698 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ll« juin 1791.] nant prétendue antérieure au présent décret, sous titre primitif ou possessionnaire, et sur le seul fondement de l’ancienne distinction de la qualité noble ou roturière du possesseur. M. Tronchet. M. Lanjuinais a présenté son amendement sur une idée trop générale. On pourrait adopter cette disposition additionnelle si on la restreignait ainsi : « La présomption du domaine congéable n’aura pas lieu par suite et en conséquence de l’ancienne distinction de la qualité noble ou roturière du possesseur. » M. lanjuinais. J’adopte cette rédaction. M. Delavigne. Personne ne s’attendait à cet article. Je crois qu’il serait sage de le renvoyer, sans rien préjuger pour ou contre, aux comités qui y entendent mieux que nous. (L’Assemblée décrète le renvoi de l’amendement de M. Lanjuinais aux comités.) M. de Virieu. Il est telle condition que l’on regarde comme féodale et qui ne l’est point, à laquelle plusieurs ont pu donner naissance, et qui se perd dans la nuit des temps comme la suite du moulin ; et je ne conçois pas d’après cela comment il est possible d’en proposer la destruction surdes allégations vagues. Vous gêneriez les conventions qui existent dans toutes les parties du royaume; car moi, possesseur en Dauphiné, je puis y avoir passé un bail à convenant et me trouver dans le cas de la loi qu’on vous propose... ( Interruption .) Un membre : Concluez donc! M. de Virieu. Il est inconcevable qu’on soit interrompu quand on défend des propriétés. Le Corps législatif peut bien prononcer que les conventions, de quelque espèce qu’elles soient, seront à l’avenir illicites, mais je demande que la convention soit entretenue jusqu’à la fin des baux existants seulement. Si l’Assemblée la juge mauvaise, il convient alors qu’elle dise qu’elle n’aura pas lieu ; mais cela ne doit pas avoir un effet rétroactif. M. lanjninaig. J’observe à M. de Virieu que la suite de moulin est dans le principe un droit de fief et une preuve que l'usement dérive de la féodalité et même de la mainmorte. Tous les droits féodaux doivent être absolument supprimés; je demande donc qu’il soit dit dans l’article que : « Tous les droits et redevances convenancières, de même nature et qualité que les droits féodaux, seront supprimés sans indemnité, conformément aux décrets des 4 août 1789 et jours suivants, expliqués en détail dans le décret des 15 mars 1790 et autres subséquents. » M. le Chapelier. J’appuie la rédaction de M. Lanjuinais qui me paraît beaucoup plus claire. M. Tronchet. En adoptant la rédaction de M. Lanjuinais, je voudrais qu’on ne supprimât pas l’énumération. (L’Assemblée consultée rejette l’amendement de M. de Virieu et adopte celui deM. Lanjuinais, avec l’observation de M. Tronchet.) En conséquence, l’article 2 est mis aux voix dans les termes suivants ; Art. 2. « Aucun propriétaire foncier ne pourra, sous prétexte des usements dans l’étendue desquels les fonds sont situés, ni même sous prétexte d’aucune stipulation insérée au bail à convenant ou dans la baillée, exiger du domanier aucuns droits ou redevances convenancières de même nature et qualité que les droits féodaux supprimés sans indemnité, par les décrets des 4 août 1789 et jours suivants, par le décret des 15 mars 1790, ou autres subséquents, et notamment l’obéissance à la ci-devant justice ou juridiction du foncier, le droit de suite à son moulin, la collecte du rôle de ces rentes et cens, et le droit de déshérence ou échute. » {Adopté.) M. Arnoult, rapporteur , donne lecture de l’article 3, ainsi conçu : Art. 3. « Pourront les domaniers, nonobstant tous usements ou stipulations contraires, aliéner les édifices et superfîces de leurs tenues, pendant la durée du bail, sans le consentement du propriétaire foncier, et sans être sujets aux loas et ventes; et leurs héritiers pourront diviser entre eux lesdits édifices et superfices, sans le consentement du propriétaire foncier, sans préjudice de la solidarité de la redevance ou des redevances dont lesdites tenues sont chargées. » Un membre propose, par amendement, de déclarer rachetable le droit de lods et vente des édifices et superfices, ainsi qu’il l’est dans les baux de cens et rente. Un membre répond que ce droit est le prix d’une confirmation de propriété qui n’existe pas dans les baux à convenant. (L’Assemblée repousse l’amendement et adopte l’article 3 sans modification.) M. Arnoult, rapporteur, donne lecture de l’article 4, ainsi conçu : « Le propriétaire foncier ne pourra exiger du domanier aucuns des services d’hommes, voitures, chevaux ou bêtes de somme qui n’auront point été expressément stipulés et détaillés dans le bail ou la baillée, et qui n’auraient été exigés qu’en vertu des usements ou d’une clause de soumission à iceux. Lesdits services qui auront été expressément stipulés ne pourront être exigés qu’en nature et ne s’arrérageront point. » M. I�e Chapelier. Je crois que l’on devrait ôter ces mots ; « les services d'hommes >. Je ne sais pas ce que c’est que des services d’hommes, si ce n’est pas la servitude personnelle. ( Marques d'assentiment.) Quant à la dernière partie de l’article, le colon serait grevé si, an moment où les travaux de l’agriculture sont dans la plus grande activité, il était obligé de faire servir ses chevaux à faire des charrois de corvée. Je demande donc que les journées dont sont tenus les domaniers soient payables à leur option en nature ou en argent, suivant l’apprécis qu’en fera tous les 5 ans le tribunal du district. (L’Assemblée adopte le premier amendement de M. Le Chapelier et rejette le second.) Un membre propose, par amendement, d’insérer [Assemblée tlationalô.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 juin 1791.1 699 dans l’article que les abonnements faits relativement au service des baux seront exécutés suivant la convention. (Get amendement est adopté.) Un membre demande la question préalable sur l’article du comité. (L'Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer.) En conséquence, l’article est mis aux voix avec les amendements dans les termes suivants : Art. 4. * Le propriétaire foncier ne pourra exiger du domanier aucunes journées d’hommes, voitures, chevaux ou bêtes de somme qui n’auraient point été stipulées et détaillées par le bail ou la baillée, et, à leur défaut, par actes recognitoires, et qui n’auraient été exigées qu’en vertu des usements ou d’une clause de soumission à iceux : lesdites journées qui auront été expressément stipulées ne s’arrérageront point; elles ne pourront être exigées qu’en nature, et néanmoins les abonnements seront exécutés suivant la convention. » (Adopté.) (La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.) M. le Président lève la séance à dix heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BUREAUX DE PUSY. Séance du jeudi 2 juin 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi, 31 mai, au soir, qui est adopté. Un membre fait part d’une réclamation du sieur Kuhn , membre du département du Rhin, relative à l’article 6 du décret de mardi soir, 31 mai, concernant le renouvellement tant du directoire que du conseil général du département du Bas-Rhin. Un membre fait la motion qu’on rende en définitif au’sieur Kuhn la même justice qu’on lui a rendue lors de la suspension provisoire du directoire du département du Bas-Rhin, et qu’en conséquence il soit excepté du renouvellement de ce directoire, comme il l’a été de la suspension provisoire. (Cette motion, mise aux voix, est décrétée.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, 1er juin, au matin, qui est adopté. M. le Président. Plusieurs particuliers attachés aux états-majors demandent que le comité des pensions s’occupe de la liquidation qu’ils réclament. M. Camus, au nom du comité des pensions. (1) Cette séance est incomplète att Moniteur . Gn s’en est occupé, Monsieur le Président, et on a rejeté leur demande. M. 1© Président. J’ai reçu une lettre du président du tribunal du district de Saint-Germain en Laye qui demande qu’une députation de ce tribunal soit admise à la barre pour instruire l’Assemblée d’une procédure criminelle commencée contre un de ses membres. Je vous demande vos ordres à cet égard. (L’Assemblée, consultée, décrète que la dépu-tatiou du tribunal du district de Saint-Germain en Laye sera admise à la barre.) M. Dufraisse-Duchey. Messieurs, vous avez rendu un décret, par lequel il est permis à tous les citoyens de s’assembler pour célébrer les mystères de leur religion. (Murmures.) Ce matin, dans l’église des théatins, on y a célébré la messe. Après que les particuliers, qui s’y étaient rendus sans bruit, en sont sortis, une cinquantaine d’individus sont entrés, ont renversé l’autel, et y ont commis les actes de la plus grande violence. Comme il est arrivé plusieurs fois que l’on a vu insulter les maisons religieuses et les églises, sans que l’accusateur public, ni que la municipalité remplissent leurs fonctions, j’ai cru devoir rendre compte de ce fait à l’Assemblée nationale pour qu’elle ordonne que la municipalité... (Murmures et applaudissements.) M. Regnaud (de Sain t-Jean-d' A ngèly) . L’Assemblée nationale ne peut pas être érigée en tribunal de police. On ne lui doit pas compte de détails semblables à ceux dont on veut l’entretenir; le département de Paris a assez prouvé et il prouvera, j’espère, qu’il saura maintenir l’exécution des lois. ( Murmures à droite.) M. Malouet. 11 n’a rien prouvé encore. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angêly). Il a très bien prouvé que vous ne donnez jamais aux autres ce que vous exigez d’eux. (Murmures à droite.) Je dis. Messieurs, que c’est le département de Paris quia provoqué par sa pétition la loi sage et bienfaisante qui assure à tous la liberté ; que c’est le département qui est préposé, sous les ordres du roi et de l’Assemblée nationale, pour inspecter le peuple s’il manque à son devoir, faire exécuter les lois de police et maintenir l’exercice de la liberté que vous avez décrétée. Le délit dont on vienf de vous parler est sans doute répréhensible, et je ne doute pas que le département ne s’empresse de prendre les moyens nécessaire s pour en faire poursuivre les auteurs. L’Assemblée nationale a le droit, sans doute, de surveiller les corps administratifs quand ils ne remplissent pas leurs devoirs, mais ce n’est pas lorsqu’ils n’ont pas eu le temps de le remplir ; ce n’est pas lorsqu’ils n’ont pas eu le temps physique de les dénoncer, qu'on doit venir occuper l’Assemblée nationale de ces objets. On ne peut se plaindre à elle que si le département a refusé d’entendre. Si M. Dufraisse veut faire une dénonciation, c’est à la municipalité, c’est au département, c’est là qu’il doit aller et non pas à l’Assemblée nationale. Il ne doit pas intervertir l'exercice des pouvoirs qu’elle a délégués. Je demande qu’on passe à l’instant à l’ordre du jour. (Applaudissements.) M. Dufraisse-Duchey. Vous voulez détruire la religion...