[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 décembre 1790.] 235 M. Dnport. Je me plains de ce que le comité, au lieu de donner son avis, au lieu de faire un rapport, ne fait que des questions. En attendant que le comité veuille bien nous en préparer la solution, je demande qu’il soit décrété qu’il sera fait une fabrication de petite monnaie. M. Démeunier. Il suffit en ce moment de résoudre les questions suivantes : Combien faut-il de petite monnaie ? Admettra-t-on la monnaie de billon ? Adoptera-t-on les divisions décimales? Enfin quelle empreinte portera cette petite monnaie? Comme vous ne pouvez examiner aujourd'hui ces questions, je propose de les renvoyer à jeudi. Cette proposition est adoptée et le décret suivant est rendu : « L’Assemblée décrète que son comité des monnaies lui présentera jeudi prochain ses vues sur chacune des questions suivantes: « 1° Quelle est la somme de petite monnaie dont il paraît convenable d’ordonner la fabrication dans les moments actuels; « 2° Ordonnera-t-on de fabriquer de la mon-naie-billon, où se bornera-t-on à une monnaie rouge et à une monnaie d’argent d’un titre bas? « 3° Adoptera-t-on la division décimale? « Le comité des monnaies se concertera sur cet objet avec le comité des finances, et indiquera les moyens d’exécution touchant la petite monnaie qui paraît nécessaire à la circulation. 11 sera tenu, en outre, de rappeler les questions proposées par lui dans la séance de ce jour, et de les accompagner de ses réponses. » M. Pinteville-Cernon. Je viens vous rendre compte de la situation actuelle du Trésor public; elle est très consolante. Le mois dernier, la recette a excédé la dépense de 3 millions, et tout annonce pour ce mois-ci un succès encore meilleur. La caisse de l’extraordinaire est prête à y verser 2 millions; la loterie a eu des tirages plus heureux ; la ferme générale tient ses engagements, et l’état de la régie des aides est assez bon . Il y avait hier au soir dans la caisse, en espèces d’or, 2,242,000 livres ; en argent, 9,475,0 )0 livres ; en assignats 11,374,000 liv. ; en effets 6,592,000 livres. Ainsi le Trésor public n’a pas encore besoin des secours qui ont été désignés pour le mois de décembre dans l’aperçu des besoins et des dépenses des deux derniers mois de cette année ; nous pouvons attendre jusqu’au 10, et lorqu’à cette époque nous vous proposerons un nouveau versement au Trésor public, ce sera pour continuer l’économie des espèces qu’il est précieux de conserver. (On applaudit à plusieurs reprises.) M. le Président. L’ordre du jour est la discussion du projet de décret sur l'organisation delà force publique (1). M. Rabaud, rapporteur. Le comité de Constitution, avant de présentera l’Assemblée les projets de décrets sur l’organisation de la force publique dans ses diverses parties, a cru devoir les faire précéder des articles constitutionnels. La postérité y retrouverait les principes dans toute leur pureté pour corrriger les erreurs que le temps aurait pu introduire. C’est même le seul moyen de (i) Voyez le rapport do M. Rabaud do Saint-Étienne, Archives parlementaires , t. XX, p. 592» conserver la Constitution dans sonintégrité, parce-que les principes constitutionnels expliquent clairement la pensée du législateur et qu’ils la perpétuent sans altération. Enfin, si l’Assemblée trouvait quelque chose à y changer, à ajouter ou à retrancher, le comité en profiterait pour rectifier les diverses parties de son travail qui sont des conséquences de ces principes. Voici les articles constitutionnels que votre comité présente à votre délibération : De la force publique en général. « Art. 1er. L’Assemblée nationale déclare, comme principes constitutionnels, ce qui suit : 1° La force publique, considérée d’une manière générale, est la réunion des forces de tous les citoyens. 2° L’armée est une force habituelle, extraite de la force publique, et destinée essentiellement à agir contre les ennemis du dehors. 3° Les corps armés pour le service intérieur sont une force habituelle extraite de la force publique et essentiellement destinée à agir contre les perturbateurs de l’ordre et de la paix. 4° La nation ne forme point un corps militaire; mais les citoyens seront obligés de s’armer aussitôt que l’ordre public troublé ou la patrie attaquée demanderont l’emploi de la force publique, ou lorsque la liberté publique sera en péril. 5° Ceux-là seuls jouiront des droits de citoyens actifs qui, réunissant d’ailleurs les conditions prescrites, auront pris l’engagement de rétablir l’ordre au dedans quand ils en seront légalement requis, et de s’armer pour la défense de la liberté et de la patrie. 6° La force armée est essentiellement obéissante. 7° Nul corps armé ne peut exercer le droit de délibérer. 8° Les citoyens ne pourront exercer le droit de suffrage dans aucune des assemblées politiques s’ils sont armés ou seulement vêtus d’un uniforme. 9° Les citoyens ne peuvent exercer aucun acte de force publique établie par la Constitution sans avoir été requis. 10° Les citoyens ne pourront refuser le service dont ils seront requis légalement. « Art. 2. En conséquence, l’Assemblée nationale déclare que les citoyens actifs et leurs enfants mâles, âgés de dix-huit ans, déclareront solennellement la résolution de remplir au besoin ces devoirs en s'inscrivant sur les registres à ce destinés. « Art. 3. L’organisation de la garde nationale n’est que la détermination du mode suivant lequel les citoyens doivent se rassembler, se former et agir, lorsqu’ils seront requis de remplir leur service. « Art. 4. Les citoyens requis de défendre la chose publique et armés en vertu de cette réquisition, ou s’occupant des exercices qui seront institués, porteront le nom de gardes nationales. « Art, 5. Comme il n’y a qu’une nation, il n’y aura qu’une garde nationale, soumise aux mêmes règles, à la même discipline et au même uniforme. » La discussion s’ouvre sur la première disposition de l’article 1er. M. de Montlosier. Je n’ai jamais cru qu’il fût possible d’organiser un corps sans parler de son