[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 juillet 1791. J 4i8 le royaume; il n’y a aucune espèce de raison pour apporter à cet égard des distioctions entre Paris et les autres départements : la même loi doit régler les fonctions et les droits des receveurs qui existent partout au même titre, et sont établis pour le même objet. L’édit de 1689 et les déclarations subséquentes doivent donc provisoirement être la législation générale des dépositaires judiciaires, et la déclaration de 1669 doit cesser d’avoir des effets. Les receveurs des consignatons de Paris insistent, et disent que l’état particulier de leurs caisses est un obstacle de plus à ce que les mesures générales leur soient appliquées; que la nation doit à ces caisses une somme assez forte. Cette considération sera l’objet d’un examen et d’un travail particulier lors de la liquidation des offices de Paris, et de l’apurement des comptes; mais elle est étrangère à la question agitee sur la suppression de la vénalité, et sur le mode de remplacement provisoire. L’existence d’une dette publique envers les caisses des consignations, et le rétablissement qu’il faudra faire de fonds déplacés, regardent beaucoup plus les créanciers de ci-s caisses que ceux qui les administrent. Si la nation doit, elle s’acquittera, soit en remettant dans les caisses l’objet de la dette, soit en payant à mesure que les payements seront ordonnés; c’est au comité de judicature et à celui des tinances à vous proposer à cet égard les dispositions que les anciennes lois et la justice demandent. Quant aux receveurs, on examinera les compensations légitimes qu’ils pourront avoir à proposer; on admettra comme pièces de leur compte les reconnaissances qu’ils auront été autorisés à recevoir; et moins il y a de temps que leurs caisses ont été vérifiées, moins ils auromde frais à faire et de temps à employer pour en constater i'élat définitif : avantage que n’auront pas les receveurs de consignations des autres départements, qui ne pourront pas, sans un grand travail, établir leurs comptes très arriérés. Quoi qu’il en soit, cela est entièrement du ressort de la liquidation; et il faut le dire, la demande de toutes ces exceptions a pour cause la position assez heureuse des receveurs des consignations de Pans : ils ont acheté leurs charges fort bon marché; malgré la diminution de leur territoire, ils trouvent encore un très avantageux salaire dans la perception des droits qui leur sont attribués. Différents en cela des receveurs des consignations dans les autres départements, ils préféreraient à leur liquidation la conservation pleine de leur état, et ils s’efirayent et d'un établissement provisoire, et de la suppression des trois quarts de leurs droits. Mais les lois ne sont pas faites pour l’avantage de quelques particuliers ; et, sous un régime sage, les institutions ne peuvent pas être morcelées, et ne présenter qu’un amas d’exceptions; elles doivent être le résultat d’un système uniforme et complet. Nous vous proposons donc le projet de décret suivant : « Art. 1er. Tous offices de receveurs des consignations et commissaires aux saisies réelles sont et demeurent supprimés; le comité de judicature fera incessamment son rapport sur le mode de leur liquidation et la reddition de leurs comptes. « Art. 2. Jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné, les titulaires desdits ofiiees près les ci-devant bailliages, sénéchaussées et autres sièges royaux de première instance, continueront provisoirement d’exercer leurs fonctions près les tribunaux de district qui se trouvent établis dans l’étendue de leurs anciens ressorts, sans qu’ils puissent néanmoins sortir des limites de leurs départements. « Art. 3. Du jour de la publication de la présente loi, et pendant tout le cours de leur exercice provisoire, tous les receveurs des consignations, sans exception, seront tenus de se conformer aux dispositions contenues dans l’édit du mois de février 1689, ainsi qu’aux déclarations subséquentes qui auraient pu y ajouter ou déroger. Leurs droits dans tout le royaume seront de 3 deniers pour livre dans tous les cas, et ceux des commissaires aux saisies réelles, sur le produit des baux judiciaires, seront de 12 deniers pour livre du prix desdits baux. « Art. 4. Les cautionnements et finances d’offices, qui auront été fournis précédemment par lesdits receveurs et commissaires, serviront également à la sûreté des dépôts qu’ils recevront en qualité de séquestres provisoires. « Art. 5. En conséquence, tant que durera le cours de cet exercice provisoire, ils ne pourront retirer les sommes qui seront décrétées devoir leur être remboursées ; seulement, après que le mode de leur liquidation aura été déterminé, ils seront admis à employer eu acquisition de domaines nationaux la moitié de leur remboursement présumé, sur les reconnaissances provisoires qui leur seront délivrées par le commissaires de la liquidation, même la toialfé de leur remboursement, après que leurs liquidations particulières auront été définitivement décrétées. « Art. 6. Les biens nationaux qu’ils acquerront demeureront affectés et hypothéqués par privilège spécial, tant aux débets actuels de leurs caisses et à la reddition de leurs comptes, qu’aux dépôts qui pourront leur être confiés pendant le cours de leur exercice provisoire. «> M. Gaultier-Biauzat. Je crois qu’avant que nous nous occupions du projet de décret qui nous est actuellement soumis, il est important que chacun de nous puisse y réfléchir et soit à même d’examiner cette matière par comparaison et par rapprochement avec les lois que nous avons déjà rendues sur l’ordre judiciaire. Alors nous pourrons décider; mais dans ce moment nous ne pouvons rien prononcer. Je demande donc l’impression et l’ajournement du projet de décret. M. Chabroud. Il est fort inutile de conserver de pareils officiers publics dont le choix doit être laissé aux parties, si elles en jugent les fonctions nécessaires; je ne vois donc aucun inconvénient à prononcer sur-le-champ la suppression de ces offices et à adopter l’article 1er. M. Le Chapelier, rapporteur, s’oppose à la division des articles du projet et conclut à l’impression et à l’ajournement. (L’Assemblée décrète l’impression du rapport et du projet de décret et l’ajournement.) M. Louis llonnerou représente à l’Assemblée la nécessité de liquider promptement les comptes de l'ancienne Compagnie des Indes et de rassurer, par là, les colons indiens qui se trouvent avoir fait des avances et qui, jusqu’à ce jour, ont attendu sans murmurer. Il demande que l’Assemblée renvoie leurs réclamations au comité central de liquidation, et charge ce comité de présenter un projet de décret sur les moyens les 419 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 119 juillet 1791] plus prompts et les plus économiques pour arriver a la liquidation des affaires de cette compagnie. (Celte motion est adoptée.) M. Alexandre de Beauharnais, au nom du comité militaire. Je suis chargé de rapporter une observation contenue dans une des lettres adressées à l’Assemblée par MM. Alquier, de Biron et Boullé, nommés commissaires pour se rendre dans les départements du Nord. MM. les commissaires observent que, dans l’expédition de la loi qui contient leur commission, il a été fait une omission par rapport au département de l’Aisne qui devrait y être compris. Je prie donc Monsieur le Président de consulter l’Assemblée sur la question de savoir si elle autorise MM. les commissaires à remplir également leurs fonctions dans le département de l’Aisne. (L’Assemblée décrète que MM. Alquier, Biron et Boullé, membres de l’Assemblée nationale, commissaires nommés par elle pour se rendre dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, rempliront aussi leurs fonctions dans le département de l’Aisne.) M. le Président fait donner lecture par un de MM. les secrétaires : 1° D’une adresse du conseil général de la commune de Rouen, ainsi conçue : « Messieurs, « Des perfides, des traîtres ont séduit le roi, et lui ont conseillé d’abandonner le meilleur des peuples. « Le monarque a disparu dans un instant où sa suite pouvait perdre l’Etat; s’il a prévu les funestes conséquences de cette étrange démarche, il doit se faire les plus grands reproches : mais par la Constitution sa personne est sacrée et inviolable, et elle n’a pu cesser de l’être. « Le monarque tient tous ses pouvoirs de la nation; s’il est inviolable, ce n’est pas pour son bonheur, c’est pour le nôtre; s’il est inviolable, il ne peut donc être accusé, autrement son inviolabilité serait illusoire. Il était cependant soumis à une peine. Si, sorti du royaume, il refusait d’y rentrer, il perdait le trône". Sa seule peine légale était dans la déchéance, mais il n’a pas mérité ce malheur, puisqu’il est encore au milieu des Français. Le peuple a pu blâmer sa conduite, mais qui que ce soit ne peut inculper sa personne. Malheur à ceux qui voudraient soumettre le chef de l’Etat aux attentats de l’audace ou de la scélératesse. Voilà, Messieurs, ce que vous venez de consacrer encore par un de vos décrets. « Cependant un petit nombre de factieux, que nous sommes bien éloignés de confondre avec la très grande majorité de nos frères les braves et sages Parisiens, ose protester en ce moment contre le décret par lequel vous venez d’affermir l’inviolabilité des monarques français. « Nous n’examinons pas quels sont les chefs, les instigateurs de ces révoltés ; nous nerelèverons pas les sophismes dangereux dont ils s’efforcent de voiler leurs projets criminels, nous ne considérons que la loi : elle est rendue, et dès lors ceux-là doivent être punis, qui, méconnaissant l’autorité suprême du pouvoir constituant, osent appeler de ses décrets à des assemblées turbulentes et illégales. f Ils se montreraient moins hardisc.es hommes pervers dont l’anarchie est l’élément si, par un sentiment naturel aux grandes âmes, vous n’aviez presque toujours usé de clémence, lorsque l’aristocratie et le fanatisme irrités de leur chute provoquaient sans cesse votre sévérité. « Mais le temps est venu de donner un grand exemple, et l’intérêt de Paris et 1 intérêt de tous les départements, fatigués de tant de manœuvres criminelles, exigent que toute la rigueur des lois soit déployée contre tous ceux, quels qu’ils soient, qui enfreindront les lois constitutionnelles et troubleront l’or i re public. « Loin de nous les projets condamnables de cette ligue insensée de factieux, qui voudrait soumettre notre immortelle Constitution à la censure misérable d’un petit nombre de brigands soudoyés. « Nous jurons, et ce serment est celui de nos concitoyens; nous jurons de maintenir, contrôles ennemis du dehors et du dedans, la Constitution que vous avez donnée à la France. « Nous jurons de vivre et mourir sous le gouvernement libre et monarchique que vous avez décrété. « Achevez, Messieurs, de fixer les bases de ce gouvernement; conservez cette immuable, cette imperturbable fermeté contre laquelle sont venus échouer les efforts des malveillants, et ne retournez dans vos foyers qu’après avoir donné à la France le code complet de la Constitution. (Applaudissements). « Rouen, 18 juillet 1791. « Les membres composant le conseil général de la commune de Rouen. » (Et ont signé au nombre de 39.) 2° D’une adresse de la garde nationale de Rouen , ainsi conçue : Messieurs, « La garde nationale et citoyenne de Rouen, informée des mouvements des factieux, tendant à détruire la monarchie pour établir sur ses ruines le gouvernementrépublicain, vient, Messieurs, vous offrir son appui pour maintenir une forme de gouvernement que vous avez consacrée par vos décrets. « Nous vous déclarons donc, qu’attachés à cette forme de gouvernement, nous ne souffrirons jamais qu’il lui soit porté atteinte; nous jurons de le maintenir de tout notre pouvoir, et d’employer les armes qui nous ont été confiées pour la soutenir avec la plus grande énergie, ainsi que le pouvoir d’un monarque qui ne doit et ne peut régner désormais que par la Constitution ( Applaudissements) . A Rouen, ce 18 juillet 1791. « La garde nationale de Rouen, représentée par ses officiers. » (Et ont signé au nombre de 62.) M. Delavigne. Je demande l’impression de ces deux adresses. ( Oui ! oui !) M. Vadier. Et l’envoi à tous les départements. M. Tuant de [Ta Bouverie. Il est inutile d’ordonner l’envoi ; c’est le sentiment général de toute la France. (L’Assemblée ordonne l’impression des adresses de la commune et de la garde nationale de Rouen.) Une députation des membres composant les direct