702 [Assemblée nationale.] la classe indigente des villes et des gens de campagne à qui vous ôtez la faculté de se ruiner pour une somme de 5U livres. Agissant toujours d’après les mêmes bases, vous prendrez les mesures nécessaires, et vous verrez que tout se réduit à cette question : 1° Y aura-t-il un recours pour les citoyens contribuables, qui, après avoir été im posés à une somme qui parait excéder leur faculté, auront été jugés par le directoire du département? 2° Dans le cas que vous admettiez le recours, quel sera-t-il et à qui en attribuerez-vous le jugement? Nous ne croyons pas que ce puisse jamais être au conseil du roi. Je dois ajouter que l’avis du comité de Constitution est' que le recours n’ait pas lit u, et qu’on ne peut permettre d’attribuer la connaissance de ces sortes de contestations, ni au tribunal de cassation, ni au Conseil d’Etat. Il est très clair que si les directoires de district et de département rejettent la réclamation qu’un citoyen aura faite pour sa contribution, à plus forte raison les cotisateurs n’écouteront pas la réclamation, lorsque cette réclamation, quoique juste, aura été condamnée par Je district et ensuite par le département. Le contribuable restera donc opprimé? La matière est très importante et je demande donc que cet objet soit renvoyé au comité de Constitution qui vous présentera une disposition à cet égard. M. Le Bois Desgnays. Les décisions des corps administratifs rendus pour ou contre les particuliers sont non de simples actes d’administration, mais de véritables jugements. Le tribunal de cassation doit connaître, en dernier ressort, des réclamations qui seront faites contre ce jugement. Je demande en conséquence le renvoi au comité de Constitution pour proposer un projet de loi à ce sujet. M. Lanjntnais. La difficulté paraît venir de ce que la Constitution attribue aux corps administratifs la compétence pour l’assiette de la contribution directe. Il semble choquant d’admettre un recours aux tribunaux dans l’ordre de compétence accordée aux corps administratifs. Mais on pourrait trouver, dans les institutions qu’elle consacre, un recours suffisant. Ce serait un recours au conseil général de département qui ne doit pas être présumé partager les affections du directoire. Ainsi je proposerai le recours au conseil général de département. M. de La Rochefoucauld. Je vois que l’on s’effraye aujourd’hui d’inconvénients qui 'n’existent pas; car il ne sera pas des corps administratifs comme des intendants 1 1 des subdélégués. D’ailleurs, dans votre Constitution, vous avez déclaré que le pouvoir exécutif, ni par lui ni par ses agents, n’auraü aucune connaissance des contestations en matière de contribution directe. Raison de plus pour être tranquille. Je ne prétends pas qu’il ne faille ras prendre tonies les précautions possibles pour procurer aux citoyens tous les recours nécessaires pour avoir justice dans tous les cas; mais la question demande à être réfléchie; et j’< n demande le renvoi aux comités de Constitution et d'imposition. Plusieurs membres : Aux voix! aux voix ! (L’Assemblée renvoie l’examen des diverses [Il avril 1791.] motions aux comités réunis de Constitution et des contributions publiques.) M. Démeunier, rapporteur. Messieurs, par un décret antérieur, vous avez supprimé le conseil des parties ; ce sont les seules expressions dont vous vous ê’es servis. 11 paraît que d’après ces expressions les maîtres des requêtes et les conseillers d’Etat sont supprimés. Il reste à savoir si vous voulez les supprimer nommément. Plusieurs membres : Oui I oui 1 M. Démeuïiicr, rapporteur. Je propose eu conséquence à l’Assemblée la disposition particulière suivante : « Les maîtres des requêtes et les conseillers d’Etat sont supprimés. » {Adopté.) M. Tuant de La Bouverie. J’ignore s’il y a un décret qui prononce la suppression des avocats au conseil. Plusieurs membres : Non! non! M. Tuant de La Bonverie. En ce cas, il faut aussi les supprimer. M. Démcnnier, rapporteur. J’observe que la question sur les avocats au conseil est ajournée jusqu’au moment où vous terminerez la cour de cassation ; et il n’y a plus rien à statuer sur ce point en ce moment (1). M. de FolEeville. Je demande à M. le rapporteur pourquoi il n’a pas altribué au tribunal d’administration le reste des questions contentieuses en matières de finances qui se traitent au conseil, il y en a un grand nombre. Je demande si le conseil subsistera pour juger les difficultés qui s’élèveront sur cet objet-là, ou quel sera le tribunal devant lequel il sera envoyé. M. Oétneunicr, rapporteur. À l’égard des objections faites par M. de Folleville sur les anciennes attributions du conseil, pour savoir le parti qu’on prendra dans le nouveau régime, j’ai l’honneur de répondre que le comité de trésorerie, avec le ministre des contributions et des revenus publics, et le Corps législatif, statueront sur tout ce qui regarde les finances. M. de Folleville. Il y a un grand nombre d’affaires portées à différentes commissions du conseil qui sont restées indécises, quoique plusieurs fussent sur le point d’être jugées, et que la suppression du conseil imposé à l'Assemblée l’obligation de rouvrir promptement, d’une manière quelconque, aux parties intéressées l’accès de la justice qui leur est maintenant fermé. M. Le Chapelier. Le comité s’occupe de présenter un projet à l’Assemblée pour renvoyer ces diverses affaires aux tribunaux, auxquels elles doivent appartenir, suivant l’ordre judiciaire actuel qui est établi. Observez, en passant, que le projet du comité ne donnera aucune de ces affaires au tribunal de cassation, à moins qu’elles ne soient tendantes à des demandes en cassation. Je demande donc l’ajournement de la question (1) Voyez aux annexes de la séance la pétition des avocats aux conseils du roi à l’Assemblée nationale. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.| ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |U avril 17Ù1.J proposée par M. de Folleville en déclarant qu’à la lin de la semaine le projet sera envoyé à tous les membres et qu'il pourra être mis à la discussion. (L’Assemblée renvoie la proposition de M. de Folleville an comité de Constitution pour lui présenter, très incessamment, ses vues à cet égard.) M. Démeunier, rapporteur. Je propose que nous passions maintenant à la discussion du traitement de s ministres. M. Tliévenot de llaroise. Il me paraît un cas où la res i on sa bilité doit avoir lieu, et qu’il me paraît absolument nécessaire d’expliquer; c’est le cas où lorsqu’une troisième légi-lature proposerait la même loi qui l’aurait déjà été par les précédentes, ou ferait répondre au roi par la forme du relus suspensif. (Murmures.) Plusieurs membres : L’ordre du jour! ( L’Assemblée décrète l’ordre du jour.) M. ©éineunicr, rapporteur. Voici l’article 42 du projet de décret concernant les traitements des ministres. « Art. 42. Le traitement des ministres sera, savoir : « Pour celui des affaires étrangères, de 150,000 livres par année et, pour chacun des autres, de 100,000 livres payées par le Trésor public. »» M. Robespierre. Je crois que l’on pourrait, sans beaucoup d'inconvénients, porter encore plus loin les vues d’économie proposées par le comité. On peut certainement avoir un traitement moindre de 100,000 !ivr< s et être un homme très opulent et être un homme public capable de tenir un éiat considérable. Je ne vois d’objection contre la diminution proposée au traitement de 100,000 livres, que la nécessité de donner à dîner et de représenter. Des prétextes si puérils, si étrangers à la dignité de fonctionnaires publics, si étrangers surtout à l’utilité publique, ne doivent pas être mis en parallèle a\ec les principes d’économie que je réclau e. Je demande en conséquence, et je me reproche en cela de n’oser pas encore pousser mon opinion jusqu’au bout ne la vérité, je demande que le traitement de 100,000 livres soit réduità 50,000. (. Applaudissemen ts.) M. Carat. En combattant l’avis du préopinant, en honneur et en conscience, ce n’est pas pour les ministres que j’entends parler, c’est pour la nation, pour la pureté des ministres qu'elle aura désormais. Messieurs, songez que, de toutes les classes du royaume, celles des ministres, malgré toutes les précautions que vous avez prises, sera encore c île où les prévarications extrêmement lucratives seront les plus faciles et ne pourront jamais être découvertes. 1! faut donc défendre autant qu’il est possible la vertu des ministres, ouceux qui en auront, contre une t ntation si séduisante. Voilà le grand motif qui doit engager la nation à beaucoup de muni-licence, si je puis m’exprimer ainsi, envers les ministres : ce n’est pas le vain et orgueilleux motif de les mettre en état d’avoir une maison, de donner à dîner. A cette considération s’en joint une aube, c’est que vous ne pouvez pas vous dissimuler, Messieurs, que plus les fonctions d’une place deviennent difficiles, plus elles sont sujettes 7 03 à des mortifications, et plus il faut en vérité récompenser le fonctionnaire. Et si le mot économie, aveuglement même ne provoquait ici des applaudissements, jose dire que j’en recevrais en ce moment. Ne céderez-vous pas à toutes ces observations? Pour moi elles m’entraînent. Je persiste donc dans le projet du comité. M. Anilioiue. Je ne saurais approuver les vues d’économie présentées par M. Robespierre. Je crois qu’une telle parcimonie n’est pas de la dignité d’une grande nation. Je crois que, quand les ministres et les ambassadeurs des puissances étrangères ont des rapports avec un homme qui est obligé de faire des avances, il ne faut pas montrer la corde à ce point. (Pares.) Plusieurs membres : Aux voix! aux voix l’article! M. Prieur. Je n’ai rien aperçu dans l’avis des préopinants qui puisse empêcher l’Assemblée de remplir le plus sacré de ses devoirs, qui est de ne |ias prodiguer mal à propos et sans nécessité la sueur des peuples. (Applaudissements.) On croit qu’il est essentiel que le miuisire des affaires étrangères fasse une grande dépense, afin que les ministres des autres puissances ne voient pas que nous sommes dans ie besoin; et moi je dis et je pense que ce n’est pas à l’hôtel du ministre des affaires étrangères que les nations doivent juger de nos moyens; c’est dans l’excellente administre. tion de nos affaires, ch st dans l’ordre et la discipline de notre armée, c’est dans le fer de nos soldais. On dit qu’il faut, eu bien payant les ministres, leur ôter le désir de commettre des prévarica-(ions. Est-ce avec de l’argent que l’on achète la vertu des ministres? Non. La soif des richesses s’accroît avec les richesses à mesure qu’on en a davantage. (Applaudissements à gauche et aux tribunes.) J’ai entendu souvent répéter que les ministres devaient avoir une table somptueuse, et l’on prétend qu’il faut leur conserver ces mêmes avantages. Moi je dis que la table d’un ministre est un foyer de corruption. (Grands applaudissements.) Je dis, en outre, que cette nécessité de représenter, de la part d’un ministre, est extrêmement contraire à l’expédition des affaires. On se rappelle qu’un étranger, arrivant à la cour de Prusse, trouva uu ministre qui avait une perruque de travers et un coude percé; et cependant jamais prince ne fut plus respecté que le roi do Prusse. Je demande donc, et c’est à regret, que le plan du comité soit réduit à moitié, c’est-à-dire 75,000 livres pour le ministre des affaires étrangères, et 50,000 livres à chacun des autres. M. Lanjuinais. A mesure qu’un peuple fait des pas vers la liberté, il diminue et supprime les places lucratives. Maintenant que vous avez des ministres à 100,000 livres, vous avez aussi plu-sl urs commis à 50,000 livres, et des douzaines d’autres commis à 30,000 livres. La distance d’un ministre à un autre citoyen fonctionnaire public n’est pas infinie; et cependant si vo: s adoptiez le projet qu’on vous propose, elle serait comme 2 à 3,000 mille livres est à 100,000 livres. Lorsque vous avez porté cette disposition provisoire, vous n’aviez pas toutes les idées d’économie publique que vos décrets ont consacrées. Il ne faut donc pas que le règlement qui a été fait eu faveur des ministres dans un temps où