[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] 595 de l’article qui établira chacune de ces lois, et que tout homme chargé d’une autorité fasse serment de s’y conformer strictement; 3° Que la responsabilité soit établie pour tout militaire chargé d’un département, pour tout chef de corps ou conseil d’administration de régiment, si on les laisse subsister, et qu’aucun des objets de comptabilité dont ils seraient chargés, ne puisse plus être caché aux inspecteurs, à qui tous les ans ils seraient tenus d’en justifier; 4° Qu’il soit permis, ordonné même à tous les subordonnés de citer au tribunal de la loi tous chefs quelconques qui auraient été injustes ou de mauvaise foi à leur égard, en établissant une punition grave pour quiconque oserait porter des plaintes qu’il ne pourrait ni justifier ni prouver; 5° Que la défense soit rigoureusement renouvelée aux commis des bureaux de la guerre, de faire accorder toute espèce de grâce que ce soit aux officiers particuliers, sans la demande expresse de leurs chefs; 6° Que la paye du soldat et les appointements des officiers soient augmentés; 7° Que les semestres soient établis après seize mois de résidence au corps ; et dans ce cas, que les appointements seraient payés absents comme présents; 8° Qu’il soit statué sur une nouvelle forme de demande en congé d’affaires, et sur l’espèce d’affaire qui pourra permettre une absence avec payement d’appointements ; 9° Qu’une punition soit annoncée pour tous médecins ou chirurgiens qui seraient convaincus d’avoir donné des certificats de maladie contraires à la vérité, de même que pour les officiers qui les auraient sollicités; 10° Qu’il ne soit plus donné de congés de recruteurs, les semestriers pouvant, avec une assurance d’indemnité, ou même avec promesse de gratification, remplir le même but ; 11® Que toutes les lois relatives aux congés de semestre, d’affaires et de santé, et même de recruteurs soient exactement les mêmes pour les soldats que pour les officiers; 12° Que la loi, obligeant d’être présent à son corps pendant seize mois, soit obligatoire pour les colonels ; 13° Qu’il soit pris une décision définitive sur la manière dont se déterminera l’avancement ; 14° Qu’il soit accordé annuellement, par régiment, une gratification dans chaque grade, ainsi qu’à deux sergents, sur la présentation du colonel, autorisée par l’inspecteur ; 15° Que sur une bourse d’économie, nécessaire à entretenir les régiments, il soit prélevé tous les ans une certaine somme, pour fournir à des récompenses militaires pour tous les soldats qui n’auraient point été punis de prison pendant l’année � ce qui pourrait s’effectuer en gratifications ou fêtes militaires, auxquelles les autres soldats ne pourraient point participer. 2e ANNEXE à la séance de V Assemblée nationale du 15 décembre 1789. Observations sur la constitution militaire ou bases de travail proposées au comité militaire par M. Dubois de Crancé (1), ancien mousquetaire du Roi, député du bailliage de Vitry-le-François , membre et secrétaire dudit comité à l'Assemblée nationale . L’esprit militaire doit acquérir d'autant plus d’énergie, qu’il est guidé par un patriotisme plus éclairé. Indépendamment de l’instinct naturel qui fait aimer à l’homme sa patrie, si cet homme est considéré dans son état, s’il est environné des regards de ses proches, si son intérêt se trouve lié à la force publique, si elle le protège et le nourrit, si pour le service qu’il en retire, il ne sacrifie que la portion de sa liberté nécessaire au maintien de l’ordre social, si toujours à portée de ses plus chers compatriotes, en temps de paix, il peut quelquefois partager leurs plaisirs et leurs sollicitudes, s’il cesse enfin d’être l’agent du despotisme et la terreur des bourgeois, cet homme doit devenir d’autant meilleur soldat, qu’il conserve les droits et la qualité de citoyen. Cet état est surtout celui qui convient au caractère français ; et je suis persuadé que si le gouvernement a*dop-tait ces principes, les recrues seraient meilleures et plus faciles ; et que la désertion, flétrie par l’opinion, lorsqu’elle ne pourrait plus être que le crime des lâches, s’effacerait de la mémoire d’une nation naturellement brave, et si fière aujourd’hui de sa constitution et de ses ressources. Cette considération nous mène à jeter un coup d’œil sur l’esprit qui régnait ci-devant dans les troupes. Le soldat français n’est pas un automate; en vain a-t-on cherché à le travestir en Allemand; on lui a fait dissimuler son caractère, sans pouvoir lui en communiquer un autre, et la discipline même en a été altérée. Habitué à raisonner les ordres qu’il doit exécuter, il ne peut jamais être l’instrument servile des volontés arbitraires : l’Allemand qui s’engage, sait qu’il appartient tout entier à celui qui l’a acheté; mais le Français ne sert que par honneur; et dès qu’il croit son honneur blessé, il brave tous les dangers pour punir ou pour fuir son bourreau. Est-il donc étonnant que dans une révolution ou le peuple de l’Ëurope le plus doux, mais le plus fier, vient de briser ses chaînes, le soldat français ait senti renaître en lui l’étincelle du patriotisme, surtout losqu’on pense que cette insurrection des troupes était provoquée par les tracasseries qu’elles éprouvent sans cesse, parles peines infamantes qu’on leur inflige, par la barbare insouciance de leurs chefs et par la pénurie de moyens que leur laissaient pour subsister les retenues aussi injustes qu’inutiles dont elles étaient victimes ? Notre état militaire est le plus cher de l’Europe, et le soldat n’a que du mauvais pain, et 4 sols nets par jour. Notre armée n’est composée que de 160,000 hommes, que l’insurrection vient de réduire à moins de 80,000 hommes effectifs, et nous avons 15,000 officiers de tous grades, et plus de 1,200 officiers généraux. La dépense totale des soldats, cavaliers et dragons, au com-(1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. 596 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [lo décembre 17R9.J plet, est de 41 millions; et jamais département de la guerre n’en a coûté moins de 110. Enfin, malgré l’abondance d’hommes que le luxe de nos déprédateurs ravit à l’agriculture et au commerce, pour les laisser ensuite au gré de leurs caprices, sans état et sans ressources, nos régiments ne peuvent se compléter ; et la moitié des troupes de nos ennemis est composée de déserteurs français. Sous le ministère de M. de Choiseul, la plupart des régiments était de quatre bataillons ; on a commencé par dédoubler ces régiments ; on leur a donné à chacun deux colonels ; c’est ainsi que pour plaire aux gens de cour et se faire des créatures, on a quadruplé les officiers supérieurs et le tourment des troupes. Cette manœuvre très-ministérielle a multiplié des états-majors aussi dispendieux qu’inutiles ; ce n’était pas assez, on a fait des colonels à la suite ; on a créé des commissions de tous grades, on les a distribuées avec profusion, comme on jette de l’argent au peuple. Nous avons vu dans un jour 4,000 enfants devenir capitaines, sans troupes et sans espoir d’en obtenir, pour ud pot-de-vin de 4,000 francs chacun. Jadis un bon gentilhomme croyait avoir atteint son but, lorsqu’après quarante ans de services, il était devenu lieutenant-colonel, commandant de bataillon, ou même capitaine de grenadiers de son régiment. Une compagnie de cavalerie faisait à un homme un sort qui suffisait à son ambition; mais depuis que notre état militaire est surchargé d’une foule d’officiers généraux qui, pour la plupart, n’ont jamais vu l’ennemi ; depuis que nos places démantelées ne sont plus censées places de guerre que pour l’intérêt des gouverneurs, des commandants, des états-majors ; depuis que les grâces honorifiques et surtout pécuniaires, sont au concours à Versailles, tout le monde a cru, avec un peu d’intrigue, être fait pour parvenir à tout ; ce véritable principe du relâchement de tout bon esprit, de toute discipline, n’a eu que trop d’influence sur notre constitution militaire; et nous voyons cet état, en grande partie, composé aujoud’hui d’officiers qui ont des emplois ou fictifs, ou sans objet utile, mais qui ont obtenu des pensions, des traitements extraordinaires, des gratifications annuelles excessives, (en attendant un gouvernement) et dont l’exemple apprend à ceux qui le suivent, qu’on peut inpu-nément et même avec succès fatiguer la cour de ses importunités, le Trésor public de son insatiable avidité, comme les troupes de sa folle vanité. En qualité de membre du comité des finances, j’ai été employé au dépouillement des dépenses du département de la guerre, j’ai cherché vainement à pénétrer dans ce dédale inconnu, même aux agents les plus fidèles de l’administration ; toutes les parties en sont si peu corrélatives, tous les détails en sont si vagues et si peu prononcés, que le comité n’a eu à vérifier que des chiffres et non des choses; nous avons rendu fidèlement compte de notre travail, et il a été imprimé sous la direction de M. le duc de Liancourt. On a vu que le projet de dépense pour 1 789 était de 99 millions, mais ce ne sera qu’en 1790 qu’on en connaîtra l’effectif : il a souvent passé 110 millions, et nous n’avons aucun motif de présumer pour l’année qui s’écoule de grandes économies. Cependant M. Necker a annoncé par aperçu une économie de 20 millions à faire sur 99 qu’était censé coûter ce département; la nation a donc droit d’y compter; le respect qu’elle porte au caractère connu de ce ministre, l’opinion vague mais très-légitime de toutes les déprédations qui ont absorbé jusqu’ici les fonds publics, enfin, le besoin absolu d’une économie impérieusement commandée par le long épuisement de nos facultés, sont des motifs trop puissants pour ne pas mériter la plus sérieuse attention; et la position du comité militaire est d’autant plus délicate, que le ministre des finances, lui-même, n’a pas présenté le travail du département de la guerre sous son vrai point de vue. Il a calculé sur un projet de dépense de... ......................... 99 millions. Mais l’effectif a été souvent de cent dix, ci ..................... 110 » Premier déficit ................ Il » L’économie commandée est de. . 20 » L’augmentation nécessaire de la solde des troupes, à 3 sols par jour, par chaque soldat, ferait une augmentation de dépense de. ... . 9 millions 40 » Donc l’économie que le comité doit faire est réellement de 40 millions au lieu de 20. J’observe que l’ancien comité de la guerre avait déjà fait un travail en 1778, qui avait réduit de 7 à 8 millions les dépenses de ce département. Il faut cependant nous mettre en mesure avec les puissances étrangères; et pour avoir la paix, nous préparer à la guerre. Dans une circonstance où tous les ressorts de la discipline paraissent détendus, où tous les régiments sont incomplets, où le pouvoir exécutif est sans force, où les ennemis de la nation redoublent leurs efforts, l’étendard du patriotisme peut seul ramener à l’ordre tous les citoyens. Ce n’est pas au sein de la tranquillité que les grands changements d’une utilité publique peuvent s’opérer. Le calme ne peut renaître qu’après l’orage, et nous en avons encore à essuyer. Mais la nation a droit d’attendre de ses délégués un courage au-dessus de tous les événements : le vaisseau de l’Etat ne cessera d’être en péril, que lorsque nous aurons régénéré la finance, ainsi que l’administration civile et militaire : marchons donc sûrement au but; et, sans égard pour toutes les sangsues qui sont collées à la chose publique, recomposons tout à neuf; c’est le moyen le plus expéditif, et j’ose dire le seul pour détruire des abus que le temps et les personnes ont consacrés. En ne recréant que ce qui est utile, on laisse dans l’oubli ce qui était nuisible; on n’a pas même la peine de s’en occuper, et la rapidité de la marche du législateur n’en est pas interceptée; mais il faut des bases, des principes inattaquables; et voici, pour ce qui concerne le bureau militaire, les réflexions que je soumets à sa sagesse. Bases de la constitution militaire. Art. 1er. Tout homme, avant de choisir un état, doit avoir sous les yeux le tableau du cercle qu’il aura à parcourir. Art. 2. Nul homme ne doit rencontrer dans cette course si rapide de la vie aucun obstacle qui ne vienne de lui. Art. 3. Ce n’est pas la modicité des différents traitements qui décourage un bon citoyen, mais l’abus des grâces qu’il ne partage pas, et surtout 597 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] ces iniques passe-droits qui ne sont dus qu’à l’intrigue la plus révoltante. Art. 4. L’ambition est un vice dévorant, qui ne fait d’un grand peuple qu’une échelle d’esclaves ; mais l’honneur fait des hommes, des citoyens, nous devons donc envisager l’honneur comme le premier ressort d’un bon gouvernement. Art. 5. Suivant ces quatre premiers principes, depuis l’état de soldat jusqu’à celui d'officier, et depuis le grade d’ofücier jusqu’au rang de maréchal de France. Tout arbitraire doit être antérieurement anéanti, tout homme de mérite, sans autre distinction, doit être choisi par ses pairs pour les commander, et tout état doit être indépendant du caprice, de la légèreté et des aveugles préventions de l’autorité; car l’expérience n’a que trop démontré que la récompense due au mérite, a souvent été extorquée par l’intrigue et la faveur. Art. 6. Les emplois supérieurs doivent être rares, pour que les grades subalternes soient plus respectés; le premier agent du bien public est que chacun s’honore de son état. Art. 7. Aucun individu, quel qu’il soit, ne peut et ne doit jamais remplir à la fois deux emplois. Art. 8. Un militaire ne doit être payé par la nation, que pour le temps qu’il consacre au service de la nation. Art. 9. Pendant le temps de son service, chacun doit recevoir un salaire proportionné à son grade et aux dépenses qu’il occasionne. Art. 10. Le calme de la paix n’étant destiné qu’à se préparer à la guerre, il peut suffire d’assembler les troupes trois mois par an pour les exercer : et le reste de l’année, la moitié au moins de chaque corps doit avoir la liberté de retourner dans ses foyers : cette méthode vivifie le commerce et l’agriculture; rend le soldat citoyen, lui conserve l’habitude du travail, et des exercices aussi utiles à sa santé et à ses mœurs, qu’ils le rendent propre à soutenir les fatigues de la guerre. Art. 11. Les corps nombreux sous la main d’un chef, sont mieux organisés, plus utiles à la guerre, surtout en cas d’échec ou de mortalité. Il y règne plus d’ensemble et plus d’esprit de corps, qui fit toujours la gloire du nom français. Art. 12. Les pensions de retraite doivent être assurées, sans retenue, proportionnées au grade, aux services et aux facultés du demandeur; car l’Etat ne doit de secours pécuniaires, qu’à celui qui ne peut s’en passer. Les principes que je viens d’énoncer, peuvent servir de base à une nouvelle formation du militaire français; mais je crois devoir faire précéder le travail sur la composition de l’armée, de deux ordonnances primaires, une sur l’état militaire en général, et une sur les pensions. Ordonnance primaire pour tous les grades d'officiers, à décréter constitutionnellement par l’Assemblée nationale. Art. 1er. L’égalité des droits de l’homme, sagement reconnue par la nation, et sanctionnée par le Roi, n’accordant plus de distinction qu’au mérite, toutes les écoles militaires sont supprimées. Art. 2. Il sera établi dans la ville principale de chaque département un collège où les enfants qui se destineront à l’état militaire, trouveront maîtres de langues anglaise , allemande et française ; maîtres d’armes, de dessin, de mathématiques et d’histoire, aux frais des provinces. Art. 3. L’éducation dans ces collèges, sera particulièrement dirigée vers cette instruction, sous la direction de la commission intermédiaire du département. Art. 4. Les enfants y seront examinés tous les ans en présence du corps des magistrats, de la commission intermédiaire et des chefs de corps qui seront à portée; et il sera délivré à ceux des élèves qui l’auront mérité, un brevet d’aspirant à l’état militaire, signé des trois pouvoirs examinateurs, dont je viens de parler. Art. 5. Les colonels des régiments ne pourront choisir que parmi ces aspirants, les sujets dont ils auront besoin pour remplir les sous-lieutenances vacantes de leur régiment ; et ce sera toujours par rang d’ancienneté de promotion ; c’est-à-dire que les aspirants brevetés en 1790, seront tous placés avant d’entamer la promotion de 1791. Art. 6. Si un colonel est reconnu pour avoir vendu un emploi, il sera cassé sur-le-champ, et le candidat renvoyé du régiment. Art 7. Dans l’année de la promotion, et sans qu’on puisse s’écarter de l’article 5,1a préférence pour les sous-lieutenances sera cependant accordée, à mérite égal, aux enfants de militaires qui auraient obtenu la croix de Saint-Louis, ou seraient morts au service. Art. 8. Si les nations se sont librement donné des rois, il est juste que dans tout état les subalternes choisissent leur supérieur immédiat, et ie considère cet axiome comme le seul garant de la liberté publique. En conséquence, tous les différents grades d’officiers seront donnés au scrutin ; et de cette manière les lieutenants seront nommés par les sous-lieutenants; les capitaines par les lieutenants ; les commandants de bataillon, et les majors, par les capitaines (1). Art. 9. Le major deviendra, de droit, à son tour, lieutenant-colonel, puis colonel commandant de son régiment. Art. 10. Les officiers supérieurs, destinés à commander des divisions, seront choisis parmi les colonels commandants, et nommés au scrutin par les quatre commandants de bataillon, et les trois officiers supérieurs de chaque régiment composant la division : nul ne pourra exercer les fonctions d’officier général que de cette manière. Art. 11. Le commandant d’une armée sera choisi parmi les officiers généraux par tous les colonels et officiers généraux en activité. Art. 12. Le général choisira lui-même les officiers qui devront être plus immédiatement employés sous ses ordres, mais toujours dans le grade attaché à chaque genre de service. Art. 13. Un colonel, au bout de dix ans, sera breveté du grade de maréchal de camp, sans être obligé de quitter son régiment, à moins qu’il ne soit employé comme chef de division. Art. 14. Tout officier, sans activité, sera censé hors du service. (1) On objectera, sans doute, que cette méthode va mettre dans les troupes un esprit de cabale, d’intrigue et d’insubordination, je répondrai simplement, qu’un ministre sera toujours plus facile à tromper ou à séduire qu’un régiment entier ; cette vérité est incontestable, et je ne vois pas pourquoi on n’adopterait pas les mêmes principes pour le gouvernement militaire, que ceux que ia nation réclame avec tant de force pour toute administration civile et politique, principes également sujets aux cabales et aux intrigues, et qui n’en sont pas moins le symbole de la justice, et le garant de la liberté publique. 598 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Art. 15. Pour être fait lieutenant général, il faudra avoir servi dix ans comme maréchal de camp, ou avoir fait dans ce grade quelque action d’éclat à la guerre. Art. 16. Nul ne pourra devenir maréchal de France, s'il n’a gagné deux batailles, ou pris deux places fortes assiégées en forme. Art. 17. La croix de Saint-Louis est fixée à 25 ans de service, en temps de paix, pour tous les officiers, sans aucune distinction, et les campagnes de guerre compteront pour deux ans, si elles durent au moins six mois. Art. 18. Tout officier qui passera aux îles, la Corse exceptée, comptera trois ans de service pour deux, en temps de paix, et quatre en temps de guerre. Art. 19. Pour obtenir la grande croix de l’ordre de Saint-Louis, il faudra avoir commandé une division, et fait en cette qualité quelque action d’éclat. Des pensions. M. Necker a annoncé qu’il y aurait une économie de 6 millions à faire sur les pensions. Cette promesse met encore l’Assemblée dans des entraves excessivement délicates. Quoique le département des pensions soit absolument distinct de celui de la guerre, les pensions ne pouvant être qu’une récompense de services, la plupart militaires, je pense que le premier travail à faire est de fixer les bases de ces récompenses, et cette opération est du ressort du bureau militaire. Si elle est bien faite, elle doit faciliter au comité des finances, des moyens légitimes de réduction, qui ramènent au principe de répartition, fixé par l’Assemblée, et sanctionné par le Roi, tous ceux qui précédemment en ont abusé. Ce serait, je crois, une grande immoralité que d’imiter les opérations de M. l’archevêque de Sens, en supprimant partiellement des portions de chaque traitement, sans égard pour les motifs qui les ont fait obtenir, mais uniquement en raison de leur quotité. Ces travaux, dignes d’un ministère qui ne s’embarrasse pas d’être juste, qui souvent, dans les réformes qu’il fait, ne cherche que de nouveaux moyens de déprédation, ne conviennent aucunement à la dignité de l’Assemblée nationale. Il y a telle pension de 600 livres qui est trop forte, à raison des services du pourvu; dans ce cas, il faut la diminuer, peut-être même a-t-elle été, sans mérite, extorquée de la faveur par l’intrigue, et alors il faut la supprimer. Mais il y a telle autre pension de 20,000 livres, qui peut n’être qu’une juste récompense de longs et excellents services dans des emplois très -importants, et l’Assemblée pourra-t-elle croire de sa justice d’en retrancher quelque chose? Placé entre ces deux extrêmes, il serait donc impossible de justifier une combinaison purement arithmétique, et qui n’aurait pour base aucun principe de justice et de raison. Je dis plus, ce serait se couvrir de honte sans profit. Car c’est de l’accord de toutes les parties qui constituent une administration, que dépend essentiellement l’économie. Or, si l’Assemblée nationale se livrait elle-même à l’arbitraire; si elle arrachait des mains d’un père de famille, ce qui est absolument nécessaire à sa subsistance, sans égard aux sacrifices que lui ont coûté de longs services, comment empêcher les agents du pouvoir exécutif d’être des fripons? Lorsque l’homme est incertain de l’avenir, il se croit en droit d’abuser du présent : nous lui en indiquerions la fatale nécessité, et je ne vois pas, en ce cas, de barrières qu’il soit dans le pouvoir de l’Assemblée d’empêcher de franchir. Nos commettants nous ont envoyés pour réformer des abus, et le Roi lui-même nous a invités à rétablir l’ordre dans toutes les branches d’administration. Il est donc indispensable d’entrer dans tous les détails de chaque département. Si, par exemple, l’Assemblée nationale se contentait de dire au ministre : l’armée coûtait 100 à 110 millions, nous n’en voulons plus payer que 80, et nous veillerons à ce que vous n’en dépensiez pas davantage, mais nous vous laissons comme agent du pouvoir exécutif suprême, l’entière disposition de la composition de l’armée, au lieu de remplir l’intention du Roi et celle de ses commettants, l’Assemblée pourrait ajouter de grands abus politiques à ceux de finance, qui existaient; car elle s’exposerait à voir la réforme porter sur des objets de la plus grande utilité, pour engloutir nos ressources dans le gouffre de la cabale et du crédit. Le pouvoir exécutif consiste (selon mon opinion), à choisir ses principaux agents, à disposer souverainement (avec le respect dû aux lois) de toutes les forces de la nation: enfin, à maintenir dans l’ordre tous les ressorts, et donner le mouvement à la grande machine du gouvernement ; mais c’est au pouvoir législatif, ce me semble, à en constituer toutes les parties; et je ne vois que ce qu’on appelle la maison commensale du Roi, sur laquelle il peut être assez indifférent à la nation de n’entrer dans aucun détail, lorsqu’elle en aura fixé la dépense générale. Pour appliquer ce principe à ce qui concerne la réforme des pensions, je pense qu’il est temps que les différents comités que l’Assemblée a honorés de sa confiance, quittent le rôle de scribes ou de simples nomenclateurs, pour s’élever à la hauteur des fonctions dont la nation les a revêtus : il faut régler à la fois le passé, le présent et l’avenir, et calculer, dans le calme d’une conscience pure, des moyens irréprochables, qui en imposent même à ceux qui, plus particulièrement intéressés à nous déprimer, n’oseront ajouter à la douleur de se voir dépouiller du fruit de leurs intrigues, la honte de publier leur inutile mécontentement. Je pense donc qu’un travail sur les pensions pour l’avenir deviendrait très-utile, même au comité des finances, et qu’il est une partie intégrante des fonctions confiées au bureau militaire. Bases d'ordonnance sur les pensions. Art. 1er. Toute personne en activité de service ne pourra jouir d’aucune pension ou gratification annuelle, sous telle dénomination que ce soit, parce que le sort de chaque employé sera déterminé suivant son grade et la nature de ses services . Art. 2. Pour obtenir la pension de retraite attachée à un grade ou emploi, il faudra avoir servi dix ans dans ce grade ou emploi, sinon, l’on ne pourra obtenir que la pension du grade inférieur. Art. 3. Pour obtenir une pension quelconque, il faudra avoir servi trente ans au moins ‘dans différents grades ou emplois. Art. 4. Après trente ans de service, on obtiendra pour retraite moitié des appointements du grade dans lequel on aura servi dix ans ; à quarante ans, les trois quarts, et à quarante-cinq ans la totalité. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] 599 Art. 5. Nul, quels que soient sa naissance et son grade, ne pourra espérer de pension, s’il a plus de 2,000 écus de rente de patrimoine, et 100 pistoles de rente par chaque tête d’enfant qu’il pourrait avoir sans emploi ; mais il lui sera accordé pour retraite un brevet d’un grade supérieur à celui qu’il aura exercé pendant dix ans. Art. 6. Le grade de maréchal de France, ne pouvant à l’avenir être accordé qu’à des officiers supérieurs qui auraient gagné deux batailles, ou pris deux places assiégées en forme, sera excepté de l’article précédent. Art. 7. Tout ministre, officier général, ou employé quelconque au service du Roi, ne peut espérer de pension de retraite au-dessus de 20,000 francs. Art. 8. Les survivances ne pouvant être considérées que comme pension alimentaire à des veuves d’officiers morts au service et restées dans la détresse; il ne sera accordé de pensions en survivance, qu’à des veuves qui justifieront de leur pauvreté par un certificat énonciatif de leur situation, souscrit de la commission intermédiaire provinciale du canton où elles ont leur demeure, et ces pensions ne pourront excéder moitié du traitement qui avait été accordé au mari. Art. 9. Il ne sera accordé aucune pension sur le Trésor public à titre de douaire, ou avant décès, pour jouir après la mort du titulaire. Art. 10. La préférence aux emplois étant conservée aux enfants de ceux qui auront bien servi, ce ne sera qu’à titre d’orphelins pauvres, que des enfants pourront obtenir chacun 300 livres de pension au plus ; et cette pension cessera toujours dès qu’ils seront pourvus d’un état. Art. 11. Tout homme retiré du service ou sans activité, ne pourra y rentrer sans renoncer à la pension dont il jouissait, et alors il suivra la chance attachée à son nouvel emploi. Art. 12. Nul officier commensal de la maison du Roi, de la Reine ou des princes, ne pourra obtenir de pension pour raison de ce service, sur le Trésor public, et il sera renvoyé à la liste civile de Sa Majesté. Art. 13. Tout employé civil ou militaire qui aurait été ou sera réformé, jouira complètement de sa pension de réforme, jusqu’à ce qu’il ait été employé dans un grade égal, pour lequel il lui appartient toute préférence. J’ai cru devoir poser les principes constitutionnels de l’état militaire, principes d’après lesquels (si la nation veut les consacrer et les faire sanctionner par le Roi) tout individu connaîtra complètement la carrière que ses talents ou son mérite pourront lui faire parcourir. Ne perdons pas de vue que le tombeau de la liberté publique est dans l’arbitraire; que les ennemis ae cette liberté sont toujours ceux que le souverain a préposés pour la défendre ; que tout caractère social disparait devant la soif de gouverner ; et que le nom du Roi, si souvent profané, ne recevra jamais plus d’hommages et de respects, que quand la loi ne cessera plus d’être assise à ses côtés. Je vais maintenant passer au développement des principaux articles d’un nouveau régime pour l’armée. C’est moins une ordonnance de tactique que je me suis occupé de faire, qu’un code moral et politique : j’ai cru que le moment était venu de rendre l’Etat militaire imposant et patriotique, et de le combiner de manière à réunir une excellente organisation à une prudente économie. Bases d'un projet d'ordonnance pour l'infanterie. Sa Majesté désirant l’exécution de tout ce qui peut assurer le bonheur de ses peuples, de l’avis et sur les représentations de l’Assemblée nationale, voulant combiner ensemble le patriotisme français, la tranquillité du royaume, l’influence qui appartient à son empire sur les affaires de l’Europe, l’amélioration physique, morale et politique de son armée, avec la plus sévère économie, a ordonné et ordonne : Art. 1er. A compter du 1er ..... 1790, toute l’infanterie française et étrangère, ainsi que tous les établissements qui y ont rapport, seront et demeureront supprimés. Art. 2. N’entend Sa Majesté comprendre dans la présente réforme les Suisses et Grisons, ni les douze bataillons d’infanterie légère auxquels elle conserve leur composition et leur traitement. Art. 3. La France étant divisée en 81 départements, il sera recréé sur-le-champ 41 régiments nationaux; savoir : un pour le département de la ville de Paris, et un pour deux départements plus ou moins, eu égard à la population. Art. 4. Les régiments nationaux seront de quatre bataillons chacun, et porteront le nom de la province à laquelle ils seront attachés. Art. 5. Tous les officiers et soldats de troupes actuellement existantes, seront incorporés dans lesdits régiments, suivant leur grade, leur rang d’ancienneté et le lieu de leur naissance. Art. 6. Les officiers et soldats étrangers seront également incorporés dans les régiments nationaux, à leur choix, et suivant leur grade ; mais à mesure que leurs emplois viendront à vaquer, ils seront remplis par des Français. Art. 7. Les officiers irlandais régnicoles seront considérés comme français. Art. 8. Tous les régiments seront désormais composés en officiers et soldats de sujets domiciliés dans les provinces dont ils porteront le nom. Art. 9. Les engagements seront fixés à 60 livres, et ne dureront que cinq ans. Art. 10. Tout soldat obtiendra son congé à l’instant où il fournira un autre homme, agréé de son district, pour le remplacer ; mais ce nouveau soldat sera'toujours tenu de servir cinq ans, quel que soit le temps qui restait à faire à celui qu’il remplacera ; et il en répondra. Art. 11. Tout Français se doit tout entier à sa patrie dès qu’elle est en danger; donc aucun soldat ne pourra obtenir de congé ni se faire remplacer en temps de guerre, mais il lui sera payé 25 livres par année, au delà de cinq ans qu’il devait. Art. 12. Tout déserteur en temps de guerre, sera passé par les armes. Art. 13. Tout voleur sera pendu. Art. 14. Tout déserteur, en temps de paix, qui ne sera pas revenu au bout de huit jours, sera passé par les verges, non avec barbarie, mais avec beaucoup de modération; cette punition n’étant que d’appareil, mais infamante. Avant l’expédition, ses cheveux seront coupés très-près de la tête ; et il sera chassé comme indigne de servir sa patrie. Art. 15. Sa Majesté défend expressément les coups de canne, de plat de sabre, et toute punition corporelle pour autres délits militaires, lesquels seront punis suivant l’exigence des cas, par les doubles gardes, le piquet, la prison, et surtout la privation des semestres, dont il sera parlé ci-après. 600 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Art. 16. Le piquet n’aura pas moins de trois pouces de diamètre; la prison sera rarement employée : 1° parce qu’elle indiscipline les troupes, par la fréquentation des libertins; 2° parce que le séjour d’individus renfermés dans des lieux malsains, nourris au pain et à l’eau assomme le physique, quand c’est le moral qu’il faut corriger. Art. 17. Depuis le rang de soldat jusqu’à celui de porte-drapeau, inclusivement, tous les grades intermédiaires seront nommés par voie de scrutin, dans chaque bataillon ; savoir : les appointés par les soldats ; les caporaux par les appointés ; les sergents par les caporaux, etc. Art. 18. Les quatre adjudants seront au choix des trois officiers supérieurs du régiment. Ari. 19. Les grenadiers se recruteront eux-mêmes dans les compagnies de fusiliers, parmi les hommes qui auront 5 pieds 4 pouces et au-dessus ; mais jamais parmi les chasseurs, pour ne point énerver l’émulation qui doit y régner. Art. 20. Les chasseurs se recruteront, de même que Tes grenadiers, dans les compagnies de fusiliers, parmi les hommes qui auront 5 pieds, 3 pouces 6 lignes et au-dessous ; l’intention en laissant 6 lignes au moins de démarcation entre la taille de grenadiers et eelle de chasseurs, est d’éviter les querelles et les jalousies. Art. 21. Tout soldat ou bas officier qui aura servi vingt-cinq ans, à dater de l’âge de 15 ans, recevra la plaque militaire à la tête du régimen t; cette plaque sera distinguée suivant son grade ; et il jouira, dès cet instant, d’une pension de moitié de sa paye, soit qu’il reste attaché à son corps, soit qu’il veuille se retirer. Art. 22. Tout militaire décoré de la plaque sera censé volontaire et libre de se retirer quand il voudra, excepté en temps de guerre. Art. 23. Un régiment ne sera jamais en temps de paix assemblé en totalité que trois mois de l’année; savoir: du 15 mars au 15 juin, pour faire l’exercice en commun. Art. 24. Le dernier mois sera employé, lorsque le local le permettra, à des campements et évolutions militaires, sous les ordres des officiers généraux attachés à chaque division. Art. 25. Le 15 juin, chaque année, il sera délivré un congé de semestre de neuf mois, à la moitié de tous les officiers et soldats composant chaque bataillon; et ce, alternativement, mais sans appointement ; de manière que tout militaire, sur deux ans, ne servira que quinze mois ; et sera payé pour 15 mois. Art. 26. L’état-major sera payé pour l’année complète, comme toujours présent; cependant le colonel ne servira que du 1er avril au 1er octobre, chaque année; le major et le lieutenant-colonel alterneront ensemble pour les six mois d’hiver ainsi que les quatre commandants de bataillon ; tout le reste de l’état-major ne pourra s’absenter que par congé limité au besoin absolu. Observation sur l'article 25. On objectera vraisemblablemenlquecetteabsence de la moitié de chaque régiment, pendant neuf mois, relâchera la discipline militaire, et détruira tout fruit d’instruction, de manière que l’armée sera toujours réduite aux premiers éléments de la tactique. Je répondrai à cette assertion que la révolution présente permet d’espérer que le Français, abandonnant son ancien caractère de frivolité, ne changera plus de principescomme de modes ; et qu’un soldat, une fois instruit, n’aura plus besoin que de quelques jours de classe, pour reprendre l’ensemble de son bataillon, au retour de son semestre. La compilation des ordonnances depuis la paix de 1763, formerait une énorme bibliothèque; on doit donc être parvenu au point de perfection dans cet art fameux; et il est temps de démolir les tréteaux d’une parade dont le bien du service est le prétexte, le tourment des troupes, l’effet et 'avancement de ceux que nous appelons des faiseurs, l’unique objet. inexpérience vaise police, les punitions trop fortes ou mal à propos infligées; enfin, le défaut de confiance, d’estime et de considération des subalternes envers leurs supérieurs. On objectera peut-être encore que beaucoup de soldats n’ayant ni feu, ni lieu, ne pourront profiter de leur semestre ; que restant au corps, il faudra les payer, ce qui contrariera mes calculs d’économie. Je répondrai que ce raisonnement serait fondé, si nos troupes restaient composées comme elles le sont aujourd’hui, de vagabonds et gens sans aveu ; mais je pense que la douceur de mes principes, que le patriotisme et les moyens d’émulation qui en sont la base et le résultat, inspireront autant de goût pour le service, à d’hopnêtes citoyens, qu’ils en ont été éloignés jusqu’ici. Je crois encore que la mauvaise administration de nos finances ayant desséché tous les canaux de la fortune publique, il n’est pas étonnant que la France soit peuplée de mendiants ; mais l’ordre étant une fois rétabli dans toutes les branches de l’administration, les entraves du cultivateur étant détruites, l’argent circulant plus vivement dans le commerce, les fortunes rapides étant plus rares, et par conséquent, le luxe moins effréné, la France doit reprendre son activité, et doubler son industrie. Il est facile de démontrer que l’amélioration seule de l’agriculture peut doubler la richesse de l’Etat, et fournir des travaux utiles au double de ses habitants : ainsi, lorsque J es provinces, mieux organisées, auront pourvu aux besoins des vieillards et des infirmes, lorsqu’elles auront acquis par là le droit de punir la paresse comme un vice capital, l’homme, protégé par la loi, et devenu libre sous son égide, reprendra ce caractère moral qui attache à sa famille, à ses travaux et à la société, tout individu qui est assuré de recueillir le fruit de ses peines ; alors, il n’y aura plus à craindre que nos troupes soient recrutées d’autres hommes que de citoyens honnêtes qui auront un domicile, et des moyens d’y subsister. Au reste, l’article suivant va pourvoir aux besoins les plus pressants. Art. 27. Sa Majesté désirait depuis longtemps qu’un nouvel ordre de choses lui permît d’augmenter la paye et les douceurs de ses troupes : elle a voulu en conséquence, malgré la pénurie de ses finances , que le dernier soldat eût 7 sols par jour, sans aucune retenue; mais elle entend, par un principe uniquement de bonté et de surveillance paternelle, qu’il soit fait par l’état-major de chaque régiment, réserve d’un sol sur la paye du soldat, pour lui remettre le montant entier de cette réserve, lorqu’il partira pour son semestre ; et ce, enfin qu’il ne puisse jamais être au dépourvu. Art. 28. Indépendamment des semestres de droit [Assemblée nationale.] ARCHIVES PA désignés article 25. Sa Majesté autorise l’administration des régiments, à accorder vingt congés par compagnie, sans appointements, pendant les six mois d’hiver, à ceux qui auraient mérité cette faveur par une conduite irréprochable, et particulièrement aux gens mariés ; et la retenue de ces congés extraordinaires par compagnie, doit servir à égaliser l’entretien du linge et chaussure et à donner quelques gratifications. Art. 29. L’intention de Sa Majesté est que, excepté les circonstances que commandent la sûreté de la patrie et l’honneur du nom français, les régiments restent toujours cantonnés dans leur province ou au moins très à portée. Art. 30. Les régiments seront partagés en quatre divisions pour la facilité des logements, la consommation des denrées, la répartition de sûreté des provinces, et ils ne se réuniront que pendant les mois d’exercice. Art. 31. Il sera établi un conseil générai d’administration pour chaque régiment, composé de tous les capitaines et des commandants de bataillon, pour administrer la masse et toutes les fournitures du régiment. Le compte de chaque iégi-ment sera imprimé tous les ans, et rendu public. Art. 32. Tout sera délibéré dans le conseil d’administration au scrutin : les trois officiers supérieurs n’y auront aucune voix; mais ils seront maîtres d’y assister pour rappeler le conseil à l’ordonnance, s’il s’en écartait ; et de cette manière, il existera quelqu’un dans un régiment pour faire suivre l’ordonnance; ce qui est impossible lorsque les chefs se mêlent de l’administra-tiun : aucun officier n’ose faire des représentations, et tout est arbitraire. Composition et solde du régiment national de la province de ..... ETAT-MAJOR. 1 colonel ....................... 1 lieutenant colonel ............. 1 major ......................... 4 commandants de bataillon , chacun 3,000 livres ............. 1 quartier-maître trésorier ........ 4 porte-drapeau, chacun 900 iiv. 1 chirurgien-major .............. 1 aide-chirurgien ................ 4 adjudants, chacun 800 livres.-. . . 1 tambour-major ............... . t caporal tambour ............... 8 musiciens, chacun 300 livres.. . 1 maître tailleur ................. 1 maître armurier ....... . . . . ..... 1 maître cordonnier .............. 6,000 liv. 5,000 4,000 12,000 1,200 3,600 1,500 900 3,200 360 240 2,400 150 150 150 Total pour l’état-major.... 40,8501iv. Composition et solde d’une compagnie de grenadiers. Nota. Le calcul pour le reste du régiment va être fait pour deux ans, à cause des neuf mois de semestre sans appointements. Composition et solde d'une compagnie de chasseurs. 1 capitaine com - 1 capitaine en second ........... 1 lieutenant en pre-1 lieutenant en second ........... 2 sous -lieutenants, chacun 900 liv. . 1 sergent-major . . 1 fourrier, à 15 s. par jour ....... 4 sergents, à 15 s. 8 caporaux, à 10 s. 8 appointés, à 8 s. . 6 carabiniers, à 8 s. 74 chasseurs, à 7 s.. 2 tambours, à 8 s . 270 1.080 1,440 1,152 864 9,324 288 337 1,350 1,800 1,440 1,080 11,655 360 10 s. Total pour deux ans ....... 28,7221. 10s. et par an ................ 14,361 5 Composition et solde d'une compagnie de fusiliers. 1 capitaine com - 1 capitaine en second ........... 1 lieutenant en premier ........... 1 lieutenant en second ........... 2 sous-lieutenants, chacun 900 iiv. . 1 sergent-major.... 1 fourrier, à 15 s. par jour ....... 5 sergents, à 15 s.. 10 caporaux, à 10 s. 10 appointés, à 8s. 85 fusiliers, à 7 s. . 2 tumbou-s, à 8 s. . 2 enfants de soldat, à 7 s .......... 270 1,350 1,800 1,440 10,710 288 252 3 O & 337 1,687 2,250 1,800 13,387 360 315 10 s. 10 10 Total de la solde pour deux ans. et pour chaque année ....... 30,8371. 10 s. 15,418 15 602 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Art. 33. Chaque régiment national d’infanterie sera composé de son état-major, comme il est désigné ci-dessus, deux compagnies de grenadiers, deux compagnies de chasseurs et seize de fusiliers. Total de composition et solde d'un régiment. ÉTAT-MAJOR. Récapitulation. 41 régiments nationaux, composés de f � nffirippsi \ 164 damons L| #8.851 hom. I officiers J coûteront ................ 23,457,268 liv. 10 s. 40,850 liv. 30,310 28,722 10 s. iu wjuipciguies ub vu uuiuiers / a/n 7nn fusiliers . . 1,856 hommes ] Total d’un régiment : 136 officiers. — 2 chirurgiens. — 2,273 hommes. — Solde ..... 346,5821.10s. Art. 34. Sa Majesté accorde à chaque régiment 2 sols par homme , au complet, pour se charger de la fourniture du pain de munition ; le nombre de rations effectives étant par an de 513,360, la ration sera payée sur le pied de 3 sols , 2 deniers , 3/10; en conséquence , entend Sa Majesté , que le pain du soldat soit toujours de pur froment, purgé de son, et que le petit équipement soit prélevé sur cet objet, montant , pour chaque régiment , à la somme annuelle de 82,116 livres. Art. 35. Sa Majesté accorde à chaque régiment 30 livres par homme, au complet, pour masse d’habillement et autres faux frais, voulant qu’il ne soit fait aucune retenue sur la solde, sous aucun prétexte : ladite masse, pour chaque régiment, sera de 68,430 livres. Art. 36. Veut, Sa Majesté, qu’il soit pourvu par les assemblées provinciales à tous établissements de casernes, tentes, magasins, hôpitaux, étapes, transports militaires, bois et lumières, et généralement tout ce qui concerne le service ; pour tous lesquels objets Sa Majesté accorde par abonnement, pour chaque régiment, 75,000 livres. 16 officiers 2 chirurgiens. 13 hommes.... Quatre bataillons. 2 compagnies de 12 officiers grenadiers . 196 hommes 2 compagnies de 12 officiers chasseurs . . 208 hommes 1 A PAmnormiûû rlû QA Affinîauo Total de dépense pour un régiment national. Solde ............. 346,5821.10 s. Pain et petit équipement ......... 82,116 Masse ..... ....... 68,430 Casernes, hôpitaux, etc ...... . 75,000 572,1281.10 s. Nota. Un soldat n’avait ci-devant que du mauvais pain, et 4 sols par jour : il coûtait au Roi, compris les officiers, et, non compris les dépenses des provinces, 292 livres 7 sols 6 deniers. Il aura du bon pain, 7 sols par jour, et ne coûtera, les officiers compris, et sans frais pour les provinces, que 245 livres 3 deniers. Infanterie suisse . 11 régiments, composés de 22 bataillons) 10j~f “Sf ( 11.429 hommes. coûteront, comme ci-devant. . . ., 5,256,004 liv. Infanterie légère. 12 bataillons, \ 324 officiers l t kr composés de f 5,132 soldats I 5,456 hommes. coûteront, comme ci-devant ..... 1,800,000 liv. Total de notre infanterie. 52 régiments i 198 bataillons 52 colonels 64 lieutenants - colonels 64 majors 164 comm.de bataillon / 6,281 autres offi -l tiers de tous! grades 82 chirurgiens. 109,028soldatsuu bas officiers. ; 115,736 hommes coûteront 30,513,2721. 10 s. DE LA CAVALERIE. Avant l’insurrection du peuple français contre les abus du despotisme ministériel, la France avait sur pied 24 régiments de cavalerie, 2 de carabiniers, 6 de hussards, 18 de dragons, et \�L ds chasseurs. Total : 206 escadrons, 2,164 officiers, 31,148 chevaux et 32,164 hommes. Le Trésor public payait pour cet objet : Solde et masse ................ 12,208,548 liv. Fourrages .................. ... 7,243,056 Fourrages acquittés par les provinces, par estimation ....... 2,000,000 Hôpitaux, à 15 liv. par homme. 482,460 Part et portion relative de la cavalerie dans la dépense des casernes, lits militaires ........ 175,000 Idem, pour bois et lumière ..... 264,000 Vivres, à 1 sol par homme ..... 578,952 Total de dépense pour la cavalerie ....... 22,952,016 liv. Tous les principes que j’ai établis dans le projet d’ordonnance primaire, et dans celle pour l’infanterie, étant également applicables à la cavalerie, je ne m’occuperai que d’y analyser sa composition ; je formerai de même 41 régiments na- [Assemblée nationale.] 603 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] lionaux de cavalerie, sur les mêmes bases et d’après les mêmes principes que le seront les 41 régiments nationaux d’infanterie. Un homme de cheval est plus difficile et plus long à former qu’un fantassin ; mais il n’en est pas moins inutile d’entretenir à grands frais une aussi grande quantité de chevaux que de cavaliers en temps de paix : un cheval peut servir à l’instruction de deux nommes, surtout lorsque de ces deux hommes, il y en aura un d’absent neuf mois de l’année. D’après ce calcul, un régiment national de cavalerie sera composé d’un état-major, et de quatre escadrons de chacun 9 officiers et 156 hommes, dont, en temps de paix, moitié seulement sera montée et l’autre à pied. Composition et solde d'un régiment national de cavalerie. ÉTAT-MAJOR. 1 colonel ..................... .... 6,000 liv. 1 lieutenant-colonel ................ 5,000 1 major ........................... 4,000 1 quartier-maître trésorier ...... .... 1 ,200 2 adjudants, chacun 800 livres ...... 1,600 1 chirurgien-major ................. 1,500 1 trompette-brigadier ............. 360 1 maître maréchal .................. 340 1 maître sellier .................... 340 1 maître tailleur ................... 144 1 maître bottier ................... 144 1 maître armurier ................. 144 Total pour l’état-major ....... 20,772 liv. Composition et solde d'une compagnie pendant deux ans. Total pour deux ans. .... 22,585 et pour un an ......... 11,292 1. 10 s. et pour 8 compagnies formant 4 escadrons ................. 90,340 liv. Masse. 316 hommes montés, à 130 liv. 41,080] 316 hommes à pied, et pour / trois mois, 24 livres... 7,584 ( 4 porte-étendard, à 100 liv. 400] 49,064 l. Fourrages. 352 chevaux, compris ceux des officiers, à 15 sols par jour par abonnement pour 365 jours. . . . 96,360 1. Nota. Les officiers ont de celte manière un supplément de 270 livres chacun par an ........................ Pain et petit équipement. 2 sols par homme, au complet ..... 22,752 1. Casernes, hôpitaux, écuries, ustensiles, bois et lumières, etc., par abonnement avec les provinces, comme pour l’infanterie .................... 30,000 1. Total de dépense et composition. 1 régim.) 4 escad. j 1 solde. . . . masse. . . fourrages pain .... casernes. 111,112 1. 49,064 96,360 22,752 30,000 668 hommes. Dépense . . 309,288 1. Et pour toute la cavalerie nationale. [solde. 4,555,592 1. ( 1,476 officiers, imasse 2,011,624 A\ r�f'!?'<12,956h. à chev.lfourr. 3,950,760 164 escad • i2, 956 h. à pied. /pain . 932,832 [casern. 1,230,000 27,388 hom. Dépense. 12,680,808 1. J’ai laissé subsister dans l’infanterie douze bataillons légers, pour deux motifs : le premier, pour ne point anéantir une composition et un genre de service très-utile à la garde de nos frontières, à des mouvements rapides qui peuvent être déterminés par les circonstances et à des détachements séparés du corps de bataille à la guerre ; le second motif a été de procurer aux gens dénuées de ressources et sans domicile fixe les moyens de subsister, en se rendant utiles à la patrie. Les mêmes raisons doivent déterminer la conservation des 12 régiments de chevau-légers ou chasseurs. Chacun de ces régiments est composé d’un état-major, formé de 5 officiers, 1 chirurgien-major , 1 aumônier et 8 hommes; de 4 escadrons, formés chacun de 9 officiers, et de 160 hommes, compris 2 enfants de chasseurs. Chaque escadron est partagé en deux compagnies : total par régiment, 41 officiers, 1 chirurgien, 1 aumônier et 648 hommes, dont 44 à pied. Donc, les 12 régiments de chasseurs sont com- 604 [15 décembre 1789.] [Assemblée nation île ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. posés de 492 officiers, 7,776 hommes, dont 528 à pied. Cette espèce d’armée coûte en solde et masse . . ................ 2, 720,436 iiv. Fourrages .................... 2,122,848 Supplément de boulangerie ..... 139,968 Casernes, etc ................. 360,000 Total par an .......... 5,343,252 iiv. Des officiers généraux. Lorsque les circonstances obligent à un rassemblement de troupes, il faut bien des chefs pour les conduire, y maintenir la discipline, l’ensemble et l’unité d’action, qui constituent la véritable force d’une armée ; il faut aussi que ces chefs, quelque expérimentés qu’ils soient d’ailleurs, s’habituent à manier de grands corps pendant la paix, pour que la nation soit assurée de profiter de leurs talents à la guerre. Il est donc nécessaire qu’il y ait des officiers généraux attachés à chaque 'division ; et comme chaque division sera composée de deux régiments d’infanterie et deux de cavalerie nationale, non compris les Suisses ou troupes légères, qui pourraient se trouver dans l'arrondissement de ces départements, je crois nécessaire d’attacher à chaque division un maréchal de camp d’infanterie, un de cavalerie, et un lieutenant général. En sorte que dans Je cas même où la France se trouverait en guerre avec tous ses voisins, soit l’augmentation des troupes, soit l’incorposation des milices puissent s’effectuer sans augmentation du nombre des chefs destinés à les conduire à l’ennemi. La France étant divisée en 80 départements, Paris non compris, entre lesquels se trouveront partagés 40 régiments d’infanterie nationale, et 40 régiments de cavalerie, je formerais chaque division de quatre départements, et par conséquent 2 régiments d’infanterie et 2 de cavalerie, sous les ordres de deux maréchaux de camp, choisis dans chaque arme, et d’un lieutenant général. Tous les régiments suisses, les bataillons ou chevau-iégers, seront également aux ordres des officiers généraux, commandant dans l’arrondissement du lieu de leur garnison. Le service d’un maréchal de camp sera de trois mois, du 15 mars au 15 juin; pendant lequel temps il s’occupera de la manoeuvre, de la tenue, de l’exacte discipline des troupes, et de l’exécution littérale des ordonnances. Un maréchal de camp aura, pour ce service de trois mois, 9,000 livres de traitement, Le lieutenant général, commandant de division, ne servira que du 15 mai au 15 juin, pour rassembler et faire manœuvrer ensemble les troupes à ses ordres ; il aura 12,000 livres de traitement. Récapitulation. 20 lieutenants généraux, à 12,000 livres .................. 240,000 liv. 40 maréchaux de camp, à 9,000 livres ........ ..... ...... 360,000 Total ..... ... 600,000 liv. Des commissaires des guerres. Le commissaire des guerres a des fonctions utiles, pour le service de l’armée, en temps de guerre, et pour l’exacte observation des ordonnances en temps de paix ; il est l’homme du ministre auprès des corps, chargé de lui rendre compte de leur exactitude, du complet des recrues, des réformes, des congés, des hôpitaux et de la surveillance des vivres, ainsi que du détail des logements. 11 doit donc y avoir un commissaire des guerres attaché à chaque département, dont le traitement sera de mille écus, et pour 41 commissaires .......... 123,000 liv. Artillerie. Les dépenses de l’artillerie montent, année commune, à la somme de ....... 7,829,725 liv. Savoir : 7 régiments, composés chacun d’un état-major, de 10 officiers, 1 aumônier, 4 chirurgiens, 1 tambour-major et 1 armurier. 20 compagnies, dont 16 de canonniers “ou sapeurs et quatre de bombardiers ; chaque compagnie est composée de 1 capitaine, 1 lieutenant en premier, 1 lieutenant en second, 1 lieutenant en troisième et 54 hommes. Total par régiment, 1,082 hommes et 90 officiers. Solde et subsistance. . . . ...... 377,467 liv. Et pour sept régiments, 7,574 hommes, 630 officiers..' ......... 2,642,269 6 compagnies de mineurs, composées chacune de 62 hommes et 5 officiers, non compris un commandant et un aide-major, font 372 hommes et 320 officiers , et coûtent ........................ 133,668 9 compagnies d’ouvriers, composées de 639 hommes et 36 officiers, coûtent .................. 240,321 242 officiers, inspecteurs, colonels, directeurs, sous-directeurs détachés dans les places, coûtent. 736,680 Total, 940 officiers, 8,585 hommes, 9,525 officiers et soldats coûtent .................. ......... 3,752,938 liv. non compris les casernements, les hôpitaux, les vivres, bois, lumières et gratifications. Les régiments d’artillerie ne pouvant pas, à raison de la nature de leurs exercices, être déplacés de leur garnison ordinaire, et ayant besoin de plus d’instruction qu’aucune troupe de ligne, il serait difficile, et peut-être nuisible au bien du service, de vouloir assimiler ces corps aux autres régiments nationaux ; leur composition est la meilleure de l’Europe, et ce titre me paraît infiniment respectable. Mais je ne sens pas également l’utilité de 242 officiers détachés dans les places, qui coûtent736,6801ivres. Jecrois qu’on pourrait réduire au moins à moitié cette dépense, toujours vivante, et en soulager d’autant l’état de la guerre. Les écoles d’artillerie sont au nombre de huit; elles sont très-utiles, et ne coûtent que 95,830 livres. On y remarque seulement que les loyers de terrain d’exercice absorbent chaque année environ 12,000 francs ; et certainement il serait plus avantageux d’en faire l’acquisition. La dépense annuelle des places d’artillerie, et gardes de ces places, me parait n’avoir guère [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] gng d’autre utilité que de servir de retraite à d’anciens sergents ; elle coûte 282,359 livres, et peut être sujette à quelques abus. Nous avons 8 arsenaux de construction, qui coûtent 534,842 livres 4 sous. Il faut s’en rapporter, sur cet article, à la probité de l’administration que je crois intacte ; il en sera de même des fonderies de Douai et de Strasbourg, dont le service coûte annuellement 650,200 livres, savoir : 528,000 en métaux de cuivre ou d’étain, et 115,000 aux sieurs Poitevin, pour déchet, façon et traitement. Cet article paraît exorbitant, eu égard à la dépense de la matière première ; car, en y joignant 7,200 livres d’appointements à différents employés, on voit que nos fonderies coûtent près de 20 0/0 de faux frais. L’artillerie emploie trois forges, une en Champagne, une dans le pays Messin et une en Franche-Comté. La dépense évaluée de 95 à 120 livres, le mille, pour les fers coulés de toute nature, monte à 461,950 livres. L’artillerie entretient trois manufactures d’armes à feu, qui sont Saint-Etienne, Charleville et Maubeuge. Ces trois manufactures doivent fabriquer chacune 1,200 fusils; le prix effectif de chaque fusil ne reviendrait qu’à 18 livres environ, s’il ne fallait pas y ajouter l’intérêt accordé aux entrepreneurs, sur la valeur des bâtiments et fabrication; ce qui porte le prix moyen de chaque fusil à 26 livres. L’intérêt accordé aux entrepreneurs monte à 175,479 livres 6 sous 8 deniers, somme qu’il faudrait annuellement payer, quand même le Roi ne ferait fabriquer aucune arme. La totalité de la dépense, pour 36,000 fusils, est évaluée, compris les gages des employés, à 957,555 livres. Il paraît que si le gouvernement changeait ce régime, la nation ne serait point exposée à payer fort cher des loyers inutiles; en assurant à un entrepreneur une fourniture quelconque, chaque année, sur un pied fixé pour chaque arme conforme au modèle, on pourrait économiser un quart de la dépense. L’artillerie alimente une autre manufacture d’armes blanches et de baïonnettes à Kleingen-tall, qui coûte 134,530 livres; les sabres qu’on y fabrique sont payés sur la masse des régiments ; ainsi, la totalité de cette dépense porte sur la fabrication des baïonnettes : le Roi alloue au régisseur 11,728 livres pour traitement, 10 0/0 sur la main d’œuvre, et 6,000 livres pour entretien de bâtiments; de sorte qu’il paraît démontré que si l’on ne séparait pas l’entreprise des baïonnettes de celle des fusils, cette dépense pourrait se réduire à moitié. L’entretien des armes dans les places est évaluée à 80,000 livres , cela suppose 640,000 fusils en magasin, à raison de 2 sous 6 deniers, par fusil d’entretien. La consommation de poudres est de 400 milliers par an, à raison de 13 sous la livre ci. 260,000 liv. Les magasins de-ce corps montent de 19 à 20 millions pesant de poudre : cette munition est évaluée devoir être portée à 50 millions, et pour arriver au complet, on tire chaque année de la régie 750 milliers, qui coûtent ..... 490,000 liv. Le radoub des barils, et l’entretien des poudres en magasin coûtent. . . . 30,000 Total de dépense pour les poudres 520,000 liv. Il n'y a sur cet article rien à réclamer, sinon qu’il soit justifié de l’emploi. Transports d'artillerie. Cette dépense forme deux objets , l’un à l’entreprise, et l’autre en régie. La régie coûte, année commune , 150,000, èt l’entreprise est à raison de 300 chevaux, payés sur le pied de 52 sous par jour au complet, et forme une dépense de .............................. 284,700 liv. Total ................. 434,700 liv. On conçoit difficilement qu’il doive, au sein de la paix, en coûter cette somme pour transporter dans les différents magasins les armes et boulets, dont la plupart voyagent par eau. La conservation des canons et affûts destinés à la garde de nos côtes, et emmagasinés en temps de paix, coûte ................. ... 30,000 liv. Enfin, diverses dépenses, comme 480 livres à chacun des élèves d’artillerie, au nombre de 50; — 10,750 livres pour le bureau de l’inspecteur en chef; 100,000 francs employés en gratifications à différents officiers de ce corps , et autres traitements particuliers , coûtent annuellement ............................. 179,520 liv. D’après ce compte rendu de toutes les dépenses de l’artillerie, il est facile d’apercevoir que sans altérer la composition et l’organisation de ce corps, on peut réduire sa dépense à 7 millions de livres. Du génie. Louis XIV, dans sa plus grande gloire, ayant 400,000 hommes de troupes réglées , faisant tête à toute l’Europe, attaquant et fortifiant des places, n’avait que 55 officiers du génie. La France encore étonnée des immenses travaux que lui a coûtés la triple ceinture de nos frontières ; la France hors d’état d’entretenir tant de places de guerre , a cependant aujourd’hui 376 officiers du génie, dont la solde est de 879,680 livres. Les dépenses assignées sur les travaux ordinaires du génie passen 1 2 mi I lio n s de livres ,et presque toutes nos places sont démantelées. Nous avons, en outre, des ingénieurs géographes, des ingénieurs de la marine , des ingénieurs des ponts et chaussées; eh! que font donc les ingénieurs du Roi ? Je pense que ce corps est très-respectable, et par ses talents et par sa composition , qu’il est essentiel à conserver, que l’essai qu’on a voulu faire de l’amalgamer avec l’artillerie, a suffisamment prouvé que c’était nuire, à la fois, 5 deux établissements précieux, mais je pense que la nation doit employer plus utilement des hommes , qui , depuis 50 ans, enfouissent de grands talents et de vastes connaissances dans des spéculations oiseuses et sans utilité publique. Je pense que le corps royal du génie doit être le centre de tous les travaux importants du royaume, et qu’il résultera, de ce nouvel ordre de choses, le plus grand bien, et une économie d’un million sur les frais qu’acquittent les provinces ou la marine, pour les conducteurs de leurs travaux. Ainsi , en déchargeant le département de laguerre, en temps de paix, sans surcharger les provinces , les appointements et travaux du génie militaire, ne coûteront plus au trésor royal que 1,800,000 livres. Delà milice. Cent cinquante mille hommes de troupes ré- 606 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] glées peuvent bien suffire à la France en temps de paix, mais il faut pouvoir doubler cette masse pour faire tête, à la fois, à toutes les puissances qui nous environnent, et qui, jalouses de notre bonheur, tenteraient de le détruire ; ce cas est presque impossible, sans doute, mais pour n’avoir rien à craindre, il faut tout prévoir. Nous avons d’ailleurs aujourd’hui un motif de politique bien plus déterminant ; le despotisme est abattu, une constitution libre, sanctionnée par le Roi , doit régénérer la France ;mais les efforts du monstre terrassé, seront encore longtemps dangereux; et c’est souvent sous le meilleur des Rois, lorsque le peuple dort tranquillement à l’ombre de sa confiance, que les tyrans subalternes se permettent de porter les plus vives atteintes à son bonheur. Français , n’oubliez jamais que, depuis le cardinal dé Richelieu, des fleurs ont couvert les chaînes dont vous étiez garrottés; que lorsque vous en avez senti le poids, vous touchiez au moment d’en être accablés ; que votre réveil a pensé vous causer la mort ; que votre courage seul a rétabli vos droits; mais que leur solidité dépend du temps et de votre constance; et qu’en respectant les agents du pouvoir, vous ne devez pas les perdre un instant de vue. Une nation composée de 25 millions d’âmes, n’a rien à craindre que d’elle-même, et pour tromper l’espoir des méchants, elle ne doit jamais cesser d’être armée, non pour conquérir, mais pour se défendre. C’est dans cet état perpétuel de simulacre de guerre , que nous conserverons la paix et la liberté, au milieji des tyrans et des esclaves qui nous environnent. Car, on a beau calomnier ce pauvre genre humain, dans une nation qui jouit de la plénitude de ses droits, les honnêtes gens sont toujours les plus nombreux. Lors de la rédaction des cahiers des baillages, toutes les communes ont réclamé contre le tirage au sort de la milice ; il n’est pas étonnant qu’une opération consacrée par l’autorité arbitraire, avilissante par ses formes , souvent exécutée d’une manière atroce, ait laissé, malgré sa longue inutilité, une impression profonde de douleur dans des cœurs qui se sentaient nés pour la liberté. Ce n’est pas le service qui répugne, c’est le mode; et nous en avons la preuve évidente daus la vivacité avec laquelle, en un jour, tout citoyen est devenu soldat. Conservons précieusement ce feu sacré : si sous l’empire du despotisme, c’était jadis un malhenr d’être choisi par le sort , pour servir la patrie, c’est maintenant sous l’étendard de la liberté, un droit et un droit honorable qui appartient à tout citoyen, sans distinction de naissance ni de fortune; et ce droit ne peut être considéré que comme le plus beau titre de tout bon français. Ce n’est donc pas le tirage au sort, dont il peut être ici question, mais une conscription nationale pour tous les hommes , de quelque état et condition qu’ils soient. Tout citoyen domicilié doit avoir son fusil armé d’une baïonnette, son sabre et sa giberne garnie de cartouches, mais ces armes doivent reposer chez lui : il suffit qu’il soit inscrit au rôle de la municipalité ; il suffit qu’il ait prêté le serment de défendre ses foyers et sa liberté , d’obéir aux lois et aux chefs qu’il se sera donné librement. Tous les jeunes gens qui auront atteint l’âge de 15 ans, viendront acquérir le droit de citoyen en faisant sur la place , en présence de toute la milice assemblée, et après avoir entendu la lecture de la constitution française , le serment d’y être fidèles jusqu’à la dernière gouttede leur sang. Cette cérémonie aura lieu une fois par an, et chacun pourra vaquer ensuite tranquillement à ses affaires. Une telle milice ne doit jamais sortir de ses foyers, que de son consentement, et pour une expédition de peu de jours. Mais si l’ennemi, criblant nos frontières, nous contraint à déployer l’appareil d’une plus grande force militaire, alors chaque ville, bourg ou village tirera de son sein un nombre proportionnel d’hommes célibataires, en commençant de l’âge de 18 ans jusqu’à 40, pour compléter et doubler les régiments nationaux de chaque département. Ces volontaires, soumis d’ailleurs à tout le régime militaire des régiments, dans lesquels ils seront incorporés, porteront sur la poitrine une marque distinctive, prise dans l’écusson de leur province ; et s’ils se sont bien comportés, ils recevront à leur retour un grade supérieur dans la milice de leur canton. Si la nation adopte pour principe constitutionnel : 1° que tous les régiments nationaux doivent être rigoureusement composés en officiers et soldats de sujets pris dans les mêmes départements ; 2° Que les grades et récompenses seront accordés au mérite, par le choix des camarades ; 3° Que les volontaires émanés de la milice nationale, ne pourront être en aucun cas et sous aucun prétexte, incorporés ailleurs que dans les régiments de leur département, nul doute que bannissant à jamais le barbare et ridicule usage du tirage au sort, l’on ne puisse au premier besoin de la patrie, mettre sur pied trois à quatre cent mille hommes des meilleures troupes de l’Europe, sans contrainte et sans frais. De la maison du Roi. Le régiment des gardes-suisses, fort de 99 officiers, et 2,248 hommes coûte. . 1,427,880 liv. La compagnie des cent-suisses. 101,692 Le régiment des gardes françaises, composé de 202 officiers et 3,642 hommes, coûtait. . . 2,127,001 Les 4 compagnies des gardes du corps, fortes de 1,500 officiers, tout compris, coûtaient, avant la réforme, compris les frais des villes de leurs garnisons. . . . 3,000,000 Les 4 compagnies rouges, ré� formées en 1776, fortes de 217 officiers chacune, coûtaient. . . 800,000 Le corps des grenadiers à cheval, composé de 150 maîtres et 7 officiers, coûtait ...... 150,000 La gendarmerie, forte d’environ 1,200 hommes, coûtait environ .............. 1,000,000 Total : 8,606,573 liv. 5,990 hommes d’infanterie, 304 officiers ....... 3,656,573 liv. 3,725 hommes de cavalerie. 4,950,000 10,019 hommes. — Dépense. 8,606,573 liv. Il ne reste aujourd’hui de tous ces corps, si brillants et si imposants à proprement parler, que les gardes-suisses. 607 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Je ne rappellerai pas ici les services essentiels qu’a rendus la maison du Roi, composée telle qu’elle était de la main habile et politique de Louis XIV ; le ministère jaloux et parcimonieux de M. de Saint-Germain, en a culbuté les fondements en 1776, et les circonstances viennent d’achever l’éboulement de cet édifice, aussi magnifique qu’utile, sous tous les points de vue. Certainement, la nation a le plus grand intérêt de ne pas mettre dans la main du pouvoir exécutif des forces capables de détruire ses droits et sa liberté, mais la nation a un intérêt égal à maintenir la décence du trône, et à garantir son souverain des convulsions d’une ville immense que le caprice ou l’intrigue pourrait diriger. Trop de justes motifs concourent maintenant à la création d’une nouvelle maison militaire, pour que cet objet ne soit pas pris en considération par l’Assemblée nationale. J’ai dit que l’observance religieuse de nos traités avec la Suisse, était à la fois la garantie du bonheur et de la tranquillité des deux nations : il faut indispensablement, pour le service du Roi, des troupes à pied et à cheval ; et l’on a eu grand tort de perdre de vue l’adroite politique de Louis XIV, qui, balançant la force et l’intérêt des troupes qui l’entouraient, pouvait, dans des circonstances orageuses, les opposer l’une à l’autre, et n’avoir rien à redouter, par ce moyen, d’un chef de gardes prétoriennes. Je propose donc de laisser le corps des gardes suisses, constitué comme il est de 2,347 hommes, compris les officiers, coûtant, 1,354,878 liv. Les cent-suisses, coûtant. . 101,692 liv. Je propose de rétablir un régiment de gardes-françaises réduit à quatre bataillons, parce qu’il ne sera plus employé au service de Paris que quand le Roi y sera, et chez le Roi. Ce régiment, composé et soldé comme les gardes-suisses, coûtera de même. 1,354,878 liv. Relevé de l'infanterie de la maison du Boi. 2,248 gardes-françaises. . . . 99 officiers ........ 2,248 gardes-suisses ..... 99 officiers ........ 100 gardes, dits cent-suisses 3 officiers ........ 1,354,878 liv. 1,354,878 101,692 Total : 4.596 so'ldits8 | 2'811’«8 “*• Je propose de créer huit corps de troupes moitié à pied et moitié à cheval, de chacun 426 hommes, choisis dans la même classe que tous les officiers des troupes de France. Le royaume étant divisé en 80 départements, chacun de ces corps, indépendants l’un de l’autre, serait composé de sujets choisis dans dix départements les plus voisins, et porterait le nom de légion royale de la province de... Chaque corps serait partagé en dix brigades formant cinq escadrons, et chaque brigade porterait le nom d’un département. Le service intérieur du château serait fait par le s troupes à pied de ces corps, et le service exté-rieur par les troupes à cheval. Tout serait égal entre ces huit corps, grades, avancements et retraites ; le Roi seul en serait le chef, et chacun son capitaine-lieutenant. Je vais maintenant entrer dans quelques développements. Ordonnance de création de huit compagnies de dragons de la Couronne , sous le nom de légions des provinces de. . . . Art. Ier. A compter du 1er janvier prochain, il sera créé huit légions , pour remplacer, auprès de la personne de Sa Majesté, le service que faisaient ci-devant les gardes du corps, et autres corps militaires à cheval de la maison du Roi. Art. 2. Chacun de ces corps sera composé de sujets choisis dans les dix départements qui lui seront affectés conformément a la nouvelle distribution du royaume. Art. 3. Tout maître de la maison militaire ancienne, garde du corps, gendarme de la garde, chevau-léger et mousquetaire sera admis de préférence dans chacun desdits corps du département dans lequel il fait habituellement son domicile ; et il prendra rang à raison de son ancienneté de service. Art. 4. Chaque légion sera composée d’un capitaine-lieutenant, d’un commandant en second, de deux aides -majors , et 5 escadrons de 84 hommes chacun, moitié à pied et moitié à cheval. Art. 5. Chaque escadron sera composé d’un lieutenant commandant d’escadron, deux sous-lieutenants deux maréchaux des logis, deux brigadiers, quatre sous-brigadiers, un porte étendard ou porte-drapeau, et 72 hommes. Art. 6. Les légions serviront par quartier de chacun 3 mois, et fourniront chaque quartier, un escadron complet. Il y aura donc toujours de service, près la personne du Roi, huit escadrons ; savoir : huit lieutenants, 16 sous-lieutenants, 16 maréchaux des logis, 16 brigadiers, 22 sous-brigadiers, 8 porte-étendards, et 576 dragons de la Couronne, dont 288 à cheval pour le service extérieur, et 288 à pied pour le service intérieur. Art. 7. Chaque maître de la maison militaire du roi s’appellera dragon de la Couronue. Art. 8. Les dragons de la Couronne feront alternativement le service à pied et à cheval, d’année à autre ; c’est-à-dire que ceux qui auront été employés tout un guet à pied au service de l’intérieur, lorsque leur tour reviendra de monter le guet, arriveront avec leurs chevaux pour le service extérieur, et vice versa. Art. 9. Les dragons de la Couronne ne feront avec leurs propres chevaux que les exercices de Earade ou de sûreté publique; et il sera entretenu actuellement, aux frais du Roi, 288 chevaux de course qui serviront au service extérieur de la personne du Roi et de la famille royale, et à monter, au besoin, les dragons à pied faisant le service intérieur du château. Art. 10. Le Roi passera en revue la totalité de sa maison, tant à pied qu’à cheval, tous les 4 ans, dans la belle saison. Art. 11. Excepté le temps destiné à se préparer à passer la revue, temps auquel la totalité de la maison sera assemblée pendant 3 mois, un dragon de la Couronne ne servira que 3 mois sur 151; par conséquent celui qui aura fait le quartier de janvier, ne sera obligé de rejoindre ses drapeaux qu’en avril de l’année suivante, à moins des cas 608 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] imprévus, pour lesquels il lui sera tenu compte d’un supplément de traitement, proportionnel à sa dépense. Art. 12. Le capitaine-lieutenant et le commandant en second de chaque corps seront entièrement à la nomination du Roi; mais ils seront toujours choisis parmi les ofti ciers généraux en activité dans les troupes de ligne. Art. 13. Tous les autres grades seront donnés à l’ancienneté, dans chaque régiment, excepté les places d’aides-majors et de sous-aides-majors, qui seront au choix du commandant; choix qu’il ne pourra cependant faire que parmi les officiers du corps, depuis le dernier sous-brigadier jusqu’au premier chef d’escadron . Art. 14. Au moyen de la solde que Sa Majesté accorde à chaque individu composant ses dragons de la Couronne, ils seront tenus de se monter, équiper, et généralement de toutes les dépenses de corps ou personnelles qui peuvent concerner le service auquel ils seront assujettis par la présente ordonnance. Art. 15. Les huit légions seront montées en chevaux noirs à tous crins, et les chevaux des officiers, hors des rangs, seront bais. Art. 16. L’uniforme sera le môme pour les huit légions, qui ne seront distinguées que par le numéro du bouton, depuis 1 jusqu’à 80, à raison du nombre des département dont elles seront composées ; ainsi la légion royale de ***, supposée la dernière, portera en tête du bouton le numéro 8 ; et chaque brigade sera distinguée par le numéro de son département. Exemple pour la huitième légion et le 80e département. Art. 17. Nul autre corps militaire ne pourra à l’avenir s’appeler légion. Art. 18. L’uniforme sera composé d’un habit d’écarlate, galonné sur toutes les tailles, en or, avec l’ancien galon, dit à la mousquetaire, collet et revers bleu de Roi, ainsi que les parements. L’ancienne croix de mousquetaire, brodée en velours et or sur la poitrine, de manière qu’U y en ait moitié sur un revers et moitié sur l’autre, s’agraffant au milieu, quatre boutonnières en or aux revers, de chaque côté , deux au-dessus de la croix, et deux au-dessous ; trois grandes boutonnières à l’habit, de chaque côté, au-dessous des revers ; deux poches en long, à chaque côté, et trois boutonnières à chaque poche, les manches rondes, avec un seul galon et trois boutonnières; l’épaulette en or, chacun suivant son grade ; doublure de laine blanche, veste et culotte de drap blanc, galonné, avec des boutonnières en or ; le baudrier qui porte le sabre traversant sous une contre-épaulette de droite à gauche, et la giberne traversant sous l’épaulette de gauche à droite, tous deux de cuir blanc bordé en or. Les officiers commandants, les lieutenants, sous-lieutenants, maréchaux des logis et officiers majors ne porteront ni giberne, ni baudrier, mais seulement une épée d’exercice. Le chapeau avec un plumet blanc pour les jours de parade seulement, cocarde blanche, et un galon de deux doigts, en or. L'équipage du cheval sera en écarlate, galonné en or, avec des croix brodées sur les fontes et sur la housse, tresse et cocarde blanche; le manteau bleu de roi, galonné en argent. Les officiers supérieurs, ne portant point de gibernes, auront en broderie tout ce que les dragons ont de galonné; nulle autre distinction. Art. 19. Sa Majesté accorde par an, sans aucune retenue : Au capitaine-lieutenant ..... 20,000 liv. Au commandant en second. ... 12,000 Aux deux aides-major, rang de colonel, avec chacun 4,000 livres. . 8,000 Aux deux sous-aides major, rang de lieutenant-colonel, et chacun 3,000 livres ............ 6,000 Ces messieurs seront de service tous les six mois. Total. . . . 46,000 liv. Par escadron. Au lieutenant-commandànt, rang de colonel ............. 4,000 Aux deux sous-lieutenants, rang de lieutenant-colonel, chacun 3,600 1. 7,200 Aux |deux maréchaux des logis, rang de lieutenant-colonel, chacun 3,000 livres ........ .... 6,000 Aux deux brigadiers, rang de major, chacun 2,400 livres ....... 4,800 Aux quatre sous-brigadiers, chacun 1,800 livres ............ 7,200 Aux porte-étendard ou drapeau.. 1,500 A 72 dragons, chacun 900 livres . 64,800 Total. ... 95,500 liv. Hautes payes . Sa Majesté, considérant qu’un dragon de la Couronne peut rester trente ans à son service sans avoir obtenu, par son ancienneté, un grade supérieur, voulant qu’il soit établi, dans chaque corps, une progression de grâces analogues à celles qu’obtiennent ses autres troupes, a bien voulu accorder aux 160 plus anciens dragons de chaque légion, le rang de capitaine et des hautes payes, dans la proportion suivante; Savoir ; Aux vingt plus anciens, chacun 300 livres ............ 6,000 liv. Aux vingt suivants. 250 livrés. . 5,000 Aux trente suivants, 200 livres . 6,000 Et aux trente suivants, 150 liv. 4,500 Total. . . 21,500 liv. Petit état-major. Un trésorier comptable à l’administration du corps ....... 1,200 liv, Un chirurgien-major ...... 1,800 Un aide-chirurgien ....... 1,200 Cinq trompettes, chacun 800 liv. 4,000 Six musiciens, chacun 800 liv. 4,800 Total. . . 13,000 liv. Résumé pour une légion. Grand état-major, 6 officiers. . 46,000 liv. Cinq escadrons, 420 officiers. . 477,500 Hautes payes .......... 21,500 Petit état-major ........ 13,000 Total. . . . 558,000 liv. 600 {Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.] Et pour huit légions pareilles, composées de 3,408 officiers . . . 4,464,000 liv. Art. 20. Il ne pourra être reçu plus de cinquante surnuméraires dans chaque légion; et lesdits surnuméraires resteront au quartier, occupés à faire leurs exercices sans aucun congé jusqu’à ce qu’ils aient été mis en pied. Art. 21. Les surnuméraires ne pourront jamais porter que le petit uniforme, même en temps de revue. Art. 22. Les dragons de la Couronne auront rang de lieutenants de cavalerie, et les surnuméraires rang de sous-lieutenants. Art. 23. On pourra être reçu surnuméraire à quinze ans, mais un dragon ne pourra être mis en pied qu’à dix-huit ans révolus, et il ne sera fait aucune attention à la taille. Art. 24. Les dragons de la Couronne auront pour quartier commun à Versailles, l’hôtel des gardes du corps; et le bâtiment des petites écuries servira pour loger tous les surnuméraires. Art. 25. Lorsque les légions seront assemblées en totalité, elles auront pour quartier l’Ecole militaire, Meudon, Saint-Cloud, Neuilly et Saint-Germain en Laye. Récapitulation de la maison nouvelle du Roi. Huit légions formant un corps de 3,408 officiers, non compris 400 surnuméraires, total 3,808 dont 1 ,120 toujours de service chez le Roi, coûteront la somme de ....... 4,46 i, 000 liv. 288 chevaux de course pour le service extérieur, à 30 sols par jour, tout compris ....... 157,680 2, 357 hommes de gardes-suisses. 1,354,878 2,347 gardes-françaises. . . . 1,354,878 203 gardes dits cent-suisses. . 101,682 3,808 hommes de cavalerie. 4,797 — d’infanterie. 8605 7,433,118 liv. La maison du Roi, telle qu’elle était en 1776, coûtail8,606,573 livres. Elle était égale en cavalerie pour le nombre; mais la composition de celle-ci présente de bien plus grandes ressources à la nombreuse classe des citoyens, que leur fortune et leur goût détermine à donner à l’état militaire la préférence sur tout autre. Cette composition nouvelle, san êtres excessivement dispendieuse, puisqu’un garde du corps coûtait 2,000 livres, tout compris, et qu’un dragon de la Couronne, mieux traité à tous égards, ne coûtera que 1,360 livres; cette composition, dis-je, répandra sur le trône tout l’éclat qui convient à une grande nation comme la France; elle fournit près de 4,000 places d’officiers de plus, débouché d’autant plus nécessaire, que les communes auraient vainement réclamé le droit de servir honorablement la patrie, si l’engorgement cruel occasionné parla réforme de 1776, subsistait plus longtemps. Je ne doute donc pas que la nation, après avoir assuré la liberté publique, ne trouve toute sorte d’avantages à environner son souverain de l’élite de ses membres. Résultat des réformes, changements, augmentations ou diminutions proposées au précédent mémoire. En vain s’efforce-t-on de justifier son opinion par tous les principes d’équité, et par des convenances morales et politiques, nos ressources sont tellement épuisées, qu’il semble que la seule vertu soit l’économie, je vais donc prouver que je n’ai pas perdu de vue ce moyen unique d’obtenir quelque succès. Tableau de nos forces militaires, telles que je suppose qu'elles seront composées à l'avenir, avec toutes leurs dépendances. Maison du Roi. 3,808 hommes de] cavalerie. f > dépense 7,433,118 livres. 4,797 hommes d’in-\ Officiers généraux. 60 maréchaux de camp et lieutenants généraux ......... 600,000 Commissaires des guerres. 41 commissaires .......... 123,000 Total. 13,778 offiiciers de tous grades. 155,896 soldats ou cavaliers. 65,493,450 1. 10 s. La solde annuelle du département de la guerre étant de 104 millions, il reste 38, 506, 550 livres, pour les invalides, la maréchaussée, et les frais de bureau. lre Série, T. X. 39 O <3> Différence de V ancienne composition des troupes de la ligne avec le nouveau projet . [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 décembre 1789.]