(9 décembre 1790. J 359 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. M. Rarrère répond que cette omission a été réparée dans un article nouveau (art. 1/). L’observation n’a pas d’autre suite. Divers membres formulent quelques critiques sur la rédaction de l’art. 21 (art. 20 du projet primitif), mais ne présentent' pas d’amendements. Après ces observations, le décret est renduaiusi qu’il suit : DÉCRET. L’Assemblée nationale, ayant reconnu, par son décret du 10 juillet dernier', qu’il était de la justice de restituer, aux représentants des religion-naires fugitifs, les biens dont ceux-ci ont été privés dans des temps de troubles et d’intolérance, et voulant pourvoir au mode de la restitution déjà ordonnée, après avoir entendu le rapport de son comité des domaines, Décrète ce qui suit : Art. 1er. Les religionnaires fugitifs et autres dont les biens ont été confisqués pour cause de religion, ou leurs héritiers, sont appelés à recueillir, selon les formes indiquées ci-après, les biens qui se trouvent actuellement dans les mains des fermiers préposés à la régie. Art. 2. Ils seront tenus de se pourvoir par simple requête en mainlevée desdits biens, dans le délai de trois armées, à compter du jour delà publication du présent décret, par-devant le tribunal de district, dans l'étendue duquel lesdits biens se� ront situés; lequel tribunal ne pourra prononcer la mainlevée, qu’après communication au procureur général syndic du departement, et sur les conclusions du commissaire du roi. Art. 3. Ils joindront à leur requête les titres et pièces propres à établir qu’ils sont héritiers de celui qu’ils prétendent représenter, et que les biens, par eux réclamés, proviennent de son chef. Art. 4. Lorsque les titres dn demandeur en mainlevée ne seront pas suffisants pour prouver sa parenté et la propriété des biens par lui réclamés, il pourra être admis à compléter cette preuve par enquête, même de commune renommée. Art. 5. Tous les titres, baux et documents qui sont au pouvoir de la régie, concernant les biens réclamés, seront communiqués, sans déplacer, aux parties intéressées qui pourront s’en faire délivrer copie ou extrait sans frais. Art. 6. Ne pourront les demandeurs en mainlevée se mettre en possession des biens, en vertu des ordonnances qui l’auront prononcée, qu’après l’avoir fait signifier, tant au régisseur ou à ses préposés qu’aux fermiers et détenteurs desdits biens. Art. 7. Les adjudicataires actuels des biens des reli-giomiaires, à titre de rente perpétuelle, avec clause résolutoire, seront tenus d’en laisser la libre possession et jouissance à ceux qui en auront obtenu mainlevée sur la première réquisition, à la charge, par ces derniers, de leur rembourser préalablement les frais de culture, labour et semences, ainsi que lemontantdes sommes que les adjudicataires justifieront, par des procès-verbaux de visite, devis estimatif, adjudication au rabais, réceptions d’ouvrages et quittances d’ouvriers, avoir rayé, lors de leur entrée en jouissance, aux adjudicataires précédents, pour le parfait rétablissement desdits biens, conformément aux clauses de leur adjudication. Art. 8. A l’égard des biens des religionnaires fugitifs adjugés à titre de location, ceux qui en obtiendront la mainlevée seront obligés d’en entretenir les baux; et ils en percevront les loyers, à compter du jour de leur demande. Ils pourront, en conséquence, exercer contre les fermiers toutes les actions résultant desdits baux, à la charge d’en remplir également toutes les clauses et conditions. Art. 9. Pourront néanmoins, ceux qui auront obtenu la mainlevée, faire procéder à la visite deslieux par experts, ou à défaut, nommés d’office ; lesquels estimeront les rêédifications, plantations et améliorations qui se trouveront à faire auxdits biens; et iis sont autorisés à compenser le montant de cette estimation jusqu’à due concurrence avec les sommes qu’ils devront rembourser aux adjudicataires, eu vertu des dispositions de l’article précédent. Art. 10. Dans le cas oùle montant des sommes à répéter d’après l’estimation des experts, excéderait le remboursement à faire à l’adjudicataire, celui qui a obtenu la mainlevée pourra se pourvoir devant les mêmes juges pour se faire payer le surplus par l’adjudicataire. Art. 11. Les baillistes et adjudicataires des biens appartenant aux religionnaires fugitifs, seront tenus de restituer à ceux qui obtiendront la mainlevée de ces biens, le prix des bois et arbres de futaie qu’ils auraient coupés sur ces biens depuis le jour de la publication du décret rendu le 10 juillet dernier, et ce, à dire d’experts accordés ou pris d’office. Art. 12. Les religionnaires fugitifs et autres dont les Liens ont été confisqués pour cause de religion, et leurs héritiers, dont les biens auraient été vendus, ne pourront les revendiquer ; mais il leur sera donné mainlevée et délivrance des rentes constituées par le gouvernement des deniers provenant de la vente desdits biens. Art. 13. Tous prétendants-droit à la propriété des biens, dont la mainlevée sera accordée, seront tenus de se présenter dans le délai de cinq années, à compter du jour de la publication de la prise de possession liesdits biens, prescrite par l’article 6 du présent décret. Lequel délai courra même contre les mineurs sans aucune espérance de restitution. Art. 14. Ceux qui se présenteront dans le délai de cinq 360 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. )9 décembre 1790. | années ne pourront répéter les fruits de ceux qui auraient obtenu la mainlevée qu’à compter du jour de la demande. Art. 15. Les portions de revenu des biens desreligion-naires fugitifs, ci-devant accordés aux dénonciateurs, cesseront de leur appartenir, à compterdu l*r janvier 1791, et seront soumises à la même régie et comptabilité qui sera établie pour le surplus de autres Liens. Art. 16. Les dons et concessions des biens des religion-naires, faits à titre gratuit, à autres qu’à leurs parents, sont révoqués, sans que les donataires et concessionnaires puissent se prévaloir d’aucune prescription ; et néanmoins ils ne seront tenus à aucune restitution des fruits; mais la prescription pourra être opposée par leurs héritiers et successeurs à titre universel, qui auraient possédé lesdits biens pendant l’espace de 30 ans. A l’égard des tiers acquéreurs et successeurs à titre particulier, ils ne pourront être inquiétés en aucun cas. Art. 17. Quant aux dons et concessions faits en faveur de parents de religionn aires, à quelque degré que ce soit, lesdits parents demeureront en possession des biens, sans préjudice des droits des parents plus proches ou en égal degré, qui viendraient à se présenter dans le délai prescrit par l’article 14, et ce, à compter, pour eux, du jour delà publication du présent décret, à moins que la question de parenté n’eût été jugée entre eux, par arrêts rendus contradictoirement ou par jugements passés en force de chose jugée. Art. 18. Toutes les demandes en mainlevée et toutes les instances en restitution desdits biens, qui sont actuellement pendantes au conseil, seront, après la publication du présent décret, renvoyées au tribunal de district de la situation de la majeure partie des biens, pour y.être jugées les premières par ordre de leur date. Art. 19. Il sera dressé incessamment un tableau des biens saisis sur les religionnaires, et qui sont actuellement compris dans le bail général avec l’énonciation des lieux de leur situation et indication des noms des propriétaires anciens, lequel tableau sera imprimé et envoyé à chaque tribunal de district, pour y être affiché et enregistré. Art. 20. Après l’expiration du délai de trois années fixé pour se pourvoir en mainlevée, les biens pour lesquels il ne se sera présenté aucun demandeur en mainlevée seront vendus dans les mêmes formes que les biens nationaux, pour le prix en provenant être placé en capitaux ou déposé dans la caisse de l’extraordinaire, et être restitué sans intérêt aux religionnaires ou à leurs héritiers, dans quelque temps qu’ils se présentent, en justifiant par eux de leur descendance ou titres d’hérédité, suivant les formes ci-dessus. Art. 21. Les bailiistes et autres débiteurs des biens mis en régie ne pourront, sous quelque prétexte que ce soit, se refuser au payement du prix de leurs baux ou du montant des rentes qu’ils doivent; et ils seront tenus de payer au régisseur général actuel les arrérages échus et à échoir des fermages et rentes jusqu’au jour de la signification de la mainlevée qui pourra en être accordée, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale ait statué sur le nouveau régime qu’elle se propose d’établir dans cette partie, en attendant la vente desdits biens portée dans l’article précédent. Art. 22. Toutesfpersonnes qui, nées en pays étrangers, descendent en quelque degré que ce soit d’un Français ou d’une Française expatriés pour cause de religion, sont déclarées naturels Français et jouiront des droits attachés à cette qualité, s’ils reviennent en France, y fixent leur domicile et prêtent le serment civique. Les fils de famille ne pourront user de ce droit sans le consentement de leur père, mère, aïeul, ou aïeule, qu’autant qu’ils seront majeurs, ou jouissant de leurs droits. Art. 23. L’Assemblée natiouale charge son président de présenter dans le jour ce décret à la sanction du roi, avec prière à Sa Majesté de donner des ordres à tous ses ambassadeurs, ministres, envoyés, résidents, consuls, vice-consuls, ou agents auprès des puissances étrangères, afin que te présent décret soit incessamment connu de toutes les familles françaises, ou descendants de Français. M. Martineau. J’applaudis avec l’Assemblée à l’article par lequel elle vient de déclarer citoyens français les descendants des religionnaires fugitifs nés en pays étrangers; mais je demande que cet article soit étendu aux descendants de tous les Français expatriés pour quelque cause que ce soit. M. de Foucault. Ceux des descendants des deux sexes. Je saisis cette occasion pour observer à l'Assemblée que les femmes propriétaires doivent avoir, comme les hommes, le droit de concourir à la formation des lois protectrices des propriétés. ( Plusieurs applaudissements se font entendre.) Je ne parle que des femmes propriétaires; leur droit de représentation politique est une conséquence nécessaire du principe qui dit que la propriété constitue le droit de cité. Je demande qu’elles soient autorisées à se faire représenter par procureurs. M. fiSarrère. L’observation du préopinant est bien digne du caractère de l’ancienne chevalerie française; mais l’Assemblée a déjà décrété qu’on ne pourrait exercer les droits de citoyen actif par procuration. Quant à la proposition de M. Martineau, elle est l’objetd’uneques-lion particulière. Louis XIV avait déclaré les religionnaires iugitifs et toute leur postérité déchus de la qualité de citoyens français. Louis XV abrogea cette loi atroce, mais à des conditions aussi cruelles et aussi absurdes. Il ne permit aux descendants des protestants de s’établir en France qu’a la charge par eux d’y professer la religion catholique. L’est cette loi particulière que vous venez de détruire. (L’Assemblée ne statue point sur les motions incidentes de MM. Martineau et de Foucault.) Divers membres demandent l’impression du rapport de M. Barrère.