[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1790.] 539 et statuer qu’il ne sera rien innové jusqu’au 30 juillet prochain, dans l’état actuel, tant de la municipalité provisoire de Paris que dans celui de ses districts; ce qui sera motivé surtout par l’approche de la fête du 14 juillet, par le danger de rien changer dans l’administration de la police, dans celle des gardes, des corps de garde, des divisions de la milice nationale; 2° Elle croit devoir engager les cinquante-neuf autres districts, non seulement à adhérer au présent arrêté, mais à suspendre, jusqu’à la décision de l’Assemblée nationale, toute espèce de démarche de leur part, qui pourrait tendre à altérer leur institution actuelle et à compromettre l’union que les conjonctures rendent indispensable pour la sûreté de Paris, pour celle de l’Assemblée nationale, et, par conséquent, en quelque sorte, de la France entière, qui va sous peu de jours être confiée à leur sauvegarde. Qui sera plus propre à maintenir le bon ordre d’une municipalité neuve , désunie , du moins non encore unie , timide par le défaut d’habitude, aidée ou plutôt embarrassée par quarante-huit sections également inhabiles par la même raison, également réduites en tous sens à leur apprentissage, ou d’une administration qui n’a pas peut-être mérité en tout l’approbation publique, mais qui a du moins l’usage et l’exercice habituel des moyens capables de la justifier; soutenue par soixante corporations dont tous les membres se connaissent; qui ont toutes leurs divisions formées, leurs postes assignés, leur régime consolidé par une année d’expérience et de succès? Enfin, le vœu de l’assemblée est qu’il n’y ait aucune innovation dans cette capitale jusqu’au 30 juillet : la fête du 14 n’est-elle pas seule une nouveauté suffisante pour absorber toutes les attentions, comme pour réunir tous les suffrages ? Signé : Danton, président. Pabé, vice-président. D'Eglantine, Pierre-J. Duplain, Laforgue, secrétaires. M. Voullaud, député du département du Gard , représente à l’Assemblée que, dans le nombre des pièces relatives aux troubles survenus dans la ville de Nîmes, et qui ont été lues dans la séance de samedi au soir, il se trouve une lettre du président du corps électoral, écrite par ordre exprès de cette assemblée, et qui, par la nature et l’importance des demandes qu’elle contient, paraît devoir mériter l’attention de l’Assemblée et contribuer efficacement au maintien de l’ordre et de la paix dans la ville de Nîmes. Il observe qu’après avoir rendu, dans cette lettre, à M. Chabaud, lieutenant-colonel au corps royal du génie; à M. d’Aubry, capitaine au corps royal d’artillerie; à M. de Jonquières, capitaine au régiment de Champagne, le juste tribut d’éloges dû à leur expérience dans l’art militaire, et surtout à leur dévouement généreux pour la défense des citoyens patriotes de Nîmes, le corps électoral a expressément chargé son président d’écrire à l’Assemblée nationale, pour la supplier de vouloir solliciter auprès du roi un congé illimité pour MM. Aubry et de Jonquières. Le corps électoral exprime en faveur de M. Chabaud un vœu plus particulier ; et rappelant quarante-quatre ans de service de cet officier dans l’ancienne province de Languedoc, il désirait que le roi voulût le conserver et le fixer dans la ville de Nîmes, où son séjour et sa personne deviennent absolument nécessaires pour y maintenir la paix et la concorde. La même lettre offre le témoignage le plus authentique des services signalés rendus par le régiment de Guyenne ; elle annonce que le corps électoral, pour reconnaître le patriotisme distingué de ces soldats-citoyens, avait décerné une mé-dailleàdeux d’entre eux, croyant par là satisfaire à la justice et à la reconnaissance qu’il doit à tout le régiment. Le même député observe encore que les électeurs du département, jaloux démarcher sur les traces des représentants de la nation, et se rappelant leurs principes et leur conduite dans la mémorable journée du 20 juin de l’année dernière, ont regardé comme un devoir sacré pour eux de ne pas discontinuer leurs séances, malgré les troubles et les périls dont ils étaient environnés ; et qu’ils avaient fait le serment, auquel ils ont été fidèles, de ne pas se séparer qu’ils n’eussent terminé toutes leurs opérations. M. Voulland, après cet exposé, propose le décret suivant, qui est adopté par l’Assemblée : « L’Assemblée nationale décrète que la lettre de M. Vigier-Sarrazin, président de l’assemblée électorale du département du Gard pendant la tenue de ses séances, en date du 19 du présent mois, sera insérée dans le procès-verbal; que M. le président sera chargé de la mettre incessament sous les yeux du roi, et de supplier Sa Majesté de prendre en considération le vœu qu’elle exprime en faveur de M. Chabaud, lieutenant-colonel au corps royal du génie, en le fixant, si elle le juge à propos, dans la ville de Nîmes, et en accordant un congé illimité à M. d’Aubry, capitaine au corps royal d’artillerie, et à M. de Jonquières, capitaine au régiment de Champagne. « L’Assemblée nationale décrète que son président sera chargé d’écrire à M. Vigier, président du corps électoral pendant la tenue de ses séances, pour lui témoigner la satisfaction de l’Assemblée sur la fermeté qu’ont montrée les électeurs, en ne se séparant point pendant tout le temps que les troubles ont régné à Nîmes, et enicontribuant de tout leur pouvoir au; rétablissement de la paix dans cette ville. » Suit la teneur de la lettre de M. Vigier-Sarrazin, président de l’assemblée électorale : f. Monsieur le Président, « L’assemblée électorale du département du Gard aconsommé ses élections; elle l’a fait avec ce calme que lui inspirait sa dignité. Quoique menacée, insultée, excédée dans la personne de plusieurs de ses électeurs ; quoique environnée elle-même des horreurs des combats, elle a toujours continué ses séances ; elle l’a même fait tout un jour sans interruption ; et fière de pouvoir imiter l’auguste Assemblée que vous présidez, elle a donné à ses voisins l’exemple de la fermeté qu’elle avait reçu des représentants de la nation. J’ai l’honneur de mettre sous vos yeux le récit fidèle des événements qui ont affligé cette ville pendant quelques jours. C’est d’après eux et pour en prévenir de nouveaux, que l’assemblée électorale a concouru à la formation d’un état-major qui devait diriger l’armée patriote venue au secours des bons citoyens. « M. d’Aubry, capitaine d’artillerie, a été nommé général, et en même temps colonel de la légion nîraoise. Ce brave officier, par son expérience dans l’art militaire, et surtout par son dévouement généreux à la défense de la ville, a réuni