002 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 4796.} même pas la difficulté subsistante entre eux, relative Tient aux mineurs ; 2° Que si les besoins du service, appuyés de l’autoi ité respectabledu maréchal de Vauban, semblent demander, d’une part, que le génie ait une troupe direotementà ses ordres, pendant ta guerre, pour la conduite des sièges, rien ne paraît motiver cette nécessité pendant la paix, pas même l’opinion de ce général célèbre, puisque, dans sa lettre à M. de Louvois, il ne demande cette Iroupe que dans le cas où la guerre se prolongerait, et qu’il le prie de ne la pas former, s’il voit de grandes apparences de paix ; et qu’en conséquence, il est inutile d’attacher une troupe directement au génie pendant la paix, puisque pendant la guerre, moment seul pendant lequel il est intéressant qu’il ait des bras à ses ordres, il pourrait avoir à sa disposition tous les travailleurs de l’armée, ainsi que les avait M. de Vauban, mais avec moins d’inconvénients que lui, pui-qu’il y aurait de plus, en même temps à sa disposition, les troupes instruites des sapeurs et des mineurs qui n’existaient pas alors; 3° Que pour remédier aux inconvénients de l’oisiveté à laquelle le génie se trouve trop souvent condamné, il serait possible et même plus avantageux de lui restituer différentes fonctions qui lui ont été enlevées ou qui lui conviendraient parfaitement, telles que celles des ingénieurs géographes, des travaux maritimes, etc., que de lui ad, oindre le corps des mineurs, qui, quoique ne devenant pas inutile entre les mains des ingénieurs, ne pourrait qu’être au moins détourné par eux du principal but d’instruction qu’il doit se proposer; 4° Que si les mineurs réunis au génie doivent être employés à ses travaux ordinaires, et êire en conséquence séparés, leur instruction comme mineurs serait bientôt anéantie ; que si, au contraire, ils doivent continuera se liyrer au même genre de travail, leur réunion au génie devien-- drait sans effet pour ce eorps; et qu’ainsi, pour le léger avantage de remédier à quelques diffi� cultes sur le commandement dans les travaux communs, inconvénients qu’une ordonnance sagement faite peut lever aisément, il est inutile d’apporter aucun changement dont le succès pourrait être très probtématique dans l’organisation du corps des mineurs, lorsque ie degré d’instruction, auquel il est parvenu par ses moyens actuels, doit être un sûr garant de la bonté de sa formation. Tel est, Messieurs, l’avis de votre comité militaire sur le fond de cotte question importante qu’il a cru devoir vous présenter d’abord. Il vous reste encore à examiner le plan du ministre dans les détails particuliers de la formation intérieure de l’aFtilli rie, des ouvriers, des mineurs, ainsi que de celle du génie : ce sera le sujet de deux rapports qui vous seront faits lorsque vous l’ordonnerez. En attendant, et sur le fond de la question des réunions seulement, nous avons l’hon-neuF de vous proposer le projet de décret suivant : PÇCRET, L’Assemblée nationale, ayant entendu le rapport de son comité militaire sur l’organisation de l’artillerie et du génie, décrète : Art. 1". Que les deux corps de l’artillerie et du génie continueront, comme par le passé, à rester distincts et séparés. Art. 2. Que le corps des mineurs ainsi que fa» sapeurs continueront de même, comme par le passé, à faire partie de celui de Fartièleiûe. Art. 3. Qu’il lui sera fait in cessas* ruent ]« rapport sur l’organisation intérieure à donner à chacun de ces deux corps, afin qu’elle pnisge prononcer sur le nombre et le traitement des individus de chaque grade, dont ehaeua d’eux devra être composé. M. Martineau. Les trois quarts des mera* bres de l’Assemblée ae peuvent entendre cette question. M. Fréteau. Il est vrai que nous ne eop-r naissons point la tactique militaire; mais nous saurons fort bien régler ie mode d’avancement et les règles de la discipline. le demande donc que lundi prochain le comité nous présente sou tra-r yail sur cet objet-Nous n’avong pas un moment à perdre. Des nouvelles dont j’ai déjà donné connaissance à rAssemblée deviennent de jour en jour plus certaines, H est instant que l’Assemblée s’explique. Qrj nq peut se refuser à la certitude des avis qui me sont parvenus. Je demande qu’on aille aux voix sur ma propogi* tion. M. de RostqiQfg. Quelque empressement que le comité militaire ait à satisfaire l’Assembléé nationale, j’an nonce que le rapport sur je mode d’avancement ne pourra lui être présenté que jeudi prochain. Quant à celui sur la discipline militaire, il est plus avancé; mais le comité na pu encore avoir avec les autres comités les pon* férençes nécessaires. Je crois d’ailleurs qUC l'Assemblée doit bien s’en rapporter an patrie tisme du comité militaire, M. Fréteiiii, Gomme je suis du comité di� plomalique, je pe dois pas laisser ignorer à l’Assemblée qu’il n’y a pas un moment à perdre.- Dans la plupart des provinces frontières lès troupes p’onj, point la confiance du peuple-Plqr sieurs villes d’Alsace, par exemple* désirent être débarrassées (Jes régiments qui, par lems relations avec l’étranger , donnent de justes alarmes. Je ne soupçonne point les intention? du comité militaire, mai? je suis attaché an succès de la chose publique, que jé déclare être dans un péril certain. M. Ktegnand (de Saint-Jean-d' Angêly.) On a déjà observé que les comités n’exécutaient point les ordres de l’Assemblée nationale. M. de Rostaing vous dit que le comité ne pourra faire son rapport que jeudi. Les intrigues et les cabales attendront-elles cette époque? Dans Ja crise où nous nous trouvons, il n’èst personne qui ne doive se prêter. Nous travaillerons avec les membres du comité militaire, s'il le faut; nous copierons sous la dictée-(On avplçiudit.) (L’Assemblée décide que spn comité militaire lui fera, mardi prochain t pn rapport sur la discipline militaire.) On fait lecture d'une lettre de M. La Tour-du-Pin. Ce ministre annonce que les ordres envoyés au régiment de Languedoc pour soHir de Mon-tauban, ont été exécutés avec la plus grande exactitude, et que ce corps a été remplacé par le régiment de Touraine. Le régiment lie Noail-les, qui était destiné pour Montauban, a refusé d’exécuter les ordres du roi. Le comité militaire en q ôté instruit. ‘ [Assamblée aatiMMtta.f ARCHIVES PARLEMENTAIRE! [B septembre 1790.} IL d’Ambly. Pourquoi le eomité militaire n’a-t-il pas rendu compte à l’Assemblée des instructions qui lui étaient données parle ministre de la guerre ? M. ItaveMY�nrei. Le régiment de Noailles est en garnison à Gareassonne. A la réception de l’ordre pour quitter cetie ville, il y avait des troubles relatifs à l'exportation des grains ; le régiment était dispersé dans divers endroits ; le directoire du département a écrit au ministre qu’il était impossible en ce moment de laisser partir le régiment. Il n’y a point d’autres troupes dans la ci-devant province de Langue loc. L'Assemblée reprend la discussion su v l'organisation do l'artillerie et du génie. M. Bureaux, ei-devant de Puzy, développe d’abord les fouctions des ingénieurs. Il est impossible qu’ils conduisent leurs opérations à leurs lins , si le fortifie, ateur n’a pas à ses ordres des ouvriers dont il puisse disposer, et sur lesquels il puisse compter. Si vous voulez tirer le génie de l’inactivité dans laquelle il gémit, si vous voulez qu’il vous présente des résultats satisfaisants de ses longues études, dopnez-lui des bras pour agir. Ce n’est pas uniquement à l’attaque et à la défense des places qu’il peut être utile ; il a été employé avec avantage dans plusieurs départements, et notamment dans celui du Nori, aux levés et à la confection des canaux, enfin à divers travaux nécessaires à la circulation intérieure. Pour que ce corps soit aussi utile qu’on a droit de l’espérer, il faut, ou créer une nouvelle troupe qui serait à ses ordres, ou réunir à ce corps une troupe qui existe déjà, celle des mineurs. La première de ces deux propositions me paraît inadmissible; la seconde me semble devoir être adoptée. Toutes les fois que le foriiticateur ne pourra pas disposer des dessous du terrain sur leq iel il opère, tous ses calculs, tous ses efforts seront inutiles; il faut donc qu’il ait à sp disposition l’instrument indispensable pour manipuler le terrain j cet instrument, c’est ie mineur. On a dit que les mines étant un moyen de destruction, des mineurs ne peuvent être réunis à un corps conser-vateurj Mais le corps du génie a pour objet l’attaque ainsi que lp, défense ; mais si l’art de l’ingénieur est rie conserver les fortifications de l’Empire, il doit aussi s'appliquer à renverser celles des ennemis : ainsi Gette objection n’est u’un sophisme. On objecte encore les dangers e l’incorporation : il ne s’agit point ici d'incorporer, mais de subordonner un corps travaillant à un' corps savant, afin qu’il le dirige d’une manière conforme a l’instruction de l’un et de l’autre, et utile au bien du service : d’ailleurs, à quoi aboutit cette opération qu’on paraît tant redouter? À adjoindre 30 officiers qui n’en murmurent pas, g 860 qui le désirent. Au surplus, si l’intérêt de l'Etat doit l’emporter sur les considérations particulières, c’est surtout dans la circonstance où nous nous trouvons. Je pense donc que. pour les progrès de l’art, le bien du service, l'économie dans les finances, la réunion dq corps des mineurs au génie est indispensable. Il est dope évident que' cette mesure est bonne, utile, et je désire qu’elle soit ado p? tée. Mais Gomme elle n’obvié pas aux contestations et aux conflits de compétence qui peuvent se roanife-ter dans les sièges, entre les corps de l’artillerie et du génie, et comme elle laisse subsister une dépense d’environ 100,000 663 écus, qui par la réunion de oes deux corps disparaîtrait, parce qu’alors les officiers détachés dans ces places pour le service des fortifications, pourraient en même temps remplir eeiui qu'y font actuellement les officiers d’artillerie en résidence; ces observations ramène t naturellement au projet de la réunion générale, et voici quelle est mon opinion individuelle sur cette question. En examinant avec le plus grand scrupule les difficultés qu’on oppose à ce système, je n’ai trouvé que trois objections solides et qui m’ont paru dignes d’une grande attention. L’une se tire des circonstances du moment; les deux autres tiennent à t’essenee même du projet. Quant à la première, fondée sur les hasards d’une incorporation dans les temps d’orage, sur le danger de rapprocher, par l’autorité, des hommes qu’il est désirable d’unir par la confiance, sur la crainte enfin de manquer l’opération par l'empressement même qu’on aurait de la faire réussir, on ne peut se dissimuler que cette objection est fondée; mais elle n’est pas insoluble. Gens qui ont propo-é le projet de la grande réunion ont indiqué le moyen de parer à cet inconvénient. Il consiste à ne réunir les deux corps actuels que de nom et d’habit, à laisser cheminer chaque colonne dans ses fonctions et dans son avancement, et à n’effectuer l’amalgame que par les écoles, d’où il arriverait que la fusion des deux corps en un seul se ferait progressivement, insensiblement, sans froisser les intérêts, sans détruire les habitudes. sans rompre les convenances particulières, et vraisemblablement sans réclamations comme sans inconvénients. Dans 20 ou 25 ans, l’opération serait coosommée; peut-être même les esprits familiarisés avec le nouvel ordre de choses, les préjugés dissipés par l’expérience et les liaison* qui se formeraient, permettraient de hâter l’époque de la réunion; et il est possible d’espérer qu’elle serait effectuée en entier, avant quinze ou seize ans d’ici. La seconde difficulté, prise dans le fond même de la question, consiste dans la crainte de sacrifier la perfection d’une partie à l’harmonie du tout, et de perdre l’art des fortifications dans celui de l’artillerie. Gette difficulté, dis-je, est très réelle; mais elle n'est pas insurmontable. On en sera convaincu lorsque l’on saura que c’est de l’ins-tructiou primordiale de l'école que dépend Tins» truction subséquente d’un ingénieur ; ce sont ces premières leçons qui décident de ses talents et de son utilité pour te reste de sa carrière. Un officier peut savoir très bien la pratique des travaux de l'architecture militaire, celle des retranchements, celle de l’attaque et de la défense des places; mais si ces connaissances ne sont dirigées par la théorie, si l’esprit de calcul et de méthode ne préside à leur application, si des études rôflé. chies n’ont pas établi dans sa tête les rapports de tous les travaux avec leur objet final, leurs liai* sons avec toutes les circonstances éventuelles, pet homme sera un excellent chef d’atelier, mais il ne sera point un ingénieur; il ne peut l'être que par la réunion de la pratique et de la théorie, et celle-ci a le grand avantage qu’en offrant d’avanee à l’esprit des résultats qui n’existent point encore, elle fait sentir la nécessité de la pratique, et qu’elle aide à surmonter les dégoûts des détails qui l’accompagnent. Ce serait donc uq moyen sûr de perpétuer dans le nouveau corps le goût et l’étude de l’art des fortifications, que d’y conserver, dans son entier', l'école de théorie, où les ingénieurs puisent au* jourd’hui leurs premières connaissances.- Il f 004 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1790.1 aurait d’autant moins d’inconvénient à faire de cette clause une des lois fondamentales de la réunion, si elle a lieu, et à exiger que les élèves passassent trois ans aux éludes dont il s’agit, que de toutes les connaissances qu’ils y acquerront, il n’en serait presque aucune qui ne trouvât son application dans le service de l’artillerie, proprement dite, ou dans celui des arts accessoires, confiés à la direction des officiers actuels de ce corps. Un autre moyen aussi nécessaire et non moins efficace que celui que je viens de citer, c’est l’attribution exclusive au nouveau corps des travaux de la topographie militaire. Us ne peuvent être plus avantageusement confiés qu’à des hommes exercés de longue main, portés par la nature de leurs fonctions journalières à observer la contexture et les localités d’un pays, la valeur réelle ou factice des positions, la qualité des communications, celle du fond des rivières et des ruisseaux; autant de considérations, qui intimement liées aux combinaisons de l’art fortifiant, sont inséparables des opérations topographiques, et qui, par cette raison, seront toujours convenablement affectées au corps du génie; et comme elles sont attrayantes par elles-mêmes, comme elles présentent des résultats satisfaisants, comme elles portent naturellement ceux qui s’en occu-ent aux spéculations analogues à leur profession abituelle, elles auront toujours pour le corps l’avantage précieux d’y fournir un aliment intarissable à res prit de combinaison défensive et à l’industrie militaire; et c’est le motif de tous les mouvements qui, dans l’hypothèse de la grande réunion , me fait insister plus particulièrement sur cette attribution pour le nouveau corps, persuadé que ce moyen, réuni à celui que j’ai indiqué précédemment, suffirait pour perpétuer le goût et l’étude de l’art des fortifications chez les militaires qui en seraient chargés. Enfin, il reste cette dernière objection, savoir : que l’ingénieur distrait et détourné par le service de l’artillerie, donnantuneapplication moins suivie aux objets de sa profession directe, acquerra probablement une instruction moins parfaite sur les diverses parties de son métier; que certainement il sera plus tard en état de diriger des travaux importants, et que par conséquent l’Etat sera privé d’une portion des services qu’il a droit d’en attendre. Cette objection me paraît sans réplique, et je n’essayerai pas de la réfuter; mais quel est le système sans inconvénients ? Celui-là est grand sans doute, c’est à votre sagesse à l’apprécier et à le comparer avec les avantages que d’ailleurs le projet de la réunion vous présente. Pour me résumer je regarde la réunion des mineurs au corps du génie comme une disposition simple, économique, utile sous tous les rapports, et je demande que l'Assemblée délibère sur la proposition du roi ; si elle la rejette, je pense que la réunion générale peut être adoptée comme bonne et praticable; au moyen des précautions que j’ai indiquées, mais surtout il faut éviter de brusquer cette opération, il faut savoir et attendre les faits avec patience et renoncer à obtenir rapidement, par un coup d’autorité, des avantages qui ne peuvent être le résultat que du temps, de la confiance et de la conviction des parties intéressées. Au reste, je connais tout le poids, toute Java-leur d’un avis élaboré, mûri au creuset d’une longue expérience, et comme je n’ai pas ces avantages, je souhaite que l’opinion que je soumets à l’Assemblée avec la franchise que je lui dois, en soit reçue avec la défiance que je me dois à moi-même. Je la conjure de donner l’attention la plus sérieuse à une question devenue d’autant plus capitale dans la formation de l’armée, que les principes de modération qu’elle a professés au nom de la France, que la politique purement défensive dans laquelle elle va se renfermera l’égard de toutes les puissances de l’Europe, l’obligent à porter une surveillance plus exacte et plus scrupuleuse sur les barrières de l’Empire; mais l’Assemblée nationale en s’imposant la loi d’être juste, ne s’est pas dispensée du devoir d’être prudente; et lorsqu’elle défend à l’ambition de son gouvernement toute agression coupable envers ses voisins, lorsque, fidèle aux principes de la morale la plus sévère, elle se restreint à la défense légitime du territoire français ; elle n’oubliera pas que la science des fortifications doit être un des appuis principaux de cette honorable politique, elle donnera toute la maturité désirable à une délibération de laquelle va dépendre la perfection ou la ruine entière de l’art conservateur. Elle ne compromettra pas le fruit des travaux et du génie de Vauban, de cet homme justement célèbre, qui, toujours occupé du bonheur de son pays, éleva ou consolida cette chaîne de boulevards qui en assurent les limites ; qui opposa au fléau de la guerre une digue que ses fureurs n’ont pu, même dans nos plus grands désastres, renverser tout à fait; qui, repoussant de nos foyers les dévastations des armées, marqua sur nos barrières les points où devaient s’arrêter leurs ravages; qui, portant au milieu du tumulte des armes cette philosophie douce et compatissante qui s’attendrit sur les maux de l’espèce humaine, pendant 60 ans de la vie militaire la plus active, ne perdit pas de vue un seul instant la conservation des hommes; qui en fit son étude unique, qui toujours sacrifia la gloire des succès brillants et meurtriers à l’honneur si peu recherché d’épargner le sang; qui, dans une carrière marquée par tant d’agitations, sut trouver des délassements dans l’étude et l’exercice des travaux paisibles de la paix ; qui, né avec le sentiment du bon et de l’honnête, fut toujours l’appui du mérite, le protecteur de tous les talents utiles, et qui enfin reçut de la Dature l’instinct de tous les arts et la passion de toutes les vertus. Peut-être ce faible hommage ne sera point regardé comme étranger à la question qui nous occupe; l’Assemblée nationale pardonnera cette courte digression ; du moi ns j’ose penser qu’à l’instant où le temple de l’éloquence vient de retentir de Péloge d’un héros citoyen, quelque indulgence est due au sentiment pieux d’un disciple ignoré, qui, cédant à L’admiration qu’inspire l’assemblage de taut de qualités si précieuses et si rares, vient aussi déposer un humble rameau à côté des palmes que l’estime et la reconnaissance publique ont accumulées sur le marbre de sa tombe. ( L'Assemblée applaudit.) M. de Tracy. La constitution des deux corps célèbres, autant admirée de nos amis que de nos ennemis, ne peut être assez détériorée pour que l’Assemblée ne coure pas un très grand risque à la détruire pour l’améliorer. M. Alexandre de Lameth. La question vient d’être traitée avec trop de détail et de supériorité par deux officiers du génie et de l’artillerie, pour que je parle sur le fond. Tous deux voient de grands avantages dans la réunion de l’artillerie et du génie; mais ils diffèrent d’opinion au sujet de la réunion des mineurs au corps de l’artillerie. Vous avez aujourd’hui la même marche à suivre que lorsque l’incorporation des régiments vous 665 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1790.] avait été proposée; il faut laisser les choses telles qu’elles sont, et personne n’aura à se plaindre. Tous les officiers de l’artillerie verraient avec peine que les mineurs leur fussent ôtés pour les donner au génie ; les deux corps sont arrivés à un tel point de supériorité, qu’aucun changement ne peut être indispensable. Il faut donc ne rien changer, jusqu’à ce qu'on puisse opérer la réunion de ces deux corps, et cette réunion est la meilleure opération qu’on puisse faire. Je pense donc que l’avis du comité doit être adopté. M. Bureaux. On dit que personne n’aura à se plaindre en laissant les choses comme elles sont; mais on ne se plaint que parce que les choses sont comme cela. M. de Thiboutot. Les ennemis détruisent leurs places, nous détruisons les nôtres ; le génie ne doit donc pas être préféré à l’artillerie, à cette arme que les nations regardent maintenant comme faisant la destinée des empires. M. de Sérent. M. Bureaux n’a rien laissé à dire; je ferai seulement une observation. L’objet du génie est l’attaque et la défense des places. Les mineurs ne sont pas autre chose qu’un instrument dans les mains des ingénieurs ; il serait aussi extraordinaire de les séparer les uns des autres, que de séparer l’instrument des mains de l’ouvrier. M. de Crillon, le jeune. Les raisons qui ont été données de part et d’autre ont paru très fortes et peut-être également prépondérantes ; ainsi il me parait démontré que l’Assemblée n’est pas compétente pour juger cette question. Je conclus à ce qu’on adopte la proposition faite au nom du roi, et à ce qu’on s’occupe de détails plus importants, de l’avancement, de la discipline militaire. M. Fréteau. La paix de la France peut être troublée. Je demande si, dans le moment où nous pouvons avoir besoin de nos forces, dans le moment où il faut trouver tous les esprits contents et bien disposés, nous pouvons nous portera des réformes considérables. (Il s'élève une légère discussion sur la priorité. )\ M. Mathieu de Montmorency. L’Assemblée a reconnu que, dans la matière qui l’occupe, l’initiative du roi était nécessaire. Celte initiative a été remplie. Une proposition vous est faite au nom du roi; c’est sur cette proposition qu’il fautdéli-bérer. M. Barnave. Quels que soient les principes qui ont été souvent avancés dans cette Assemblée, on n’était pas allé jusqu’à confondre l’initiative donnée au roi, avec l’obligation pour l’Assemblée de délibérer conformément à la proposition... (On observe que M. Mathieu de Montmorency n’a pas dit conformément, mais sur la proposition du roi.) Que fait l’Assemblée? Elle demande l’avis du comité, qu’il soit conforme ou non au vœu du roi. En délibérant sur cet avis, elle délibère sur l’initiative du roi. Voilà ce que vous pouvez faire ; voilà ce que vous avez déjà fait. Le roi vous avait proposé l’incorporation, vous avez délibéré que l’incorporation n’aurait pas lieu ; à présent, comme alors, vous devez vous arrêter à ce qui vous paraît le plus convenable. Je demande donc que l’avis du comité, qui n’est que la rédaction de la proposition faite par le roi, soit mise aux voix. Suivant les règles de l’Assemblée, l’avis du comité a la priorité, jusqu’à ce que, par une délibération, elle lui ait été refusée. M. Mathieu de Montmorency. M. Barnave a réfuté une opinion différente de la mienne. Je n’ai pas dit que l’Assemblée devait délibérer conformément à la proposition dü roi, j’ai pensé et je pense encore que la proposition du roi doit être mise aux voix pour l’adopter ou la rejeter. M. Millet de Murean. Je ne m’oppose pas à ce qu’on accorde la priorité au projet du comité; mais je demande qu’on dél ibère article par article : quand le premier aura été adopté, je proposerai par amendement au second de supprimer tout le corps du génie qui devient �absolument inutile. La discussion est fermée sur la priorité. La priorité est accordée au comité. La division pour délibérer article par article est rejetée. M. Begnaud (de Saint-Jean-d'Angély). Je pense qu’il faut ajouter au projet du comité, ces mots : délibérant sur la proposition du roi . L’avis du comité est adopté avec cet amendement. Le décret est rendu en ces termes : « L’Assemblée nationale, délibérant sur la proposition du roi, et ayant entendu le rapport de son comité militaire sur l’organisation de l’artillerie et le génie, décrète : « 1° Que les deux corps de l’artillerie et du génie continueront, comme par le passé, à rester distincts et séparés ; « 2° Que le corps des mineurs, ainsi que les sapeurs, continueront de même, comme par le passé, à faire partie de celui de l’artillerie; « 3° Qu’il lui sera fait incessamment le rapport des plans du ministre, sur la formation intérieure de chacun de ces deux corps, afin qu’elle puisse prononcer sur le nombre et le traitement des individus de chaque grade, dont chacun d’eux devra être composé. » M. Alexandre de Eameth. Un courrier extraordinaire, envoyé par l’Assemblée générale du commerce de Bordeaux et par la société des amis de la Constitution formée dans cette ville, est arrivé cette nuit ; il a apporté une adresse dans laquelle est exprimé le vœu de l'assemblée géné~ raie des députés du commerce de Bordeaux , en faveur des assignats : comme en ce moment le comité des recherches a un rapport à vous faire, je remets à ce soir à vous faire la lecture de cette adresse. On fait lecture d’une lettre du ministre de la guerre. Ce ministre annonce que des ordres du roi ayant été envoyés à M. de Goincy, commandant dans les départements qui composent l’ancienne province de Provence, pour augmenter la garnison d’Antibes et de Monaco, le régiment de Vexin devait partir de Marseille pour cet objet. Ce régiment a demandé la suppression de l’exécution de cet ordre, et les districts de Marseille, à une majorité de 17 contre 7, se sont opposés au départ de ce régiment. L’Assemblée arrête que le roi sera prié de faire exécuter le décret par lequel il est défendu de mettre obstacle aux mouvements des troupes , d’après les ordres du roi. M. lfoidel. Votre comité des recherches per-