SÉANCE DU 23 PRAIRIAL AN H (11 JUIN 1794) - Noa 29 ET 30 509 [Caen, 23 flor. II] (1). « Représentans, La société populaire et républicaine de Caen s’empresse de vous faire part de la feste qui vient de se célébrer sous ces murs pour la formation de la 61e brigade des troupes de la République; le représentans du peuple Pomme dont les vertus civiques et républicaines justifient quil est montagnard avoit donné l’ordre au 1er bataillon du 31® régiment et aux différents corps qui dévoient être amalgamés ensemble pour former la demie brigade, de se rassembler le 21 de ce mois sur le cours national et avoit invité la société populaire d’envoyer une députation de 12 membres; toutes les troupes animées de la joie la plus pure s’y rendirent en bon ordre et formèrent un quarré de bataille ayant a son centre le représentant du peuple, l’état major de l’armée des cotes de Cherbourg, la députation de la société populaire et des membres de la municipalité. Des cris mille fois répétés de Vive la République, vive la Convention, vive la Montagne, une musique guerrière jouant les airs chéris des hymnes de la liberté furent le prélude de cette fête, après quoy le représentant adressant à ses frères d’armes, leur fit connoitre dans un discours plain d’énergie l’objet du décret de la Convention et ce quelle attendoit d’eux. Je nay pas besoin leur, dit-il, de vous indiquer ou vous devez cueuillir des lauriers, braves camarades, suivez l’exemple de vos frères des armées du nord, d’Italie et des pirénées, la victoire suit leurs drapeaux les rois et leurs satellites fuyent a leur aspect, cillez comme eux purger la terre de la liberté des vils insectes qui la souillent encore, et bien mériter de la Patrie... Oui la joie que je voie briller sur vos fronts, votre empressement a obéir à la loy m’est un sur garant que le serment de vivre libre ou mourir que vous allez prononcer ne sera pas vain, a l’instant mille voix se font entendre et ce serment solemnel est prononcé avec cet entou-siasme ce sentiment que peut seul inspirer la liberté. Après ce beau moment en succède un autre non moins intéressant, le représentant Pomme qui lisoit dans les yeux de nos frères d’armes, le désir de le serrer dans leurs bras et de témoigner a la Convention dans la personne de son représentant le respect et l’attachement quils luy portoient, saisit cet heureux moment pour leur rapeller que la fraternité étoit le premier des devoirs et l’égalité une des vertus républicaines, et que le premier il alloit leur en donner l’exemple... a l’instant il s’élance dans leurs bras, les rangs s’ouvrent, le baiser fraternel est donné et rendu un million de fois et des larmes de plaisir coulent de tous les yeux. A cette effusion de tous les cœurs succèdent des danses, rondes ou les deffenseurs de la patrie, le représentant, les généraux, les frères de la société populaire prennent une part égale et offrent un faisceau d’union bien digne des républicains; après ces momens de plaisir que le montagnard Pomme se plaisoit a prolonger les bataillons à sa voix se reforment et la demye brigade orga-(1) D xxxvm 3 - xlix - lvii (Fêtes). nisée défile devant luy aux bruits des tambours et d’une musique guerrière. Tels sont représentants les détails d’une fête qui a gravé dans nos cœurs des traits qui ne s’effaceront jamais, et qui a fait connoitre a nos frères d’armes que les représentans montagnards sont l’image de la liberté que nous chérissons et les modèles que nous devons suivre ». Ségovi, Lelarge, P.J. Paulmier, J. Samuel, Paisant, Bloquet [et 1 signature illisible]. 29 L’agent national près le district de Cahors (1) annonce à la Convention nationale la mort du citoyen Louis Croiset, décédé le 1® de ce mois, âgé de 117 ans, qui, depuis le commencement de la Révolution, n’a pas passé un jour, une heure, sans parler de la patrie, et témoigner ses regrets de ne pouvoir la servir que par la pensée (2) . Cet homme, qui naquit sous la tyrannie, qui avait vécu auprès de la corruption des cours, qui, avec plusieurs générations successives, porta les fers du despotisme, avait reçu de la nature une âme républicaine. C’est lui qui véritablement, en voyant luire le jour de la liberté, a pu dire : « Nature, je te remercie de m’avoir conservé la vie pour me laisser voir ce beau jour »... (3). Deux minutes avant de s’éteindre, il se glorifioit d’avoir toujours eu sa cocarde à son bonnet, et il disoit à sa famille qu’il vouloit descendre au tombeau avec ce symbole de la vérité. Insertion au bulletin, et renvoi au comité d’instruction publique (4) . (Applaudi) . 30 Les membres provisoires des comités réunis de la société populaire de Saumur (5) , félicitent la Convention nationale d’avoir déclaré que le peuple français reconnoît l’existence de l’Etre-Suprême, applaudissent à ses glorieux travaux, et lui annoncent qu’un républicain a fait pétrir de la farine d’orge carrée, qu’il vient de recueillir; ils adressent les prémices de la moisson à la Convention, comme le présage de l’abondance, et un gage assuré de la subsistance de tous les Français. Mention honorable, insertion au bulletin (6). (1) Lot. (2) P.V., XXXIX, 202; C. Eg., n° 662; Audit, nat., n° 626. (3) Mon., XX, 713; Audit, nat., n° 626. (4) P.V., XXXIX, 202. Btn, 28 prair. (2* suppl'); J. Fr., n° 625; Rép., n° 174; J. Sablier, n° 1372; M.U., XL, 368; C. Eg., n° 662; Audit, nat., n° 626. (5) Mayenne et Loire, aujourd’hui Maine-et-Loire. (6) P.V., XXXIX, 203. Bln, 28 prair. (2* suppl4); Mon., XX, 714; J. Fr., n° 625; Audit, nat., n° 634. SÉANCE DU 23 PRAIRIAL AN H (11 JUIN 1794) - Noa 29 ET 30 509 [Caen, 23 flor. II] (1). « Représentans, La société populaire et républicaine de Caen s’empresse de vous faire part de la feste qui vient de se célébrer sous ces murs pour la formation de la 61e brigade des troupes de la République; le représentans du peuple Pomme dont les vertus civiques et républicaines justifient quil est montagnard avoit donné l’ordre au 1er bataillon du 31® régiment et aux différents corps qui dévoient être amalgamés ensemble pour former la demie brigade, de se rassembler le 21 de ce mois sur le cours national et avoit invité la société populaire d’envoyer une députation de 12 membres; toutes les troupes animées de la joie la plus pure s’y rendirent en bon ordre et formèrent un quarré de bataille ayant a son centre le représentant du peuple, l’état major de l’armée des cotes de Cherbourg, la députation de la société populaire et des membres de la municipalité. Des cris mille fois répétés de Vive la République, vive la Convention, vive la Montagne, une musique guerrière jouant les airs chéris des hymnes de la liberté furent le prélude de cette fête, après quoy le représentant adressant à ses frères d’armes, leur fit connoitre dans un discours plain d’énergie l’objet du décret de la Convention et ce quelle attendoit d’eux. Je nay pas besoin leur, dit-il, de vous indiquer ou vous devez cueuillir des lauriers, braves camarades, suivez l’exemple de vos frères des armées du nord, d’Italie et des pirénées, la victoire suit leurs drapeaux les rois et leurs satellites fuyent a leur aspect, cillez comme eux purger la terre de la liberté des vils insectes qui la souillent encore, et bien mériter de la Patrie... Oui la joie que je voie briller sur vos fronts, votre empressement a obéir à la loy m’est un sur garant que le serment de vivre libre ou mourir que vous allez prononcer ne sera pas vain, a l’instant mille voix se font entendre et ce serment solemnel est prononcé avec cet entou-siasme ce sentiment que peut seul inspirer la liberté. Après ce beau moment en succède un autre non moins intéressant, le représentant Pomme qui lisoit dans les yeux de nos frères d’armes, le désir de le serrer dans leurs bras et de témoigner a la Convention dans la personne de son représentant le respect et l’attachement quils luy portoient, saisit cet heureux moment pour leur rapeller que la fraternité étoit le premier des devoirs et l’égalité une des vertus républicaines, et que le premier il alloit leur en donner l’exemple... a l’instant il s’élance dans leurs bras, les rangs s’ouvrent, le baiser fraternel est donné et rendu un million de fois et des larmes de plaisir coulent de tous les yeux. A cette effusion de tous les cœurs succèdent des danses, rondes ou les deffenseurs de la patrie, le représentant, les généraux, les frères de la société populaire prennent une part égale et offrent un faisceau d’union bien digne des républicains; après ces momens de plaisir que le montagnard Pomme se plaisoit a prolonger les bataillons à sa voix se reforment et la demye brigade orga-(1) D xxxvm 3 - xlix - lvii (Fêtes). nisée défile devant luy aux bruits des tambours et d’une musique guerrière. Tels sont représentants les détails d’une fête qui a gravé dans nos cœurs des traits qui ne s’effaceront jamais, et qui a fait connoitre a nos frères d’armes que les représentans montagnards sont l’image de la liberté que nous chérissons et les modèles que nous devons suivre ». Ségovi, Lelarge, P.J. Paulmier, J. Samuel, Paisant, Bloquet [et 1 signature illisible]. 29 L’agent national près le district de Cahors (1) annonce à la Convention nationale la mort du citoyen Louis Croiset, décédé le 1® de ce mois, âgé de 117 ans, qui, depuis le commencement de la Révolution, n’a pas passé un jour, une heure, sans parler de la patrie, et témoigner ses regrets de ne pouvoir la servir que par la pensée (2) . Cet homme, qui naquit sous la tyrannie, qui avait vécu auprès de la corruption des cours, qui, avec plusieurs générations successives, porta les fers du despotisme, avait reçu de la nature une âme républicaine. C’est lui qui véritablement, en voyant luire le jour de la liberté, a pu dire : « Nature, je te remercie de m’avoir conservé la vie pour me laisser voir ce beau jour »... (3). Deux minutes avant de s’éteindre, il se glorifioit d’avoir toujours eu sa cocarde à son bonnet, et il disoit à sa famille qu’il vouloit descendre au tombeau avec ce symbole de la vérité. Insertion au bulletin, et renvoi au comité d’instruction publique (4) . (Applaudi) . 30 Les membres provisoires des comités réunis de la société populaire de Saumur (5) , félicitent la Convention nationale d’avoir déclaré que le peuple français reconnoît l’existence de l’Etre-Suprême, applaudissent à ses glorieux travaux, et lui annoncent qu’un républicain a fait pétrir de la farine d’orge carrée, qu’il vient de recueillir; ils adressent les prémices de la moisson à la Convention, comme le présage de l’abondance, et un gage assuré de la subsistance de tous les Français. Mention honorable, insertion au bulletin (6). (1) Lot. (2) P.V., XXXIX, 202; C. Eg., n° 662; Audit, nat., n° 626. (3) Mon., XX, 713; Audit, nat., n° 626. (4) P.V., XXXIX, 202. Btn, 28 prair. (2* suppl'); J. Fr., n° 625; Rép., n° 174; J. Sablier, n° 1372; M.U., XL, 368; C. Eg., n° 662; Audit, nat., n° 626. (5) Mayenne et Loire, aujourd’hui Maine-et-Loire. (6) P.V., XXXIX, 203. Bln, 28 prair. (2* suppl4); Mon., XX, 714; J. Fr., n° 625; Audit, nat., n° 634.