316 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] sont onéreux au commerce, à l’industrie et à la sûreté de la propriété. Art. 14. Les droits seigneuriaux, tels que la chasse, la pêche, les banalités, le droit d’alberge, les accaptes, les cas impériaux et autres qui représentent des impôts, ou qui sont des privilèges exclusifs, presque toujours très-onéreux, seront supprimés, en conséquence d’un dédommagement réglé sur le taux moyen de l’intérêt; ces droits ne sont pas nue-propriété, mais un engagement pris par l’Etat, engagement qui, par sa nature, ne peut pas être perpétuel. Art. 15. Les députés demanderont qu’il ne puisse pas être attenté à la liberté individuelle des citoyens sans l’observation des formes qui seront indiquées par les Etats généraux. Us solliciteront la liberté de la presse, sauf les réserves dont elle peut être susceptible. Art. 16. Les députés réclameront l’abolition de tous privilèges exclusifs et notamment de ceux qui grèvent le peuple en concentrant dans une compagnie le droit de faire le commerce des denrées et marchandises de première nécessité, et qu’aucun impôt ne soit mis sur lesdites marchandises. Art. 17. Les députés demanderont que les Etats généraux soient périodiques et que leur tenue ne puisse pas être éludée aux époques qui seront déterminées, sans qu’il y ait suspension d’impôt par tout le royaume. Art. 18. Les députés insisteront à ce qu’il ne soit perçu aucun impôt à l’avenir autre que ceux qui seront déterminés par les Etats généraux, aucun corps judiciaire n’ayant le droit de les consentir sous prétexte de la vérification de leur établissement au préjudice delà nation, qui ne peut pas se dépouiller de ce droit. Art. 19. Avant la fin des Etats généraux on tiendra de nouvelles assemblées provinciales pour ratifier ce qui aura été fait dans l’assemblée générale, et la pluralité des ratifications en faveur d’une opinion lui donnera force de loi. Art. 20. Les députés de la nation provençale aux Etats généraux réclameront l’abrogation de la loi qui exclut le tiers-état des emplois militaires. Art. 21. Les députés aux Etats généraux solliciteront la responsabilité des ministres comme loi fondamentale du royaume. Art. 22. Les députés seront expressément chargés de requérir surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales , sans exemption aucune de la part de tous les sujets de Sa Majesté, suivant leurs facultés, en quoi elles consistent et puissent consister, soit biens, capitaux, droits seigneuriaux ou autres; la puissance royale protège toutes ces espèces de biens, toutes ces espèces de biens doivent donc contribuer pour la maintenir. Art. 23. Tous les biens-fonds appartenant au clergé séculier et régulier seront mis en vente et indiqués pour amortir les dettes nationales, de manière cependant qu’aucun membre jouissant actuellement des revenus de ces fonds puisse être privé d’un honnête nécessaire selon son état, et on ne laissera à l’avenir dans le clergé que les membres véritablement utiles pour leurs fonctions. Art. 24. Sa Majesté sera instamment suppliée de réunir à la couronne la principauté des Martigues, qui est un des domaines aliénés. Art. 25. La milice est un vrai fléau des campagnes et ne donne que de mauvais soldats, parce que le milicien n’a pas le motif d’un dévouement volontaire ; pour lui donner ce mérite bien essentiel, il paraît nécessaire que chaque communauté payât une contribution libre et réglée, par elle seule, pour rendre volontaire l’engagement de chaque milicien. Cette manière d’avoir des soldats est en même temps la plus juste, la plus noble et la plus économique, la plus sûre, la plus propre à former de bonnes troupes, et elle doit avoir la préférence sur toutes celles que le mépris pour les hommes, et le respect pour l’usage, ont fait adopter ou conserver. Art. 26. Les députés aux Etats généraux demanderont la suspension d’impôts pour le pays sujet à des mortalités d’arbres et inondations et feront valoir de leur mieux l’état fâcheux où se trouve Lançon et lieux circonvoisins parla mortalité assurée de presque tous leurs oliviers qui les privera pendant plusieurs années de toutes récoltes d’huile, leur principale denrée et seule capable de fournir à l’étendue de leur contribution. Art. 27. Les députés aux Etats généraux seront autorisés à consentir toul ce qui ne choquera pas formellement ou améliorera évidemment les articles ci-dessus énoncés, toujours avec la clause de la ratification en la forme énoncée dans l’article 19. Signé Emeric, maire-consul; J. -B. Compte, consul ; A. Rostaing, consul ; Giraud ; Bousithon ; Gaspard ; Rostaing ; Ancenie ; Giroux ; J. Baulion ; Lanquin; Martin; Teissier; A. Leyron; Rainaud; Boy ; J. Rostaing; Michel de Sonnier; Romay; Emeric ; Bourely ; Laurent ; C. Rauxy ; Roux ; Martin Teissier ;’ J. -B. Conte; Lambert; Rouen; Beicheroy ; A. Duclauz ; A. Boulian ; J. Saunan ; de Marie ; J. Boucret ; Noux ; Joseph Lion ; Cour-ran; L. Lion; Nougnon ; S. Tassy ; Noussin; Arenes ; Bourely; Joseph Aynard; D. ûenoux; Bonnet ; Signora ; Astier ; A. Àstier. Paraphé le présent cahier des doléances de la communauté de Lançon , contenant quinze pages d’écriture et vingt-sept articles. Signé Emeric, maire-consul. INSTRUCTIONS, Doléances et remontrances approuvées par le conseil de tous chefs de famille de la communauté de Lauris,tenu le vingt-cinquième jour de mars 1789, en exécution de V arrêt du conseil de Sa Majesté du 2 mars courant, concernant la convocation des Etats généraux du royaume , pour être remises aux députés de cette communauté , portées à l'assemblée de la sénéchaussée et ensuite auxdits Etats généraux convoqués pour leTl avril prochain (1). L’assemblée, considérant que le premier abus de la constitution actuelle du royaume, la répartition inégale des impôts, et que la loi fondamentale gravée par la nature dans le code des nations établit que tous les individus qui les composent doivent à l’Etat dont ils sont membres le tribut nécessaire pour alimenter cette force publique, gardienne de leur sûreté , il s’ensuit de ces maximes aussi anciennes que les gouvernements que tout individu doit contribuer à proportion de ses moyens au maintien de cette puissance, qui défend, qui protège et procure le bonheur public; tout privilège, toute exemption qui obstrue cette coopération mutuelle de tous les ordres doivent (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. ] États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ISenéchaussée d’Aix.] 3�7 être regardés comme un vice de notre constitution; nous devons donc réclamer avec force contre cet abus qui retient les biens du clergé et de la noblesse dans une odieuse immunité Que si la contribution égale est de droit naturel, la participation aux dignités tant ecclésiastiques que militaires en est une conséquence immédiate, puisque tout gouvernement, quel qu’il soit, n’est lieureux au dedans et puissant au dehors, que lorsqu’il donne à tous ses sujets le droit de parvenir à la fortune et aux honneurs ; le contraire arrive lorsqu’il réserve a une seule classe de citoyens les bienfaits qui doivent être communs à tous. Les dons, les pensions, les grands bénéfices réservés aux seuls nobles, ôtent à la fois l’émulation aux nobles et aux roturiers. Elles l’ôlent aux premiers, parceque pouvantparleurnaissance prétendre à tout, ils n’ont pas besoin de mérite, et aux seconds, parce que ne pouvant prétendre à rien, il leur devient inutile. Priver ainsi un Etat des génies qui peuvent l’éclairer, l’instruire et le défendre, c’est un crime de lèse-nation. Qui pourrait nier que dans la génération présente et future du tiers, il ne paraîtra pas encore des Bossuet, des Massillon et des Fléchier? Combien de ministres subalternes qui, par leurs talents, leur zèle et leur vertu, seraient dignes des premières charges de l’Eglise; combien de Ghevert dans nos armées, qui vivent ignorés dans des rangs inférieurs ; combien de Duguay-Trouin, de Jean Bart dans notre marine marchande, feraient encore trembler les fiers Bataves et les fougueux Anglais, s’ils pouvaient parvenir au commandement des escadres? Fermer l’entrée des emplois et des professions honorables à la classe la plus nombreuse et la plus utile, c’est étouffer le génie et les talents, et les forcer à fuir une ingrate patrie ; cependant les nobles seuls dans notre constitution actuelle jouissent de toutes les prérogatives : richesses territoriales, honneurs, dignités, grâces, pensions, retraites, gouvernements, écoles gratuites et fondations pour les demoiselles nobles, chapitres richement dotés, en un mot, établissements de tout genre, voilà les faveurs que l’Etat prodigue à la noblesse exclusivement et aux dépens du tiers-état. Ainsi, la noblesse jouit de tout, possède tout, et voudrait s’affranchir de tout ; cependant si la noblesse commande les armées, c’est le tiers-état qui les compose ; si la noblesse verse une goutte de sang, le tiers-état en répand des ruisseaux. La noblesse vide le trésor royal, le tiers-état le remplit ; enfin le tiers-état paye tout et ne jouit de rien. Que notre vie et nos biens sont en très-grand danger par les abus de l’administration de la justice; notre code civil et criminel porte encore l'empreinte du siècle barbare qui l’a enfanté, malgré tous les changements que d’illustres magistrats ont pu y faire par ordre de nos rois; ce sont ces mêmes additions, tous ces arrêts de règlements qui ont jeté notre jurisprudence dans un chaos informe, dont il ne sera possible de la retirer qu’en la régénérant entièrement. Tout nous présage que cette régénération sera un monument ineffaçable de l’amour de notre auguste monarque pour ses peuples et des lumières de la saine philosophie du dix-huitième siècle. Les tribunaux souverains sont trop éloignés des justiciables et d’un ressort trop étendu; ceux qui les composent ont acquis au prix de l’or, sans examen de leur capacité, le droit de disposer de nos fortunes et de nos vies; ils ne sont point nos juges naturels parce qu’ils ne sont pas de notre choix, c’est un droit imprescriptible du peuple d’être jugé par ses pairs, et nous ne voyons dans les tribunaux que des magistrats nobles qui sacrifient bien souvent la loi au caprice, à la faveur, à leurs propres intérêts. Il est difficile que les parlements ôtant composés de nobles possédant fiefs ne fassent pencher la balance en faveur des seigneurs contre leurs vassaux. Nous espérons de la bonté paternelle de notre souverain qu’il rétablira le bon ordre partout. Pour ce qui concerne les plaintes et doléances sur certains abus qui se sont impérieusement perpétués dans l’administration des communes, le conseil général se plaint que la noblesse possédant fiefs ayant conservé dans la campagne une partie de ses privilèges , malgré tous les édits et déclarations de nos rois, elle fait faire mouvoir pour les soutenir l’espérance et la crainte, ces deux grands mobiles du cœur humain; leur despotisme est d’autant plus accablant que ses ordres sont exécutés par des agents nombreux et terribles : tels sont le retrait féodal, les cens, taxes, lods, droit de chasse, les charges de judicature qu’elle fait remplir par des hommes à ses gages, et ignorants, à qui elle dicte bien souvent leurs conclusions et leur justice; c’est pour parvenir à ces différents moyens que les nobles se sont emparés des prérogatives de la mairie , quoique les communes les eussent achetées du Roi en 1757. Les parlements leur ont accordé le droit de faire autoriser le conseil municipal par leur officier, sous le prétexte simulé d’empêcher les cabales et les factions; mais leur vrai but a été de s’emparer entièrement de l’administration. Leurs desseins n’ont que trop réussi pour le malheur des pauvres habitants des campagnes, en faisant exercer dans les conseils par leurs officiers un espionnage qui gène les suffrages des laboureurs, très-susceptibles de crainte. 11 arrive de là que les bourgeois qui ont quelque fortune ne veulent plus habiter dans les villages pour n’ètre point exposés à un avilissement inséparable du joug féodal, et pour n’étre point assujettis à là morgue d’un officier agent. 11 arrive de là que les bourgeois aiment mieux demeurer dans, les petites villes, dans l’oisiveté et dans l’ennui, que de vivifier les terres, qui avilissent leurs cultivateurs. 11 s’ensuit que les pauvres cultivateurs sont privés de leurs conseils, de leur savoir et de leurs espérances. Que dirons-nous du retrait féodal, que les nobles exercent dans leurs fiefs pendant l’espace de trente années ? de ces reconnaissances qui bouleversent, ruinent la fortune de leurs vassaux, qui enchaînent leurs libertés et leurs propriétés ; serait-ce une plainte mal fondée? une demande injuste que de demander la suppression du retrait féodal? la sûreté des propriétés, La tranquillité du citoyen l’exigent. Le droit de chasse, si onéreux par sa nature, le devient encore plus par la rigidité avec laquelle l’exercent les nobles dans leurs terres. Les laboureurs voient ravager avec larmes l’espérance de leur récolte par des animaux destructeurs, sans oser y remédier dans la crainte d’une procédure infamante, prise sur la seule déposition d’un garde-chasse souvent mal famé et mulcté de plusieurs décrets. De jeunes enfants, pour avoir déniché des lapins ou des perdrix, plutôt par un plaisir excusable à leur jeunesse que par malice, sont flétris de décret, dans un âge où aucune loi ne peut les atteindre. Ainsi, pour le plaisir et la friandise d’un seul, tout un public souffre de ce droit destructeur de l’agriculture, du commerce et de l’honneur. 318 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] Il faut un terme à tous les abus, et ce terme nous est annoncé par notre auguste monarque. Trélats, noblesse provençale, soyez les défenseurs et non les oppresseurs d’un ordre qui vous nourrit, qui fournit à votreluxe des aliments, à vos enfants des instructeurs, à vos terres des cultivateurs et à vous-mêmes des serviteurs. Vous êtes des corps respectables, sans doute, jamais le tiers-état ne vous a contesté la préséance, les égards que vous méritez; mais vouloir vous en faire un titre pour l’écraser, n’est-ce pas le comble de la déraison? Dans les circonstances présentes, où l’harmonie est si nécessaire dans les differents ordres de l’Etat, vous ne parlez que des privilèges et des droits, comme si dans une calamité publique vous deviez songer à des destructions qui ne sont que des usurpations antiques ; vous prétendez faire supporter par les communes les contributions nécessaires pour régénérer les finances de l’Etat qui ont été absorbées par des gratifications énormes et des pensions exorbitantes qui vous ont été accordées. Princes augustes , dignes rejetons d’une race chérie, et fidèles conseillers d’un souverain adoré, que vos alarmes cessent ! Le trône n’est point ébranlé par les prétentions du tiers-état. Il s’affermira au contraire sur un fondement plus solide, l’amour et la reconnaissance. Get ordre ne demande que la liberté de sa personne, la sûreté de ses propriétés, la répartition égale des impôts; en un mot, le droit sacré de citoyen une fois accordé, il sera calme, toujours soumis. Il respectera les distinctions qui sont la base de la monarchie. Beaucoup de rois se sont repentis d’avoir mis leur confiance dans des trésors, dans des alliés, dans des corps et dans des grands, mais aucun de s’être fié à son peuple. 0 Louis XVI 1 héritier du sceptre et des vertus de Louis IX, de Louis XII et de Henri IV ! vous avez dès vos premiers pas au trône établi les mœurs, et ce qui est encore plus glorieux, vous en avez donné l’exemple au milieu d’une cour française. Vous donnez à vos peuples la liberté de répartir entre eux les impositions nationales ; quelques hommes sages qui vous environnent, et ce qui est encore plus puissant que leur sagesse, les charmes et la sensibilité de votre auguste épouse, vous ont soutenu dans ce chemin de la vertu, et rendu la bienfaisance et l’amour de votre peuple cher à votre cœur. 0 grand roi 1 perfectionnez votre ouvrage, soutenez le faible contre le puissant, détruisez le reste de l’esclavage féodal, affranchissez nos biens de la servitude dont vous avez affranchi depuis peu nos corps, et votre nom sera invoqué par les malheureux de toutes les nations, et la prospérité la plus reculée nous enviera le bonheur d’avoir vécu sous vos lois ; achevez de nous rendre heureux ; vos peuples livrés à des despotes se réfugient en foule au pied de votre trône, et viennent chercher en vous leur Dieu tutélaire, leur père et leur défenseur. La dignité de l’homme et des citoyens avilie jusqu’aujourd’hui sera relevée, n’en doutons pas, dans cette auguste assemblée, où un Roi juste et bienfaisant, entouré de ses sujets comme un père au milieu de ses enfants, les consultant sur les intérêts de sa nombreuse famille, il modérera l’avidité des uns, retiendra les prétentions des autres, accueillera les plaintes des opprimés, séchera leurs larmes et brisera leurs fers. Français ! quelle carrière de bonheur s’ouvre devant nous ! Ennemis de la France, tremblez ! Le peuple devenant heureux, le prince devient puissant. Demandez à Louis ce que la France lui vaut de revenu, il vous répondra comme Henri IV: « Ayant le cœur de mon peuple, j’aurai ce que je voudrai. Un père chéri de ses enfants est bien assuré de leur secours.» 0 toi, Necker! aussi grand, mais plus heureux que Sully, ami de notre nouvel Henri IV, dispensateur de ses grandes pensées pour le bonheur public, reçois les transports de notre vive reconnaissance, permets que nous joignions nos vœux et nos hommages à ceux de nos concitoyens; nous ne sommes ni moins sensibles ni moins reconnaissants. L’assemblée désire que ses représentants aux Etats généraux demandent : 1° la répartition égale de toutes les impositions royales et locales entre les trois ordres sans aucune exemption ni privilèges quelconques, la faculté à tous citoyens de quelque ordre qu’ils soient departiciper à tous les emplois ecclésiastiques, civils et militaires. 2° L’abolition du Concordat passé entre le pape Léon X et François 1er, roi de France, en 1516, et de la pluralité des bénéfices. 3° La suppression de la dîme comme un impôt improportionnel; les communes se chargent de stipendier honorablement leurs pasteurs et d’entretenir les églises. 4° Le rétablissement de la conventualité des religieux et l’abandon des maisons où ladite conventualité ne pourra s’établir. 5° La réfnrmation du code civil et criminel. 6° La réforme des tribunaux souverains, et qu’ils soient composés par des membres du tiers égaux en nombre à ceux de la noblesse ; que personne ne puisse y obtenir la qualité de juge qu’à l’âge de cinquante ans. 7° La suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux, l’attribution de souveraineté à ceux des arrondissements jusqu’à la concurrence d’une somme déterminée; qu’on ne puisse être pourvu aux charges de judicature dans les tribunaux subalternes qu’à l’âge de quarante ans. 8° De réclamer fortement contre la vénalité des charges , et que tous juges dans les tribunaux quelconques soient obligés de motiver leurs jugements sous peine de nullité à leurs dépens.' 9° De demander instamment l’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens. 10° La cassation de tous les arrêts de règlements qui ont force de loi dans le ressort des cours souveraines et qui n’ont point été consentis par la nation; ensemble la cassation de tous les arrêts qui ont été rendus en matière féodale sans être appuyés sur un titre précis. 11° L’abolition de tout impôt sur le sel, comme portant sur la classe la plus indigente et nuisant à l’agriculture. 12° L’abolition de tout droit de circulation dans l’intérieur du royaume, et notamment le recule-ment des bureaux des traites aux frontières. 13° Que les droits de contrôle soient abolis, et pour la sûreté publique un officier public tiendra un registre où il insérera un duplicata des actes passés dans la commune , lequel officier sera stipendié par elle. 14° La tenue périodique des Etats généraux, et que les trois ordres y votent par tête et non par ordre. 15° La liberté de la presse. 16° La publication annuelle par la voie de l’impression du compte général des finances du royaume envoyé dans toutes les provinces. Due le ministre des finances soit comptable à [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 3�9 la nation, que les Etats généraux se fassent représenter l’emploi de leurs deniers ; que si, à Dieu ne plaise! un ministre avait le mallieur de trahir la confiance de son auguste maître, et les intérêts de la nation, sera très-humblement et respectueusement suppliée Sa Majesté de faire instruire son procès sous les yeux des Etats généraux, c’est-à-dire des commissaires nommés par les trois ordres, pris à égalité dans l’ordre du tiers aux deux autres ordres. Quant aux plaintes et doléances concernant les maux que souffre ladite communauté, le conseil charge les députés du tiers aux Etats généraux de demander instamment à Sa Majesté : 1° La suppression des justices seigneuriales, les retraits féodaux régis par les mêmes règles que les retraits lignagers. 2° La restitution du droit de lods que les seigneurs ont exigé des vendeurs lors des coupe-ments des chênes que le Roi a fait faire dans chaque communauté, lequel droit a été remboursé par un seigneur du voisinage pour être injustement perçu. 3° L’exclusion des agents des seigneurs de la municipalité et de l’administration des œuvres de charité. 4° La restitution des droits de la mairie aux consuls, ainsi que la police et le maintien de l’ordre public. 5° La liberté et le pouvoir aux communautés de racheter les cens, taxes, banalités, sur le prix de la dernière acquisition. 6° La restitution des régales aux communautés dont les seigneurs se sont emparés dans les campagnes, quoiqu’ils en aient retiré les demi-lods. 7° L’abolition des lods perçus sur les communautés sans transport de leurs domaines. 8° De solliciter que la garde des bois et montagnes appartenant aux communes soit confiée à la communauté et non à la garde du seigneur. 9° Que les biens vendus par les communautés aux seigneurs, à leur sollicitation, leur soient restitués en en remboursant le prix. 10° De requérir que les seigneurs ne puissent exiger ni céder à leurs agents et à toutes autres personnes les honneurs qui ne sont dus qu’à leur individu. 11° La permission aux habitants de se servir des égouts des fontaines et eaux pluviales pour mouiller et faire du fumier pour engraisser leurs terres, tant qu’elles couleront dans l’enceinte du village, ce qui leur avait été interdit par les seigneurs, sous peine des amendes pécuniaires, quoique lesdites fontaines appartinssent aux communes. La communauté expose en outre qu’étant asservie au despotisme féodal, et par conséquent soumise aux banalités, directe générale, elle gémit encore sous l’esclavage d’une taxe-cens particulière qui s’étend sur la majeure partie de son terroir. Taxe qui est fixée par les actes emphytéotiques et notamment par celui du 28 septembre 1646, au huitième des grains et légumes et au dixième des raisins, olives, noix et amandes ; telle est la stipulation de nos dernières reconnaissances. C’est la loi et l’usage. Le seigneur nous menace depuis quelques années d’étendre sa taxe sur les haricots qui se vendent en herbe et la feuille de mûriers ; nous avons la douleur de voir que le pourvu d’un office de notaire créé depuis deux ans par la protection du seigneur, réunissant la qualité de viguier et d’agent de la seigneurie, stipule la servitude de la taxe en cés teihnes : Relevant de la directe, etc... soumise envers ledit seigneur a la taxe du huitain des grains et du dixain des fruits des arbres. Qui ne s’aperçoit au simple exposé de ces maux qu’on tend à effectuer ce dont il nous a menacés ! Ces mots génériques des fruits des arbres n’en exceptent aucun; cependant nos anciens baux ne désignent que les vignes, oliviers, noyers, amandiers. Queile ressource nous resterait-il pour prouver nos franchises des arbres autres que ceux stipulés dans nos transactions, si ces sortes d’actes étaient multipliés ? Comment prouverions-nous dans quelques années l’affranchissement de cette nouvelle servitude, puisque la jurisprudence des cours souveraines porte que les servitudes établies par plusieurs actes dans la majeure partie d’un terroir asservissent l’autre, à moins que des titres clairs n’en prononcent pas la franchise? Si nous avons pris l’allarme sur cette stipulation inusitée, qu’on nous dise à quelle lin et pour quelle, raison le nouveau praticien change la forme de stipuler les servitudes en usage chez tous les notaires des environs, contraire à nos reconnaissances et à celles passées devant son prédécesseur qui était aussi notaire et agent? Avons-nous tort de nous plaindre et de nous récrier, puisque, voulant établir la banalité de l’oflice, on asservit le pauvre peuple, sous l’appât de quelque retard dans le payement des lods, de contracter chez le notaire agent ? Nous implorons le secours de MM. les députés du tiers -état à la prochaine assemblée de la sénéchaussée, et nous chargeons nos députés de prouver l’injustice de cette stipulation par les pièces justificatives, si besoin est, et de concerter avec eux les moyens convenables qu’il y a à prendre pour prévenir et corriger de tels abus. La suppression de tous les droits féodaux jusques après la détermination et la dissolution des Etats généraux. L’intervention de la communauté dans les fait et cause des particuliers qui seraient injustement attaqués par le seigneur dans la demande des droits contraires à nos transactions. L’assemblée se plaint que les négociants et voituriers, pour des affaires pressantes, sont privés de passer le bateau à leur tour, ce qui porte des torts irréparables aux négociants et voituriers pour vaquer à leurs obligations ; nous voituriers et négociants faisons des vœux et des prières au souverain pour sa conservation. Gomme encore des particuliers se sont plaints d’avoir été condamnés par frayeur à des amendes pour avoir fait faire du charbon des branches de chênes blancs coupées par ordre du Roi, même après en avoir retiré le lods, demandant le remboursement dudit lods et amendes comme indûment perçus ; espérons du Roi bienfaisant et adresserons des vœux au ciel pour la longue durée de ses jours. La présente assemblée réclame encore le changement de l’administration de la province comme étant illégale. L’assemblée demande la destruction des pigeons comme animaux qui causent des dommages considérables dans le terroir. Enfin nous chargeons nos représentants aux Etats généraux d’assurer notre bon roi Louis XVI que nous lui offrons tous nos biens, tous les secours dont nous sommes capables, nos personnes, notre vie même ; qu’il daigne en accepter l’offrande comme un tribut de notre amour pour sa personne sacrée et pour le maintien de son autorité royale. 320 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] Signé Bressier, maire-consul; Loussel; Bosse de Vrieuffrel ; Boussot ; Bressai ; Rinoux; Aubert; Achard ; Goudou ; Redortier; Terry; Borre; Loussel fils; Maurain; L. Ajard; Joubert: Terry; Griende; Julabert; G. Cherris; Gavaudan ; Rou-bcrt; J. Baraillier ; Ginran ; Louset; J.-V. Grégoire; Barrive; Renoux; Grégoire ; Joseph Mou-clard ; Rigord ; Mouclard ; Renoux , Aiglan ; Grégoire ; Sylvestre ; ü. Cuissot; Terry; Joseph Malachie; Rigord; F. Achard fils; Terris; Leirot ; Cartier; Gavaudan; Lieutaud; Achard; Cartier; Guissot; Ayglau-Fabvre; Joseph Buaph ; Larmot ; Reynaud; Aiglan; Buech ; Gavaudan; Maurin Gabsol; Redortier; Ginoux; Cuissot ; Grégoire ; Goudon; Renoux ; Sylvestre Auteman ; L. Redortier ; François Redortier ; Loussel ; Cartier ; Chauvin ; Lieutaud. Le soussigné proteste contre la demande ambiguë de la destruction des pigeons, à savoir si c’est contre les véritables sauvages ou contre ceux qui logent dans leseolombierspermis, comme on pourra le prouver en temps et lieu, et qu’un particulier ne peut pas perdre le fond de bâtisse de son colombier, qu’il a acheté à prix d'argent, et qui ne serait plus rien sans pigeons; il demande à juste titre que le fond lui soit remboursé et déchargé d’une cense ; qu’il consent alors très-volontiers à cette destruction ; en satisfaisant à cette plainte, il demande plus amples réflexions et une loi juste pour les uns et les autres, et a signé. Bressier, et au-dessous, Guibert, lieutenant. CAHIER D'instructions remontrances et doléances de la communauté du lieu de Lourmarin, sénéchaussée d’Aix en Provence (1). Tandis que le meilleur des princes s’occupe du bonheur de ses sujets, tandis qu’il a manifesté de la manière la plus ouverte le désir qu’il a de les soulager, et que pour parvenir plus facilement à ce but, il a même exhorté tous les individus de son royaume à l’aider de leurs lumières, ne devons-nous pas rompre enfin un silence qui contrarie les intentions bienfaisantes de Sa Majesté? Nos connaissances, il est vrai sont peu étendues, mais pour nous adresser à un aussi bon roi, qu’en avons-nous tant besoin? Suivons l’impulsion de nos cœurs. Nos cœurs seuls doivent nous dicter ce que nous avons à dire. Soumettons à ses pieds nos très-humbles supplications et doléances, croyons qu’il daignera les accueillir favorablement. Son oreille jusqu’ici s’est toujours ouverte avec complaisance aux plaintes de ses fidèles communes ; pourrions-nous ne pas avoir le même avantage? Espérons que le digne ministre qui, dans ces circonstances épineuses pour un homme d’Etat, fait un si bel usage de ses talents et de ses vertus, voudra bien nous appuyer de sa puissante protection. Cette communauté est dans le cas de demander et d’obtenir des soulagements dans la répartition des impôts avec d’autant plus de justice qu’elle paye au prieur la dîme au vingt de tous les grains, raisins, agneaux, chevreaux, et au seigneur la huitième partie de tous les grains, olives, légumes, noix, amandes et chanvre ; les maisons, deux gélines de cens; les bastides, une géiine de (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. cens; les jardins, deux poulets ; les prés, un cens en argent; les vignes et vergers doivent un petit cens en argent outre et par-dessus la huitième partie de leurs fruits. Le cens personnel pour chaque chef de famille, une charge de bois de cens pour chaque bète portant bât, une journée de corvée pour chaque charrue, le droit de moulure au seize et le fournage au quarante, la directe universelle au six, le retrait féodal, la banalité des fours, moulins à blé et à huile et autres petites redevances. Joignant à ces motifs la mortalité presque générale de ses oliviers-causée par les froids de l’hiver dernier, c’est une perte irréparable pour cette communauté qui l’engage à implorer les bontés du Roi, et à espérer qu’elle jouira des avantages qui seront sollicités et obtenus par les autres communautés de cette province. C’est sur ce point important pour elle que ses députés sont priés de donner leurs attentions les plus particulières. Le conseil, réunissant son intérêt particulier aux intérêts généraux, charge expressément ses députés de solliciter à l’assemblée la réformation du code civil et criminel, fa suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux, une attribution à ceux des arrondissements de souveraineté jusqu’au concurrent d’une somme déterminée, l’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens, la faculté à ceux-ci, de quelque ordre qu’ils soient, de concourir pour tous emplois militaires, bénéfices et charges attributives de noblesse, et de réclamer surtout contre la vénalité des offices. Lesdits sieurs députés réclameront en outre une modération dans le prix du sel rendu uniforme par tout le royaume, comme aussi l’abolissement de tout droit de circulation dans son intérieur, et notamment le reculement des bureaux des traites dans les frontières, et la suppression de la mendicité. Le conseil charge au surplus ses députés d’insister à demander au meilleur des rois la formation ou réformation de la constitution du pays, de réclamer de sa justice qu’il soit permis aux communes de se| nommer un syndic avec entrée aux Etats, de s’élever contre la perpétuité de la présidence et contre la permanence de tout membre amovible, ayant en l’état des choses entrée auxdits Etats, comme aussi de requérir l’exclusion des mêmes Etats des magitrats et tous officiers attachés au fisc, la désunion de la procure du pays du consulat de la ville d’Aix, l’admission des gentilshommes non possédant fiefs et du clergé du second ordre, l’égalité des voix pour l’ordre du tiers contre celles des deux premiers ordres, tant dans tous les Etats que dans la commission intermédiaire, et surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales, sans exception d’aucune et nonobstant toute possession ou privilège quelconque, l’impression annuelle des comptes de la province dont envoi sera fait dans chaque communauté, et que la répartition des secours que le Roi accorde au pays, ensemble de l’imposition de 15 livres par feu affectée à la haute Provence, sera faite dans le sein des Etats et par eux arrêtée. De demander que chaque commune fût obligée de faire et réparer à ses propres frais les ponts et chemins sans aucune association avec les vi-gueries ni avec la province, commeaussi de porter les deniers royaux directement à la caisse du trésorier de la province. La suppression des pigeonniers, à l’exception de celui au seigneur, et du droit exclusif de la chasse. Signé Corgier , maire ; Bernard ; Goulin ;