne foi publique et la sauvegarde de la loi, est entré dans une carrière pénible, avec l’espérance d’obtenir de quoi vivre, et a enfin mérité un sort convenable, mais modéré, soit respecté dans sa profession. Mais l’abbé commendataire, mais le prélat insatiable qui, au mépris des règles de son état et de la décence publique, s’est couvert de bénéfices enlevés à ceux de ses confrères qui n’avaient rien 1 j’avoue qu’il m’est impossible de le plaindre, lorsqu’une force supérieure le remettra à sa place, lui ôtera tout ce qui excède une mesure raisonnable. Alors je dis au trop riche bénéficier: sans doute, celui qui vous a donné un bien inamovible, ferait mal de vous le reprendre. Mais, vous, vous ne pouviez pas le demander, le recevoir, étant déjà doté d’un premier bénéfice. Vous êtes inhabile à posséder, à retenir tous ceux que vous avez accumulés. Gardez tout ce que vous avez pu recevoir, et cédez le reste. On pourrait, ce semble, soutenir aussi, avec beaucoup de justice, que l’ecclé.-iastique, réduit à un seul bénéfice, doit encore supporter une grande diminution dans le revenu de ce bénéfice ; il doit évidemment payer l’impôt comme tout autre citoyen; il doit payer outre l’impôt toute la partie de son revenu qui, excédant son nécessaire absolu ou relatif, était destiné par les fondateurs à l’aumône ou à l’instruction publique, et ne peut être considéré que comme un dépôt entre les mains des bénéficiers. Dès que nous confierons à des laïques le soin de l’enseignement, et celui de soulager les misérables, dès que nous dispenserons l’ecclésiastique de subvenir à ces objets, il doit sans regret abandonner la portion de son revenu qui y était affectée. D’après toutes ces considérations et la nécessité de ne pas laisser plus longtemps un grand nombre de citoyens dans l’inquiétude sur leur sort, et déterminer aussi quelque chose sur les futurs rapports du clergé avec la chose publique, je propose à mes collègues de concourir à rendre le décret suivant : Décret concernant le clergé , l'ordre de Malte , etc. Art. 1er. Tous les titres de bénéfices, même les chapitres de chanoinesses, les bénéfices de Malte, et autres ordres militaires, les monastères, les couvents et les maisons des religieux et religieuses, les séminaires et toutes corporations ecclésiastiques ou fondations particulières , telles que celles de Sorbonne, de Navarre, etc. sont éteints Art. 2. L’administration de tous les biens compris dans l’article précédent, en y ajoutant ceux des fabriques, sera confiée aux administrations de district, sous l’inspection de celle des départements. Art. 3. Les prochaines assemblées de département et des districs donneront leurs avis sur la meilleure manière de remplacer les dîmes , lesquelles continueront à être payées jusqu’au remplacement, conformément aux décrets de l’Assemblée nationale. Art. 4. A l’avenir, et à commencer du 1er avril 1790, nui évêché ne pourra avoir plus de 30,0Ü0 livres , ni moins de 20,000 livres de rentes. Art. 5. Aucune cure ne sera dotée de plus de 3,000 livres, ni de moins de 1,200 livres. Art. 6. Aucun vicaire ne recevra, pour son traitement, plus de 900 livres, ni moins de 600 livres. Art. 7. Les évêques, les curés et les vicaires seront payés sur la caisse des départements, des districts ou des municipalités, ainsi qu’il sera réglé ci-après. Art. 8. Quant aux autres titulaires de bénéfices, tels qu’ils sont com pris dans l’article premier, ceux qui possèdent actuellement, soit en un, soit en plusieurs bénéfices ou pensions ecclésiastiques, plus de 6,000 livres de rentes, seront tous réduits à cette somme de revenu. Art. 9. Ceux qui ont moins de 6,000 livres de rentes en bénéfices, conserveront leur jouissance jusqu’à leur mort. Art. 10. A leur mort ou sur leur démission, aucun des titulaires mentionnés aux articles 8et 9 ne sera remplacé. Art. 11. Les moines et les religieux auront chacun 6,000 et 1,300 livres, suivant la fortune des ordres auxquels ils appartiennent. Art. 12. Les religieux auront entre 400 livres et 800 livres , suivant la fortune de leurs maisons. Art. 13. Toutes les permissions seront acquittées par la caisse nationale, ou, sur son mandement, par les caisses de département. Art. 14. Le comité de constitution présentera incessamment un plan de service pour le culte catholique en France, où la quotité des frais et le nombre des personnes seront réduits aux vrais besoins du culte. Et en attendant qu’on examine les rapports qui peuvent lier à l’ordre public les cérémonies pudiques du culte catholique, on pourrait décréter es règlements suivants, dont la plupart des citoyens sentent la nécessité et réclament rétablissement. Art. 15. Toutes les fêtes, sans exception, seront partout ou supprimées, ou renvoyées aux dimanches. Art. 16. Il n’y aura nulle part d’offices publics que les jours de dimanche. Art. 17. Les clochers des églises ne pourront servir à appeler les fidèles que les jours de dimanche, et elles ne serviront à aucun autre usage, sans la permission de la municipalité. Art. 18. Elles ne sonneront jamais avant neuf heures du matin et après cinq heures du soir, et même dans cet intervalle on ne se permettra point de sonneries ou carillons, plus propres à étourdir les gens occupés et à tourmenter les malades, qu’à avertir sérieusement les fidèles de bonne volonté. Art. 19. On ne sonnera pas plus de trois fois par jour, et tout au plus, un quart d’heure chaque fois. Art. 20. Il n’y aura qu’une ou deux cloches, tout au plus, par église, les autres seront vendues par les municipalités, au profit du bureau des pauvres. Après cela, ce qu’il y a de mieux à faire est §96 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [U février 1790.] d’attendre le travail du comité. Mais puisque j’ai tant fait que dire mon avis, on me permettra bien d’en indiquer au moins la suite. Je désirerais que l’entretien des vicaires fût pris sur une somme qu’on laisserait aux municipalités, pour cet objet et beaucoup d’autres, afin que si plusieurs paroisses de campagne veulent se réunir pour n’avoir qu’un vicaire, ce soit tant mieux pour les autres dépenses d’utilité qu’elles auront à faire. Je désirerais que les curés fussent payés de même des deniers particuliers du district, et enfin que les évêques le fussent sur cette partie de la recette que les départements pourront garder peur leur défense propre. Rien ne nous garantira mieux la réduction du nombre des ecclésiastiques à ses justes bornes, qu’un semblable règlement. Il aura encore un bon effet, qui est de proportionner le traitement des ecclésiastiques à la convenance locale, sans néanmoins passer la mesure en plus ou en moins, qui a été prescrite par le décret ci-dessus. Je n’imagine pas qu’il soit besoin d’avoir plus de dix-huit évêques en France, y compris les archevêques, car ce n’est qu’une différence de noms. On doit faire une observation générale; la division de la France en départements ou en districts a été combinée surtout pour la représentation ou pour l’administration proprement dite. Le pouvoir judiciaire, l’établissement ecclésiastique peuvent facilement se prêter à un autre cadre; il n’est pas nécessaire qu’il y ait ni un tribunal dans tous les districts, ni un évêché dans tous les départements. Après les évêques viennent les curés; il en faut un par district, comme il faut sous son inspection, un vicaire par municipalité, en permettant, comme nous l’avons dit, à plusieurs villages de se réunir pour n’avoir à payer qu’un vicaire commun. On peut croire qu’une pareille considération réduira tôt ou tard le nombre des vicaires à 12,000 ou environ. llyaura alorsenFrance.pour l’établissemeut ecclésiastique, 18 évêques, qui, à 25,000 livres, taux moyen, coûteront ..... 450,000 livres. Environ 700 curés à 1,500 livres, taux moyen, coûteront ........... 1,050,000 12,000 vicaires à 700 livres, taux moyen , recevront la somme de ......... 8,400,000 Total pour les honoraires des personnes ....... 9,900,000 Àjoutez-y pour les frais d’administration du service et l’entretien des églises , environ .......... 2,100,000 Total général. . . . 12,000,000 ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BUREAUX DE PUSY. Procès-verbal de la cérémonie de Notre-Dame , le dimanche 14 février 1790 (1). En exécution de son décret de la veille, l’As-(1) Ce procès-verbal n’a pas été inséré au Moniteur. semblée nationale s’est réunie, le dimanche matin, dans le lieu ordinaire de ses séances. L’Assemblée s’est mise en marche à onze heures, pour se rendre en corps à l’église de Notre-Dame. La garde nationale formait la haie depuis les Feuillant jusqu’à la métropole; un peuple immense remplissait les rues. M. le Président, précédé des huissiers de l’Assemblée, et d’un détachement de la cavalerie nationale, ouvrait la marche ; les membres le suivaient deux à deux ; ils étaient escortés par la garde nationale et la prévôté réunies ; les gardes delà prévôté et les grenadiers de la garde nationale marchaient alternativement. L’Assemblée étant arrivée à l’église de Notre-Dame, une députation de la commune, M. le maire Bailly à la tête, est venue la recevoir. M. le maire a prononcé un discours analogue à la circonstance, auquel M. le Président a répondu. Le doyen du chapitre, à la tête du clergé, a pareillement harangué l’Assemblée, qui a répondu par l’organe de M. le Président. L’Assemblée est entrée dans l’église au son des cloches, au bruit du canon, des tambours et d’une musique militaire. MM. les députés ont été placés à droite sur des gradins. La commune de Paris était à la gauche, ayant auprès d’elle les ministres du roi. Al. l’abbé Mulot, chanoine régulier de Saint-Victor ■, docteur en théologie , président de l’Assemblée des représentants de la commune, a prononcé le discours suivant (1) : Facto in se spiritu Dei , dixit Régi et Populo : Audite me ..... Transibunt dies , absque lege ..... Non erit in tempore illo pax egredienti et ingre-dienti , sed terrores undique ..... Vos ergo conforta-miniet non dissolu antur manus vestræ; erit enim merces operi vestro ..... Et intravit Rex ad corro-borandum fœdus ..... Et juraverunt domino voce magna in jubilo , in clangore tuba omnes ..... cum execratione ..... in omni enim corde suo juraverunt et in omni voluntate.... et præstitit eis Dominus requiem per circuitum. Plein de l’esprit divin, il dit au Roi et au Peuple : Ecoutez-moi : il y aura des jours où l’on méprisera la loi ..... Alors la paix sera bannie du sein des coupables : soit qu’ils s’éloignent de leurs villes, soit qu’ils y rentrent; partout la terreur agitera leurs âmes ..... Pour vous, armez-vous de force; redoublez d’efforts; ne vous séparez pas, et vos travaux auront leur récompense. Et le Roi vint aussitôt faire un pacte d’alliance solennelle, et le peuple a juré cette alliance; il en a fait le serment à son Dieu : il a prononcé l’anathème contre les ennemis de la loi : son cœur dictait ; sa volonté consommait son serment ..... Et le Seigneur a répandu sur le souverain et sur Je peuple les dons bienfaisants du repos et de la paix. (Au livre II des paralipomènes, chap. XV.) Messieurs, Quel est cet homme inspiré, qui parle avec tant de sagesse et de franchise à son roi, et qui donne à tout le peuple des conseils aussi précieux? Queis sont ces coupables que la frayeur poursuit jusque dans leurs retraites? Quel est ce monarque vertueux, si docile à la voix qui l’ins-(1) Le discours de M. l’abbé Mulot n'a pas été inséré au Moniteur.